OBSERVATOIRE DE LA PETITE SIRÈNE
Questions générales
1. À votre connaissance, dans quelles conditions les mineurs en questionnement de genre sont-ils aujourd'hui pris en charge (en établissement de santé ou en ambulatoire, spécialités médicales consultées, thérapies prescrites, conditions d'accès aux soins, etc.) ?
De manière privilégiée, les mineurs sont actuellement orientés, vers les consultations spécialisées. Les praticiens (pédiatres, généralistes, endocrinologues, psychiatres, chirurgiens) exerçant en libéral reçoivent également ces patients.
a. La prise en charge hospitalie`re
Les consultations spécialisées centralisent les demandes concernant la « dysphorie de genre » des mineurs. Elles sont adossées a` des établissements hospitalo-universitaires dont les pratiques répondent aux recommandations internationales notamment le « Dutch Protocol ». Elles sont constituées d'équipes pluridisciplinaires associant psychiatre, psychologue, endocrinologue, chirurgien, équipes des CECOS (centre d'étude et de conservation du sperme humain), juristes. Elles mettent en place depuis 2015 des RCP (réunions de concertation pluridisciplinaire) qui associent professionnels et associations de personnes trans notamment Trans Sante' France (FPATH) (a` l'initiative de celles-ci et conformément aux recommandations actuelles de la Haute Autorité' de Sante'). Au cours de ces réunions, les indications médico-chirurgicales sont posées, et les décisions sont prises collectivement. Si une prise en charge hormonale est proposée a` l'adolescent, son consentement et celui de ses deux parents sont recueillis après une reprise des explications concernant les effets attendus réversibles ou non des traitements hormonaux, les effets secondaires potentiels a` surveiller ainsi que le suivi médical et biologique nécessaire. Le suivi psychothérapeutique n'est pas systématique.
Par ailleurs, ces jeunes et leurs familles sont souvent orientés vers des associations militantes. Elles les conseillent, donnent des adresses de médecins « transfriendly », organisent des groupes de paroles de jeunes sans la présence de leurs parents.
b. Le planning familial
Il applique l'auto-détermination et l'affirmation de genre et prescrit rapidement des hormones (bloqueurs de puberté' et hormones antagonistes) a` la demande des adolescents sans évaluation ni prise en charge psychologique.
c. Les consultations privées
Les pratiques se divisent en 3 catégories :
· Les médecins (pe'dopsychiatres, psychiatres, endocrinologues, chirurgiens...) et psychologues transaffirmatifs inscrits sur les listes de diffusion (sites, etc..) créées par les associations militantes trans ou de parents de jeunes trans. Les traitements peuvent être délivrés a` la demande en une a` deux consultations,
· Les médecins et psychologues qui renvoient leurs patients vers les consultations dédiées,
· Les médecins et psychologues prudents considérant que ces adolescents nécessitent une prise en charge holistique.
2. L'Académie nationale de médecine appelait, en 2022, à une « grande prudence médicale » dans la prise en charge des enfants et adolescents, compte tenu de leur vulnérabilité psychologique et des effets indésirables importants des traitements disponibles.
a. Quel regard portez-vous sur ces recommandations ?
b. Les conditions actuelles de prise en charge et de prescription vous paraissent-elles respecter ce principe de prudence ? Pourriez-vous détailler votre réponse ?
L'Académie de médecine est la seule instance officielle à avoir appelé assez prudemment (car la recommandation n'a pas été votée à l'unanimité) à la prudence en matière de prise en charge médico-chirurgicale des jeunes qui se déclarent trans. À notre connaissance, cela n'a eu aucun effet en France. En revanche à l`étranger, cette recommandation est souvent citée comme étant le signe que la France a modifié ses pratiques ce qui n'est pas le cas.
3. La place de l'évaluation psychiatrique dans la prise en charge des personnes en questionnement de genre semble soulever des questions. Alors que l'Académie recommande « un accompagnement psychologique aussi long que possible des enfants et adolescents exprimant un désir de transition », la Haute Autorité de santé (HAS) conduit actuellement des travaux destinés à « revoir la place de l'évaluation psychiatrique dans le processus de la réassignation sexuelle hormono-chirurgicale », pour tenir compte de sa « dépsychiatrisation ».
a. Quel regard portez-vous sur ces débats ?
L'Académie de médecine a défendu une position médicale (après examen des études scientifiques sur les traitements) tandis que la HAS prend préférentiellement en compte les exigences des mouvements transactivistes.
b. Une évaluation et un suivi psychologiques vous paraissent-ils devoir précéder toute transition médicale ? Leur importance vous semble-t-elle renforcée face à un patient mineur ?
