TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE MM. BRUNO LE MAIRE, MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE LA SOUVERAINETÉ INDUSTRIELLE ET NUMÉRIQUE, ET THOMAS CAZENAVE, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DU MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE LA SOUVERAINETÉ INDUSTRIELLE ET NUMÉRIQUE, CHARGÉ DES COMPTES PUBLICS (27 SEPTEMBRE 2023)

Réunie le mercredi 27 septembre 2022 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu MM. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique chargé des comptes publics, sur le projet de loi de finances pour 2024.

M. Claude Raynal, président. - Messieurs les ministres, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, pour la dernière réunion de notre commission avant le renouvellement du Sénat à la suite des élections, nous avons le plaisir de recevoir cet après-midi MM. les ministres Bruno Le Maire et Thomas Cazenave, qui viennent nous présenter le projet de loi de finances (PLF) pour 2024, après sa présentation ce matin en conseil des ministres.

Si M. Le Maire connaît très bien notre commission, c'est la première fois que nous recevons M. Cazenave en tant que ministre délégué chargé du budget et je lui souhaite donc la bienvenue parmi nous.

Je rappelle que notre réunion porte sur le projet de loi de finances pour 2024 et non sur le projet de loi de programmation des finances publiques, sur lequel l'audition du président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) portait également ce matin, le Haut Conseil ayant rendu son avis sur la trajectoire révisée des finances publiques proposée par le Gouvernement en nouvelle lecture de ce texte.

Les sujets sont toutefois liés, puisque ce budget s'inscrit dans la trajectoire définie dans le projet de loi de programmation des finances publiques. Ainsi se fonde-t-il sur un scénario de croissance en 2024 que le Haut Conseil, de même que de nombreux économistes, trouve optimiste. Sans doute pourrez-vous apporter des éléments de réponse sur ce point, messieurs les ministres.

Comme l'an passé, le Gouvernement a fait précéder ce dépôt d'une phase de consultation dans le cadre des dialogues de Bercy. Certains d'entre nous ont pu y participer, mais nos collègues souhaiteront certainement aborder de nombreux sujets avec vous cet après-midi. Nous entamons désormais la phase proprement dite d'examen parlementaire du projet de loi de finances.

Je vous laisse donc la parole pour un propos liminaire, avant de la céder au rapporteur général et à l'ensemble des commissaires de la commission des finances qui souhaiteront vous poser des questions.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. - Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, je suis très heureux de vous retrouver pour la septième fois afin de vous présenter un projet de loi de finances.

Le projet de budget pour 2024, j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises, est présenté dans un contexte très particulier. L'économie française résiste, le taux de croissance est de 1 %, la création d'emplois se poursuit, notre pays est devenu le plus attractif pour les investissements étrangers en Europe. Toutefois, dans le même temps, nous faisons face à une inflation persistante, qui brouille tous les repères. Elle pèse terriblement sur la vie quotidienne de nos compatriotes et suscite beaucoup d'anxiété, pour ne pas dire de nervosité, dans la société française. Ce projet de loi de finances doit donc nous permettre de relever trois défis, qui s'inscrivent dans des calendriers différents.

Le premier défi, c'est de mâter définitivement l'inflation. Le deuxième, c'est de désendetter le pays et de réduire les déficits. C'est, comme le Premier président de la Cour des comptes l'a rappelé, un impératif catégorique alors que les taux d'intérêt ont pris 300 points de base en l'espace de quelques années. Le troisième défi, c'est de dégager des marges de manoeuvre à un moment où il est indispensable d'investir dans la transition écologique, mais aussi dans la défense et dans la sécurité face au retour de la guerre en Europe. Il nous faut rendre ces trois défis conciliables dans le projet de loi de finances : la lutte contre l'inflation, le rétablissement des comptes et l'investissement. Cela suppose de la méthode, de la détermination et une très grande clarté dans les choix politiques.

Il faut d'abord mettre fin à la flambée des prix et poursuivre la lutte contre l'inflation, laquelle commence à donner des résultats, puisque celle-ci ralentit aujourd'hui en France. Cela implique de mettre en oeuvre une politique budgétaire cohérente avec la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Alors que l'argent devient cher, que la BCE restreint la mise à disposition de liquidités et appuie sur le frein, rien ne serait plus absurde, même s'il peut être tentant d'ouvrir les vannes de la dépense budgétaire, que d'appuyer sur l'accélérateur. Nous irions tous dans le décor ! C'est là un choix de politique économique, clair et assumé. Nous ne pouvons pas rouvrir de nouveau les vannes de la dépense budgétaire, d'abord parce que la situation de nos finances publiques ne le permet pas, ensuite parce que cela serait absurde en termes de politique économique et en contradiction totale avec les efforts de la BCE pour ramener l'inflation au niveau cible de 2 %.

Autre principe de politique publique : l'État ne peut pas tout payer. Je revendique donc le choix que nous avons fait de faire appel aux distributeurs, aux industriels et aux entreprises privées. Je préfère obtenir des efforts de leur part plutôt que de céder à la facilité de la dépense publique.

Olivia Grégoire et moi avons travaillé pendant plusieurs semaines sur les prix dans la grande distribution et nous avons obtenu des industriels et des distributeurs qu'ils bloquent ou baissent les prix de 5 000 références. Je préfère ça plutôt que de nouvelles subventions ou de nouvelles aides. Nous avons également demandé à Total de bloquer les prix à la pompe à 1,99 euro le litre au-delà du 31 décembre ; nous l'avons obtenu. De même, nous avons demandé à un certain nombre de distributeurs de vendre à prix coûtant ; nous l'avons obtenu. Peu importe donc les moqueries que peuvent nous valoir ces choix politiques, nous les maintiendrons parce que nous ne viendrons à bout de l'inflation que collectivement. Avoir toujours recours à la dépense publique est une bien mauvaise idée, sachant en outre que la charge de la dette s'élèvera à 74 milliards d'euros en 2027.

Par ailleurs, je rappelle que l'État prend toute sa part à la lutte contre l'inflation en indexant les prestations sociales, les retraites et le barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation. Le bouclier anti-inflation, il est là : il représente 4,5 milliards d'euros pour l'indexation des prestations sociales et des minima sociaux, 14 milliards d'euros pour les retraites et 6 milliards d'euros pour l'impôt sur le revenu, soit 25 milliards d'euros au total.

Aussi, quand j'entends certains dire que l'inflation permet à l'État de se remplir les poches, je me dis qu'ils sont soit mal informés, soit malhonnêtes. Comme je ne peux pas croire à la malhonnêteté des responsables politiques, de quelque bord qu'ils soient, je vais leur donner l'information : l'augmentation des recettes de TVA liée à l'inflation, c'est 10 milliards d'euros, soit deux fois moins que ce que nous dépensons pour la revalorisation des retraites, des minima sociaux et l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu.

Pour dire les choses encore plus simplement, l'inflation coûte très cher à l'État. Aussi je ne laisserai personne - personne ! - dire que l'État s'en met « plein les poches », parce que le dire, c'est affaiblir l'État. Je le dis à tous ceux qui veulent devenir chef de l'État un jour : ils seraient bien mal avisés de critiquer le comportement de l'État alors qu'il protège nos compatriotes. L'État ne cherche pas à se remplir les poches en période inflationniste, bien au contraire : il dépense plus qu'il ne reçoit.

Par ailleurs, face à la situation très particulière des carburants, nous avons pris des décisions afin de protéger ceux qui travaillent. Nous assumons ce ciblage, car nous pensons qu'il faut aider en priorité ceux qui se rendent sur le lieu de travail. Dans ma circonscription rurale, certaines personnes parcourent 50, 60, voire 120 kilomètres par jour. L'augmentation des prix des carburants est insupportable pour elles. Cela leur coûte plus cher d'aller travailler que de rester chez elles ! Comme le coeur de notre politique, c'est le travail, nous avons décidé de mettre en place une indemnité carburant pour les travailleurs des cinq premiers déciles. Au total, 4,3 millions de personnes sont concernées. L'indemnité est fonction du véhicule, assuré, bien entendu. Son montant est de 100 euros, ce qui représente une économie de 20 centimes par litre de carburant sur six mois. Cette dépense me paraît légitime et nécessaire.

Voilà pour ce qui concerne le premier objectif du PLF : faire baisser l'inflation et protéger ceux qui en souffrent le plus, soit les plus modestes, ceux dont les revenus sont les plus faibles.

Ce premier défi doit se conjuguer avec le deuxième, qui est d'accélérer notre désendettement. L'objectif à long terme est d'atteindre 2,7 % de déficit public en 2027, un endettement de 108 % et un taux de prélèvements obligatoires de 44,4 %, contre 45,4 % aujourd'hui. Pour tenir cette trajectoire, il faut que le pied d'appel soit solide.

Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit 16 milliards d'euros d'économies. Certains trouveront que ce n'est pas suffisant, mais ces économies ne sont pas faciles, contrairement à ce que j'entends dire ici ou là. Il n'est pas facile de supprimer totalement le bouclier sur le gaz et sur l'électricité. Nous le ferons parce que les prix du gaz et de l'électricité sont revenus à la normale. Cela représente 10 milliards d'euros d'économies. Il n'est pas simple de réaliser des économies sur les politiques de l'emploi. Nous le ferons alors que nous approchons d'une situation de plein emploi. Nous recentrerons les dispositifs d'aide exceptionnelle aux entreprises, ce qui permettra de réaliser une économie de 4,4 milliards d'euros.

