TITRE
III
FACILITER LES TRANSITIONS ENTRE EMPLOI ET RETRAITE
Article
13
Amélioration des transitions entre l'activité et la
retraite
Cet article vise à renforcer l'attractivité du cumul emploi-retraite et à favoriser le recours à la retraite progressive.
La commission vous demande d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.
I - Le dispositif proposé : la constitution de droits à pension en cumul emploi-retraite et l'extension de la retraite progressive à la fonction publique
A. Les dispositifs de transition entre l'activité et la retraite restent particulièrement confidentiels
1. La retraite progressive peine encore à séduire les assurés en fin de carrière
a) Les assurés en retraite progressive réduisent leur activité en contrepartie du service d'une fraction de leur pension de retraite
(1) La retraite progressive des salariés repose sur une réduction du temps de travail
Créée en 1988 482 ( * ) , la retraite progressive permet à un assuré exerçant, à titre exclusif, une activité à temps partiel 483 ( * ) ou à temps réduit par rapport à la durée maximale légale, réglementaire ou conventionnelle exprimée en jours, de demander la liquidation de sa pension de retraite et le service d'une fraction de celle-ci 484 ( * ) .
L'accès à ce dispositif est conditionné au respect de trois critères :
- avoir atteint l'âge de 60 ans ;
- justifier d'une durée d'assurance au moins égale à 150 trimestres 485 ( * ) ;
- justifier d'une quotité de travail soit à temps partiel par rapport à la durée du travail à temps complet soit à temps réduit par rapport à la durée de travail maximale exprimée en jour comprise entre 40 % et 80 % 486 ( * ) .
Lorsque l'assuré demande le bénéfice de la retraite progressive, la pension est liquidée provisoirement et la même fraction de celle-ci est servie dans le régime général, le régime des salariés agricoles, le régime des non-salariés agricoles et le régime des professions libérales 487 ( * ) . Cette dernière est égale à la différence entre 100 % et la quotité de travail soit à temps partiel par rapport à la durée du travail à temps complet soit à temps réduit par rapport à la durée de travail maximale exprimée en jour.
Du reste, la décote appliquée au taux de la pension liquidée provisoirement ne peut excéder 25 %, ce qui correspond à un taux minimal de liquidation de 37,5 %.
L'extension de la retraite progressive aux salariés en convention de forfait en jours
Créée par la loi du 19 janvier 2000, la convention de forfait est un document écrit qui détermine un temps de travail différent de la durée légale du travail, fixée à 35 heures par semaine. L'accord du salarié est obligatoire 488 ( * ) .
Deux types de conventions coexistent :
- la convention de forfait en heures, qui permet d'intégrer à la durée de travail d'un salarié sur une période prédéterminée un certain nombre d'heures supplémentaires prévisibles et rémunérées 489 ( * ) , sans dépasser la durée maximale quotidienne et hebdomadaire du travail (respectivement 10 et 48 heures). Ce type de convention facilite la gestion administrative des systèmes de paiement des salariés travaillant en autonomie en prévoyant d'avance le dépassement de la durée légale du travail ;
- la convention de forfait en jours permet au salarié qui la conclut avec son employeur de travailler un certain nombre de jours dans l'année 490 ( * ) sans être astreint au respect des durées maximales quotidienne et hebdomadaire du travail 491 ( * ) , mais en continuant à bénéficier des garanties légales prévues en matière de repos quotidien et hebdomadaire (respectivement 11 et 24 heures consécutives), de congés payés et de jours fériés chômés dans l'entreprise. La convention doit indiquer le nombre de jours travaillés dans l'année, dans la limite du nombre fixé par l'accord collectif qui prévoit la possibilité de conclure une telle convention, au maximum 218 jours 492 ( * ) .
Ce dernier type de convention permet de regrouper les heures normales et les heures supplémentaires en offrant une rémunération fixe chaque mois, à l'avantage de l'employeur. En contrepartie, le salarié dispose d'une grande liberté pour organiser son temps de travail, l'employeur devant s'assurer régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable 493 ( * ) et la rémunération en rapport avec cette dernière 494 ( * ) .