Nous n'avons aucun avis à émettre concernant les adultes. Pour les mineurs, on sait aujourd'hui que 60 à 80% d'entre eux selon les études, présentent des troubles psychopathologiques voire psychiatriques (diagnostiqués ou pas encore diagnostiqués) qui précèdent leur demande de transition. D'autres ont subi des agressions sexuelles ou s'interrogent sur leur orientation sexuelle. L'évaluation psycho-sociale du jeune et de son entourage est indispensable et devrait être suivie d'une indication de prise en charge adaptée au cas par cas.
4. Plusieurs pays occidentaux ont récemment encadré ou limité l'accès à l'hormonothérapie pour les mineurs, à l'initiative de leurs autorités sanitaires (Finlande, Suède, Royaume-Uni...) ou du législateur (nombreux États américains).
Quel regard portez-vous sur ces évolutions à l'international ?
Ces évolutions vont toutes dans le même sens. Après examen de toutes les études scientifiques (fiables ou pas), aucune des promesses de ces traitements n'ont été confirmées scientifiquement à moyen et à long terme (amélioration psychique, diminution du risque suicidaire, réversibilité totale des bloqueurs de puberté etc.).
L'attitude actuelle est donc :
- De limiter l'usage des bloqueurs de puberté dans le cadre d'un protocole de recherche approprié.
- De retarder la prise d'hormones croisées à 16 ou 18 ans selon les pays
- D'interdire les mastectomies (ablation des seins) avant la majorité
Les choses bougeant très vite, le 6 mai La Société européenne de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent (le CESAP regroupant 36 sociétés de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent dont la France) a publié une déclaration de politique générale sur la dysphorie de genre de l'enfant et de l'adolescent. L'idée maîtresse de la déclaration de la CESAP est l'appel lancé aux prestataires de soins de santé « de ne pas promouvoir des traitements expérimentaux et inutilement invasifs dont les effets psychosociaux ne sont pas prouvés et, par conséquent, d'adhérer au principe du « primum-nil-nocere » (d'abord, ne pas nuire).
Et le 10 mai 2024, les médecins allemands viennent d'adopter lors du 128e Congrès médical allemand deux résolutions visant à limiter les bloqueurs de puberté, les hormones de sexe opposé et les interventions chirurgicales pour les jeunes dysphoriques de moins de 18 ans à des essais cliniques contrôlés ; d'autre part, ils demandent de limiter la Loi sur l'autodétermination aux personnes de plus de 18 ans.
L'avenir des "traitements de genre" des jeunes allemands est désormais remis en question, car ces résolutions vont à l'encontre du projet de directive entièrement « trans affirmative » publié fin mars 2024.
La voie de l'encadrement législatif de la prise en charge de la dysphorie de genre chez les mineurs vous semble-t-elle souhaitable ?
Généralement les médecins n'aiment pas que le législateur se mêle de prescription médicale et ils ont bien souvent raison. La codification des protocoles existe néanmoins soit par consensus comme par exemple pour les vaccins, soit par la législation comme par exemple pour les conditions de l'interruption volontaire de grossesse.
Dans le cas qui nous occupe, on aurait pu penser que les médecins concernés auraient suivi la même voie que leurs collègues européens. Il n'en est rien. Les chefs de service des grands services parisiens ont un discours officiel rassurant : longue attente pour le premier RV, prudence, prise de décision collective. Mais d'abord tous les jeunes ne vont pas dans ces services. Dans l'ensemble (et notamment dans les fameuses réunions de concertation pluridisciplinaire RCP) tous ces professionnels ont la même conception concernant ces jeunes : il faut les accompagner sans interroger leur demande. La présence des associations militantes (recommandée par la HAS) ne favorise pas la prise de parole de ceux qui auraient un avis un tant soit peu divergeant.
La HAS ne produira pas de recommandation pour les mineurs avant 12 à 18 mois au mieux. Il y a donc urgence à encadrer ces pratiques d'où la nécessité d'une loi par défaut.
Dans les pays européens, les médecins qui ont tiré la sonnette d'alarme ont mis un certain temps à convaincre leur ministère de la santé (ou équivalent) pour qu'il impose des recommandations contraignantes et il n'y a donc pas de loi.
Rien de tel ne s'est passé en France. Pas plus d'ailleurs qu'aux USA. Ce sont les politiques qui ont fait voter les lois principalement dans les États Républicains (24 à l'heure actuelle) pour réguler les pratiques. Il est inhabituel que des prescriptions médicales (polluées par l'idéologie) deviennent des sujets politiques.