Au total, l'État dépensera 491 milliards d'euros en 2024, contre 496 milliards d'euros en 2023, soit 5 milliards d'euros de moins. C'est un effort notable dans une période d'inflation.

Cette première marche doit être accompagnée d'une politique plus structurelle de réduction des déficits, de choix plus avisés en matière de dépenses publiques et d'accélération du désendettement.

L'accélération du désendettement reposera sur trois principes très simples. Le premier, c'est la croissance. Je ne crois absolument pas à un désendettement par l'austérité. L'austérité tue la croissance, c'est la croissance qui permet de réduire le niveau de dette publique par rapport à la richesse. La meilleure façon de réduire la part de la dette publique dans la richesse, c'est d'abord d'augmenter la richesse par la croissance. Cela restera le principe cardinal de notre politique. Si nous voulons continuer de diminuer les impôts, si nous voulons engager une baisse d'un milliard d'euros de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) l'année prochaine, c'est pour nourrir la croissance, qui permettra ensuite d'accroître notre prospérité et de réduire la part de la dette publique.

Le deuxième levier, ce sont les réformes de structure : la réforme des retraites et celle de l'assurance chômage rapporteront, à elles deux, près de 25 milliards d'euros à l'horizon de 2027. Seules des réformes de structure permettent de dégager des économies aussi significatives.

Enfin, le troisième levier, ce sont les revues des dépenses publiques. Elles nous ont déjà permis d'identifier 2 milliards d'euros d'économies à terme sur le dispositif Pinel et plusieurs centaines de millions d'euros sur les opérateurs de l'État. Ces revues seront poursuivies chaque année jusqu'en 2027. Une quinzaine de secteurs publics seront examinés chaque année, l'objectif étant d'augmenter notre rendement par rapport au PLF pour 2024 et ainsi de mieux dépenser l'argent des Français.

Ces revues des dépenses, aussi nécessaires soient-elles, ne seront pas suffisantes. Pour être efficaces et durables, elles doivent s'inscrire dans une réflexion plus globale sur les missions de l'État, sur le périmètre de l'action publique et sur les fondements de notre modèle social. Nous sommes arrivés au point où ce débat démocratique doit avoir lieu. Sans cela, il n'y aura pas d'équilibre des finances publiques. J'invite tous les parlementaires qui le souhaitent à participer à cette réflexion.

Autre objectif, nous devons préparer l'avenir et investir en ce sens. Nous investirons d'abord dans l'éducation et la santé, priorité du Président de la République. Ensuite, nous investirons dans le régalien avec la loi de programmation militaire (LPM), la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), et la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice, afin de garantir la sécurité de nos compatriotes.

Cet investissement doit porter, en priorité absolue, sur la décarbonation de notre économie afin de faire de la France la première économie décarbonée à horizon de 2040 en Europe.

Nous porterons le budget de MaPrimeRénov' à 5 milliards d'euros, nous amplifierons la vente de véhicules électriques grâce à un bonus et à la mise en place du leasing à 100 euros par mois dès mi-novembre, et nous continuerons de favoriser la production d'énergie nucléaire en achevant les négociations avec EDF sur le tarif de l'électricité.

Nous allons convertir la fiscalité, en passant d'une fiscalité favorable aux énergies fossiles à une fiscalité qui apporte des avantages exclusifs aux énergies vertes. L'accord trouvé avec les agriculteurs et avec le secteur des travaux publics prouve que nous pouvons dialoguer et aboutir à un compromis afin de reverser l'intégralité des recettes du fossile vers le vert, sur la base d'un accord solide.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. - Je suis très heureux de vous présenter le budget de l'État, résultat d'une méthode - le dialogue - et d'un esprit de responsabilité - Bruno Le Maire a évoqué une boussole pour agir pour l'avenir.

Ce PLF 2024 est la consécration de la transition écologique en tant qu'urgence absolue. Avec ce budget, nous permettons un financement historique de la dette écologique, à côté de notre dette financière. Le PLF prévoit un investissement supplémentaire de 10 milliards d'euros dédié au financement de la transition écologique, et donc à la mise en oeuvre de la stratégie de planification écologique présentée par la Première ministre ; cela se traduit très concrètement par 7 milliards d'euros de crédits de paiement supplémentaires. Par exemple, nous permettons la construction des RER métropolitains dans le cadre de la prochaine génération des contrats de plan État-Région ; 550 millions d'euros seront engagés pour la rénovation thermique des bâtiments de l'État ; le « plan haies » bénéficiera de 110 millions d'euros d'engagements ; le fonds chaleur recevra 300 millions d'euros supplémentaires pour le chauffage urbain et la décarbonation du chauffage des entreprises et des ménages ; les collectivités locales bénéficieront de la pérennisation du fonds vert, porté à 2,5 milliards d'euros dont 500 millions d'euros pour la rénovation des écoles, comme annoncé par le Président de la République. Nous inciterons tous les acteurs à s'engager en faveur de la transition écologique en créant un crédit d'impôt pour l'investissement dans l'industrie verte pour soutenir la décarbonation de notre industrie, mais aussi en renforçant le malus automobile pour les voitures les plus polluantes. Nous cherchons à amplifier tous les leviers pour le financement de la transition écologique en dotant par exemple le futur plan d'épargne avenir climat d'un régime fiscal incitatif et en mettant à contribution les gestionnaires des infrastructures des transports les plus émetteurs pour financer le transport ferroviaire.

Les collectivités ont aussi un rôle majeur à jouer. Nous travaillons avec les associations d'élus pour permettre la généralisation des budgets verts dans les collectivités territoriales. L'enjeu est de nous doter d'une boussole commune et d'adapter nos outils financiers à la nouvelle donne écologique.

Ce budget est également celui du réarmement des services publics pour nos concitoyens : nous investissons massivement dans nos services publics, garants de notre cohésion sociale : plus 3,9 milliards d'euros pour l'éducation nationale, 1 milliard d'euros pour la recherche et l'enseignement supérieur, 3,3 milliards d'euros pour nos armées, 1 milliard d'euros pour le ministère de l'intérieur, 500 millions d'euros pour la justice. Nous augmentons la rémunération des enseignants, nous permettons la poursuite du programme d'investissements dans les matériels prévu par la LPM, nous finançons l'acquisition de nouveaux matériels pour notre police.

Au-delà de ces chiffres, le service public, ce sont des femmes et des hommes. Ce budget 2024 permettra de recruter 6 700 agents publics supplémentaires pour l'État et 1 580 pour les opérateurs de l'État. Nous créons 3 000 postes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), 1 900 postes pour la justice, 2 600 postes pour la police, et recrutons 700 agents supplémentaires pour mettre en oeuvre la transition écologique. Ces créations sont une réponse à ceux qui nous reprochent d'avoir délaissé nos services publics : rien n'est plus faux.

Arrêtons d'opposer l'État et les collectivités locales : nous portons ensemble les services publics. Les concours financiers de l'État aux collectivités s'élèvent à 54,8 milliards d'euros en 2024 et la dotation globale de fonctionnement (DGF) augmentera à nouveau de 220 millions d'euros - après une hausse en 2023 qui était la première depuis 12 ans. Dès cet exercice budgétaire, pour renforcer les capacités d'investissement des collectivités, nous étendons le fonds de compensation de la TVA (FCTVA) aux dépenses d'aménagement, évolution très attendue par de nombreux élus et qui représente un effort de 250 millions d'euros pour l'investissement public local.

Ce projet de loi de finances, ce sont aussi de grands équilibres avec un cap clair : la réduction des déficits publics. Investir pour l'avenir, c'est maîtriser nos comptes publics. Je souhaite tenir un langage de vérité, puisque vous connaissez aussi la réalité de nos comptes. L'État a pu protéger massivement parce qu'il avait réduit son déficit public en 2018 à 2,3 % du PIB. Un État qui consacre plus aux intérêts de la dette qu'au budget de l'éducation nationale - ce qui sera le cas en 2027 - ne peut plus prétendre être tourné vers l'avenir.

Les dépenses de l'État vont passer de 496 à 491 milliards d'euros, une baisse historique, qui s'explique d'abord par la sortie des dispositifs de crise. Les mesures exceptionnelles mises en oeuvre au plus haut de la crise énergétique ne peuvent pas durer ; nous devons en sortir progressivement. Ce sera le cas en 2024 où nous dépenserons 14 milliards d'euros de moins pour les mesures exceptionnelles.

Mais en même temps nous devons lutter contre la vie chère et redonner du pouvoir d'achat aux Français. C'est pourquoi nous revalorisons les tranches du barème de l'impôt sur le revenu, tout comme les pensions et les minima sociaux, en créant un véritable bouclier contre l'inflation. Les économies, importantes, sur le budget viennent des réformes structurelles : nous économiserons 350 millions d'euros sur la politique de l'emploi avec la réduction du chômage, et 500 millions d'euros en améliorant l'efficacité et l'efficience de notre politique de formation professionnelle. Ainsi, le déficit budgétaire en 2024 va baisser, passant de 165 milliards d'euros à 145 milliards d'euros. Nous tiendrons la cible de 4 % de solde public. Nous devons continuer dans cette lancée et trouver 12 milliards d'euros d'économies structurelles. C'est pourquoi nous allons relancer et muscler les revues de dépenses qui associeront naturellement les parlementaires.

