SOMMAIRE

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AVANT-PROPOS 5

I. UN DISPOSITIF D'ENGAGEMENT, DE CITOYENNETÉ ET DE MIXITÉ SOCIALE PLÉBISCITÉ QUI DOIT ÊTRE DAVANTAGE VALORISÉ 7

A. LA MONTÉE EN PUISSANCE CONTINUE D'UN DISPOSITIF RECONNU 7

B. DES OBSTACLES QUI SUBSISTENT ET ENTRAVENT LE DÉVELOPPEMENT DU SERVICE CIVIQUE 8

1. Une forme d'engagement encore trop souvent méconnue par les jeunes 8

2. Une indemnité dont le montant constitue parfois un frein pour les jeunes en situation précaire 8

3. Des missions de qualité à préserver et à valoriser davantage 8

II. UNE PROPOSITION DE LOI POUR RENFORCER LE SERVICE CIVIQUE ET MIEUX VALORISER L'ENGAGEMENT DES VOLONTAIRES 9

III. LA POSITION DE LA COMMISSION : UN TEXTE PROFONDÉMENT MODIFIÉ SUR PROPOSITION DE LA RAPPORTEURE 10

EXAMEN DES ARTICLES 13

· Article 1er Élargissement des conditions d'accès au service civique, amélioration des modalités d'encadrement des missions et renforcement de l'attractivité du dispositif 13

· Article 1er bis (nouveau) Élargissement des conditions d'utilisation des droits acquis par les volontaires du service civique au titre du compte d'engagement citoyen 18

· Article 2 Valorisation du service civique dans le cadre des études supérieures 20

· Article 3 Prise en compte du service civique dans les concours de la fonction publique 24

· Article 3 bis (nouveau) Valorisation du service civique dans la validation des acquis de l'expérience 25

· Article 4 Recevabilité financière 26

EXAMEN EN COMMISSION 27

· Mercredi 3 avril 2024 27

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES 45

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS ») 47

LA LOI EN CONSTRUCTION 49

AVANT-PROPOS

La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a adopté, le 3 avril 2024, la proposition de loi visant à renforcer le service civique.

Créé par la loi d'initiative sénatoriale du 10 mars 2010, le service civique permet à des jeunes de 16 à 25 ans, et jusqu'à 30 ans pour les jeunes en situation de handicap, de s'engager dans une mission d'intérêt général auprès d'associations ou d'institutions publiques.

Avec plus de 780 000 jeunes mobilisés depuis sa création, le dispositif a pris une place croissante dans les politiques de jeunesse et jouit désormais d'une véritable crédibilité chez les participants : 84 % des jeunes en service civique déclaraient en 2021 qu'ils recommandaient le dispositif. Il s'agit d'un vecteur d'engagement fort : 58 % des volontaires souhaitent s'engager bénévolement après leur mission. Pour poursuivre et accompagner au mieux la montée en charge du service civique, cette proposition de loi vise à renforcer le dispositif et améliorer son attractivité auprès des jeunes désireux de s'engager.

À l'occasion de l'examen de ce texte et sur proposition de la rapporteure, la commission l'a largement remanié en adoptant 15 amendements. Elle a notamment porté de 25 à 27 ans l'âge plafond pour effectuer un service civique pour les jeunes qui ne sont pas en situation de handicap, sécurisé le cadre juridique permettant à un volontaire de participer à des missions d'urgence et de crise en dehors de celles prévues par sa mission d'origine, supprimé l'obligation de prendre en compte le service civique dans l'examen des candidatures pour accéder à des filières sélectives de l'enseignement supérieur et modifié les conditions de valorisation du service civique dans les concours de la fonction publique au regard du principe d'égal accès à l'emploi public.

I. UN DISPOSITIF D'ENGAGEMENT, DE CITOYENNETÉ ET DE MIXITÉ SOCIALE PLÉBISCITÉ QUI DOIT ÊTRE DAVANTAGE VALORISÉ

A. LA MONTÉE EN PUISSANCE CONTINUE D'UN DISPOSITIF RECONNU

Depuis sa création, le nombre de volontaires effectuant un service civique a connu une forte progression. Après une phase d'expansion entre 2010 et 2017, le nombre annuel des missions s'est stabilisé autour de 80 000 depuis cette date. En 2022, 83 497 missions ont débuté. L'année 2023 devrait être une année record, avec près de 88 300 nouveaux engagements.

Ces missions, qui durent de 6 à 12 mois, doivent être proposées par des organismes agréés par l'Agence du service civique. 60 % d'entre elles sont réalisées au sein d'associations, 30 % au sein des services de l'État - notamment l'éducation nationale - ou d'établissements publics et 5 % auprès des collectivités territoriales. Leur durée moyenne est de 8 mois.

Depuis 2017, les volontaires engagés - dont 61 % sont des femmes - représentent chaque année environ 10 % de la classe d'âge des 16 - 25 ans. Cette proportion varie fortement selon les départements mais le service civique attire sur l'ensemble du territoire des jeunes aux profils diversifiés. Unis-cité, acteur majeur du service civique, met ainsi au coeur de sa mission l'accueil de volontaires issus d'un quartier prioritaire de la politique de la ville.

Situation et âge des volontaires avant le début de leur mission en 2022

Source : Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP)

Cette variété des profils, en progression constante depuis la création du dispositif, témoigne de la capacité du service civique à remplir sa mission d'accueil de la jeunesse dans sa diversité, pour constituer un moment de mixité sociale et d'ouverture aux autres. Le service civique est « une école de l'engagement citoyen à davantage valoriser », comme le soulignait de manière transpartisane la mission sénatoriale de 2022 visant à redynamiser la culture citoyenne1(*).

B. DES OBSTACLES QUI SUBSISTENT ET ENTRAVENT LE DÉVELOPPEMENT DU SERVICE CIVIQUE

1. Une forme d'engagement encore trop souvent méconnue par les jeunes

Si le service civique a fait ses preuves depuis sa création, son développement ne pourra être assuré sans que des efforts soient mis en oeuvre pour mieux faire connaître cette forme d'engagement.

Intégré au sein du plan « 1 jeune 1 solution », le service civique est parfois confondu avec d'autres dispositifs en faveur de la jeunesse. Il est essentiel de mieux communiquer sur les objectifs remplis par cette forme d'engagement en rappelant en quoi elle se distingue d'un stage, d'une activité salariée ou du bénévolat, mais aussi d'un dispositif d'insertion sociale et professionnelle.

2. Une indemnité dont le montant constitue parfois un frein pour les jeunes en situation précaire

Depuis le 1er janvier 2024, les missions de service civique sont indemnisées à hauteur de 620 euros net par mois. L'indemnité est versée en partie par l'État, à hauteur de 505 euros par mois ; l'organisme d'accueil verse un complément de 115 euros. Une majoration de 115 euros sur critères sociaux est accordée aux boursiers des échelons 5 à 7 et aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA).

Malgré cette hausse, son montant peut s'avérer être un frein pour certains jeunes en situation précaire pourtant désireux de s'engager dans une mission de long terme.

3. Des missions de qualité à préserver et à valoriser davantage

L'équilibre du service civique repose sur sa capacité à mobiliser les jeunes sur les défis sociaux et environnementaux en leur proposant un cadre d'engagement dans lequel ils pourront mûrir, gagner en confiance et en compétences.

Le volontaire bénéficie d'un encadrement par un tuteur au sein de l'organisme d'accueil pour l'accompagner tout au long de sa mission. Par ailleurs, et dès l'origine du dispositif en 2010, un accompagnement dans la réflexion du volontaire sur son projet d'avenir ainsi qu'une formation civique et citoyenne obligatoire de deux jours relative aux institutions et aux valeurs de la République sont prévus pour chaque volontaire et en constituent une spécificité.

Pour autant, cette obligation de formation n'est pas entièrement satisfaite puisqu'un quart des jeunes engagés n'en bénéficie toujours pas et seulement la moitié d'entre eux font deux journées effectives de formation. Cette situation s'explique pour plusieurs raisons : difficultés d'accès et coût du transport pour rejoindre le lieu de formation, manque d'information des jeunes, absentéisme, méconnaissance du dispositif par les tuteurs... Consciente de ces enjeux, l'Agence du service civique a accru depuis septembre 2023 son contrôle sur ce point.

Il est indispensable de renforcer l'accompagnement des structures d'accueil dans l'élaboration des missions de service civique, afin que celles-ci tiennent compte à la fois de leurs projets et de celui des volontaires et répondent pleinement aux objectifs de cohésion nationale, d'engagement et de renforcement de la citoyenneté fixés par le service civique.

II. UNE PROPOSITION DE LOI POUR RENFORCER LE SERVICE CIVIQUE ET MIEUX VALORISER L'ENGAGEMENT DES VOLONTAIRES

La proposition de loi vise tout d'abord à faciliter l'accès au service civique par une meilleure information auprès des jeunes et un élargissement de ses conditions d'accès.

À ce titre, l'article 1er ouvre la possibilité pour tous les jeunes de 25 à 30 ans d'effectuer une mission et élargit aux assemblées parlementaires et aux juridictions administratives et financières la possibilité d'accueillir des jeunes en service civique. L'article 2 prévoit quant à lui que soit proposé à tout jeune sortant du système éducatif un service civique comme alternative à la formation professionnelle. Il renforce l'information des étudiants sur la possibilité de césure pour accomplir un service civique en garantissant à l'étudiant volontaire sa réinscription à l'issue du contrat dans la formation dans laquelle il avait été accepté.

Le texte accroît également l'attractivité du dispositif. Dans cette perspective, son article 1er prévoit une révision des modalités de calcul de l'indemnité octroyée aux volontaires, la possibilité pour une association proposant une mission de percevoir une aide modulée selon la situation personnelle du volontaire et l'octroi pour celui-ci d'une allocation de fin d'engagement.

Par ailleurs, il vise à valoriser davantage l'engagement du volontaire. L'article 2 renforce l'accompagnement en fin de contrat en permettant au volontaire de se voir proposer une formation professionnelle ou la reprise de sa formation initiale. Il prévoit également la prise en compte de la réalisation du service civique dans le cadre de l'inscription à une formation du premier cycle d'enseignement supérieur, notamment au sein des filières sélectives. L'article 3 vise à valoriser le service civique lors des concours externes de la fonction publique et à créer une voie d'accès au troisième concours pour les anciens volontaires.