5. Avez-vous eu connaissance, dans le cadre de vos activités associatives, de situations dans lesquelles des mineurs ont regretté d'avoir entamé une transition médicale et envisagé une détransition ? Quelles réponses appellent, selon vous, ces situations ?
Oui bien sûr. Nous connaissons plusieurs détransitionneuses (uniquement des filles qui ont arrêté leur traitement hormonal) et plus encore de « désisteuses » (jeunes filles qui ont fait leur transition sociale : changement de prénom et de pronom).
Ces jeunes filles ont énormément de courage pour reconnaître qu'elles ont fait fausse route car elles sont vilipendées sur les réseaux sociaux lorsqu'elles se sont connaître. En France, il n'existe aucune structure spécifique pour les recevoir (elles sont encore peu nombreuses et probablement sous-estimées), il n'y a pas d'études à leur sujet ni d'association contrairement à plusieurs pays comme la Belgique ou le Canada.
Il est surprenant d'entendre certains médecins (homme) dire qu'une mastectomie n'est pas si grave « puisqu'on peut implanter des seins ».
Les jeunes filles que nous connaissons (qui ont demandé et obtenu une double mastectomie en étant mineures et avec l'accord de leurs parents) veulent au contraire s'assumer comme elles sont pour reconstruire leur féminité.
Côté médical : il y a eu une erreur de diagnostic : ces jeunes filles n'étaient pas trans.
Sur l'interdiction de prescription des bloqueurs de puberté et traitements hormonaux (article 1er)
6. Vous semble-t-il pertinent d'interdire, dans le cadre de la prise en charge de la dysphorie de genre, la prescription aux patients de moins de 18 ans :
a. De bloqueurs de puberté ?
b. Des hormones du sexe opposé ?
Le problème de l'interdiction est qu'elle est vécue comme une restriction de liberté voire comme une impossibilité de faire une transition. Le but n'est absolument pas celui-là mais au contraire de laisser à un jeune toutes les possibilités ouvertes avant de s'engager où il le souhaitera.
À ce jour, aucune étude ne permet de certifier que les avantages des bloqueurs de puberté sont supérieurs aux inconvénients. Or, leur prescription est en augmentation et la majorité de ceux qui reçoivent des bloqueurs de puberté prendront des hormones croisées. Il n'y a pas d'autre domaine en médecine où on élargit les prescriptions sans certitude d'efficacité. Il y a de nombreuses façons de gérer les problèmes de ces jeunes sans recourir aux bloqueurs de puberté.
Pour les hormones croisées, l'âge peut varier selon les pays entre 16 et 18 ans. L'interdiction vise à laisser toutes les options à un mineur avant de s'engager dans des traitements à vie et dont certains effets sont irréversibles alors qu'il n'a aucune expérience sexuelle et que les risques d'infertilité sont considérables.
L'autre problème de l'interdiction légale est qu'elle ne permet pas la nuance ni le cas particulier qui, en médecine, existe toujours.
Rappelons que les lois de bioéthiques sont révisables tous les 5 ans en fonction de l'avancée des recherches. Dans le domaine qui nous occupe, compte tenu de recherches en cours, la loi devrait également être révisable tous les cinq ans.
7. À votre connaissance, dans quelles conditions ces traitements sont-ils prescrits aujourd'hui aux mineurs en questionnement de genre ? Par quels professionnels de santé ?
La réponse à cette question est la même que pour la question 1.
8. Quels sont les principaux effets indésirables de chacun de ces traitements ? Dans quelle mesure leurs effets sont-ils réversibles ?
Le cerveau de l'adolescent présente un développement dissocié entre le système qui gère les émotions (limbique) et le cortex régulant le comportement (pré-frontal), on ne sait ce qu'induisent ces molécules au niveau cérébral.
Les hormones masculinisantes :
La non réversibilité concerne la voix, la pilosité, les modifications des organes génitaux sont souvent acquises, ce d'autant plus après bloqueurs de puberté.
Les hormones féminisantes :
Les anti androgènes : l'Androcur dont la responsabilité dans la survenue de tumeurs cérébrales a été démontré. Le Bicalutamide qui empêche la sécrétion d'hormones mâles (utilisé dans le cancer de la prostate). Ces produits sont dangereux et à ne pas utiliser. Ils sont prescrits en milieu hospitalier ou par des médecins libéraux non obligatoirement endocrinologues.
9. D'autres mesures législatives visant à encadrer la prescription de bloqueurs de puberté et de traitements hormonaux vous paraîtraient-elles souhaitables (âge minimal du patient différent de celui actuellement prévu par la proposition de loi, conditions tenant à l'existence de consultations ou de décisions collégiales préalables, etc.) ?