Enfin, ce PLF est un PLF antifraude. Avant d'être un enjeu financier, la lutte contre la fraude est un enjeu de cohésion et de justice sociale. Il n'y a pas de consentement à l'impôt si l'État n'est pas en mesure de garantir à nos concitoyens que tous ceux qui doivent payer des impôts le font effectivement. Le PLF et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) vont instaurer une dizaine d'outils juridiques nouveaux pour mieux lutter contre la fraude, dont voici quelques exemples : face à la nouvelle donne numérique, nos administrations pourront déréférencer les vendeurs des plateformes numériques qui ne respectent pas leurs obligations fiscales. Nous allons autoriser les agents du fisc à mener des cyberenquêtes sous pseudonyme. Nous lutterons contre ceux qui achètent à l'étranger et revendent en France sans payer la TVA. Nous allons créer une peine complémentaire de privation des bénéfices des crédits et des réductions d'impôts pour les particuliers condamnés. Nous mettrons en place un nouveau délit d'incitation à la fraude fiscale afin de poursuivre tous les intermédiaires qui proposent des montages d'évasion fiscale, sans attendre la condamnation de leur client. C'est une manière d'empêcher la fraude à la source et nous le ferons également pour les fraudes aux aides sociales. Enfin, nous créons des sanctions administratives pour lutter contre la fraude aux aides publiques.

En parallèle de la création de 1 500 postes à la direction générale des finances publiques (DGFiP) sur le contrôle fiscal, c'est 1 000 agents supplémentaires d'ici à 2027 qui se consacreront à la lutte contre la fraude au sein des caisses de sécurité sociale. Enfin, nous devons renforcer la sécurité de nos agents en leur permettant de délocaliser certains contrôles et d'en réaliser anonymement. Il s'agit de les protéger, en écho au drame qui est survenu en novembre dernier. Nous proposons ces mesures dès le texte initial, mais nous sommes en situation de l'enrichir. Lors des dialogues de Bercy, et certains d'entre vous y ont participé, la lutte contre la fraude a été évoquée par la plupart des participants et nous sommes preneurs de vos propositions dans ce domaine comme dans d'autres.

Enfin, ce PLF repose sur une méthode, le dialogue. J'ai réuni les parlementaires de tous bords lors des dialogues de Bercy ou de réunions bilatérales. Nous avons associé naturellement les associations d'élus locaux et les entreprises pour construire ce budget.

C'est aussi une main tendue aux collectivités territoriales. Dans le cadre du pacte girondin, nous avons créé avec Bruno Le Maire le Haut Conseil aux finances publiques locales (HCFPL) pour échanger d'égal à égal entre l'État et les collectivités territoriales, et s'agissant du PLF, à l'issue des dialogues de Bercy, nous avons identifié des thématiques communes sur lesquelles les différents groupes du Sénat comme de l'Assemblée nationale souhaitent travailler - le logement, la justice fiscale, la transition écologique... Nous sommes à votre disposition pour continuer à enrichir le texte qui vous est présenté, un texte initial qui n'est pas le texte final.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je remercie le ministre de l'économie et des finances - durable, car il est inoxydable, présent depuis le premier gouvernement nommé en 2017 après l'élection du Président de la République. Je souhaite la bienvenue au ministre des comptes publics. Au Sénat, nous avons toujours eu des débats constructifs et apaisés, malgré nos désaccords.

Beaucoup d'entre nous sortent d'une période intense de dialogue et de visites sur le terrain. Il y a un monde entre une partie des propos que vous venez de tenir et la situation ressentie sur les territoires.

Je commencerai par deux remarques générales sur les grands équilibres de ce PLF.

D'une part, avec les transferts de TVA à d'autres personnes morales que l'État, le budget de l'État devient hypersensible à la volatilité de l'impôt sur les sociétés, qui prend une place essentielle dans ses ressources, ce qui n'est pas souhaitable.

D'autre part, vous prévoyez plusieurs milliers d'équivalents temps plein (ETP) supplémentaires en 2024. Cela me conduit à vous interroger sur la ligne du Gouvernement sur les recrutements dans la fonction publique ? Le Président de la République a renoncé à la suppression de 50 000 postes dans la fonction publique d'État qu'il avait initialement promise. Quelle est donc la ligne actuelle ? Le Président de la République ne l'a pas évoquée dans sa prise de parole dimanche dernier.

Monsieur le ministre de l'économie, je suis assez frappé par votre souplesse et ce que j'appellerais la pratique du grand écart. D'un côté, vous présentez une image sérieuse, apôtre de la rigueur, voire une forme d'austérité, souriante certes. Mais, de l'autre, depuis six ans que vous êtes ministre des finances, jamais vous n'avez baissé la dépense publique. Même si l'on retranche les mesures exceptionnelles ou de crise : ces dépenses ont toujours augmenté, que ce soit en valeur ou en volume. Tous les jours, ou presque, de nouvelles annonces de dépenses d'un ministre, de la Première ministre, voire du Président de la République, chargent la barque.

Le PLF 2024 prévoit encore une hausse de 2,2 % des dépenses hors mesures exceptionnelles.

Je pense qu'il faut agir plus et faire moins de déclarations qui perdent l'opinion et les élus, avec le danger que cela représente. Les finances magiques, ça n'existe pas !

Votre programmation budgétaire jusqu'en 2027 est fondée sur une seule hypothèse : votre capacité à faire baisser la dépense publique comme jamais aucun gouvernement n'est parvenu à le faire précédemment.

Vous vous abritez derrière la revue de dépenses, censée faire économiser des dizaines de milliards d'euros. Or, je ne vois pas d'économie : toutes les dépenses budgétaires sont à la hausse. D'ailleurs, monsieur le ministre des comptes publics, vous nous en avez fait un florilège en annonçant des hausses un peu partout.

La réalité, c'est l'absence quasi totale d'économies structurelles. D'ailleurs, vous financez des mesures pérennes grâce à la disparition des mesures exceptionnelles. Vous tentez de renvoyer la balle, voire la responsabilité, aux parlementaires, comme l'an dernier. Chacun son rôle : l'exécutif doit assumer des choix, les proposer, et ensuite les deux assemblées se prononcent.

Messieurs les ministres, quand allez-vous proposer une réduction des dépenses publiques, une meilleure gestion de nos finances publiques ?

J'évoquerai un deuxième sujet, les carburants. Je rappellerai les déclarations récentes du Gouvernement, que j'ai eu du mal à suivre : l'an passé, une remise généralisée qui coûte 8 milliards d'euros, ensuite un chèque carburant, puis l'annonce par la Première ministre d'une autorisation de vente à perte, avec un projet de loi disparu une semaine après l'annonce. Et aujourd'hui vous nous parlez désormais d'une aide ciblée de 100 euros par an pour les ménages modestes... Quel est l'objectif, quels sont les montants consacrés et combien de foyers seront concernés ?

Par ailleurs, pouvez-vous nous dire quel est le niveau effectif de consommation des crédits pour l'aide ciblée à destination des gros rouleurs mise en place en 2023, avec combien de bénéficiaires ? Pour mémoire, un milliard d'euros de crédits avaient été inscrits en 2023.

Je poursuivrai sur le prix de l'énergie et de l'électricité. Vous avez déclaré que vous ne laisseriez pas ce prix augmenter de plus de 10 % en février prochain, comme le prévoit la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Mais cette année ces prix ont augmenté de 10 % en catimini au milieu de l'été, remettant en cause votre engagement initial de plafonner l'augmentation à 15 % sur l'année. Peut-on vous croire pour 2024 ? Vous n'avez pas tenu votre parole pour 2023. Par ailleurs, cet engagement est-il compatible avec la fin du « quoi qu'il en coûte » ?

Enfin, le PLF propose la transposition de la directive européenne visant à assurer un niveau minimum d'imposition mondial des grandes entreprises, avec une proposition de taux de 15 %. Comment ce taux s'articulera-t-il avec celui de l'impôt sur les sociétés français, qui est actuellement à 25 % ? Et quelles recettes fiscales cet impôt pourrait-il engendrer en France ?

M. Claude Raynal, président. - Rien ne vaut une bonne séance de rentrée pour répondre à un nombre significatif de questions du rapporteur général et tout à l'heure des sénateurs...

M. Bruno Le Maire, ministre. - C'est toujours un plaisir de répondre aux questions pertinentes du rapporteur général.

Je partage votre avis sur l'impôt sur les sociétés et la TVA, mais tout le monde veut de la TVA. La part de recettes de TVA revenant à l'État atteint juste 50 %. Lorsqu'on supprime la taxe d'habitation, pour un coût de 20 milliards d'euros, c'est la TVA, recette dynamique, que veulent les collectivités locales.

Je suis non pas un apôtre de l'austérité, mais des comptes publics bien tenus. Je serais un ministre des finances inoxydable : en 2017 et 2018, nous avons rétabli les finances publiques et sommes sortis de la procédure pour déficit public excessif, avec des décisions courageuses, comme la suppression de tous les emplois aidés. Ce n'était pas facile.

