EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 68 (nouveau)

Prolongation de trois ans de l'expérimentation
relative aux entreprises d'insertion par le travail indépendant

Le présent article prolonge de trois années l'expérimentation, prévue par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018, de l'extension de l'insertion par l'activité économique (IAE) au travail indépendant via les entreprises d'insertion par le travail indépendant (EITI).

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : L'EXPÉRIMENTATION DES ENTREPRISES D'INSERTION PAR LE TRAVAIL INDÉPENDANT (EITI) ARRIVE À ÉCHÉANCE LE 23 DÉCEMBRE 2023

A. LES STRUCTURES D'INSERTION PAR L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE RECOUVRENT, DEPUIS 2018, LES ENTREPRISES D'INSERTION PAR LE TRAVAIL INDÉPENDANT (EITI)

L'article 83 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a prévu l'expérimentation d'une nouvelle forme de structure d'insertion par l'activité économique (SIAE) : les entreprises d'insertion par le travail indépendant (EITI).

Aux termes de cette loi, ces EITI réalisent un service de mise en relation avec des clients et d'accompagnement des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, en vue de l'exercice d'une activité professionnelle indépendante. Il est prévu qu'un rapport d'évaluation de l'expérimentation soit remis au Parlement au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation.

L'expérimentation était prévue pour une durée de 3 ans à compter de la publication du décret d'application de cet article, soit jusqu'au 23 décembre 202138(*).

B. UNE EXPÉRIMENTATION DÉJÀ PROLONGÉE DANS LA LOI DE FINANCES POUR 2022

Le dispositif d'insertion par l'activité économique par le biais des EITI a déjà fait l'objet d'une prorogation, décidée dans la loi de finances pour 2022. À cette date, il avait été relevé que le rapport d'évaluation qui aurait dû être transmis au Parlement ne l'avait pas été, de sorte qu'il était difficile pour les rapporteurs spéciaux de se prononcer sur le dispositif de façon éclairée.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICABLE DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : UNE EXPÉRIMENTATION PROLONGUÉE POUR TROIS ANNÉES SUPPLÉMENTAIRES

Le présent article retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement de M. Didier Le Gac, du groupe Renaissance, et plusieurs de ses collègues39(*).

Il propose de prolonger de trois ans l'expérimentation, soit jusqu'au 23 décembre 2026.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : L'APPROBATION DE LA PROLONGATION RECOMMANDÉE

D'après les informations transmises aux rapporteurs spéciaux, les secteurs d'activité couverts par les EITI sont variés et peuvent viser, par exemple, du ménage, du bricolage ou encore de l'informatique. Les publics relevant de l'insertion bénéficient d'un accompagnement social et professionnel : accompagnement à la création de leur microentreprise puis à sa gestion ou accompagnement socio-professionnel pour lever les freins sociaux périphériques. Cet accompagnement des travailleurs indépendants, qui peuvent être des créateurs d'entreprise en difficulté (bénéficiaire du revenu de solidarité active, demandeurs d'emploi, personnes isolées, migrants) peut également se traduire par l'octroi de prêts d'honneur et l'offre d'un panel de services de mise en relation avec des clients, pour développer le chiffre d'affaires.

Selon les documents budgétaires, en 2024, les EITI compteraient 1 899 bénéficiaires. Avec un montant forfaitaire de l'aide au poste de 6 517 euros par bénéficiaire et par an, le montant budgété dans le projet de loi de finances pour 2024 serait d'un peu moins de 13 millions d'euros. Ce montant est en augmentation par rapport au montant prévu pour 2023, qui s'établissait à 7,9 millions d'euros. La hausse des crédits budgétés résulte exclusivement d'un effet volume, tiré par l'augmentation du nombre de bénéficiaires (710 bénéficiaires supplémentaires étant attendus en 2024 par rapport à 2023).

Le Gouvernement indique qu'un rapport de l'inspection générale des affaires sociales qui lui a été remis en 2023 recommande la prolongation de l'expérimentation.

Les rapporteurs spéciaux sont partagés quant à la prolongation proposée. Le rapporteur spécial Emmanuel Capus considère en effet que le statut de travailleur indépendant présente des atouts auprès de publics pour lesquels l'intégration par le travail salariés ne serait pas approprié.