Il nous semble difficile mais peut-être pas impossible que la loi soit plus précise. Le principe est que les jeunes aient accès à des interventions non médicales fondées sur des données probantes répondant à l'ensemble de leurs difficultés. L'autre principe est que rien d'irréversible ne puisse être prescrit à des mineurs. Il s'agirait alors de s'entendre sur ce que signifie « irréversible ».
Sur l'interdiction des opérations chirurgicales de réassignation sexuelle (article 1er)
10. L'expression « opérations chirurgicales de réassignation sexuelle » vous paraît-t-elle suffisamment précise ? Selon vous, quelles interventions vise-t-elle ?
Les interventions de réassignation sexuelle englobent plusieurs types de chirurgie. Le vocable est imprécis. Pour les mineures, dans le vocabulaire trans, on appelle « torsoplastie » des mammectomies bilatérales (ablation des seins). Il s'agit d'une mutilation d'organes sains.
Toutes les autres interventions chirurgicales concernent des majeurs
11. Vous semble-t-il pertinent d'interdire, dans le cadre de la prise en charge de la dysphorie de genre, les opérations chirurgicales de réassignation sexuelle aux moins de 18 ans ?
OUI. Il s'agit de laisser toutes les options ouvertes. Une intervention irréversible sur des organes sains n'est pas aussi urgente qu'il peut y paraître. Il y a d'autres moyens de soulager la souffrance exprimée.
12. Dans les faits et à votre connaissance, ces opérations sont-elles aujourd'hui réalisées sur des mineurs en questionnement de genre ? Le cas échéant, dans quelles conditions le sont-elles ?
Les mastectomies sont peu fréquentes en France mais on ne dispose pas de chiffres nationaux car certaines opérations sont qualifiées de réduction mammaire.
Elles se pratiquent en privé et à l'hôpital public (remboursé par SS ou pas). La plus jeune opérée de France a 14 ans. Sur les réseaux sociaux, la « torsoplastie » est vantée comme une opération « esthétique », appréciée et le nom des chirurgiens qui la pratiquent à Paris et en province est donné.
13. Quels sont les principaux effets indésirables et risques attachés à ces interventions ? Dans quelle mesure sont-elles réversibles ?
Une mastectomie n'est pas réversible. Une réparation esthétique artificielle ne redonne aux seins ni leurs fonctions ni leur sensibilité.
14. D'autres mesures législatives visant à encadrer les opérations chirurgicales de réassignation sexuelle vous semblent-elles souhaitables (âge minimal du patient différent de celui actuellement prévu par la proposition de loi, conditions tenant à l'existence de consultations ou de décisions collégiales préalables, etc.) ?
L'interdiction de toute chirurgie mutilante chez les mineurs ne devrait pas souffrir d'exception.
Sur le régime de sanction associé à ces interdictions (article 2)
15. Les peines prévues en cas de violation des dispositions encadrant la prise en charge des mineurs s'élèvent à deux ans d'emprisonnement, 30 000 euros d'amende et, le cas échéant, une interdiction d'exercice de dix ans au plus.
Ces peines vous semblent-elles justement proportionnées ?
Nous n'avons pas de compétence particulière dans ce domaine. Nous nous permettons de rappeler que pour la loi sur l'interdiction des thérapies de conversion les peines prévues sont de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Une interdiction d'exercer la profession de médecin peut également être prononcée, pour une durée ne pouvant excéder dix ans.
16. L'insertion de ces peines dans le chapitre du code pénal relatif à l'éthique biomédicale vous semble-t-elle pertinente ?
Oui
Sur la mise en place d'une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie (article 3)
17. Alors que la dernière mise à jour de la classification internationale des maladies (CIM) exclut l'incongruence de genre des troubles mentaux et qu'un récent rapport de l'Igas sur la santé et le parcours des personnes trans préconisait une « dépsychiatrisation » de la prise en charge, l'insertion de cet article au sein de cette proposition de loi vous semble-t-elle pertinente ?
Non
Dans quelle mesure la santé mentale des jeunes atteints de dysphorie de genre vous paraît-elle constituer un enjeu important ?
Les jeunes atteints de « dysphorie de genre » sont avant tout des jeunes. S'ils souffrent, ils doivent avoir accès en première intention à des interventions non médicamenteuses répondant à l'ensemble de leurs difficultés. Ils n'ont pas à être « dirigés » d'emblée vers des services dits spécialisés sur leur « ressenti » qui est un auto-diagnostic.
18. La mise en place d'une « stratégie nationale pour la pédopsychiatrie » vous parait-elle constituer une réponse adéquate dans le suivi des mineurs souffrant de dysphorie de genre ? Quel regard portez-vous aujourd'hui sur l'accompagnement et la prise en charge de ces mineurs ?