Nous avons pris des décisions structurelles pour revenir sous les 3 %, et je vous invite à faire des propositions pour revenir sous ce seuil en 2027.

Mon objectif n'est pas l'austérité, mais d'avoir de la dépense publique bien employée et qui augmente moins vite que l'inflation.

Je ferai aussi preuve d'un peu de malice : dans votre famille politique, certains disent qu'il faut rétablir les finances publiques, mais ne cessent de proposer des dépenses supplémentaires : supprimer la TVA sur les carburants - 10 milliards d'euros ! - ou octroyer une remise sur les carburants, comme nous l'avons fait l'année dernière, sur la proposition du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, ce qui nous a coûté 12 milliards d'euros. Et puis d'autres, comme Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat, et le Président du Sénat, dont je salue la sagesse, ont dit que ce n'était pas possible. Je me range plutôt de leur côté, eux qui estimaient qu'une remise générale sur les carburants était une triple erreur.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Mais vous l'avez commise.

M. Bruno Le Maire, ministre. - Nous l'avons faite sur proposition du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale. Je suis obligé de le reconnaître...

M. Daniel Breuiller. - La faute est partagée...

M. Bruno Le Maire, ministre. - C'est une erreur pour les finances publiques, car cela coûte trop cher ; une erreur pour le climat, car nous subventionnons ainsi les énergies fossiles ; une erreur géopolitique puisque la Russie et l'Arabie saoudite ont réduit leur production de pétrole pour faire augmenter les prix. Les prix se stabiliseront voire augmenteront au-dessus du niveau actuel de 85 dollars le baril. Entraîner nos finances publiques dans un puits sans fond serait irresponsable. Il faut aider ceux qui travaillent et accélérer l'indépendance énergétique de la France en déployant les véhicules électriques, les biocarburants... Cela prend du temps et il y a un délai entre la solution immédiate et ce que peuvent se payer les contribuables. Mais un leasing à 100 euros dès le 15 novembre sans apport initial est une solution, de même que l'accélération du déploiement des bornes de recharge rapide, y compris en zone rurale. Je préfère investir dans ces solutions pour notre indépendance qu'être pieds et poings liés à l'Arabie saoudite et à la Russie. Ce serait folie de dépenser l'argent public pour acheter du pétrole, qui irait dans les poches de MM. Poutine ou ben Salmane.

L'indemnité carburant, comme l'année précédente, concernera 4,3 millions de foyers pour 430 millions d'euros. Nous pouvons débattre du ciblage, mais nous privilégions les plus modestes : une majorité des bénéficiaires est en zone rurale, et c'est légitime.

La CRE évoque une augmentation de 10 à 20 % en janvier, mais c'est hors de question. Nous ne sommes pas là pour créer des inquiétudes supplémentaires chez nos compatriotes. Nous verrons quels choix nous devrons prendre en fonction du prix de l'électricité. Celui-ci a baissé car EDF en produit davantage et a remis en fonctionnement des réacteurs arrêtés pour corrosion sous contrainte. Je félicite les agents d'EDF de ce travail considérable effectué dans des délais rapides. Notre priorité est d'avoir le plus grand nombre de réacteurs en état de fonctionnement et de réaliser d'ici à 2035 les six nouveaux réacteurs pressurisés européens (EPR).

L'imposition minimale sur les sociétés sera effective début 2025 après le règlement des difficultés techniques. Elle rapportera 1,5 à 1,6 milliard d'euros par an, soit une recette fiscale significative.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. - Je félicite le rapporteur général pour sa réélection.

Concernant la part des économies structurelles, nous revoyons la politique de l'emploi à mesure que le chômage baisse, par exemple sur les contrats aidés dans le secteur marchand. Nous économisons 500 millions d'euros en renforçant l'efficience de la politique de formation et en révisant les coûts-contrats. Les excédents générés par l'assurance chômage sont la conséquence à la fois des bonnes performances du marché du travail et de la réforme de l'assurance chômage.

La révision des dispositifs fiscaux évalués et jugés peu efficaces comme le Pinel constitue aussi des réformes structurelles. Dès 2024, nous enclencherons donc des réformes structurelles, mais celles-ci devraient être beaucoup plus importantes à partir de 2025 avec 12 milliards d'euros d'économies attendues. Nous allons faire passer la part des dépenses publiques dans le PIB de 57,7 % à 53,8 %. C'est un effort très significatif, puisqu'elles progresseront en volume moins vite que le PIB, avec un effort renforcé sur le périmètre État. Nous avons donc une trajectoire ambitieuse de baisse progressive et continue de la dépense publique. Nous sommes ouverts à toutes les propositions des parlementaires lors des revues de dépenses. Il est indispensable d'ouvrir le chantier du coût de notre organisation collective, comme déjà évoqué lors des dialogues de Bercy. Notre organisation collective génère une dynamique de dépenses très importante entre l'État, ses agences et les collectivités territoriales. Je suis convaincu, comme les élus locaux, que nous pouvons faire plus simple et donc moins coûteux. Travaillons ensemble sur ce type de réformes structurelles qui permettraient de ralentir le rythme de la dépense.

M. Claude Raynal, président. - À titre personnel, j'ai goûté l'échange piquant sur les chèques énergie ou la réduction du prix de l'essence... Vous avez raison, d'un côté il y avait le groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, tandis qu'ici leur groupe était beaucoup plus prudent...

M. Bruno Le Maire, ministre. - C'est la sagesse...

M. Claude Raynal, président. - Les députés Les Républicains ont une part de responsabilité dans les 12 milliards d'euros de la mesure, mais vous-même aussi, en disant oui, au bénéfice d'une alliance que l'on peut dire de circonstance...

M. Vincent Éblé. - Éphémère...

M. Claude Raynal, président. - ... car elle n'aura pas duré longtemps. Au final, la mesure aura coûté 12 milliards d'euros à tout le monde. Donc j'ai du mal à vous féliciter les uns et les autres...

M. Michel Canévet. - Ici, nous préférons le débat parlementaire pour aboutir à un budget le plus équilibré possible, plutôt que les seuls dialogues de Bercy, pour autant qu'ils soient utiles néanmoins. Le groupe de l'Union centriste avait proposé un report de la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Nous sommes heureux que le Gouvernement nous ait entendus sur ce point. Nous aurions souhaité aussi le report de la suppression de la redevance audiovisuelle, car cela représente 3,2 milliards d'euros de dette supplémentaire chaque année. Nous vous ferons part d'autres propositions.

Les éventuelles aides sur les carburants doivent être dédiées à ceux qui travaillent et en lien avec les employeurs, comme le suggère le ministre. Il faut associer le secteur privé.

Nous sommes très inquiets de la situation du logement, qui est en panne. Les ménages modestes devraient pouvoir disposer de prêts à taux zéro (PTZ) pour accéder à la propriété, facteur essentiel d'insertion.

Sur la fiscalité, vous avez évoqué l'accord avec les agriculteurs. Il faudrait suivre la même trajectoire pour les travaux publics. Une trajectoire différenciée serait source d'inégalités de traitement, notamment faute de solution alternative sur les modes de propulsion des engins. Ne pénalisons pas l'activité d'entreprises, au risque sinon de réduire d'autres recettes.

Il faut accompagner les entreprises du secteur de la pêche, qui souffrent terriblement.

Près de 90 % des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) sont en déficit, ce qui appelle des mesures fortes. L'équilibre du PLFSS est difficile à trouver, mais il faut que la solidarité s'exerce et que ces établissements fonctionnent.

Nous apprécions qu'on revienne au remboursement par le FCTVA des aménagements de terrains, mais il reste à régler le décalage de versement de la TVA à de nombreuses collectivités : il est anormal que les collectivités se voient rembourser la TVA plus de deux ans après avoir réalisé un investissement.

M. Marc Laménie. - Merci de votre présentation. Malgré des avancées significatives, l'autonomie financière des collectivités territoriales reste un problème latent. Actuellement, les communes ne conservent que les taxes foncières. La taxe d'habitation est compensée à l'euro près, l'État reste historiquement le premier partenaire des collectivités territoriales avec l'ensemble des dotations de fonctionnement. Des inquiétudes persistent pour la DGF, malgré la revalorisation.

Quel avenir pour les aides à l'investissement, comme la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ou le fonds vert ?

M. Hervé Maurey. - Je suis toujours très étonné de l'autosatisfaction des membres du Gouvernement, très éloignée de ce que l'on entend sur le terrain, qu'on soit ou non en campagne électorale...

Vous prétendez que la réduction de la dette est une priorité, mais son niveau est inédit, et nous allons emprunter 285 milliards d'euros cette année. Nous sommes le troisième pays le plus endetté. Ce matin, le président du Haut Conseil des finances publiques estimait que l'on pouvait faire beaucoup mieux sans austérité. Pourquoi ne pas s'engager dans cette voie ?

Le compte n'y est pas pour le Haut Conseil des finances publiques locales. Le Gouvernement annonce très fièrement une augmentation de 220 millions d'euros des dotations - soit 0,8 % - alors que l'inflation des collectivités territoriales se situe entre 4 et 5 %. Cette année encore, il y aurait 1 milliard d'euros de perte. Les collectivités territoriales ne peuvent indéfiniment servir d'amortisseur ; de plus, les maires ont été extrêmement choqués que le Président de la République mette sur le dos des communes l'augmentation de la taxe foncière.