Enfin, le texte souhaite améliorer les modalités d'encadrement des missions en renforçant la place de la formation civique et citoyenne et en encourageant la réalisation de missions collectives.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION : UN TEXTE PROFONDÉMENT MODIFIÉ SUR PROPOSITION DE LA RAPPORTEURE

Afin d'éviter une éviction des jeunes en situation de handicap et un dévoiement du service civique comme alternative à l'emploi, la commission a fixé, sur proposition de la rapporteure, l'âge plafond des volontaires à 27 ans, sauf pour les jeunes en situation de handicap pour lesquels la limite reste à 30 ans.

Reprenant les conclusions de précédents travaux2(*), la commission a créé un cadre juridique permettant au volontaire de pouvoir participer à des missions d'urgence en dehors de celles prévues par son contrat, par exemple à la suite d'une catastrophe naturelle (art. 1er).

Elle a également supprimé l'allocation de fin de contrat estimant qu'elle faisait doublon avec les droits acquis au titre du compte d'engagement citoyen (CEC) dont bénéficie tout volontaire effectuant une mission de six mois minimum. Il lui semble plus pertinent de s'appuyer sur ce dispositif existant qui valorise l'engagement bénévole tout au long de la vie et d'élargir son utilisation au paiement des frais d'inscription en formation initiale (art. 1er bis) - le CEC permettant déjà le financement du permis de conduire ou de formations destinées à faciliter la création d'entreprise.

Dans le cadre des études supérieures, la commission a sécurisé le droit à la réintégration dans son cursus de formation pour tout étudiant effectuant une césure et a précisé la possibilité pour les établissements d'enseignement supérieur de prendre en compte un engagement de service civique lors d'une inscription en premier cycle de formation universitaire. En revanche, elle a supprimé l'obligation d'intégrer cet engagement parmi les critères qui doivent être pris en compte dans l'examen des candidatures dans les filières sélectives. Un tel système risque d'engendrer une rupture d'égalité dans l'accès aux études supérieures au regard du nombre de missions disponibles et de réduire la diversité des profils des volontaires en surreprésentant les néo-bacheliers au détriment des autres jeunes (art. 2).

Elle a également modifié l'article 3 visant à valoriser le service civique dans les concours de la fonction publique, au nom du principe d'égal accès aux emplois publics. Elle a substitué à la prise en compte d'un service civique dans les épreuves d'admissibilité des concours externes une possibilité pour les statuts particuliers de permettre aux anciens volontaires de bénéficier d'une dérogation aux conditions de diplôme ou de titre pour s'inscrire à ces concours.

Pour le troisième concours, la création d'une voie spécifique pour les anciens volontaires interroge du fait de la durée moyenne d'un service civique - 8 mois - par rapport à l'expérience professionnelle, bénévole ou politique exigée pour les autres voies - a minima de plusieurs années. Aussi, la commission l'a remplacée par une prise en compte de la durée du service civique dans le calcul de la durée d'expérience professionnelle exigée, au même titre que les contrats d'apprentissage ou de professionnalisation.

Enfin, elle a inclus la durée du service civique dans les périodes pouvant être prises en compte dans le cadre d'une procédure de validation des acquis de l'expérience (article 3 bis).

*

* *

La commission de la culture, de l'éducation, de la communication
et du sport a adopté la proposition de loi ainsi modifiée
.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
Élargissement des conditions d'accès au service civique,
amélioration des modalités d'encadrement des missions
et renforcement de l'attractivité du dispositif

Cet article fixe à 30 ans l'âge limite pour effectuer un service civique et élargit le périmètre des organismes d'accueil, renforce la formation civique et citoyenne et améliore l'attractivité financière du dispositif.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté plusieurs amendements qui visent notamment à abaisser le plafond d'âge à 27 ans, sauf pour les personnes en situation de handicap, fixer à trois le nombre de jours de formation et imposer qu'ils soient réalisés par des organismes spécifiquement agréés, prévoir une indemnité identique pour tous les volontaires sans distinction d'âge, ainsi qu'à sécuriser juridiquement la mise à disposition d'un jeune, avec son accord, sur des missions ponctuelles d'urgence. Elle a également supprimé l'allocation de fin de contrat.

I. Les conditions d'accès, d'organisation du service civique ainsi que d'indemnité dans le droit en vigueur

Créé par la loi n° 2010-241 du 10 mars 2010, le service civique est un engagement volontaire d'une durée continue de six à douze mois donnant lieu au versement d'une indemnité prise en charge par l'agence du service civique, ouvert aux personnes âgées de seize à vingt-cinq ans ou aux personnes en situation de handicap âgées de seize à trente ans, visant à exercer des missions d'intérêt général reconnues prioritaires pour la Nation.

L'article L120-1 du code du service national précise que le service civique doit être effectué auprès de personnes morales agréées. Celles-ci sont limitativement énumérées par cet article : il doit s'agir d'un organisme sans but lucratif de droit français, d'une personne morale de droit public, d'un organisme d'habitations à loyer modéré mentionné à l'article L411-2 du code de la construction et de l'habitation, d'une société d'économie mixte mentionnée à l'article L481-1 du même code ou d'une société publique locale mentionnée à l'article L1531-1 du code général des collectivités territoriales, d'une société dont l'État ou la Banque de France détient la totalité du capital ou à laquelle le ministre chargé de la culture a attribué un label en application de l'article 5 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, d'une organisation internationale dont le siège est implanté en France ou d'une entreprise solidaire d'utilité sociale agréée en application du II de l'article L3332-17-1 du code du travail.

En application de l'article L120-4 du code du service national, sont éligibles les jeunes de nationalité française, d'un État membre de l'Union européenne ou d'un pays membre de l'espace économique européen, ainsi que des jeunes de nationalité étrangère résidant dans certains pays tiers où les personnes de nationalité française sont éligibles à des dispositifs similaires au nom du principe de réciprocité. Cet article permet également aux étrangers disposant d'un des titres de séjour prévus par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile d'effectuer un service civique, le cas échéant sous conditions de durée minimale d'un an de séjour en France.

L'article L120-14 du code du service national prévoit pour le volontaire un accompagnement dans sa réflexion sur son projet d'avenir ainsi qu'une formation civique et citoyenne. Fixée actuellement à deux jours, elle doit être délivrée au moins pour la moitié de cette durée dans les trois mois suivant le début de l'engagement de service civique.

L'article L120-18 du code du service national prévoit le versement d'une indemnité mensuelle au volontaire. Le décret n° 2017-1821 du 28 décembre 2017 a fixé cette indemnité à 36,11 % de la rémunération mensuelle afférente à l'indice brut 244 de la fonction publique prévu par le décret du 23 décembre 1982. Cette indemnité peut être majorée lorsque les difficultés de nature sociale ou financière rencontrées par le volontaire le justifient.

Depuis le 1er janvier 2024, les missions de service civique sont indemnisées à hauteur de 620 euros net par mois3(*). L'indemnité est versée en partie par l'État, à hauteur de 505 euros par mois ; l'organisme d'accueil verse un complément de 115 euros. Une majoration de 115 euros sur critères sociaux est accordée aux boursiers des échelons 5 à 7 et aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ou dont les parents en sont bénéficiaires.

Aux termes de l'article L120-31 du code du service national, les organismes sans but lucratif4(*) accueillant des volontaires peuvent percevoir une aide, à la charge de l'agence du service civique, aux fins de couvrir une partie des coûts relatifs à l'accueil, à la formation et à l'accompagnement du volontaire accomplissant son service. Actuellement, la seule modulation de cette prise en charge concerne le lieu de la mission et est d'un montant de 100 euros fixé par un décret en date du 12 mai 2010.

Pour faciliter le déploiement du service civique au sein de petites structures, la loi permet l'intermédiation : en application de l'article L120-3 du code du service national, un organisme sans but lucratif de droit français agréé par l'agence du service civique peut mettre à disposition un volontaire pour effectuer une mission auprès d'un ou, de manière successive, de plusieurs organismes sans but lucratif de droit français, personnes morales de droit public français, collectivités territoriales étrangères ou organismes sans but lucratif de droit étranger, non agréés, s'ils satisfont aux conditions d'agrément. L'organisme agréé est responsable du respect par l'organisme tiers non agréé des conditions d'accueil, de tutorat et de formation des volontaires.

Enfin, l'article L5151-9 du code du travail précise que la réalisation d'une mission de service civique permet au volontaire d'acquérir des droits inscrits sur son compte d'engagement citoyen (CEC). L'article D5151-14 du même code indique que la durée minimale nécessaire à l'acquisition de ses droits fixés à 240 euros est de 6 mois. Ces fonds peuvent être mobilisés dans les conditions définies à l'article L6323-6 du code du travail, notamment pour le financement du permis de conduire ainsi que pour des actions de formation de certifications professionnelles enregistrées au répertoire national, de validation de compétences, de bilan de compétences ou encore, d'accompagnement à la création ou reprise d'entreprises.

II. Les dispositions de la proposition de loi

Le 1° de l'article 1er élargit les conditions d'accès au service civique à tous les jeunes de 25 à 30 ans et permet aux assemblées parlementaires ainsi qu'aux juridictions administratives et financières d'être agréées pour accueillir des personnes en service civique.

Selon les informations transmises par Nadia Bellaoui, présidente de l'agence du service civique, la moyenne d'âge des volontaires est de 21 ans. Seuls 6 % des services civiques sont réalisés par des volontaires de 24 ans et 4 % par des volontaires de 25 ans ou plus.

Afin d'encourager davantage la mixité sociale dans le cadre de la réalisation de missions de service civique, le 1° précise que, lorsque la nature de la mission et de l'organisme le permet, le jeune est affecté à la réalisation d'une mission collective impliquant au moins deux volontaires.

Le 2° renforce la formation civique et citoyenne pour la porter à cinq jours. Elle reprend en cela une recommandation du conseil national de refondation (CNR) Jeunesse ainsi que de la mission d'information sénatoriale visant à renforcer la culture citoyenne.

Le 3° aligne le montant minimal de l'indemnité versée à un volontaire sur la rémunération perçue au même âge par un apprenti lors de sa première année de contrat d'apprentissage.

Le 4° exonère l'indemnité ainsi que les prestations complémentaires perçues par les volontaires de cotisations sociales et de l'impôt sur le revenu.

Le 5° renforce l'attractivité financière du service civique en créant une allocation de fin de contrat. Celle-ci permet, dans des conditions fixées par décret, au volontaire de financer au choix le permis de conduire, un projet de formation, de reprise d'études ou de création d'entreprise.

Le 6° élargit les possibilités de modularité d'une aide aux organismes sans but lucratif accueillant des volontaires, en prenant en compte leur niveau d'études, leur lieu de résidence ou une éventuelle situation de handicap. Il s'agit de les inciter à accueillir des jeunes au profil plus atypique nécessitant un accompagnement renforcé de la part du tuteur ou leur permettre de proposer aux volontaires une aide financière supplémentaire par exemple en termes d'aide au logement.