La rapporteure spéciale Ghislaine Senée considère que les EITI sont source d'une précarité accrue pour les personnes concernées. Elle relève que ces EITI présentent un caractère dérogatoire par rapport au secteur de l'insertion par l'activité économique, qui doit en principe permettre de bénéficier d'un contrat de travail salarié. Le salariat est en effet plus protecteur que le travail indépendant : il apporte une garantie de revenus, permet un meilleur accompagnement et protège le salarié au titre du chômage et de la maladie - toutes choses que ne permet pas nécessairement le travail indépendant. Le modèle des EITI contribue donc à fragiliser le salariat et le reste du secteur de l'insertion par l'activité économique.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 69 (nouveau)

Prolongation de deux ans de l'expérimentation
relative aux « contrats passerelles »

Le présent article prolonge de deux années l'expérimentation des contrats dits « passerelles », prévue dans la loi, relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique (IAE).

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : L'EXPÉRIMENTATION DES « CONTRATS PASSERELLE » ARRIVE À ÉCHÉANCE LE 15 DÉCEMBRE 2023

L'article 5 de la loi n° 2020-1577 du 14 décembre 2020 relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique a prévu l'expérimentation visant à faciliter le recrutement par les entreprises de droit commun de salariés engagés dans un parcours d'insertion par l'activité économique, dite « contrats passerelles ».

Aux termes de cette loi, un salarié engagé dans un tel parcours dans un atelier et chantier d'insertion (ACI) ou dans une entreprise d'insertion (EI) depuis plus de quatre mois peut être mis à disposition d'une entreprise de droit commun pour une durée de trois mois non-renouvelable.

Si le salarié est embauché dans l'entreprise utilisatrice à l'issue de sa période de mise à disposition, dans un emploi correspondant aux activités qui lui avaient été confiées, il est dispensé de période d'essai.

Il est prévu qu'un rapport d'évaluation de l'expérimentation soit remis au Parlement au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation.

L'expérimentation était prévue pour une durée de 3 ans à compter de la publication de cette loi, soit jusqu'au 15 décembre 202340(*).

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : UNE EXPÉRIMENTATION PROLONGÉE POUR DEUX ANNÉES SUPPLÉMENTAIRES

Le présent article retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, reprend un amendement de M. Stéphane Viry, du groupe Les Républicains41(*).

Il propose de prolonger de deux ans l'expérimentation, soit jusqu'au 15 décembre 2025.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : PROLONGER POUR MIEUX ÉVALUER

Dans l'exposé des motifs de son amendement retenu à l'Assemblée nationale, son auteur fait valoir que « les structures de l'insertion par l'activité économique se sont encore peu saisies » des contrats passerelles. Effectivement, aucun contrat passerelle n'avait été signé en 2021 du fait de la publication tardive des textes d'application. En 2022, selon le Gouvernement, « seulement 35 demandes ont été validées sur 50. En 2023, 23 dossiers ont été déposés à date et 13 acceptés. »

De fait, le projet annuel de performances de la mission « Travail et emploi » pour l'année 2024 fait apparaître des sommes très faibles pour l'année à venir : 18 855 euros pour les contrats passerelles en ACI, et seulement 4 714 euros pour les contrats passerelles en EI. Dans ces conditions, on comprend sans peine que le rapport d'évaluation prévu n'ait pas été remis au Parlement.

Faute de pouvoir tirer des conclusions de cette expérimentation, les rapporteurs spéciaux estiment préférable de la reconduire. Ils soulignent néanmoins qu'elle devra, d'ici deux ans, avoir trouvé son public.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.


* 38 Décret n° 2018-1198 du 20 décembre 2018 relatif à l'expérimentation de l'élargissement des formes d'insertion par l'activité économique au travail indépendant.

* 39 Amendement n°  II-4050, couvert par l'amendement n°  II-1969 du Gouvernement.

* 40 La loi du 14 décembre 2020 a été publiée au Journal officiel le 15 décembre 2020.

* 41 Amendement n°  II-4364, couvert par l'amendement n°  II-1954 du Gouvernement.

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