B. UN ÉLARGISSEMENT DE LA PROCÉDURE D'ÉVACUATION FORCÉE
La loi Dalo du 5 mars 2007 a créé, à l'initiative du Sénat, une procédure administrative dérogatoire2(*) permettant à un propriétaire ou à un locataire de solliciter le concours du préfet pour procéder à l'évacuation forcée de son logement en cas de violation de domicile au sens de l'article 226-4 du code pénal. Sa mise en oeuvre requiert la réunion de trois conditions : le dépôt d'une plainte ; la preuve que le local occupé constitue le domicile du demandeur ; le constat par un officier de police judiciaire (OPJ) de l'occupation illicite. Cette procédure administrative permet d'obtenir une évacuation des lieux sans attendre d'avoir obtenu une décision de justice. Elle demeure peu usitée puisqu'au cours de l'année écoulée moins de 170 demandes ont été recensées par les préfectures et qu'il a été procédé seulement à une quarantaine d'évacuations forcées.
L'article 2 de la proposition de loi entend élargir le champ d'application de cette procédure aux situations où un squatteur se maintient dans les lieux de façon illicite sans y être entré par effraction (par exemple parce que la porte était ouverte) ainsi qu'aux domiciles vides de meubles, ce qui paraît contradictoire puisqu'un domicile doit en principe comporter un minimum de meubles pour être habitable.
Tel qu'il est rédigé, cet article présente en outre un inconvénient majeur : pour traiter de cas marginaux, il risquerait de rendre applicable la procédure d'évacuation forcée à des situations où un locataire se maintient dans les lieux après la résiliation de son bail. Dans la mesure où la procédure de l'article 38 n'offre aucune garantie en matière de respect du contradictoire ou de prévention des expulsions, elle n'apparaît pas appropriée pour régler ce type de litige.
C.
DÉCOURAGER LE SQUAT EN PRÉVOYANT
UN RÉGIME
DÉROGATOIRE DE RESPONSABILITÉ CIVILE
ET EN LUTTANT CONTRE LA
VACANCE DES LOGEMENTS
Alors qu'en l'état actuel du droit, les dommages résultant d'un défaut d'entretien relèvent de la responsabilité du propriétaire, l'article 2 bis introduirait un régime dérogatoire lorsqu'un bâtiment est occupé sans droit ni titre en prévoyant que le propriétaire serait libéré de l'obligation d'entretien du bien et, par conséquent, ne pourrait voir sa responsabilité engagée sur ce motif. De même, pour tout dommage causé à un tiers, l'occupant illicite en serait tenu pour responsable, et non le propriétaire.
L'article 2 ter pérennise le dispositif de mise à disposition temporaire de locaux vacants, introduit à titre expérimental en 2009 et prorogé à deux reprises, pour une fin de l'expérimentation initialement programmée à l'issue de l'année 2023. Ce dispositif permet à des organismes agréés par le préfet de loger des résidents temporaires dans des locaux vacants, dans l'attente d'un changement d'usage ou de travaux importants, en contrepartie de leur engagement à entretenir les locaux et à les rendre au propriétaire à l'échéance convenue. En favorisant une meilleure utilisation de locaux vacants, ce dispositif contribue indirectement à lutter contre le squat.
* 2 Article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (dite « Loi Dalo »).