La refonte de la pédopsychiatrie est une urgence et englobera le suivi de ces mineurs. Il est inadmissible qu'une demande de RV pour un jeune puisse prendre plusieurs mois.
Actuellement en France, les mineurs que nous appelons « transidentifés » ne bénéficient pas de soins ayant des preuves suffisantes concernant leur efficacité. Le protocole doit être revu comme il l'est déjà dans plusieurs pays européens.
19. La dysphorie de genre s'accompagne fréquemment de souffrances psychiques qui peuvent être liées à l'environnement social et aux difficultés associées à un processus de transition générateur de stress.
Dans ce cadre, quel accompagnement proposer aux mineurs dans cette situation ?
Ces jeunes ne sont pas différents des autres jeunes. Ils doivent bénéficier d'une prise en charge globale (holistique).
20. Le Conseil national de l'ordre des médecins estime que le nombre de pédopsychiatres avait diminué de 34 % entre 2010 et 2022 passant ainsi de 3 113 à 2 039 sur tout le territoire. Dans un rapport de mars 2023, la Cour des comptes alertait sur les difficultés du secteur et les inégalités de prise en charge des mineurs sur le territoire.
Quelles réponses pourraient être apportées ?
Le rapport de la cour des comptes est accablant.
Nous nous referrons à ce qu'a écrit Bernard Golse, pédopsychiatre-psychanalyste, ancien Chef du service de Pédopsychiatrie de l'Hôpital Necker-Enfants Malades (Paris), Professeur émérite de Psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'Université Paris Cité, conseiller expert auprès de la Cour des comptes dans un article pour l'Agora du COPES (2023) dont voici un extrait :
« Les chiffres parlent d'eux-mêmes : on estime la population de mineurs (moins de 18 ans) dans notre pays à 14 millions d'enfants et d'adolescents dont 1,6 million souffrent d'un trouble psychique alors que 750.000 à 850.000 seulement bénéficient de soins psychiatriques. En contraste avec ces chiffres impressionnants, le nombre de pédopsychiatres a diminué de 34% entre 2010 et 2022, passant de 3113 en 2010 à 2019 en 2022 tandis que 58% des lits de pédopsychiatrie ont été supprimés. Les soins sont donnés essentiellement sur un mode ambulatoire : consultations, séances thérapeutiques diverses, hospitalisation de jour. Il y a eu, dit la Cour des comptes, un « virage ambulatoire ». La prévalence des troubles psychiques chez les enfants et adolescents européens est estimée à 13% selon une méta-analyse faite en 2022. Elle est mal connue pour la population française : la seule donnée épidémiologique remonte à 1981 et porte sur un échantillon limité aux enfants de 6 à 11 ans, pour aboutir à un taux de prévalence de 12,4%, donc proche de la moyenne européenne. On peut craindre que ce taux n'ait augmenté au cours des dernières années, si l'on en juge par l'accroissement des troubles suicidaires et des troubles de l'humeur chez les adolescents pendant la période COVID. Quant aux troubles les plus sévères, le rapport en estime le nombre à 190.000 enfants et adolescents compte tenu des dépenses de soins de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM). Au total, si l'on compare le nombre d'enfants et d'adolescents souffrant de troubles psychiques et le nombre d'entre eux qui bénéficient d'une prise en charge pédopsychiatrique, seul 1 enfant ou adolescent sur 2 bénéficie des soins dont il a besoin. Encore faut-il évaluer la qualité et l'adéquation de ces soins. À cet égard le rapport est sévère si l'on en juge par les sous-titres du rapport et les recommandations qui sont faites : « Une offre de soins de pédopsychiatrie mal adaptée aux besoins - Une offre de soins qui ne tient pas suffisamment compte de la diversité des troubles et des facteurs de risques - Un parcours de soins inadapté faute d'une gradation cohérente de l'offre de soins - Une politique de l'offre de soins de pédopsychiatrie plus lisible mais peu efficiente - Une lisibilité de l'action administrative à renforcer pour améliorer l'offre de soins de pédopsychiatrie ».
En conclusion de ce chapitre sur l'organisation des soins, le rapport souligne que : « Plus de 60 ans après la mise en place des secteurs de pédopsychiatrie, le parcours de soins des enfants et jeunes souffrant de troubles psychiques reste peu lisible et confronté à de multiples acteurs, la famille restant encore trop souvent en charge de la coordination des interventions ».
Le bilan étant fait et depuis plusieurs années, nous attendons avec impatience des mesures structurelles.