II. L'IGN : UN NOUVEAU MODÈLE DÉJÀ EN SURSIS
Établissement public administratif placé sous la double tutelle des ministres chargés de l'écologie et des forêts, le nouvel Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) est issu de la fusion entre l'Institut géographique national et l'Inventaire forestier national (IFN) intervenue le 1er janvier 201212(*).
Les missions de l'IGN se partagent entre ses tâches dites « traditionnelles » et des activités émergentes. La collecte et la production de données géolocalisées souveraines dites « socles »13(*) constituent ainsi le coeur de ses missions de service public. Par ailleurs, l'IGN conçoit et met à jour différents référentiels géographiques publics14(*). Il a aussi en charge la réalisation de l'inventaire forestier.
Au-delà de ces activités « traditionnelles », l'IGN se tourne de plus en plus vers des missions nouvelles telles que des activités d'expertise et de conseil, d'assistance à maîtrise d'ouvrage, d'agrégation de données produites par d'autres acteurs ou de diffusion et de valorisation de l'information géographique publique. L'IGN est aussi amené à devenir le pilote de l'écosystème de la donnée géolocalisée.
Dans son rapport d'information publié au mois de novembre 2022 et intitulé « acteur de référence de la donnée géolocalisée souveraine, l'IGN avance sur un chemin à baliser »15(*), le rapporteur spécial a analysé les enjeux du renouvellement en cours du modèle économique de l'établissement. Mis sous tension par les bouleversements du paysage de la donnée géolocalisée, concurrencé par l'émergence d'acteurs publics comme privés, affecté par l'essor des démarches collaboratives, l'IGN était, il y a quelques années, remis en cause dans son identité et contesté dans sa légitimité. Le processus d'ouverture et de gratuité des données publiques, s'il lui ouvre de nouvelles perspectives de collaborations, implique une transformation du modèle d'un institut dont l'équilibre financier dépendait de la vente de ses données. Pour toutes ces raisons, l'IGN devait se transformer.
Aussi, à partir de 2019, l'IGN a-t-il entrepris de refonder son modèle. D'une mission de production-diffusion d'information géographique, l'IGN évolue vers des rôles d'agrégateur de données, d'expert, de coordinateur ou de certificateur. Il recentre son action sur la production des données socles souveraines ainsi que sur le pilotage de vastes projets d'accompagnement de grandes politiques publiques directement financés par leurs commanditaires.
A. SON NOUVEAU MODÈLE A FAIT CROÎTRE L'ACTIVITÉ DE L'IGN
Dépenses et recettes de l'IGN (2017-2023)
(en milliers d'euros)
Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Le nouveau modèle de l'IGN a généré une croissance de son activité et de son budget. Alors que ce dernier avoisinait les 150 millions d'euros jusqu'en 2020, moyennant le décalage entre la perception des recettes issues des financements des grands projets et l'exécution des dépenses pour leur réalisation effective, il se situe désormais à un niveau supérieur à 180 millions d'euros. Ainsi, pour l'exercice 2023, les dépenses de l'IGN sont-elles estimées à 191 millions d'euros pour des recettes attendues de 176 millions d'euros.
Cet accroissement d'activité à effectifs constants, et même en diminution, est permis par l'effet de levier lié au recours à la sous-traitance. Il signale aussi que la multiplication des projets auxquels contribue l'IGN a placé l'opérateur dans une situation de « saturation » de ses moyens humains.
* 12 Le décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011 précise les statuts et le fonctionnement de cet établissement public administratif.
* 13 Les géodonnées socles sont les données « primaires » de base qui servent de support à toute conception de services d'information géolocalisée.
* 14 Tels que les différentes couches qui composent le référentiel à grande échelle (RGE), la base de données de précision décamétrique dite BD Carto, la base de données géodésique (BDG), la BD Topage, le registre parcellaire graphique (RPG) pour les besoins agricoles ou encore le fond cartographique au 1/25 000e dit Scan 25.
* 15 Rapport d'information n° 17 (2022-2023) de M. Vincent Capo-Canellas, fait au nom de la commission des finances, novembre 2022.