Le 7° étend à toute personne morale agréée par l'agence du service civique la possibilité de réaliser une intermédiation. Il ouvre par exemple la voie au portage d'une mission de service civique par une intercommunalité et à la mise à disposition du volontaire au profit d'une ou plusieurs communes de son ressort qui n'ont pas les moyens humains, financiers et administratifs de proposer seules une mission de service civique.

III. La position de la commission

Concernant le report de l'âge limite à 30 ans, la rapporteure a été alertée sur un risque d'éviction aux dépens des jeunes en situation de handicap - actuellement les seuls entre 25 et 30 ans à pouvoir effectuer un service civique - ainsi que de publics moins autonomes comme les mineurs ou les décrocheurs scolaires. En outre, pour reprendre l'expression de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, le service civique est sur une « ligne de crête » entre dispositif de promotion de l'engagement et outil d'insertion sociale et professionnelle.

Or, l'élévation de l'âge maximal pour effectuer un service civique intensifie la confusion entre service civique, emploi et outil d'insertion sociale et accroit le risque d'une substitution à l'emploi pour les jeunes.

Pour toutes ces raisons, la commission a adopté, sur proposition de la rapporteure, un amendement COM-1 visant à fixer l'âge maximal pour effectuer un service civique à 27 ans, sauf pour les jeunes en situation de handicap pour lesquels l'âge plafond est maintenu à 30 ans. Par rapport au droit actuel, l'âge plafond est rehaussé de deux ans afin de tenir compte des parcours d'études moins linéaires qu'auparavant avec interruption ou réorientation en cours d'études.

La commission a également adopté, sur proposition de la rapporteure, un amendement COM-2 qui vise à permettre aux personnes accueillies en France au titre de la protection temporaire prévue à l'article L.581-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile d'effectuer un service civique. Celle-ci n'ouvrant pas droit à un titre de séjour, ses bénéficiaires ne peuvent actuellement pas postuler à un service civique. Ce dispositif de protection de populations victimes de conflits armés issu du droit européen a été utilisé pour la première fois en 2022 en faveur des ressortissants ukrainiens.

S'agissant de la formation civique et citoyenne, s'il existe un consensus sur l'utilité pour les volontaires d'une augmentation du nombre de jours de formation5(*), la rapporteure estime que certains volontaires n'ont pas besoin de 5 jours de formation. Elle a également été alertée sur le coût d'une telle mesure : le passage de deux à cinq jours de formation représenterait un coût supplémentaire de 150 euros par volontaire.

En revanche, la qualité et l'effectivité de cette formation doivent être mieux contrôlées : actuellement un quart des engagés n'en bénéficie toujours pas et seulement la moitié d'entre eux font deux journées effectives de formation.

C'est pourquoi la commission a adopté, sur proposition de la rapporteure, un amendement COM-15 prévoyant d'une part que la formation soit désormais délivrée par un organisme spécifiquement agréé pour le faire et, d'autre part, portant le nombre de jours de formation à trois. Par rapport au droit existant, la formation est renforcée d'un jour.

Compte tenu des spécificités d'engagement du service civique, la commission a également adopté un amendement COM-3 pour permettre à un volontaire, avec son accord, de pouvoir participer à des missions d'urgence en dehors de celles prévues par son contrat. Cet amendement, qui pourrait par exemple être amené à jouer lors d'une catastrophe naturelle, fait écho à l'une des recommandations du groupe de travail sectoriel au sein de la commission de la culture sur les conséquences de l'épidémie de Covid-19 sur la jeunesse et la vie associative présidé par notre ancien collègue Jacques-Bernard Magner en 20206(*). Lors de la covid, près de 50 000 volontaires s'étaient inscrits sur la plateforme gouvernementale « jeveuxaider.gouv.fr » pour aider dans diverses missions. L'agence du service national a été confrontée à des difficultés juridiques pour leur permettre d'agir en dehors des missions prévues par leur contrat.

En ce qui concerne l'indemnité perçue par le volontaire, la rapporteure se félicite qu'elle soit désormais calculée en référence au contrat d'apprentissage et donc au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), lui permettant de faire l'objet de revalorisation plus régulière que le point d'indice de la fonction publique. En revanche, en faisant référence à l'âge du volontaire, la proposition de loi conduit à une diminution de l'indemnité perçue par les mineurs, qui représentent 10 % des volontaires engagés. Ces derniers toucheraient ainsi une rémunération mensuelle de 471 euros, contre 620 euros aujourd'hui. Par ailleurs, afin d'éviter que pour une même mission deux jeunes perçoivent une indemnité différente du seul fait de leur âge, mais aussi pour limiter le risque de substitution à l'emploi pour les volontaires les plus âgés7(*), la commission a adopté un amendement COM-4 qui fixe l'indemnité perçue par un volontaire du service civique par référence à la rémunération versée à un jeune majeur âgé de 18 à 20 ans lors de sa première année en contrat d'apprentissage. Cet amendement porte la rémunération mensuelle d'un jeune engagé dans un service civique à 43 % du SMIC quel que soit son âge, soit 751 euros. Cela représente une augmentation mensuelle de 131 euros.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a également adopté un amendement COM-5, supprimant l'allocation de fin de contrat introduite par l'article 1er. En effet, les volontaires du service civique bénéficient déjà du compte d'engagement citoyen (CEC), qui est abondé de 240 euros à la fin de leur contrat. Il a été indiqué à la rapporteure au cours de ses auditions que dans le contexte budgétaire actuel, la création de cette allocation risque d'entraîner par ricochet la diminution des droits ouverts au titre du compte d'engagement citoyen pour les volontaires du service civique. Or, le système actuel via l'acquisition de droits au titre du CEC participe à la connaissance par les jeunes volontaires de l'existence de ce dispositif. Il semble plus opportun à la rapporteure de s'appuyer sur un outil qui vise à favoriser l'engagement tout au long de la vie. Ce sont en effet 10 % d'une classe d'âge chaque année qui ont ainsi la possibilité de découvrir l'existence et le fonctionnement du CEC.

Enfin la commission a adopté un amendement COM-14 rédactionnel.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 1er bis (nouveau)

Élargissement des conditions d'utilisation des droits acquis
par les volontaires du service civique au titre du compte d'engagement citoyen

Cet article additionnel, adopté à l'initiative de la rapporteure, permet aux volontaires d'utiliser les droits acquis dans leur CEC au titre de leur service civique pour payer les droits d'inscription de leur formation initiale.

Les actions de formation éligibles au compte personnel de formation sont encadrées par l'article L6323-6 du code du travail.

Il s'agit notamment des actions de formation permettant une certification professionnelle enregistrée au répertoire national ainsi que celles sanctionnées par les attestations de validation de blocs de compétences au sens de l'article L6113-1 du même code et celles sanctionnées par les certifications et habilitations enregistrées dans le répertoire spécifique mentionné à l'article L6113-6 comprenant notamment la certification relative au socle de connaissances et de compétences professionnelles.

Sont également éligibles les actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience, les bilans de compétences, la préparation aux épreuves théoriques et pratiques de toutes les catégories de permis de conduire d'un véhicule terrestre à moteur, les formations d'accompagnement et de conseil pour les créateurs ou repreneurs d'entreprises, les formations destinées à permettre aux bénévoles et aux volontaires en service civique d'acquérir les compétences nécessaires à l'exercice de leurs missions.

Parce que le compte d'engagement citoyen s'adosse sur le compte de formation professionnelle, celui-ci s'inscrit dans une démarche de formation continue. Le droit actuel ne permet ainsi pas son utilisation pour le paiement des frais d'inscription de certaines formations initiales de l'enseignement supérieur prévus à l'article L719-4 du code de l'éducation.

Or, du fait des caractéristiques propres au service civique, un nombre important de volontaires sont étudiants - l'âge moyen est de 21 ans - ou souhaitent reprendre leurs études à l'issue de leur mission.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-6 permettant aux anciens volontaires du service civique d'utiliser les droits acquis à ce titre pour payer les droits d'inscription de leur formation initiale.

La commission a adopté cet article 1er bis ainsi rédigé.

Article 2
Valorisation du service civique dans le cadre des études supérieures

Cet article vise à mieux faire connaître le service civique auprès des jeunes ainsi qu'à faciliter sa réalisation et le valoriser dans le cadre des études supérieures.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté plusieurs amendements qui visent à inclure les dispositifs d'accompagnement ou d'insertion sociale et professionnelle parmi ceux qui peuvent être proposés à un volontaire à la fin de son contrat, sécuriser le droit à la réintégration dans sa formation d'origine de tout étudiant effectuant une césure ainsi qu'à supprimer l'obligation d'intégrer la réalisation d'un service civique parmi les critères qui doivent être pris en compte dans l'examen des candidatures dans les filières sélectives sur Parcoursup.

I. L'information et la valorisation du service civique dans le droit en vigueur

La proposition de loi sénatoriale de 2010 créant le service civique lui fixe un double objectif : d'une part, « recréer du lien social » et « permettre à des jeunes, parfois à la recherche de repères, de s'engager au service des autres, en faveur de l'intérêt général », et d'autre part offrir aux jeunes une « expérience humaine enrichissante qui viendra compléter leur cursus scolaire et/ou universitaire, avant d'entrer dans la vie active »8(*).

Conçu comme un dispositif « d'intégration citoyenne des jeunes » selon l'expression de Christian Demuynck, rapporteur pour le Sénat de la proposition de loi relative au service civique en 2009, le législateur a prévu une information et une sensibilisation des jeunes à plusieurs étapes de leur cursus scolaire et citoyen : à l'école, à travers les programmes d'enseignement moral et civique (EMC) comme le précise l'article L312-15 du code de l'éducation, lors de la Journée Défense et citoyenneté, obligatoire pour tous les Français (art. L114-3 du code du service national), ainsi que pendant leurs études supérieures : les établissements d'enseignement supérieur sont tenus d'informer leurs étudiants de l'existence de ce dispositif (art. L611-7 du code de l'éducation). Enfin, dans le cadre du stage de cohésion du service national universel, une information sur le service civique qui doit constituer sa troisième phase facultative est donnée.

Dans le cadre des études supérieures, le service civique est encouragé et valorisé par plusieurs biais. Ainsi, l'article L611-11 du code de l'éducation permet aux étudiants faisant un service civique en parallèle de leurs études de bénéficier d'aménagement dans l'organisation et le déroulement de celles-ci.

