DEUXIÈME PARTIE
LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS
DE LA MISSION « SANTÉ »

I. DES ÉVOLUTIONS MARGINALES SUR LE PROGRAMME « PRÉVENTION, SÉCURITÉ SANITAIRE ET OFFRE DE SOINS »

Les dotations inscrites en loi de finances initiale n'ont donné qu'une vision très partielle des actions financées par le programme 204 au cours de ces trois dernières années, puisque celui-ci a bénéficié en cours d'exercice de crédits de fonds de concours très importants pour la gestion de la crise sanitaire. Cette caractéristique devrait toutefois s'atténuer en 2024.

Ce programme est doté de 220 millions d'euros en AE (+ 3,43 %) et de 223,3 millions d'euros en CP (+ 3,37 %) pour 2024. Plus de la moitié des crédits se concentrent sur quatre actions :

- la subvention à l'Agence de santé des îles Wallis-et-Futuna (49,6 millions d'euros) ;

- les actions juridiques contentieuses (41,6 millions d'euros), incluant la subvention de l'État à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux et des infections iatrogènes (Oniam) ;

- une subvention à l'Institut national du cancer (34,5 millions d'euros) ;

- une subvention à l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Ansés) (25 millions d'euros).

Selon les prévisions pluriannuelles, le programme 204 connaîtrait une légère progression de ses crédits en 2025 (+ 1,23 % en AE), mais devrait subir une baisse de ses dotations en 2026 (- 3,14 % en AE).

A. LES ACTIONS DE SANTÉ PUBLIQUE ET DE SÉCURITÉ SANITAIRE

Beaucoup d'actions financées par ce programme sont extrêmement dispersées, pour des montants généralement faibles, si bien qu'elles paraissent loin de disposer d'une « masse critique » suffisante pour prétendre produire un réel impact sur la réalisation des objectifs de santé publique poursuivis. Le projet annuel de performances énumère à ce titre de nombreuses contributions budgétaires à des plans nationaux ou feuilles de route8(*) dans des domaines qui ont été très largement délégués à des opérateurs aujourd'hui surtout financés par l'assurance maladie.

1. Les subventions aux opérateurs diminuent, du fait d'une baisse de la dotation à l'Institut national du Cancer

Les subventions aux opérateurs représentent à elles seules un peu plus du quart (27 %) des crédits du programme 204. Cette part est en baisse par rapport à 2023 (38 %).

Le projet de loi de finances prévoit en particulier une diminution de 6 millions d'euros (- 14,8 %) de la subvention destinée à l'Institut national du cancer (INCa) dont le plafond d'emplois (131 ETPT) reste stable. Cette subvention est principalement destinée à financer le fonctionnement de l'opérateur - ses dépenses d'intervention étant financées par une autre dotation provenant de la mission « Recherche » pour un montant de 76,4 millions d'euros.

Selon la direction générale de la santé, la diminution de la subvention à l'INCa budgétée sur la mission « Santé » tient à la situation financière très favorable de cet opérateur, qui aurait accumulé 56 millions d'euros en fonds de roulement fin 2022, pour seulement 38 millions de dépenses de fonctionnement.

La lecture du « jaune » budgétaire relatif aux opérateurs de l'État9(*) laisse cependant voir que l'INCa a enregistré un résultat net négatif en 2023, et en déficit de 25,1 millions d'euros, qui conduit à une diminution de 20,3 millions d'euros de son fonds de roulement. De plus, les charges de personnel et de fonctionnement de l'opérateur s'élèvent à 40,2 millions d'euros, un niveau supérieur à sa subvention du programme 204. Enfin, l'INCa a engagé d'importantes dépenses d'intervention en 2023 (158,3 millions d'euros), qui seront décaissées lors d'exercices ultérieurs.

La situation financière de l'INCa constitue donc un point de vigilance pour le rapporteur spécial : s'il est normal et même souhaitable de ne pas subventionner excessivement un opérateur qui bénéficie d'un fonds de roulement confortable, il convient également de lui permettre de mener à bien ses missions. Si à l'avenir un niveau d'excédents trop important était constaté, le rapporteur soutiendrait une diminution de sa subvention ; dans l'hypothèse inverse, il recommanderait a minima de la maintenir à un niveau inchangé.

La subvention à l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS) imputée sur la mission « Santé » est augmentée de 2 millions d'euros et atteindra 25 millions d'euros en 2024. Cette hausse a notamment vocation à tenir compte des nouvelles missions qui lui ont été confiées en matière de qualité de l'air et de cosmétique.

2. L'extinction probable du fonds de concours « Santé publique France »

Le fonds de concours « Participations diverses aux politiques de prévention, de sécurité sanitaire et d'offre de soins », créé en mars 2020, rattaché au programme 204 et alimenté par Santé publique France, a financé des actions pour des montants dépassant très largement les crédits budgétaires initiaux du programme 204. En crédits de paiement, 622 millions d'euros ont été consommés au titre du fonds de concours en 2020 puis 284,4 millions d'euros en 2021 et 159,4 millions d'euros en 2022, soit un total de 1 065,8 millions d'euros sur trois ans.

Durant ces trois années, le fonds de concours a principalement financé l'achat de matériel médical (masques, tests, respirateurs...), mais aussi des dépenses de transport (transport de matériels et évacuations sanitaires), des commandes de vaccins, des systèmes d'information (Sidep, « TousAntiCovid », plates-formes de rendez-vous vaccinaux), ou la mise en place de numéros verts dédiés.

Comme indiqué précédemment, dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire 202210(*), la Cour des comptes a recommandé la mise en extinction du fonds de concours. L'évolution intervenue depuis 2020 dans l'usage du fonds de concours a montré que certaines actions relevaient davantage de l'État que d'un opérateur financé par l'assurance maladie. Au vu de cette expérience et alors que les impératifs d'urgence ne peuvent plus être évoqués, une clarification et une stabilisation de la répartition des missions entre l'État et Santé publique France méritent désormais d'être opérées.

Selon le « jaune » budgétaire relatif aux fonds de concours11(*), l'exercice 2023 connaîtrait un abondement de 41,2 millions d'euros au titre du fonds de concours de Santé publique France. Entendue par le rapporteur spécial, la direction générale de la santé a confirmé que seuls des restes à payer subsisteraient en 2024, aucun versement du fonds de concours n'étant prévu pour cette année. Le rapporteur spécial se félicite de cette clarification, attendue par le Sénat et la Cour des comptes depuis plusieurs années.

La nouveauté de l'exercice 2023 consiste en l'attribution de 118,9 millions d'euros au titre du nouveau fonds de concours « Participation de l'Union européenne à la constitution d'un stock de produits médicaux et non médicaux en cas d'événement nucléaire, radiologique, biologique ou chimique ». Aucun versement n'est prévu en 2024.


* 8 Nutrition et santé, santé environnement, santé mentale et psychiatrie, maladie d'Alzheimer...

* 9 Annexe au projet de loi de finances pour 2024, « Opérateurs de l'État ».

* 10 Cour des comptes, mission « Santé », Note d'exécution budgétaire sur l'exercice 2022.

* 11 Annexe au projet de loi de finances pour 2024, « État récapitulatif des crédits des fonds de concours et attributions de produits ».

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