Avec Stéphane Sautarel, je suis rapporteur spécial sur les transports. La taxe sur les concessions devrait rapporter 600 millions d'euros. Quelle répartition est prévue entre les aéroports et les autoroutes ? Comment éviter toute répercussion sur les usagers ? Les contrats de concessions autoroutières sont plus favorables aux concessionnaires qu'aux usagers...

Comment se répartissent les 700 millions d'euros prévus pour les infrastructures, entre le routier et le ferroviaire, notamment pour la régénération et la modernisation du ferroviaire ?

Vous avez accepté qu'Île-de-France Mobilités augmente la part du versement mobilité. Les autres autorités organisatrices de la mobilité (AOM) veulent le faire ; cette autorisation est-elle un précédent ?

Mme Christine Lavarde. - Ma première question concerne le crédit d'impôt sur l'industrie verte, dont le coût cumulé a fortement augmenté entre les annonces initiales - 2 milliards d'euros - et ce qui figure dans le budget - 3,7 milliards d'euros... J'avais compris que les coûts associés à l'industrie verte devaient être nuls pour les finances publiques grâce aux économies sur les dépenses brunes. Comment assurez-vous cette neutralité ?

Vous êtes largement revenu sur le bonus écologique. Il nous est difficile d'avoir un avis éclairé sur les montants alloués aux bonus cette année si nous ne connaissons pas la grille des véhicules éligibles ou si nous la découvrons au milieu, voire à la fin de l'instruction du PLF. Il serait cohérent que nous en disposions avant l'examen des crédits de la mission.

Dernier sujet, plus compliqué : nous avons bien noté l'élargissement de l'enveloppe du FCTVA. De quelle enveloppe parlez-vous désormais : uniquement le compte 212 « Agencements et aménagement de terrains » et des sous-comptes 2121 et 2128 ? Que faites-vous alors des comptes 213 « Construction » et 215 « Réseaux » qui sont particulièrement utilisés dans l'aménagement des zones d'aménagement concerté (ZAC) ? L'aménagement des ZAC repose sur des contrats de concession. Pour qu'ils puissent être de nouveau éligibles au FCTVA, il faudrait revenir sur l'abrogation qui a été faite en loi de finances initiale (LFI) pour 2019 de l'article 1615-11 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Parlementaires, nous ne pouvons faire cette modification, contrairement au Gouvernement. Je souhaite disposer de toutes ces précisions sur des dispositions réglementaires même si nous n'allons voter que des crédits consacrés au FCTVA.

Toujours sur le FCTVA, j'ai bien noté que dans la LPFP votée en 2022, 7 milliards d'euros de crédits étaient ouverts en 2024 ; dans la nouvelle LPFP corrigée, l'enveloppe atteint 7,1 milliards d'euros, soit une augmentation uniquement de 100 millions d'euros, ce qui n'est pas cohérent avec les 250 millions d'euros supplémentaires annoncés. Avez-vous revu la prévision des dépenses socles dans la trajectoire et avez-vous bien ajouté 250 millions d'euros, ou l'effort n'est-il que de 100 millions d'euros en 2024 ? Qu'en sera-t-il des dépenses de 2022 et de 2023 ? La règle risque d'être un peu différente entre ceux qui sont compensés en année N et ceux qui sont compensés avec retard.

M. Antoine Lefèvre. - Les perspectives financières du PLF et de la LPFP laissent supposer un optimisme gouvernemental dépassant la réalité des indicateurs macroéconomiques : non seulement la voilure des recettes budgétaires et fiscales se réduit, mais l'État se réengage dans un « quoi qu'il en coûte » court-termiste. Ce dimanche a été annoncé un nouveau chèque carburant pour les 50 % des ménages les plus modestes, avec à la clef une addition de plus de 500 millions d'euros. Il serait plutôt audacieux de se réjouir de prévisions de croissance à 1,4 % en 2024 quand le déficit demeurerait à 4,4 %, avec une charge de la dette de 285 milliards d'euros, faisant de la France le premier émetteur de la zone euro, d'autant que cette prévision de croissance ne saurait être atteinte qu'en respectant des conditions extrêmement optimistes, selon le Premier président de la Cour des comptes. La France sera le dernier pays, avec la Slovaquie, à repasser sous le seuil des 3 % en 2027. À l'aube de la renégociation des critères de Maastricht prévue en 2024, pensez-vous tenir un discours crédible devant nos partenaires européens ? La promesse de geler le livret A à 3 % jusqu'au 1er janvier 2025 pourra-t-elle être tenue ?

M. Christian Klinger. - Lundi, devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, vous avez indiqué que l'augmentation de la fiscalité du gazole non routier (GNR) pour les agriculteurs et les entrepreneurs de travaux publics serait affectée à l'accompagnement de ces professions. Quel sera le bilan financier global ? Toutes les recettes fiscales supplémentaires ont-elles vocation à être transformées en dépenses nouvelles ? Prévoyez-vous, dans le budget, d'affecter juridiquement ces recettes à des dépenses, et si oui, sous quelle forme et avec quel suivi ?

M. Daniel Breuiller. - Ce sera mon dernier commentaire général, puisque je quitte bientôt cette belle assemblée. Monsieur le ministre, vous avez une grande constance dans vos choix budgétaires. J'étais heureux de vous entendre parler de la « folle dépendance » au pétrole - il y a aussi une folle dépendance au gaz de schiste lorsqu'il se substitue au pétrole. J'encourage ces progrès sémantiques !

Les 7 milliards d'euros supplémentaires consacrés à la transition écologique sont une « moyenne » bonne nouvelle. J'attends de voir en détail les affectations, a priori plutôt dans l'industrie verte que dans d'autres champs de la transition. Nous vous proposerons des aménagements. Si nous voulons tenir la trajectoire Pisani-Mahfouz, cela supposerait que les collectivités territoriales investissent 14 milliards d'euros... Comment le pourraient-elles ? Les 220 millions d'euros supplémentaires au titre de la DGF ne permettent pas une hausse, car ce montant n'empêche, en réalité, pas une baisse de la capacité d'action des collectivités territoriales, monsieur Cazenave. Ce n'est pas à vous que je dois le faire exprimer publiquement ! Les collectivités auront des difficultés à prendre leur part à cette transition alors qu'elles en sont un maillon essentiel.

Je vous remercie de reprendre quelques-unes de nos propositions que vous aviez rejetées pour le PLF 2023 : l'augmentation MaPrimeRénov', la taxation des autoroutes, la réduction de l'avantage défiscalisé d'Airbnb, ainsi que le report de la suppression, hasardeuse, de la CVAE. Mais vous prenez des décisions par petites touches sans changer vos choix fondamentaux.

Vous avez évoqué un triangle contraint, auquel j'ajouterai un côté : le refus de tout nouveau prélèvement sur les plus aisés, y compris sur les superprofits, même si vous avez fini par obtenir une taxation européenne.

Financer les services publics et la transition écologique nécessite de trouver de nouvelles recettes, sinon nous nous perdrons dans le triangle des Bermudes. Nous subissons actuellement un réchauffement de 1,2 degré, avec des conséquences dramatiques chaque année, et nous nous avançons vers une France à + 3,5 ou 4 degrés. Personne ne peut dire ce qu'il en sera... La dette climatique est au moins aussi importante que la dette financière et peut bouleverser totalement notre cohésion sociale. Faites preuve d'intelligence : plutôt que d'attendre un an pour amender, écoutez attentivement les amendements proposant un impôt de solidarité sur la fortune (ISF) vert pour financer davantage cette transition. D'autres amendements écologistes pourraient enrichir ce budget puisqu'il est ouvert et non bouclé, selon M. Cazenave.

M. Claude Raynal, président. - Merci pour cette dernière intervention en commission.

M. Jean-Michel Arnaud. - Vous cherchez des recettes complémentaires. J'espère que vous intégrerez la proposition du président Marseille de taxer les profits exceptionnels. Il s'agit non pas de faire l'aumône auprès des grands groupes pétroliers, mais de faire en sorte que ceux qui se sont gavés puissent restituer une partie de leurs surprofits. Je vous remercie des soutiens fiscaux pour l'accession à la propriété des ménages.

J'ai noté la prorogation de quatre ans du PTZ. Acceptez qu'il ne soit pas uniquement dédié aux ménages modestes urbains dans des logements collectifs, mais aussi aux jeunes gens dans les campagnes, y compris pour une maison individuelle, qui reste le modèle dominant dans le secteur agricole.

Je vous remercie d'avoir annoncé ce matin, dans la presse, que vous étiez favorable au report de l'interdiction de location de certains logements disposant d'un mauvais classement énergétique. Pouvez-vous nous le confirmer ici ? J'espère que vous vous en ferez l'avocat au sein du Gouvernement pour éviter une crise majeure du logement.