La loi de 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants consacre dans la loi le droit à une année de césure. L'article L611-12 du code de l'éducation prévoit la possibilité pour tout étudiant sur sa demande et avec l'accord du président ou directeur de l'établissement dans lequel il est inscrit de suspendre temporairement ses études. L'article D611-16 du même code prévoit que la césure peut notamment prendre la forme « d'un engagement de service civique ».

Enfin, l'article L611-9 du même code permet à un jeune en service civique de bénéficier d'une validation des compétences, connaissances et aptitudes acquises lors de celui-ci au titre de sa formation.

Outre la promotion de l'engagement des jeunes, le service civique revêt une dimension d'insertion professionnelle sur certains territoires comme le souligne l'étude de l'institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire de février 20249(*) : les départements dans lesquels la part de volontaires peu diplômés est élevée sont également les départements où les taux de réalisation du service civique sont les plus élevés. Elle constate également une corrélation entre taux de chômage territorial élevé et recours élevé à ce volontariat.

D'ailleurs, l'article L120-14 du code du service national prévoit un « accompagnement [du volontaire] dans sa réflexion sur son projet d'avenir » par l'organisme qui l'accueille, témoignant de cette vocation d'insertion sociale et professionnelle.

Conscient de ce rôle du service civique pour raccrocher des jeunes en voie de décrochage scolaire, l'article L114-1 du code de l'éducation inclut la participation à un service civique comme répondant à l'obligation de formation de 16 à 18 ans, au même titre que la poursuite de la scolarité, l'apprentissage ou le stage d'une formation professionnelle ainsi qu'un accompagnement dans le cadre d'un dispositif d'insertion sociale ou professionnelle.

En complément de cet article, et afin de lutter contre la sortie du système scolaire sans diplôme ni formation, l'article L122-3 du même code issu de la loi d'orientation sur l'école de 1989 prévoit que tout jeune y compris majeur doit se voir proposer une formation professionnelle avant sa sortie du système éducatif et quel que soit le niveau d'enseignement qu'il a atteint.

II. Les dispositions de la proposition de loi

Le 1° de cet article complète l'article L122-3 du code de l'éducation afin de prévoir comme alternative à la formation professionnelle proposée à tout jeune sortant du système éducatif, un service civique. Par ailleurs, il renforce l'accompagnement en fin de contrat en permettant au volontaire de se voir proposer une formation professionnelle ou la reprise de sa formation initiale.

Afin de développer le service civique, le 2° de cet article inclut dans les programmes d'enseignement moral et civique une information sur la possibilité de réaliser une année de césure après le baccalauréat pour effectuer un service civique.

Le 3° impose aux établissements d'enseignement supérieur d'informer leurs étudiants de la possibilité de césure pour accomplir un service civique et garantit à l'étudiant volontaire sa réinscription à l'issue du contrat dans la formation dans laquelle il avait été accepté.

Le 4° prévoit une prise en compte de la réalisation du service civique dans le cadre de l'inscription à une formation du premier cycle d'enseignement supérieur (licence, BTS, DUT notamment). Il impose aux établissements d'enseignement supérieur de prendre en compte celui-ci lors de l'examen des candidatures déposées via Parcoursup. Pour les filières sélectives, l'accomplissement d'un engagement de service civique devient un critère à prendre en compte au même titre que ses acquis et compétences au regard de la cohérence avec la formation demandée.

III. La position de la commission

La rapporteure partage la volonté de mieux faire connaître et valoriser le service civique. Sur sa proposition, la commission a adopté cinq amendements.

Compte tenu de la dimension d'insertion sociale que joue le service civique pour certains jeunes, l'amendement COM-7 inclut les dispositifs d'accompagnement ou d'insertion sociale et professionnelle parmi ceux qui peuvent être proposés à un volontaire à la fin de son contrat.

Par ailleurs, par un amendement COM-8, la commission a supprimé la modification du programme d'enseignement moral et civique. Comme elle a pu le rappeler à de nombreuses reprises sur de précédents textes, il ne revient pas au législateur de définir les contenus des programmes scolaires. Elle souligne d'ailleurs que l'article L312-5 du code de l'éducation inclut déjà une sensibilisation au service civique. Enfin, en ce qui concerne plus spécifiquement cet article du code de l'éducation, elle a récemment appelé à en simplifier sa rédaction afin de le recentrer autour d'objectifs concis, liés à la connaissance des valeurs de la République, des institutions françaises et européennes ainsi qu'à la compréhension des enjeux internationaux, sociétaux et environnementaux du monde contemporain10(*).

En ce qui concerne la réalisation d'une année de césure, dans un contexte d'augmentation du nombre d'étudiants pour un nombre de places dans l'enseignement supérieur quasi stable, par un amendement COM-9, la commission a sécurisé le droit à la réintégration dans sa formation d'origine de tout étudiant effectuant une césure.

L'amendement COM-10, adopté par la commission, substitue à l'obligation de prise en compte du service civique par les établissements d'enseignement supérieur la possibilité de le faire. Il s'inspire en cela de la possibilité offerte par l'amendement de Laurent Lafon voté par le Sénat lors de l'examen de projet de loi de programmation pour la recherche pour les années 2021 à 2030 afin de valoriser les dispositifs des cordées de la réussite.

En revanche, par l'amendement COM-11, la commission a supprimé toute mention du service civique dans la procédure de sélection pour les filières sélectives. En effet, selon les informations transmises à la rapporteure, il y a actuellement deux demandes pour une place de service civique. Ce ratio pourrait être amené à se dégrader puisque dans le cadre des coupes budgétaires annoncées début février près de 100 millions d'euros ont été annulés pour le service civique, ce qui représente l'équivalent de 50 000 missions. Dans sa décision n° 2018-763 DC, le Conseil constitutionnel a estimé conforme un système de départage entre les étudiants à la condition qu'il soit fondé sur des critères objectifs de nature à garantir le respect de l'exigence constitutionnelle d'égal accès à l'instruction. L'écart entre le nombre de places disponibles et le nombre de candidatures risque de créer une inégalité dans l'accès aux études supérieures.

Par ailleurs, l'âge moyen actuel des jeunes en service civique est de 21 ans, soit à la fin du premier cycle d'études universitaires ou au début du cycle de master. Introduire la réalisation d'un service civique dans les critères de sélection pour certaines filières risquerait d'une part de dénaturer la nature même de ce dispositif qui est avant tout un engagement au service de l'intérêt général, et d'autre part d'augmenter le nombre de candidatures post-bac au détriment de celles de jeunes à d'autres stades de leur parcours de formation.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3
Prise en compte du service civique dans les concours de la fonction publique

Cet article vise à valoriser le service civique lors des concours externes de la fonction publique ainsi qu'à créer une voie d'accès au troisième concours pour les anciens volontaires du service civique.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a modifié cet article pour le concours externe en permettant aux statuts particuliers de déroger à l'obligation de diplômes ou titres pour se présenter à un concours au bénéfice des anciens volontaires du service civique et pour le troisième concours en substituant à la création d'une voie spécifique, la prise en compte du service civique dans la durée d'expérience professionnelle, d'engagement associatif ou politique nécessaire pour se présenter à celui-ci.

Cet article prévoit une valorisation du service civique dans les concours de la fonction publique.

En ce qui concerne le concours externe, le texte prévoit une prise en compte du service civique lors des procédures d'examen des candidatures et d'admissibilité dans les concours externes.

La mise en place de dispositions spécifiques au sein d'une même voie d'accès - en l'occurrence pour les épreuves d'admissibilité - interroge au regard du principe constitutionnel d'égal accès aux emplois publics découlant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

En ce qui concerne le troisième concours, en application de l'article L325-7 du code général de la fonction publique, celui-ci est ouvert aux candidats justifiant l'exercice pendant une durée déterminée d'une ou plusieurs activités professionnelles, d'un ou plusieurs mandats d'élu local ou de responsable d'une association, y compris à titre bénévole. Ce délai minimal de service fixé par le statut particulier de chaque concours est dans la majorité des cas au minimum de 4 ans (par exemple pour le concours d'éducateur d'activités physiques et sportives - catégorie B) voire plus (5 ans de délai pour les concours d'accès aux instituts régionaux d'administration, 6 ans pour l'institut national du service public).

Or, en application de l'article L120-1 du code du service national, un contrat de service civique est d'une durée de 6 mois à 12 mois11(*). Comme l'a rappelé Nadia Bellaoui, présidente de l'agence du service civique, lors de son audition par la rapporteure, la durée moyenne d'un service civique est de 8 mois. Pour la commission, créer une voie d'accès spécifique au troisième concours pour les anciens volontaires d'un service civique risque de créer une inégalité entre les candidats se présentant à ses différentes voies dans la durée minimale d'expériences professionnelles, d'engagement associatif ou politique à justifier pour y accéder.

Pour cette raison, sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-12 de réécriture globale de l'article.

Pour les concours externes, il ouvre la possibilité aux statuts particuliers et cadres d'emplois de prévoir une dérogation aux conditions de diplômes et de titres pour les anciens volontaires du service civique. Une dérogation similaire existe pour certaines catégories de candidats : elle est de droit pour les parents d'au moins trois enfants (art. L325-10 du code général de la fonction publique) et possible pour les sportifs de haut niveau (art. L325-12 du même code). En revanche, les épreuves et les modalités de notation restent les mêmes pour l'ensemble des candidats.

Pour le troisième concours, la durée du service civique est incluse dans la durée nécessaire d'expérience professionnelle, d'engagement bénévole ou politique demandée par les statuts particuliers de chaque concours, de manière identique à ce que l'article L325-8 du code général de la fonction publique prévoit pour la prise en compte des contrats d'apprentissage ou de professionnalisation. La rapporteure note que le service civique est valorisé de manière similaire dans le cadre des concours internes : l'article L.325-6 du code général de la fonction publique prévoit la prise en compte du temps effectif de service civique dans le calcul de l'ancienneté exigée pour accéder à ceux-ci.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 bis (nouveau)
Valorisation du service civique dans la validation des acquis de l'expérience

Cet article additionnel permet une reconnaissance du service civique dans le cadre de la procédure de validation des acquis de l'expérience.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-13 visant à mieux valoriser le service civique dans la procédure de validation des acquis de l'expérience.

L'article L6412-1-1 du code du travail, relative aux activités pouvant être prises en compte dans le cadre d'une validation des acquis de l'expérience mentionne les stages, les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel. En revanche, les périodes de service civique ne sont actuellement pas prises en compte.

