N° 686

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juin 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République d'Arménie, d'autre part et de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et l'Ukraine, d'autre part (procédure accélérée),

Par M. Alain CAZABONNE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Cédric Perrin, président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Mmes Hélène Conway-Mouret, Catherine Dumas, Michelle Gréaume, MM. Joël Guerriau, Jean-Baptiste Lemoyne, Akli Mellouli, Philippe Paul, Rachid Temal, vice-présidents ; M. François Bonneau, Mme Vivette Lopez, MM. Hugues Saury, Jean-Marc Vayssouze-Faure, secrétaires ; MM. Étienne Blanc, Gilbert Bouchet, Mme Valérie Boyer, M. Christian Cambon, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Alain Cazabonne, Olivier Cigolotti, Édouard Courtial, Jérôme Darras, Mme Nicole Duranton, M. Philippe Folliot, Mme Annick Girardin, M. Guillaume Gontard, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, André Guiol, Ludovic Haye, Loïc Hervé, Alain Houpert, Patrice Joly, Mme Gisèle Jourda, MM. Alain Joyandet, Roger Karoutchi, Ronan Le Gleut, Claude Malhuret, Didier Marie, Thierry Meignen, Jean-Jacques Panunzi, Mme Évelyne Perrot, MM. Stéphane Ravier, Jean-Luc Ruelle, Bruno Sido, Mickaël Vallet, Robert Wienie Xowie.

Voir les numéros :

Sénat :

544 et 687 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de deux accords aériens respectivement avec l'Arménie et l'Ukraine, signés par l'Union européenne et ses États membres.

Ces accords s'inscrivent dans un mouvement général relatif aux transports aériens impulsé par l'Union européenne en 2005 et relancé en 2012 puis en 2015.

Les accords de services aériens sont des traités destinés à définir l'ensemble des conditions dans lesquelles les liaisons aériennes peuvent être réalisées. Ils procèdent d'une compétence partagée. Certaines de ces dispositions, comme celles en matière de droit de la concurrence, renvoient à une compétence exclusive de l'Union européenne, tandis que d'autres, comme celles relatives à l'accès au marché (octroi des droits de trafic) relèvent encore des États.

En requérant des mandats de négociation, la Commission européenne se propose donc d'agir à la fois au nom des États membres et au nom de l'Union européenne. En revanche, les accords sont signés par l'Union européenne et les États membres et doivent être ratifiés également par les États membres. En application du principe de subsidiarité, les ratifications ou approbations sont d'abord effectuées par les États membres, avant de l'être par le Parlement européen. Le processus peut prendre plusieurs années et représenter des délais significatifs en ce qui concerne son entrée en vigueur. L'application provisoire de l'accord, dès sa signature, permet ainsi de réduire les inconvénients inhérents à la lenteur du processus de ratification.

Depuis une dizaine d'années, les signatures des accords aériens ont été suspendues à cause d'un différend entre le Royaume-Uni et l'Espagne au sujet de l'aéroport que le Royaume-Uni avait construit sur l'isthme de Gibraltar. Avec la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, le 1er janvier 2020, l'opposition à la signature des accords aériens a été levée. C'est pourquoi différents accords ont pu être signés en très peu de temps, comme ceux avec l'Arménie ou l'Ukraine, alors qu'ils ont été négociés à des périodes différentes.

L'accord sur la création d'un espace aérien commun avec l'Arménie, le mandat a été octroyé par le Conseil de l'Union européenne et ses États membres le 1er décembre 2016. Il a été paraphé le 24 novembre 2017. Il n'a été signé que le 15 novembre 2021.

Quant à celui avec l'Ukraine, il a fait l'objet d'un mandat le 12 décembre 2012. Il a été paraphé le 28 novembre 2013, mais signé que le 12 octobre 2021.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté ce projet de loi, dont le Sénat est saisi en premier.

I. DES ACCORDS QUI SE SITUENT DANS LE CADRE DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE D'OUVERTURE DES TRANSPORTS AÉRIENS

A. LES ARRÊTS DITS « CIELS OUVERTS » UNE JURISPRUDENCE QUI A REDESSINÉ LE PARTAGE DES COMPÉTENCES ENTRE L'UNION ET SES ÉTATS MEMBRES

Les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes du 5 novembre 2002 dits « Ciel ouvert », ont marqué le point de départ d'une politique extérieure de l'aviation de l'Union européenne.

Cette jurisprudence affirme des compétences communautaires en matière de services aériens internationaux, alors que traditionnellement ces services étaient régis par des accords bilatéraux entre États.

Il s'agissait pour la Cour de se prononcer sur des accords bilatéraux passés entre certains États membres et les États-Unis.

En effet, la Commission européenne estimait que la Communauté disposait d'une compétence exclusive pour conclure des accords de transport aérien avec des pays tiers.

La Cour n'a pas donné raison à la Commission européenne, considérant que si, effectivement, certaines dispositions des accords bilatéraux conclus par les États membres empiétaient sur la compétence communautaire (dispositions relatives aux systèmes informatisés de réservation et à la gestion des créneaux horaires, ainsi que certaines dispositions tarifaires), d'autres, comme celles relatives à l'accès au marché (octroi des droits de trafic) relevaient des États.

Prenant acte des arrêts de la Cour, le Conseil transports du 5 juin 2003 a adopté une décision autorisant la Commission à négocier un accord avec les États-Unis visant à établir un « espace aérien sans frontière » avec l'Union européenne, destiné à remplacer les accords bilatéraux de l'ensemble des États membres et à résoudre les problématiques juridiques soulignées par la Cour.

Le Conseil de juin 2003 a également autorisé la Commission à négocier avec l'ensemble des pays tiers (mandat de négociation dit « horizontal ») des accords dont l'unique objet est de remplacer les dispositions des accords bilatéraux des États membres contraires au droit européen.

Enfin, lors de cette session, le Conseil a arrêté une approche générale concernant un projet de règlement sur la négociation et la mise en oeuvre des accords de services aériens entre les États membres et les pays tiers. Celle-ci s'est concrétisée par l'adoption, en avril 2004, du règlement (CE) n° 847/2004 du Parlement européen et du Conseil.

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