Cet été, nous avions évoqué à Briançon le bouclier tarifaire. J'ai lu avec attention la prolongation temporaire du bouclier tarifaire sur l'électricité. Qu'en est-il des discussions entre EDF et des opérateurs publics ou parapublics, comme des communes ou des régies de remontées mécaniques, qui ont été méprisées par EDF dans sa dernière proposition ? EDF leur propose 50 euros pour un surcoût de 400 euros par rapport aux factures habituelles. Par exemple, la commune de Saint-Léger-les-Mélèzes se retrouve en grande difficulté faute de pouvoir payer ses factures : 90 % du déficit lié à ce surcoût n'est pas compensé ni accompagné par l'État. La collectivité est en grave difficulté.

Mme Frédérique Espagnac. - Tout à fait.

M. Didier Rambaud. - La création d'un impôt minimum pour les grandes entreprises et les multinationales est une mesure phare de ce PLF. Pour sortir de l'ambiance un peu rabat-joie de cette commission,...

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - C'est une mauvaise interprétation !

M. Didier Rambaud. - ...il s'agit d'une victoire pour notre pays : depuis 2017, la France agit aux côtés de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Peut-on envisager une application au niveau européen pour les particuliers ?

Sur la TVA, le ministre Cazenave a décliné toutes les mesures. Le Sénat était particulièrement actif sur la lutte, complexe, contre la fraude à la TVA. Quelles sont les prochaines étapes de cette lutte ?

M. Bernard Delcros. - Nous saluons le crédit d'impôt pour les industries vertes. Quelles filières concernera-t-il, et avec quelle ventilation ?

Nous saluons le plan de lutte contre la fraude et les moyens consacrés. Avez-vous évalué les recettes potentielles qui en résulteraient ?

Plusieurs dizaines de niches fiscales arrivent à échéance en fin d'année. Allez-vous les évaluer pour savoir s'il faut les reconduire ?

Je m'associe à MM. Canévet et Arnaud sur le PTZ : le recentrage ne doit pas se faire au détriment des zones rurales. Attention aux définitions : dans une zone non tendue, on ne doit pas priver des jeunes d'accéder à la propriété. C'est un sujet extrêmement sensible et plus important qu'il n'y paraît. J'en appelle à votre bienveillance et à la concertation.

M. Albéric de Montgolfier. - Monsieur Cazenave, je vous invite à lire et à écouter le Sénat à la veille du PLF : si le Gouvernement l'avait écouté sur la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), nous n'aurions pas eu le mouvement des « Gilets jaunes » ; et nous aurions eu depuis sept ans la taxation solidaire des plateformes...

Êtes-vous prêts à nous communiquer l'avis du Conseil d'État sur le PLF ? Sinon, pour quelles raisons ? Avez-vous quelque chose à cacher ?

M. Thierry Cozic. - Ce PLF ressemble à un vertigineux exercice d'équilibrisme, tant le « trilemme » auquel vous souhaitez faire face est antinomique. Cet exercice chute devant la nécessité affichée d'engager la transition écologique, tout en maintenant la cohésion sociale, et en mettant en place des politiques d'austérité budgétaire. Vous ne voulez pas de hausse d'impôt et souhaitez verdir l'économie, mais avec peu de mesures pour augmenter le pouvoir d'achat.

Vous voulez investir massivement dans la transition écologique. Mais sans nouvelles recettes fiscales et en baissant trop les dépenses publiques comme l'éducation ou le social, vous aboutissez à un triangle d'incompatibilités.

Pour faire face à nos engagements de réduction des gaz à effet de serre d'ici à 2030, les besoins de financement sont importants, selon le rapport Pisani-Mahfouz. Le financement de la transition climatique représenterait un surcroît d'investissement de 2,3 % du PIB par an, soit 66 milliards d'euros. Nous en sommes très loin !

Selon Pierre Mendès-France, « gouverner c'est choisir ». Choisir, c'est aussi renoncer. En refusant les moyens nécessaires à la transition écologique, vous renoncez à vos propres engagements.

Monsieur Cazenave, vous reconnaissiez récemment nos deux dettes, l'une budgétaire, l'autre écologique. Au regard de vos choix dans ce PLF, la première semble conditionner la seconde. Pourtant, des solutions existent et le groupe socialiste en propose, comme l'ISF vert et le renforcement de la progressivité de l'impôt. Les personnes ayant la chance d'avoir une meilleure situation doivent contribuer davantage. Seriez-vous prêt à soutenir ces mesures de bon sens pour combler ces deux dettes, tout en faisant preuve de justice sociale ?

M. Stéphane Sautarel. - Le désendettement mériterait d'être plus important. Je reviens sur l'inflation et le rythme de la transition écologique. Vous avez évoqué les contraintes normatives et réglementaires sur les bâtiments et la mobilité. Si ces aspects étaient reconsidérés dans le contexte de l'inflation actuelle, ils ne coûteraient pas à l'État. Nous appelons à une réforme réglementaire et de révision du calendrier dans lequel nous sommes engagés sur de nombreux sujets, dont le rythme n'est pas soutenable actuellement.

Mon deuxième point concerne les collectivités territoriales. Je ne reviendrai pas sur la DGF et le FCTVA, qui ont déjà été évoqués. Je dirai simplement qu'il convient que le Gouvernement fasse davantage confiance aux collectivités territoriales. Le ministre des comptes publics a dit que nos coûts de structure étaient importants. Il suffirait pourtant de supprimer un certain nombre d'agences ou d'opérateurs de l'État et de faire confiance aux collectivités territoriales pour faire « maigrir » notre dépense publique ! Je suis d'ailleurs surpris, à cet égard, que vous proposiez d'augmenter le nombre de postes au sein des opérateurs de l'État.

Enfin, je voudrais vous interroger sur les RER métropolitains. Une enveloppe de 700 millions d'euros est prévue dans le projet de loi de finances, mais, au printemps, il était question de 800 millions d'euros dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER) et l'on sait que le coût de réalisation des 13 RER métropolitains identifiés s'élève à 15 ou 20 milliards d'euros. Ces dépenses ne seront pas soutenables pour les collectivités si une ingénierie financière spécifique n'est pas mise en place. En tout cas, je note l'écart entre les annonces du Gouvernement et les crédits réellement débloqués.

Mme Frédérique Espagnac. - Vous avez annoncé, dans une interview parue dans Le Parisien, la réduction de l'abattement fiscal - actuellement de 71 % - pour la location de meublés de tourisme classés dans les zones tendues, afin de l'aligner sur celui de la location classique de meublés, qui s'élève à 50 %. Comptez-vous également réviser les plafonds - très élevés - de revenus locatifs qui permettent de bénéficier de ce régime : ces derniers s'établissent à 188 700 euros pour la location de meublés classés et à 77 000 euros pour les autres meublés. À titre de comparaison, les loueurs de logements nus de longue durée ne bénéficient que d'un abattement de 30 % si les revenus locatifs n'excèdent pas 15 000 euros : ce dernier régime reste donc désavantageux, alors même que la location vide est moins rentable. Ce sujet est particulièrement sensible dans les Pyrénées-Atlantiques et au Pays basque.

Avec Bernard Delcros, nous avons rédigé deux rapports, l'un dans le cadre de nos travaux au Sénat et l'autre qui a été remis à Jean Castex, alors Premier ministre, sur la préservation des zones de revitalisation rurale (ZRR). Nous préconisions notamment, afin d'accompagner la revitalisation des communes, la création d'un dispositif complémentaire, les ZRR+, qui comporterait une bonification de la dotation de solidarité rurale (DSR), des exonérations fiscales pour les entreprises, mais aussi pour le secteur médical et celui des aides à la personne, notamment les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Je voudrais donc vous interroger sur l'automaticité de ces exonérations fiscales, notamment pour les entreprises et les professions libérales, et sur les aides destinées aux collectivités. Ce projet de loi de finances comporte-t-il des mesures concernant les ZRR ?

M. Charles Guené. - Les relations entre l'État et les collectivités territoriales ne sont pas bonnes ! Le Gouvernement a pourtant installé cette année le Haut Conseil des finances publiques locales. Est-ce le résultat des échanges épistolaires que nous avons eus ? Cette initiative en tout cas est intéressante et je m'en réjouis, mais tout n'est pas encore formalisé ni bien défini. Certaines personnes n'ont pas été invitées et le cadre reste informel.

Surtout, pour que le dispositif fonctionne, il faut de la confiance. Hier, au Comité des finances locales (CFL), nous devions nous prononcer sur un projet de décret précisant les modalités de répartition de la part dynamique de TVA à la suite de la suppression de la CVAE. Les ministres et leurs services nous ont bien expliqué quel serait le montant de TVA qui serait perçu par les collectivités, mais lorsqu'il s'est agi d'obtenir des éclaircissements sur les 650 millions qui avaient été distraits l'an passé au profit de la finance verte et des départements, nous n'avons pas eu d'explication et la discussion s'est arrêtée là. C'est typique : le Gouvernement et les collectivités ne cessent, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, de se renvoyer la balle et la responsabilité, au lieu de parler du fond des sujets. Si l'on veut avancer, il faut parler vrai, tout mettre sur la table et éviter de passer notre temps à nous chicaner.