Cette valorisation du service civique dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience s'inscrit dans une démarche plus large souhaitée par le gouvernement de certification des compétences acquises dans le cadre d'un engagement. Un système de « badges de compétences numériques » porté par la Caisse des dépôts et la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle du ministère du travail est en cours de déploiement. Évoquée depuis plusieurs années, cette démarche a accéléré en 2024 bénéficiant d'un portage politique pour valoriser l'engagement des 45 000 volontaires sollicités dans le cadre des jeux olympiques et paralympiques. La rapporteure appelle à une reconnaissance des compétences acquises par les volontaires du service civique et souhaite que ceux-ci soient éligibles aux « badges de compétences numériques ».

La commission a adopté cet article ainsi rédigé.

Article 4
Recevabilité financière

L'article 4 de la proposition de loi assure la recevabilité financière de la proposition de loi au titre de l'article 40 de la Constitution.

La commission a adopté cet article sans modification.

*

* *

La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN EN COMMISSION

Mercredi 3 avril 2024

_________

M. Laurent Lafon, président. - Mes chers collègues, tout d'abord, nous accueillons parmi nous, Mireille Jouve, qui connait bien notre commission pour y avoir siégé lors de son précédent mandat.

Nous nous réunissons ce matin pour l'examen du rapport de notre collègue Sylvie Robert sur la proposition de loi visant à renforcer le service civique, déposée par le président Patrick Kanner et plusieurs de ses collègues.

Je vous rappelle que l'examen de ce texte est programmé en séance publique mercredi prochain dans le cadre de l'espace réservé au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, après l'examen de la proposition de loi d'abrogation de la réforme des retraites portant l'âge légal de départ à 64 ans.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Depuis sa création, le nombre de volontaires du service civique n'a eu de cesse de progresser. Après une phase d'expansion entre 2010 et 2017, le nombre annuel de missions se stabilise désormais autour de 80 000 par an. Les chiffres pour l'année 2023 ne sont pas encore connus, mais il pourrait s'agir d'une année record avec plus de 88 000 nouveaux engagements. En outre, en prenant en compte le nombre de missions qui débutent, se déroulent ou s'achèvent au cours d'une année civile, près de 150 000 jeunes étaient en service civique à un moment donné en 2023.

Au-delà de ces chiffres, le service civique a trouvé sa place en tant que politique publique en faveur à la fois de la jeunesse et de l'engagement, puisque, en 2021, 84 % des volontaires déclaraient recommander le dispositif et 58 % souhaitaient s'engager bénévolement après leurs missions.

La mission d'information sur le thème « Comment redynamiser la culture citoyenne ? », issue du droit de tirage du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen (RDSE) et présidée par notre collègue Stéphane Piednoir, avait d'ailleurs qualifiée, en 2022, le service civique d'« école de l'engagement citoyen à davantage valoriser ».

Aujourd'hui, des jeunes aux parcours très différents en termes d'âge, de diplôme, de situation ou d'origine sont volontaires chaque année. Cette variété de profils témoigne de la capacité du service civique à remplir sa mission d'accueil de la jeunesse dans sa diversité pour constituer un moment de brassage, de mixité sociale et d'engagement au service des autres.

Je tiens toutefois à attirer l'attention sur un point. Depuis son origine, le service civique est sur une « ligne de crête », selon l'expression de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (Djepva) chargée du suivi de cette politique, entre dispositif de promotion de l'engagement et outil d'insertion sociale et professionnelle.

Soyons vigilants à ne pas rompre cet équilibre qui est l'une des raisons du succès du service civique et de la mixité sociale des jeunes volontaires !

Cette proposition de loi vise à renforcer le service civique. Elle s'inscrit dans une tradition qui dépasse les familles politiques. En effet, le service civique, qui est né d'une initiative sénatoriale sous la présidence de Nicolas Sarkozy, est monté en puissance pendant celle de François Hollande, avant de devenir un élément à part entière du plan « 1 jeune, 1 solution » durant la présidence d'Emmanuel Macron.

Toutefois, actuellement, des obstacles subsistent et entravent son développement.

Deux points me paraissent importants à évoquer, même s'ils ne peuvent pas être abordés par le texte.

Le premier est d'ordre budgétaire : au cours de nos auditions, la Djepva nous a indiqué que l'Agence du service civique connaît 100 millions d'euros d'annulation de crédits dans le contexte budgétaire actuel, soit l'équivalent de 50 000 missions. Si une telle annulation devait se répéter dans les années à venir, c'est la dynamique du service civique qui serait atteinte.

Le deuxième point concerne le lien entre service national universel (SNU) et service civique, qui devait constituer sa troisième phase facultative. Aujourd'hui, nous ne disposons d'aucune information sur le sujet, alors même que l'extension du SNU dès 2026 a été évoquée.

Plusieurs obstacles, à laquelle cette proposition de loi souhaite répondre, ont été identifiés.

Cette forme d'engagement demeure encore trop méconnue des jeunes et reste parfois confondue avec un dispositif d'insertion professionnelle. La proposition de loi tend à renforcer l'information sur le service civique. Je connais la position constante de la commission sur le fameux article L. 312-15 du code de l'éducation relatif à l'enseignement moral et civique. Aussi, je vous soumettrai un amendement visant à supprimer toute modification de cet article.

En revanche, il me semble intéressant de sécuriser le dispositif de césure qui est à la disposition des jeunes, en inscrivant dans la loi le droit à réintégrer la formation dans laquelle ils étaient inscrits avant leur mission. En effet, le service civique intervient le plus souvent lors des études supérieures, puisque l'âge moyen des volontaires est de 21 ans.

Par ailleurs, le montant de l'indemnité constitue parfois un frein pour le jeune en situation précaire. Un premier effort a été fait voilà quelques mois pour porter l'indemnité à 620 euros, soit un montant supérieur au revenu de solidarité active (RSA). La proposition de loi vise à l'aligner sur la rémunération touchée par un jeune en première année d'alternance. Je vous soumettrai un amendement prévoyant un montant identique pour tout volontaire, sans distinction de l'âge, contrairement au contrat d'apprentissage.

Autre point important, le texte ouvre la voie à une aide financière renforcée pour la structure d'accueil en fonction du diplôme, de l'origine ou encore de la situation de handicap du volontaire accueilli. C'est une forme d'encouragement à choisir des jeunes au profil plus atypique. C'est également dans cette optique, selon l'auteur de la proposition de loi, que le texte tend à porter à 30 ans l'âge plafond pour effectuer un service civique.

Si l'augmentation de l'âge limite pour effectuer un service civique répond à des parcours d'études moins linéaires qu'auparavant, avec des interruptions de formation ou des changements de voie, il est important de maintenir cet équilibre entre politique en faveur de l'engagement et outil d'insertion professionnelle - la ligne de crête évoquée précédemment. C'est pourquoi je vous proposerai de porter l'âge limite à 27 ans, soit deux ans de plus que l'âge actuel.

La proposition de loi prévoit de renforcer la formation des jeunes volontaires en portant le nombre de jours de formation de deux à cinq. Ce renforcement de la formation est l'une des recommandations de la mission sénatoriale citée précédemment. Je vous proposerai deux amendements sur ce sujet. Le premier vise à garantir l'effectivité et la qualité de cette formation, qui devra désormais être réalisée par un organisme spécifiquement accrédité. Actuellement, moins de la moitié des jeunes bénéficient effectivement des deux jours de formation prévus par les textes. Un second amendement tendra donc à porter le nombre de jours à trois : s'il me semble important de renforcer la formation, c'est méconnaître la diversité des profils et des parcours de tous les jeunes que d'imposer cinq jours de formation.

Je souscris pleinement à l'objectif de mieux valoriser le service civique. Aussi, je vous soumettrai plusieurs amendements afin de favoriser cette prise en compte dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience (VAE) ou encore des concours de la fonction publique, tout en respectant le principe d'égal accès à l'emploi public. Pour ce qui concerne Parcoursup, il ne semble pas aujourd'hui opportun d'inclure l'engagement de service civique parmi les critères pris en compte dans les filières sélectives. Un amendement visera à supprimer cette disposition.

Enfin, je vous proposerai de prévoir, dans tout contrat de service civique, la possibilité de participer, à la demande du jeune, à une mission de crise ou d'urgence non prévue par sa mission d'origine, par exemple dans le cas d'une catastrophe naturelle. Il s'agit de l'une des recommandations du groupe de travail sectoriel sur les conséquences de l'épidémie de covid-19 sur la jeunesse et la vie associative, présidé par notre ancien collègue Jacques-Bernard Magner.

Lors du premier confinement, l'Agence du service civique avait rencontré des difficultés juridiques pour faire évoluer les contrats des volontaires qui s'étaient inscrits en masse sur la plateforme jeveuxaider.gouv.fr. Or leur mission au sein de leur organisme d'accueil, qui s'était souvent interrompue du fait du confinement, ne le prévoyait pas.

Depuis sa création en 2010, le service civique a montré toute sa pertinence et s'est forgé une place à part entière auprès des jeunes. Ainsi, chaque année, 10 % d'une classe d'âge effectue un service civique. Cette politique publique doit être encouragée et renforcée. Tel est l'objet de cette proposition de loi.

Pour conclure, j'ai déposé plusieurs amendements afin de trouver un équilibre et un compromis pour encourager et renforcer le service civique, ce qui est la philosophie de la proposition de loi déposée par Patrick Kanner. Néanmoins, des blocages et des irritants existaient. Aussi ai-je tenté de trouver un compromis sénatorial qui, je l'espère, vous agréera.

Concernant le périmètre de cette proposition de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que ce périmètre comprend les dispositions relatives au service civique. En revanche, les dispositions relatives au service national universel en seraient exclues.

Il en est ainsi décidé.

M. Cédric Vial. - Le service civique a pris une place importante au sein des politiques publiques en faveur de la jeunesse et a trouvé son public, comme en témoignent les 80 000 nouveaux contrats par an et les quelque 150 000 volontaires financés par le budget de la Nation. Ce dispositif a connu plusieurs évolutions, depuis le volontariat associatif en passant par le service civil, pour aboutir à la version actuelle du service civique. Ses conditions d'accès et sa durée ont été également modifiées. La proposition de loi du président Kanner va dans le sens de son amélioration.

Le service civique est un dispositif d'engagement et non pas d'insertion - nous devons veiller à conserver cette différenciation -, qui doit avoir un intérêt à la fois pour le jeune et pour la Nation. Pour le jeune, celui-ci réside dans l'intérêt de la mission qu'il effectue, dans la formation qui peut lui être dispensée ou encore dans les compétences ou les expériences acquises. Pour la Nation, les missions d'intérêt général proposées aux jeunes servent la collectivité et permettent à ces derniers d'y jouer un rôle, vous l'avez évoqué au travers de l'amendement visant à constituer une sorte de réserve citoyenne d'urgence. Un des objectifs est de favoriser la poursuite de cet engagement grâce à différentes valorisations. Toutefois, il faut distinguer la valorisation liée au simple accomplissement d'un service civique de celle qui est liée aux compétences acquises pendant cette expérience.

