N° 500
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024
Enregistré à la Présidence du Sénat le 3 avril 2024
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur la proposition de loi visant à endiguer la prolifération du frelon asiatique et à préserver la filière apicole,
Par M. Jean-Yves ROUX,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Didier Mandelli, premier vice-président ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Hervé Gillé, Rémy Pointereau, Mme Nadège Havet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Yves Roux, Cédric Chevalier, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Audrey Bélim, MM. Pascal Martin, Jean-Claude Anglars, secrétaires ; Mme Jocelyne Antoine, MM. Jean Bacci, Pierre Barros, Jean-Pierre Corbisez, Stéphane Demilly, Gilbert-Luc Devinaz, Franck Dhersin, Alain Duffourg, Sébastien Fagnen, Jacques Fernique, Fabien Genet, Éric Gold, Daniel Gueret, Mme Christine Herzog, MM. Joshua Hochart, Olivier Jacquin, Damien Michallet, Georges Naturel, Louis-Jean de Nicolaÿ, Saïd Omar Oili, Alexandre Ouizille, Clément Pernot, Mme Marie-Laure Phinera-Horth, M. Bernard Pillefer, Mme Kristina Pluchet, MM. Hervé Reynaud, Pierre Jean Rochette, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Simon Uzenat, Mme Sylvie Valente Le Hir, M. Michaël Weber.
Voir les numéros :
Sénat : |
359 et 501 (2023-2024) |
L'ESSENTIEL
La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a adopté, le 3 avril 2024, suivant les orientations du rapporteur, Jean-Yves Roux, la proposition de loi visant à endiguer la prolifération du frelon asiatique et à préserver la filière apicole, présentée par Michel Masset et plusieurs de ses collègues.
Depuis sa détection en 2004, le frelon asiatique a colonisé en moins de deux décennies l'ensemble du territoire national, grâce à sa forte résilience et à des conditions climatiques favorables. Cette espèce exotique envahissante, qui s'attaque préférentiellement aux insectes sociaux, est un prédateur redoutable de l'abeille domestique, responsable d'environ 20 % de la mortalité observée dans les ruchers.
Face aux pressions que le frelon asiatique fait peser sur les pollinisateurs et à sa prodigieuse capacité de dispersion, la réponse publique a manqué de cohérence, de moyens budgétaires et de coordination. Il est à présent illusoire d'espérer éradiquer cette espèce, faute d'avoir agi de façon concertée quand c'était encore possible. Il est, en revanche, possible de diminuer les pressions de prédation et de limiter les dégâts causés aux ruchers et à l'entomofaune en coordonnant mieux les actions de lutte.
C'est précisément l'objet du présent texte, à travers un plan national de lutte contre le frelon asiatique, décliné en plans départementaux, afin de fédérer les actions à des échelles pertinentes, en associant les acteurs et les scientifiques. Ce dispositif vise à renforcer l'efficacité des mesures prises localement, en confiant à l'État le pilotage de ce nouvel arsenal de lutte contre le frelon asiatique, doté de moyens dédiés et mettant en oeuvre un régime de soutien aux apiculteurs touchés par ce ravageur.
La commission a adopté ce texte à l'unanimité, sous le bénéfice de six amendements du rapporteur précisant le contenu, la portée du plan national de lutte et ses déclinaisons départementales, favorisant la recherche de systèmes de lutte plus efficaces et sécurisant certains des dispositifs créés par le texte.
I. UNE PRISE DE CONSCIENCE TROP TARDIVE DES DANGERS DU FRELON ASIATIQUE ET DES ACTIONS NON COORDONNÉES QUI N'ONT PAS PERMIS D'ENDIGUER SA PROLIFÉRATION
A. LE FRELON ASIATIQUE, UNE ESPÈCE EXOTIQUE ENVAHISSANTE À FORTE CAPACITÉ D'ADAPTATION DEVENUE ENDÉMIQUE
Le frelon asiatique à pattes jaunes est un prédateur généraliste et opportuniste qui capture des insectes pour nourrir ses larves, en privilégiant les espèces vivant groupées, plus faciles à chasser, à l'instar des abeilles, des guêpes et des mouches.
Ses fortes capacités d'adaptation, sa plasticité phénotypique, sa résilience à la prédation et au parasitisme lui ont permis de coloniser l'ensemble de la France métropolitaine en moins de vingt ans. Son front de colonisation a progressé en moyenne de 78 km par an, faisant du frelon asiatique l'archétype même de l'espèce exotique envahissante.
Les scientifiques s'accordent sur le constat que son implantation sur le territoire national est impossible à éradiquer avec les moyens de lutte dont nous disposons aujourd'hui.
Progression du frelon asiatique en France et en Europe
Le frelon asiatique contribue à des pertes significatives de population d'abeilles à proximité des nids où il s'établit. Selon GDS France, environ 20 % de la mortalité de l'abeille domestique est imputable au frelon asiatique. Les pressions qu'il exerce sur les ruches sont de deux ordres : la prédation directe et le stress que son vol stationnaire à proximité de la ruche induit sur la colonie d'abeilles, entraînant moins de sorties des butineuses et une baisse d'activité qui affaiblit toute la ruche.
Son impact sur l'entomofaune et les pollinisateurs sauvages reste en revanche plus difficile à apprécier, faute d'études dédiées, même si les ravages qu'il cause aux espèces solitaires sont probablement limités, du fait de sa préférence pour les insectes sociaux.