M. Jean-Baptiste Blanc. - Dans un entretien publié dans Le Parisien, vous avez proposé de réviser le barème du prêt à taux zéro pour mieux l'ouvrir aux jeunes ménages et de créer un prêt à taux bonifié. Or le texte du projet de loi de finances ne contient pas ces mesures ; il réduit au contraire la portée du prêt à taux zéro. Comptez-vous introduire vos propositions par voie d'amendement ? Ma question fait écho à celle de Jean-Michel Arnaud sur le zéro artificialisation nette (ZAN) ; nous ferons d'ailleurs des propositions sur ce sujet dans les prochaines semaines. C'est aussi la question de l'avenir du modèle pavillonnaire en milieu rural qui est posée.

L'article 17 limite dans le temps ou supprime vingt et une dépenses fiscales, dont douze qui concernent le logement. S'agit-il seulement de modifications techniques ? Quelle est votre réflexion sur la réorientation, nécessaire, de ces dépenses fiscales vers la transition écologique et la réduction de l'artificialisation dans le logement et l'urbanisme ?

Enfin, que pouvez-vous nous dire concernant la réforme de la fiscalité des locations meublées ?

M. Bruno Le Maire, ministre. - Vos questions sont nombreuses... Nous allons nous efforcer d'y répondre, avant de retourner sur les bancs de l'Assemblée nationale pour l'examen du projet de loi de programmation des finances publiques.

M. Canévet m'a interrogé sur le report de la suppression de la CVAE : il est sage, alors que la situation de nos finances publiques est tendue, d'étaler dans le temps la baisse de la CVAE, même si je suis convaincu que la diminution des impôts de production est une nécessité absolue. Plus tôt nous pourrons supprimer ces derniers, mieux cela sera pour l'industrie française ! Les effets positifs de la réindustrialisation sont nombreux : revitalisation de certains territoires, meilleurs salaires, hausse de la qualification et de la productivité des salariés, etc.

En ce qui concerne les abattements sur le GNR pour les agriculteurs, les entreprises de travaux publics et les transporteurs routiers, les situations de ces secteurs sont très différentes. Les droits d'accise sur le gazole s'élèvent à 60,75 centimes d'euro par litre de carburant. Pour les agriculteurs, ils sont de 3,89 centimes, soit le niveau le plus faible en Europe. Dans les travaux publics, ils sont un peu plus élevés. Pour les transporteurs, ils s'établissent actuellement à 42 centimes, soit plus que la moyenne européenne.

Nous avons eu des discussions avec ces secteurs pendant six mois et nous avons trouvé des accords. Il me semble que cette méthode est exemplaire si nous voulons réussir la transition écologique, trouver des consensus, comprendre les contraintes de chacun et apporter des réponses. La brutalité, ça ne marche pas ! On ne fera pas la transition écologique à coup de diktats. Il faut associer les gens, les écouter et trouver des solutions. En tout cas, telle sera toujours ma méthode.

Avec les agriculteurs, nous nous sommes mis d'accord sur une augmentation des accises de 2,85 centimes par litre de carburant, par an, jusqu'en 2030. À cette date, les agriculteurs conserveront un avantage fiscal très élevé, de presque 50 % par rapport au niveau des accises sur le gazole en France : ce n'est que justice et cela me paraît être un bon accord.

Les entreprises des travaux publics ne sont pas, à la différence des agriculteurs, exposées à la concurrence internationale. En outre, elles bénéficient d'une indexation des contrats sur l'inflation. Pour ce secteur, l'évolution sera un peu plus rapide, avec une hausse des accises de 5,99 centimes par litre de carburant par an.

La hausse sera ainsi lissée dans le temps et l'intégralité des recettes fiscales supplémentaires ira aux secteurs concernés. Certes, il ne s'agit pas d'une affectation juridique, car le droit ne permet pas d'affecter ces taxes, mais, grâce à une transparence totale, il sera possible de vérifier que les recettes supplémentaires iront bien à la transformation des exploitations agricoles et des entreprises de travaux publics.

Nous avons abouti à ces accords après six mois de discussions et des dizaines de réunions. C'est la bonne méthode, j'y insiste, en matière de transition écologique. On n'impose pas, on discute et on trouve des compromis. Certes cela prend du temps. Toutefois je préfère cette méthode à ceux qui font des déclarations péremptoires dans les médias pour affirmer qu'il faut supprimer tous les avantages fiscaux sur le GNR, mais qui, finalement, décident de ne rien faire lorsqu'ils sont confrontés aux protestations et aux manifestations des professions concernées. Entre ne rien faire et sortir progressivement des énergies fossiles, je préfère la seconde option.

Monsieur Maurey, il n'y a pas d'autosatisfaction dans mes propos. Je rappelle simplement les bons résultats de l'économie française, que l'on doit aux salariés et aux entrepreneurs. Oui notre dette est élevée, mais elle est soutenable : le spread, l'écart de taux d'intérêt avec l'Allemagne, est stable depuis 2022, autour de 50 ou 60 points de base et n'a pas explosé. C'est la preuve que nous devons maintenir notre trajectoire de désendettement.

La taxe sur les infrastructures de transport de longue distance devrait rapporter environ 600 millions d'euros - 150 millions prélevés sur les aéroports et 450 millions sur les concessions autoroutières. À ceux qui pensent que cette taxe aboutira à une explosion du prix des péages, je rappelle que nous nous sommes assurés auprès du Conseil d'État que l'instauration de cette taxe ne modifierait pas la règle selon laquelle les tarifs des péages sont fixés par arrêté du Gouvernement. Ils suivent l'inflation, mais les sociétés concessionnaires d'autoroutes ne pourront pas répercuter cette taxe sur les usagers. Cette dernière ne vise qu'à faire en sorte que les activités polluantes, qui utilisent des énergies fossiles et brunes, financent la transformation écologique du pays et le transport ferroviaire.

Madame Lavarde, le coût du crédit d'impôt sur les industries vertes n'a pas changé. Cela dépend de la période de référence. Nous prenons 2030, soit un niveau plus élevé qu'en 2027 : 3,7 milliards d'euros - qui devraient rapporter 23 milliards d'euros d'investissement - iront principalement aux batteries électriques. Nous ouvrons énormément d'usines de batteries électriques en France, par exemple dans le Vercors. Une partie plus modeste ira aux éoliennes, aux panneaux photovoltaïques et aux pompes à chaleur... Nous souhaitons accélérer la montée en puissance.

Accorder un crédit d'impôt sur ce type d'activité n'a de sens que si l'on favorise la production industrielle française et européenne. Je suis déterminé à livrer ce combat. Il ne sert à rien de développer l'industrie verte pour avoir nos propres pompes à chaleur, batteries et véhicules électriques si l'on donne des bonus à des industries extra européennes. Je plaide pour que, comme en Chine et aux États-Unis, il y ait des aides à contenu européen : soit un produit industriel comprend 60 % de contenu européen et il a droit à l'aide, soit il ne la touche pas. Cela heurte beaucoup la doxa de certains en Europe, mais ce n'est pas le premier combat que je livre - je pense aux GAFA, à la taxation minimale, à la taxe carbone aux frontières... Je compte sur le soutien de la représentation nationale.

Nous n'avons pas encore rendu les derniers arbitrages sur le bonus. Nous voulons augmenter les aides à l'achat d'un véhicule électrique pour les classes moyennes et modestes. Cela n'a de sens que si ces aides sont réservées aux véhicules les plus respectueux de l'environnement. Ceux-ci sont produits en Europe : tant mieux !

Monsieur Lefèvre, nos prévisions de croissance sont en phase avec celles de l'OCDE et du Fonds monétaire international (FMI).

Le taux du livret A sera bien maintenu à 3 %. J'ai signé un arrêté et j'ai l'habitude de respecter ma signature.

Monsieur Klinger, j'ai répondu sur la fiscalité du GNR et l'affectation.

Je salue la dernière intervention de Daniel Breuiller et le remercie pour la qualité du travail que nous avons fait ensemble. Oui, nous évoluons. Si le débat au Parlement ne faisait pas progresser les parlementaires et les ministres, il ne servirait à rien. Voilà l'intérêt du débat démocratique serein et approfondi qui a lieu au Sénat : faire bouger les lignes. Nous l'avons fait sur MaPrimeRénov' - augmentée de 1,6 milliard d'euros - sur la CVAE - je veux aller le plus vite possible - et sur les locations Airbnb - nous allons modifier la fiscalité. Je me félicite de ces victoires utiles pour la collectivité.

Monsieur Arnaud, je suis prêt à parler de la contribution sur la rente inframarginale, c'est-à-dire les recettes récupérées sur les profits élevés réalisés par certains énergéticiens. Mise en place en 2022 par l'Union européenne, prorogée en 2023, elle s'arrête à la fin de l'année. Si les parlementaires veulent la maintenir, nous sommes ouverts à la discussion.

L'interdiction de location des passoires thermiques commençait pour les logements classés G+ au 1er janvier 2023. Je demande que l'application soit soutenable pour les propriétaires. Or cela pose problème dans de nombreuses copropriétés où il n'y a pas d'accord. On ne peut pas leur dire : « débrouillez-vous ! ». Les solutions sont encore beaucoup trop complexes actuellement.

Les diagnostics de performance énergétique (DPE) sont-ils l'instrument le plus efficace pour évaluer une passoire thermique ? Ils favoriseraient le chauffage au gaz, au détriment de celui à l'électricité. Est-ce cohérent ? Je suis ministre, mais aussi citoyen : j'écoute mes compatriotes, qui veulent plus de clarté, de simplicité et d'accompagnement. Ils ont raison. Tel était l'objet de la discussion que j'ai eue avec des lecteurs du journal Le Parisien. Ces discussions sont aussi utiles que celles avec le Parlement pour la présentation du budget.