Madame la rapporteure, vous nous soumettez plusieurs amendements. Au nom des membres de mon groupe, je souligne que nous nous approchons d'une vision convergente, alors que certaines dispositions initiales nous gênaient. Le service civique doit rester un dispositif d'engagement pour la jeunesse de la Nation et non pas d'insertion.

Nous débattrons peut-être en séance de l'âge limite. Aligner l'âge limite sur celui de l'apprentissage nous semblait poser un problème politique important, puisque des jeunes de plus de 25 ans auraient touché un salaire inférieur ou équivalent au Smic. Vous avez en partie répondu à cette difficulté.

Je remercie Mme la rapporteure de son travail réalisé en un temps particulièrement court. Dans l'attente de savoir si les amendements seront adoptés - ils le seront probablement -la position de notre groupe est celle d'une abstention bienveillante.

Mme Laure Darcos. - Je remercie la rapporteure d'avoir tenté de rapprocher les points de vue.

Il ne faut pas assimiler le service civique au SNU ; aussi ai-je apprécié que ce dernier soit exclu du périmètre.

Pour avoir suivi nombre de cohortes de jeunes effectuant un SNU dans mon département, je peux témoigner qu'il serait intéressant de leur proposer plus facilement un service civique à l'issue de leur SNU - j'en avais discuté avec la déléguée interministérielle de l'époque. À mon sens, cela a été le cas pour les premières cohortes de volontaires SNU. En effet, certains découvrent ce qu'est l'engagement et se retrouvent dépourvus, sans proposition émanant de collectivités ou d'associations. J'ignore comment cela pourrait être mis en place, et cette question n'entre peut-être pas dans le périmètre du texte. Mais s'il fallait opérer une jonction entre le service civique et le SNU, ce devrait être celle-là.

Notre groupe sera favorable à l'adoption du texte.

M. Gérard Lahellec. - Je remercie Mme la rapporteure d'avoir mis en évidence de véritables questions, d'avoir rappelé que le service civique est une école d'engagement citoyen - personne ne peut s'y opposer -, et qu'un équilibre subtil doit exister entre engagement et insertion ainsi que d'avoir pointé l'absence d'information sur le SNU, quant à ses résultats et sa fréquentation.

Dans le même temps, je ne masquerai pas mon sincère embarras. D'une part, le service civique ne satisfait pas toujours l'un des objectifs de sa création : renforcer la mixité sociale dans la société, pourtant principe fondamental du dispositif. Or la communication de la Cour des comptes, La formation à la citoyenneté, souligne la dégradation de la mixité sociale : seuls 12,3 % des volontaires sont des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville, 8,5 % sont boursiers ou bénéficiaires du RSA, alors que 42,5 % sont dotés du niveau baccalauréat.

D'autre part, la convergence entre l'engagement volontaire et l'appropriation des notions d'intérêt général et de citoyenneté demeure fragile.

Enfin, la non-substitution à l'emploi doit demeurer un point de vigilance. Nous prenons acte de vos amendements ayant trait à l'âge.

Toutefois, dans l'état actuel des choses, j'exprime mes plus grandes réserves. Aussi adopterais-je plutôt une position d'abstention.

Mme Mathilde Ollivier. - Je soutiens l'idée de proposer un type d'engagement différent d'un SNU aux sujets d'intérêt et au temps réduits, mis en avant par le Gouvernement.

À l'heure où l'engagement des jeunes est en hausse, comme nous l'avons constaté lors de l'examen de la proposition de loi visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative, les initiatives en faveur de la vitalité de la vie associative et de la mixité dans l'engagement bénévole sont importantes.

Je remercie Mme la rapporteure des échanges que nous avons eus ces derniers jours et à l'occasion des auditions.

Le service civique répond au besoin de lien entre les associations et les citoyens. Néanmoins, des alertes fortes existent sur le risque d'emplois dissimulés qu'il comporte. Vous avez évoqué la ligne de crête sur laquelle se tient le service civique.

La proposition de loi répond à une demande récurrente, l'augmentation de l'indemnité du service civique, sur laquelle la ministre s'était engagée à avancer lors de l'examen du dernier projet de loi de finances. Ainsi, la proposition d'aligner le niveau de rémunération du service civique sur celui des apprentis en première année était une bonne nouvelle et nous la soutenons. Malheureusement, l'amendement de la rapporteure revoit cette proposition à la baisse. L'indemnité passerait donc de 619 à 759 euros, une augmentation certes, mais pas suffisante pour vivre. Nous y reviendrons lors de l'examen de cet amendement.

Au regard de la ligne de crête sur laquelle nous nous trouvons, nous nous interrogeons sur certaines mesures, notamment sur l'âge limite - 30 ans ou 27 ans - et sur l'extension du service civique aux assemblées parlementaires et aux juridictions administratives ou financières. À notre sens, l'objectif est de mettre l'accent sur la qualité du service civique. Aussi, les mesures visant à augmenter le nombre de jours de formation sont positives. Toutefois, nous regrettons la réduction du nombre de jours de formation proposés : cinq jours auraient permis d'échelonner la formation tout au long du service civique et de développer l'accompagnement des jeunes en service civique.

Des mesures de contrôle plus importantes, notamment en ce qui concerne le travail dissimulé, seraient nécessaires.

Notre groupe s'abstiendra en commission et présentera des amendements en séance.

M. Pierre-Antoine Levi. - Le service civique a été créé par une proposition de loi d'Yvon Collin, alors sénateur du Tarn-et-Garonne, déposée en 2009 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, que Martin Hirsch, Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse, a fait adopter. Un des premiers services civiques a été réalisé à Montauban en 2010, j'y étais présent.

Le service civique a fait ses preuves, et il s'agit de le renforcer. Aussi, je salue la proposition de loi du président Kanner.

Plusieurs questions peuvent se poser, notamment sur l'augmentation de l'âge limite.

Permettre l'engagement de volontaires dans une mission de crise ou d'urgence est un point positif. Toutefois, quel mécanisme sera mis en place pour s'assurer que ces missions soient enrichissantes et formatrices pour les jeunes, tout en répondant efficacement aux besoins urgents de la société ?

Vous proposez de revoir l'indemnité des volontaires en prenant pour référence celle des apprentis en première année. Quelle stratégie adopterez-vous pour maintenir l'attractivité du service civique, tout en reconnaissant la valeur de l'engagement des jeunes ? Comment cette mesure influe-t-elle sur la perception du service civique comme un engagement citoyen valorisé et non pas comme un travail sous-payé ?

M. Ahmed Laouedj. - Le service civique permet à chaque jeune qui en bénéficie, quels que soient son parcours, son origine ou son projet professionnel, de contribuer à la société, de tisser des liens avec d'autres générations et de se forger une expérience précieuse pour son avenir. Il s'agit d'un véritable tremplin à l'insertion citoyenne et professionnelle de nos jeunes.

Toutefois, si le service civique a prouvé son efficacité, il est aujourd'hui nécessaire de le renforcer et de lui donner les moyens de ses ambitions afin qu'il soit accessible au plus grand nombre.

Il faut travailler à le rendre plus attractif et inclusif. Tel est l'objet de cette proposition de loi. Le service civique est un outil précieux pour notre société, un levier pour renforcer la cohésion nationale et pour soutenir nos réseaux associatifs et publics.

Cette proposition de loi constitue donc une avancée. Le groupe RDSE est favorable à l'élargissement du dispositif dans le droit fil du rapport d'information d'Henri Cabanel sur la redynamisation de la culture citoyenne : jeunesse et citoyenneté, une culture à réinventer.

M. Stéphane Piednoir. - Je remercie Mme la rapporteure d'avoir cité la mission d'information qui avait pour objet de redynamiser la culture citoyenne, dont le rapport fut remis en 2022. Celle-ci, dotée d'un champ plus large que le seul service civique, était née du désintérêt des jeunes pour les élections et la culture citoyenne. L'idée était de renforcer l'éducation à cette culture et, lors de nos débats, nous avions évoqué la faiblesse de la formation dédiée au fonctionnement de nos institutions dans le cadre du service civique.

Lorsqu'un jeune s'engage seul, il existe des risques concernant l'effectivité de sa mission. Le rapport préconise la présence d'au moins deux jeunes par mission de service civique, et que celle-ci soit vraiment effective.

L'engagement pour le service civique doit rester volontaire, contrairement à celui pour le SNU que l'on annonce obligatoire. À ce titre, l'indemnité versée, à la différence d'une allocation, doit correspondre à un engagement envers la société ; son niveau pourra être discuté en séance.

Enfin, existe-t-il actuellement une évaluation budgétaire du service civique ?

M. Patrick Kanner, auteur de la proposition de loi. - Je me joins aux louanges pour saluer le travail de Mme la rapporteure, effectué dans un véritable souci de concertation. Ce dispositif a été créé sous un gouvernement de droite, valorisé ensuite par un gouvernement de gauche et perpétué par un gouvernement... que je peine à qualifier. Un tel consensus mérite au moins, comme l'a exprimé précédemment Cédric Vial, une abstention bienveillante.

L'objectif est d'aboutir à un processus d'engagement vertueux, permettant aux jeunes de donner à la société, tout en recevant de celle-ci. Il s'agit d'un contrat gagnant-gagnant entre un jeune et une association, une collectivité ou un service public ; actuellement, par exemple, le Parlement ne peut pas recevoir de jeunes dans le cadre du service civique.

Un service civique ne correspond pas à un emploi. Il arrive à certains de confondre les deux, mais une mauvaise interprétation du texte ne doit pas discréditer le dispositif. Il convient de donner à l'agence du service civique et à l'inspection de travail les moyens de mieux contrôler les débordements.

Près de 800 000 jeunes ont effectué un service civique depuis sa création en 2010. Je ne souhaite pas l'opposer au SNU, même si j'émets des réserves à l'égard de ce dernier. En effet, le SNU implique douze jours d'engagement en uniforme, et coûte environ 2 000 euros par jeune, soit 170 euros par jour, un coût important - je ne suis pas certain de l'utilité d'un tel dispositif.

Depuis 2017, le Gouvernement a décidé de valoriser ce dispositif qui concerne à peine 40 000 jeunes par an, pour un budget qui ne cesse d'augmenter. Mme la rapporteure a indiqué que l'on allait retirer 100 millions d'euros au service civique, alors que le SNU exige 100 millions d'euros, avec 20 % d'augmentation dans l'épure budgétaire de 2024. Il est donc légitime de s'interroger sur les équilibres budgétaires et les messages que l'on adresse à la jeunesse.