Redonnez-moi la liste des communes concernées par la renégociation avec EDF. Je suis agacé : il y a un principe. J'ai demandé au président d'EDF de faire preuve de diligence. Quand une commune s'approvisionne à des tarifs beaucoup trop élevés, elle doit pouvoir renégocier ses contrats. J'apprends par des maires ruraux ou de montagne qu'EDF leur accorde généreusement un chèque de 50 euros par mois. Ce n'est pas possible !

M. Jean-Michel Arnaud. - Exact.

M. Bruno Le Maire, ministre. - Donnez-moi la liste des communes et leurs contrats. Mon énergie est inépuisable pour défendre nos concitoyens et nos communes.

Monsieur Rambaud, l'impôt minimum sur les multinationales sera mis en place à partir de 2025 et apportera des recettes en 2026. Il est possible de prévoir la même chose pour les particuliers, mais seulement au niveau européen. Il ne s'agit pas de pénaliser la France fiscalement. Si l'on m'explique que les plus fortunés voient, pour des raisons légales, leur niveau d'imposition baisser, et qu'il faudrait mettre en place une telle imposition européenne minimale, je suis prêt à en discuter. Je l'ai fait pour les plus grandes entreprises, qui avaient les moyens de réduire leur impôt en dessous des 15 %.

Monsieur Delcros, je vous ai répondu sur le crédit d'impôt pour les industries vertes.

Monsieur de Montgolfier, la commission des finances du Sénat peut accéder à l'avis du Conseil d'État. Je ne souhaite pas rendre celui-ci public, car cela pourrait donner des arguments à nos adversaires pour attaquer les dispositifs fiscaux français. Le risque est trop élevé. Le président et le rapporteur général de votre commission ont tout pouvoir pour fournir ces informations aux sénateurs, en s'assurant qu'elles ne soient pas divulguées.

Monsieur Cozic, l'indexation des prestations est une réponse très efficace au pouvoir d'achat, sans compter la contribution sur les carburants.

Monsieur Sautarel, je suis d'accord avec vous sur le rythme de la transition écologique.

Madame Espagnac, je vous confirme un abattement de 71 à 50 % pour les locations de meublés classés dits principalement Airbnb. Nous ferons attention à ce que les gîtes ruraux ne soient pas concernés ; c'est une vraie inquiétude. Enfin, nous alignerons les seuils - 288 700 euros à 72 600 euros - pour que la mesure soit efficace, juste et qu'elle protège le Pays basque cher à notre coeur à tous les deux.

Monsieur Guené, le HCFPL est un instrument extraordinairement efficace, permettant un dialogue d'égal à égal entre l'État et les collectivités territoriales. Je n'en peux plus des postures et des pétitions de principe où, par médias interposés, on dit que l'État reproche aux collectivités territoriales d'avoir un niveau d'épargne brute trop élevé, tandis que les collectivités territoriales se plaignent d'être fauchées. Il faut discuter sérieusement autour de la table. La composition finale du HCFPL n'est pas arrêtée. Je cherche l'efficacité et la simplicité, d'où la nomination de représentants de l'Association des maires de France (AMF), de Régions de France et de l'Assemblée des départements de France (ADF). Oui à un possible élargissement à d'autres associations d'élus, mais sans être cinquante...

Monsieur Blanc, les évolutions sur le PTZ ne figurent pas dans le PLF, car elles sont le fruit de la discussion avec les députés. Nous avons reconnu que le choix gouvernemental initial était trop fermé. La redéfinition du barème du PTZ faisait qu'avec des taux plus élevés et des apports plus faibles, plus personne ou presque ne pouvait en profiter. Tel n'était pas l'objectif. Nous devons faire évoluer le barème pour que les classes moyennes aient accès au PTZ. Je suis prêt également à réviser des éléments de zonage et à travailler sur un prêt à taux intermédiaire, un peu inférieur au prix du marché.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. - Monsieur Canévet, après le rapport sur les Ehpad de Christine Pires Beaune à la Première ministre, un fonds d'urgence de 100 millions d'euros a été mis en place. Nous expérimentons par ailleurs dans le PLFSS de nouveaux modes de financement. Il s'agit d'une réforme structurelle.

Monsieur Laménie, je vous renvoie aux travaux du rapporteur général de l'Assemblée nationale : l'autonomie fiscale des collectivités territoriales baisse, mais leur autonomie financière augmente. Dans le dernier PLF, nous avons ouvert plusieurs outils appréciés des élus locaux comme la majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) et nous avons étendu le périmètre d'application de la taxe sur les logements vacants. Cela leur permettra de répondre aux difficultés de logement.

La DGF augmentera de 220 millions d'euros après une hausse de 320 millions d'euros, et le fonds vert augmentera pour s'établir à 2,5 milliards d'euros. Les concours financiers augmentent de plus de 1 milliard d'euros entre le PLF 2023 et le PLF 2024.

Monsieur Maurey, la taxe foncière est un impôt 100 % local. La majorité ne souhaite pas revenir sur l'évolution des bases foncières votée en 2016, indexée sur l'inflation. Les élus peuvent donc faire tous les choix possibles : soit baisser leur taux face à l'augmentation de la base, soit le maintenir - comme l'ont décidé 85 % des communes -, soit l'augmenter. C'est très bien ainsi. Nous avons dû batailler à l'Assemblée nationale contre des groupes d'opposition qui voulaient plafonner l'évolution des bases foncières. Notre solution est plus respectueuse de la libre administration des collectivités territoriales et de leur autonomie fiscale, mais l'État n'est pour rien dans l'évolution de la taxe foncière.

Madame Lavarde, effectivement ce n'est pas à travers le PLF qu'on choisit les comptes éligibles au FCTVA. Je vous confirme que seul le compte 212 est concerné, et non les comptes 213 et 214. Nous ne faisons pas de rétroactivité en raison du coût que cela représenterait pour les finances publiques. Toutes les associations d'élus ont salué notre décision et le périmètre concerné : 250 millions d'euros, ce n'est pas rien dans la période actuelle. On ne retrouve pas exactement ces chiffres dans la LPFP, car c'est une chronique progressive. On arrivera à 250 millions d'euros en 2026. Je suis à votre disposition pour vous apporter davantage de précisions.

Monsieur Breuiller, il ne faut pas comparer les 7 milliards d'euros de la transition écologique de l'État avec la part publique du rapport Pisani-Mahfouz. Bien sûr, il n'y a pas de transition écologique sans les collectivités territoriales. Nous encourageons l'investissement par le fonds vert, nous réorientons les investissements vers les enjeux de la transition écologique, nous mobilisons 100 milliards d'euros de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) sur les enjeux climat. Un amendement voté lundi soir en commission des finances de l'Assemblée nationale sur la LPFP prévoit une trajectoire pluriannuelle de financement de la transition écologique, ce qui permettra de faire toute la clarté sur les financements publics et privés. Cela était attendu par de nombreux groupes politiques.

Les ministres Christophe Béchu et Dominique Faure déclineront les enjeux de la transition écologique dans des COP régionales. C'est une bonne méthode.

Monsieur Rambaud, les prochaines étapes de lutte contre la fraude à la TVA sont notamment le dropshipping, pour lutter contre ceux qui, sur des sites internet, importent des produits fabriqués à l'extérieur et les revendent en France sans application de la TVA. Nous allons renforcer notre dispositif pour les sanctionner. L'injonction numérique permettra de déréférencer sur des plateformes de commerce en ligne des entreprises qui ne respectent pas leurs obligations fiscales. Nous créerons aussi une représentation fiscale unique pour collecter la TVA, car ces sujets sont extrêmement techniques. Il est parfois très difficile, pour les agents de la DGFiP, de remonter la fraude à la TVA.

Monsieur Delcros, tant pour les dépenses fiscales que sociales, nous allons plafonner et conserver l'échéance à trois ans de toutes les niches pour garantir leur bonne évaluation. Bruno Le Maire vous a répondu sur votre proposition de travail sur le PTZ.

Monsieur de Montgolfier, je suis très heureux d'échanger au Sénat. Vous aviez fait des propositions de lutte contre la fraude à la TVA dans vos travaux antérieurs, qu'on retrouve dans notre plan contre la fraude : nous nous inspirons des travaux des deux chambres.

Monsieur Sautarel, je suis très preneur de vos pistes d'économies pour l'État, les agences et les collectivités territoriales. Je vous invite à participer à la revue de mission pour réaliser des réformes structurelles. Toutes les bonnes volontés sont les bienvenues pour ce chantier colossal.

M. Claude Raynal, président. - Je vous remercie. Je salue Gérard Longuet qui nous a toujours bluffés par la qualité de ses interventions en tant que rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire ». Je remercie également Charles Guéné, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ainsi que Daniel Breuiller, rapporteur spécial de la mission « Travail et emploi ». Deux heures après son arrivée pour remplacer une sénatrice élue à l'Assemblée nationale, il parlait comme s'il était là depuis six ans ! C'est un vrai savoir-faire. Merci pour tous vos apports à notre commission.

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