Mon objectif est d'aboutir à un consensus, et les amendements proposés vont dans ce sens. La ligne de crête est étroite, mais l'esprit du texte est conservé, tout en optimisant son effectivité.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Pour répondre à Stéphane Piednoir au sujet de l'évaluation budgétaire, les amendements prévoient d'abaisser l'augmentation prévue dans le texte initial. Après avoir réduit à trois jours le temps de formation, retiré l'allocation et trouvé un compromis à hauteur de 750 euros pour l'indemnité, une forme de rationalité budgétaire a prévalu, avec un coût supplémentaire estimé à environ 14 millions d'euros.

Avec ces amendements, nous sommes sur une ligne de crête, sans créer de confusion. Les débats, au moment de la création du service civique, évoquaient déjà la possibilité d'un salariat déguisé. Comme l'a rappelé Patrick Kanner, il s'agit bien d'un engagement, avec une indemnité. Ce dispositif de service civique n'existe nulle part ailleurs, et l'on peut s'en enorgueillir.

Enfin, pour répondre à Pierre-Antoine Levi, l'idée est de mobiliser les jeunes dans certaines situations d'urgence, sur des missions ponctuelles, afin qu'ils prêtent main-forte.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Le texte initial fixait le plafond d'âge à 30 ans. Pour toutes les raisons déjà évoquées, l'amendement COM-1 prévoit de l'abaisser à 27 ans, sauf pour les jeunes handicapés.

Mme Mathilde Ollivier. - Une étude du Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Céreq) indique que 22 % des jeunes ont effectué leur mission au cours de leur formation initiale, un tiers au cours des six mois qui suivent la fin de leurs études, et 45 % après leur formation. Plus le niveau de diplôme est élevé, plus le service civique intervient tôt dans le parcours de vie. L'augmentation de l'âge pour favoriser l'accès au service civique ne constitue pas un sujet, sachant que l'âge moyen d'un jeune volontaire est de 21 ans.

Nous sommes défavorables à une extension du plafond d'âge à 30 ans ou même 27 ans ; nous préférons le seuil actuel fixé à 25 ans.

M. Cédric Vial. - Une fois n'est pas coutume, je partage l'avis de Mathilde Ollivier. Il ne s'agit pas de la mesure la plus forte de cette proposition de loi, l'âge des jeunes concernés par le service civique se situant autour de 20 ans. Il existe, pour schématiser, trois publics : les étudiants qui ont décroché, en recherche de sens ou d'activité ; les étudiants en situation de césure ; et de nombreux étudiants ayant fait un mauvais choix d'orientation qui, avant de s'engager dans une nouvelle voie, effectue un service civique afin de donner un sens à leur année. Tous ces jeunes sont au début de leur engagement dans la vie active ; quand ils dépassent les 25 ans, leur attente est moins forte.

Notre position est favorable à cet amendement, même si, lors des débats en séance publique, il conviendra de s'interroger sur la nécessité de déplacer ce seuil de 25 à 27 ans.

M. Patrick Kanner. - J'ai été convaincu par les arguments de notre rapporteure. Pour mes collègues qui douteraient de la nécessité d'augmenter ce seuil de 25 à 27 ans, il s'agit d'offrir à des jeunes une opportunité supplémentaire. Par ailleurs, je rappelle que l'on peut demander le RSA à partir de 25 ans ; le service civique peut s'avérer une alternative positive, avec une indemnisation supérieure.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'argument de l'alternative au RSA est important. Au-delà d'une meilleure rémunération, le service civique s'inscrit dans un parcours d'engagement qui peut ouvrir d'autres portes aux jeunes.

L'amendement COM-1 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-2 permet à des personnes accueillies en France au titre de la protection temporaire de postuler au dispositif de service civique.

L'amendement COM-2 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-3 donne la possibilité à un jeune volontaire de participer à des missions d'urgence en dehors de celles qui sont prévues par son contrat.

L'amendement COM-3 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-15 prévoit de renforcer la formation citoyenne. Actuellement, 75 % des jeunes ne suivent pas les deux jours de formation prévus et, parmi eux, la moitié ne fait qu'un seul jour. Je propose de porter ce temps de formation à trois jours - peut-être à des moments différents, au début, au milieu et à la fin de la mission -, plutôt que cinq jours comme cela était prévu dans le texte initial. Le compromis proposé tient compte également de la situation budgétaire.

M. Cédric Vial. - Pour assurer cette formation, l'agent du service civique rémunère l'association qui accueille le jeune. Le montant s'élève à 100 euros par jour de formation et par jeune.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Le montant de 100 euros concerne les deux jours de formation.

M. Cédric Vial. - Au total, pour les deux jours de formation, cela représente un montant de 14,4 millions d'euros. Le coût de la journée supplémentaire se situe donc entre 7 et 8 millions d'euros, soit un effort budgétaire par rapport à l'ambition initiale qui prévoyait une formation de cinq jours.

L'idée de passer à trois jours me semble cohérente, mais il convient de réaliser un travail d'accompagnement des structures afin de veiller à ce que cette formation soit bien réalisée et selon des standards définis au niveau national. Nous voterons cet amendement.

Mme Mathilde Ollivier. - Nous étions favorables à la proposition du texte initial qui prévoyait cinq jours de formation. Ce temps en dehors de l'organisme où les jeunes effectuent leur service civique permettrait d'avoir des moments de pause, d'alerte ou de précision des missions. La question du contrôle de la formation relève d'un autre débat. Nous voterons contre cet amendement.

L'amendement COM-15 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-4 concerne l'augmentation de l'indemnité perçue par les volontaires du service civique.

Dans le texte initial, il était prévu d'indexer cette indemnité sur celle qui est perçue en première année du contrat d'apprentissage ; je préfère l'indexer sur la rémunération versée aux apprentis dont l'âge est compris entre 18 et 20 ans, dans la cadre de la première année d'apprentissage. Pour rappel, celle-ci est aujourd'hui fixée à 751 euros.

Je vais dans le sens de la proposition de loi en augmentant l'indemnité qui passe ainsi de 620 à 751 euros. Mais il convient d'éviter une possible confusion sur le statut du jeune volontaire, entre apprenti et service civique. Je ne souhaite pas non plus une disparité d'indemnités en fonction de l'âge, comme c'est le cas actuellement pour le contrat d'apprentissage.

Par ailleurs, l'indexation s'établira à partir non plus du point d'indice de la fonction publique, mais du Smic, ce qui va constituer un avantage non négligeable.

M. Laurent Lafon, président. - Le chiffre budgétaire évoqué précédemment tenait-il compte de l'augmentation de cette indemnité ?

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Oui.

M. Cédric Vial. - J'ai un doute sur le montage financier. Environ 88 000 jeunes bénéficient de cette indemnité. L'augmentation s'élevant à 140 euros par mois, la facture s'établit à 150 ou 160 millions d'euros annuels.

M. Laurent Lafon, président. - J'arrivais également à ce montant.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Vous avez raison ! Mon calcul était une estimation par mois de service civique.

M. Cédric Vial. -Sur le principe, on peut être favorable à une augmentation de l'indemnité du service civique. Il reste à préciser les parts respectives de l'État et de la structure d'accueil, qui s'élèvent actuellement à environ 500 euros pour le premier et 115 euros pour la seconde ; cette règle de répartition est-elle maintenue ?

Le risque, à budget constant, est que cette augmentation de 15 à 20 % de l'indemnité conduise à une diminution de 15 à 20 % du nombre de contrats ; ce serait contraire à l'objectif recherché, d'autant que la demande actuelle est forte. Il conviendra de demander au Gouvernement de préciser sa position sur le sujet ; au regard du gel des crédits déjà effectué sur le dispositif - de l'ordre de 100 millions d'euros -, je crains la réponse.

Nous préférons l'approche de Mme la rapporteure fixant une augmentation de 140 euros à l'approche initiale prévoyant un alignement sur le montant des contrats en alternance, qui variait en fonction de l'âge du jeune volontaire pour atteindre, au-delà de 25 ans, le niveau du Smic.

Nous sommes favorables à cet amendement, sous réserve des précisions apportées par le Gouvernement.

Mme Mathilde Ollivier. - Nous étions favorables à la proposition permettant d'aligner l'indemnité sur le niveau de rémunération de l'apprentissage. Une indemnité de 751 euros par mois, si l'on étend l'âge du service civique à 27 ou 30 ans, reste faible pour des jeunes de plus de 25 ans.

Deux types de public sont concernés par le service civique : les jeunes les plus diplômés qui s'engagent, en général, après une période d'emploi ou d'études ; et les jeunes moins diplômés, qui s'engagent notamment après une période de chômage. Lorsqu'ils sont interrogés sur les raisons de leur engagement, les premiers mentionnent le goût de l'intérêt général, tandis que les seconds évoquent une opportunité professionnelle et une source de revenus.

Les plus vulnérables seront défavorisés par l'évolution proposée. En conséquence, nous nous opposons à cet amendement et sommes favorables à la proposition du texte initial qui permettait une véritable revalorisation de l'indemnité.

M. Patrick Kanner. - Dans un souci de compromis, je me rallie à la position de la rapporteure, et notre groupe votera cet amendement.

Nous sommes des parlementaires et, en principe, selon l'article 34, nous votons le budget de ce pays. J'entends déjà les réserves de la ministre, le 10 avril prochain, concernant le défaut de budget ; en retirant, sans même nous consulter, 100 millions d'euros au service civique, j'ai bien compris la position du Gouvernement. Pour avoir assisté à la réunion lunaire organisée à Bercy le 28 mars dernier, un problème démocratique se pose dans notre pays, concernant les moyens nécessaires à la mise en place des politiques publiques.

Au regard des 3 000 milliards de dettes, un consensus me semble envisageable dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, afin de renforcer et rendre plus attrayant notre service civique. Le coût de 150 millions d'euros n'est pas négligeable, mais il sera utile pour les jeunes de notre pays.

M. Max Brisson. - Il me semble important d'avoir un débat en séance sur ce point pour connaître les intentions du gouvernement. La proposition que nous approuvons sur le principe va-t-elle se traduire par une forte réduction du nombre de contrats ?

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Je suis sûre que nous aurons ce débat en séance. Pour répondre à Mathilde Ollivier, ma proposition augmente substantiellement l'indemnité pour les mineurs, celle-ci passant de 470 à 751 euros.

L'amendement COM-4 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - À la fin de son service civique, le jeune volontaire bénéficie d'une ouverture de droits au titre du compte d'engagement citoyen ; celle-ci entraîne un versement de 240 euros. Le texte initial proposait, en outre, de verser une allocation sur projet. Dans le contexte budgétaire actuel, il est à craindre que les 240 euros versés au titre du compte d'engagement citoyen ne servent à payer cette allocation ; les jeunes y perdraient. L'amendement COM-5 prévoit donc de supprimer l'allocation de fin de contrat et de préserver le compte d'engagement citoyen.

L'amendement COM-5 est adopté.

L'amendement rédactionnel COM-14 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-6 permet aux anciens volontaires du service civique d'utiliser les droits acquis au titre de leur engagement afin de payer les droits d'inscription de leur formation initiale. Cela permet d'étendre l'utilisation du contrat d'engagement citoyen au paiement des frais d'inscription des études supérieures.

L'amendement COM-6 est adopté et devient article additionnel.

Article 2

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-7 vise à étendre les dispositifs proposés au jeune à la fin de son service civique. Cela inclut les accompagnements et les dispositifs d'insertion sociale et professionnelle parmi les dispositifs proposés au jeune, même majeur, en fin de contrat de service civique. L'amendement s'aligne sur les formations proposées à un jeune de 16 à 18 ans au titre de l'obligation de formation prévue par la loi.

L'amendement COM-7 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-8 concerne le contenu du programme d'enseignement moral et civique (EMC). Conformément à la règle de notre commission, il ne revient pas au législateur de définir les contenus des programmes scolaires ; je supprime donc la disposition.

M. Max Brisson. - En lisant le texte de la proposition de loi, je n'ai pas compris en quoi l'alinéa modifiait le programme.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Il s'agit, avant tout, d'une question de principe. Par ailleurs, le service civique est mentionné dans le programme d'EMC. La proposition de loi vise en plus à y inclure une information sur la possibilité d'une année de césure après le baccalauréat pour réaliser un service civique. L'amendement supprime cet ajout sur la césure dans les programmes d'EMC.

M. Max Brisson. - L'alinéa 3 ne concerne pas les programmes scolaires.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'article L. 312-15 concerne le contenu du programme d'EMC. Toutes les dispositions de cet article doivent ensuite être prises en compte dans le contenu des programmes.

M. Laurent Lafon, président. - Si l'on veut aller au bout de la logique, il faudrait revoir l'article L. 312-15 afin de supprimer toutes les références au service civique.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Cela irait à l'encontre de l'objectif de ce texte qui est de valoriser le service civique. Mon amendement vise à maintenir le droit en vigueur et éviter que le législateur étoffe à nouveau le contenu de l'article L. 312-5 du code de l'éducation.

M. Patrick Kanner. - L'idée n'est pas de supprimer l'esprit de l'alinéa 3, mais de l'intégrer par voie réglementaire.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - À ce stade, cela relève de la compétence du législateur.

L'amendement COM-8 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-9 tend à sécuriser le droit à la réintégration dans son cursus de formation pour tout étudiant effectuant une césure.

L'amendement COM-9 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - En miroir de la possibilité dont disposent les établissements d'enseignement supérieur de prendre en compte les dispositifs des « cordées de la réussite », l'amendement COM-10 vise à transformer l'obligation de prise en compte du service civique en possibilité pour les formations non sélectives.

L'amendement COM-10 est adopté.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-11 a pour objet de supprimer la prise en compte du service civique dans les critères de sélection pour les filières sélectives dans Parcoursup.

L'amendement COM-11 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-12 concerne la prise en compte du service civique dans les concours de la fonction publique. Au regard du principe constitutionnel d'égal accès à l'emploi public, la rédaction actuelle de cet article pour le concours externe pose question. Mon amendement ouvre la possibilité aux statuts particuliers et cadres d'emplois de prévoir une dérogation aux conditions de diplômes et de titres pour les anciens volontaires du service civique. Un tel système existe déjà pour les parents d'au moins trois enfants ou pour les sportifs de haut niveau. Je tiens à souligner que le concours passé est naturellement le même.

Concernant le troisième concours, le texte actuel conduit à une différence importante entre le service civique et les autres expériences professionnelles ou politiques ; celles-ci, bien que pouvant varier pour les concours, sont souvent de quatre ans, voire de six ans, contre huit mois, en moyenne, pour le service civique.

Mon amendement supprime la création d'une voie spécifique pour le service civique, mais il inclut la durée de celui-ci dans le calcul de l'expérience professionnelle, politique ou bénévole demandée. En cela, le service civique est traité de la même façon que les contrats d'apprentissage ou de professionnalisation. Ce mécanisme est déjà utilisé dans le cadre du concours interne : la durée du service civique est intégrée au calcul de l'ancienneté nécessaire pour se présenter à ce concours.

Il s'agit, avec cet amendement, d'inclure l'engagement du jeune volontaire dans les voies s'accès au concours de la fonction publique.

M. Cédric Vial. - Cet amendement pose question. Même s'il va dans le bon sens, le simple fait de s'engager pour un service civique ne peut justifier l'acquisition de compétences. Dans le cadre d'un concours de la fonction publique ou d'examens pour une filière sélective, cela pose des problèmes si cet engagement constitue un avantage. À titre personnel, je m'abstiendrai.

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Pour rappel, le concours reste le même.

L'amendement COM-12 est adopté.

L'article 3 est ainsi rédigé.

Après l'article 3

Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-13 permet de prendre en compte le service civique dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience, et s'inscrit dans la démarche des badges de compétences numériques, mise en place pour les jeux Olympiques. Encore une fois, il s'agit ici de valoriser l'engagement.

L'amendement COM-13 est adopté et devient article additionnel.

M. Max Brisson. - Nous entendons respecter le travail effectué, et nous souhaitons que le débat se tienne dans l'hémicycle. Nous avons l'intention d'accompagner ce texte qui va dans le bon sens, concernant un dispositif dont nous avons loué l'efficience, tout en regrettant qu'il soit insuffisamment déployé. Nous allons aujourd'hui nous abstenir, avec la volonté que ce texte puisse aboutir.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er

S. ROBERT,
rapporteure

1

Abaissement du plafond d'âge à 27 ans

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

2

Élargissement du service civique aux personnes accueillies en France au titre de la protection temporaire

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

3

Possibilité sur demande du jeune de participer à des missions de crise ou d'urgence non prévues dans sa mission d'origine

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

15

Renforcement de la formation citoyenne

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

4

Montant de l'indemnité perçue par les volontaires du service civique

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

5

Suppression de l'allocation de fin de contrat 

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

14

Amendement rédactionnel

Adopté

Article additionnel après Article 1er

S. ROBERT,
rapporteure

6

Extension de l'utilisation du compte d'engagement citoyen pour les volontaires du service civique au paiement des frais d'inscription pour les études supérieures

Adopté

Article 2

S. ROBERT,
rapporteure

7

Extension des dispositifs proposés au jeune à la fin de son service civique

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

8

Contenu du programme d'EMC

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

9

Droit à la réintégration dans la formation suivie avant la césure

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

10

Possibilité pour les établissements d'enseignement supérieur de prendre en compte un engagement de service civique

Adopté

S. ROBERT,
rapporteure

11

Suppression de l'obligation de prendre en compte un engagement de service civique pour les filières sélectives de l'enseignement supérieur

Adopté

Article 3

S. ROBERT,
Rapporteure

12

Prise en compte du service civique dans les concours de la fonction publique

Adopté

Article additionnel après Article 3

S. ROBERT,
Rapporteure

13

Valorisation du service civique dans le cadre de la validation d'acquis d'expérience 

Adopté

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mercredi 20 mars 2024

Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP) : MM. Augustin VICARD, directeur, et Thomas VENET, chargé d'études.

Lundi 25 mars 2024

- Agence du service civique : Mme Nadia BELLAOUI, présidente.

- Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse - Direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative : M. Yves BOERO, adjoint au directeur, Mme Delphine SOULT, adjointe du bureau du développement de la vie associative, M. Charles-Aymeric CAFFIN, chef du bureau du développement de la vie associative.

Mercredi 27 mars 2024

Unis-Cité : Mme Marie TRELLU-KANE, présidente fondatrice.

Proposition de loi n° 600 (2022-2023)
visant à renforcer le service civique

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie »12(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie13(*).

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte14(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial15(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 3 avril 2024, le périmètre indicatif de la proposition de loi.

Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions relatives au service civique.

En revanche, la commission a estimé que n'entraient pas dans ce périmètre les dispositions relatives au service national universel.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl22-600.html


* 1 Jeunesse et citoyenneté, une culture à réinventer, rapport n° 648, M. Henri Cabanel, rapporteur, M. Stéphane Piednoir, président, 2021-2022.

* 2 Culture, éducation, recherche, sport et communication : penser l'avenir malgré la crise sanitaire, rapport n° 667 de Mme Catherine Morin-Desailly, 2019-2020.

* 3 Les volontaires peuvent également percevoir des prestations nécessaires à leur subsistance, leur équipement, leur transport et leur logement (article L120-19 du code du service national) qui peut être en nature (chèque restaurant) ou espèces.

* 4 Associations loi 1901 ou de droit local, union et fédérations d'association, mutuelles, syndicats, fondations reconnues d'utilité publique, fonds de dotation, établissements de santé privés d'intérêt collectif, ...

En revanche lorsque l'organisme d'accueil est une personne morale de droit public, il n'est pas éligible à cette aide. C'est le cas des collectivités territoriales et des établissements publics de toute nature : EPIC, chambres consulaires, établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, collèges et lycées (EPLE),...

* 5 Jeunesse et citoyenneté, une culture à réinventer, rapport n° 648, M. Henri Cabanel, rapporteur, M. Stéphane Piednoir, président, 2021-2022 ; préconisation du Conseil national de la refondation « Jeunesse ».

* 6 Culture, éducation, recherche, sport et communication : penser l'avenir malgré la crise sanitaire, rapport n° 667 de Mme Catherine Morin-Desailly, 2019-2020.

* 7 Un apprenti en première année âgé de 21 à 25 ans perçoit une rémunération égale à 53 % du SMIC (soit 926 euros). Cette rémunération est égale à 100 % du SMIC pour un apprenti en première année de 26 ans et plus.

* 8 Proposition de loi sur le service civique de M. Yvon Collin et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, n° 612, 2008-2009.

* 9 Service civique : des variations départementales liées au chômage des jeunes, INJEP, note n° 74, février 2024.

* 10 Cf. notamment rapport n° 101 de M. Bernard Fialaire sur la proposition de loi tendant à renforcer la culture citoyenne, 2023-2024.

* 11 Il peut également prendre la forme d'un volontariat associatif d'une durée de 6 à 24 mois.

* 12 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 13 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 14 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 15 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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