Or, la Cour de cassation a jugé en 2016 495 ( * ) que les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours dit « réduit », qui fixe la durée annuelle de leur travail à un niveau inférieur au plafond légal ou conventionnel, ne pouvaient pas bénéficier de la retraite progressive, au motif que ceux-ci n'avaient pas la qualité de salariés à temps partiel telle que définie par le code du travail 496 ( * ) . En effet, à défaut d'une quantification en heures de leur activité, ces salariés ne peuvent justifier « de l'exercice d'une activité dont la durée, exprimée en heures, est inférieure à la durée normale du travail ».
Saisi d'une QPC soulevée par une salariée ayant conclu avec son employeur une convention de forfait en jours qui fixait la durée annuelle de son travail à un niveau inférieur au plafond fixé dans l'accord collectif et s'étant vue refuser le bénéfice de la retraite progressive par sa caisse de retraite, faute d'avoir la qualité de salarié à temps partiel aux termes de la jurisprudence de la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel a alors jugé que la différence de traitement entre les salariés dont la durée de travail est exprimée en heures et ceux qui exercent une activité quantifiée en jours sur l'année n'était pas en adéquation avec l'objet de la loi régissant la retraite progressive et méconnaissait le principe d'égalité devant la loi 497 ( * ) .
De fait, constatant que la retraite progressive n'est pas subordonnée à un décompte en heures de la durée de travail dès lors qu'elle est ouverte aux travailleurs indépendants, le Conseil a estimé que les salariés en convention de forfait jour « réduit » exercent une activité réduite par rapport au plafond fixé par la loi ou l'accord collectif. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une durée de travail « de principe » assimilable à un temps plein, ce dernier constitue en effet, aux termes de la décision, une durée de référence.
Le dispositif de retraite progressive applicable aux salariés à temps partiel a donc été déclaré inconstitutionnel et son abrogation différée au 1 er janvier 2022 afin d'éviter de priver les salariés à temps partiel du bénéfice de la retraite progressive dans l'attente de l'adoption de nouvelles dispositions par le législateur, intervenue fin 2021 498 ( * ) .
L'assuré dispose en outre de la possibilité de demander, sous réserve de l'accord de son employeur, que ses cotisations soient calculées sur la base du salaire reconstitué correspondant à son activité exercée à temps plein 499 ( * ) . L'employeur peut alors prendre en charge la différence entre le montant de la cotisation salariale d'assurance vieillesse due sur le salaire correspondant à l'activité exercée à temps plein et celui de la cotisation d'assurance vieillesse dont le salarié serait redevable s'il n'était pas fait usage de cette faculté 500 ( * ) .
Le dispositif est également ouvert :
- aux assurés exerçant soit plusieurs activités salariées à temps partiel, soit plusieurs activités à temps réduit, en additionnant soit les rapports entre le nombre d'heures de travail et la durée de travail à temps complet soit les rapports entre le nombre de jours et la durée de travail maximale exprimée en jours applicables à chacun des emplois ;
- aux assurés exerçant à titre exclusif certaines activités en qualité d'assimilés-salariés 501 ( * ) .
L'extension de la retraite progressive aux mandataires sociaux
Le mandataire social est une personne en charge de l'organisation de la vie d'une société, de la gestion de celle-ci et de sa représentation dans ses relations avec les tiers. Il reçoit son mandat soit de l'assemblée générale des associés, soit des statuts de la société, soit d'un contrat de mandat.
Le mandat social étant exclusif de tout lien de subordination, le code du travail n'est pas applicable au dirigeant d'entreprise exerçant en qualité de mandataire social, qui relève du code du commerce. Le cumul avec un contrat de travail n'est possible que dans la mesure où ce dernier correspond à un emploi effectif caractérisé par un lien de subordination et par le versement à l'intéressé d'une rémunération distincte de celle qu'il perçoit au titre de ses fonctions de mandataire social.
Pour autant, certains mandataires sociaux sont obligatoirement affiliés au régime général de la sécurité sociale, sans qu'il soit nécessaire de rechercher l'existence d'un lien de subordination entre les personnes exerçant ces activités et l'entreprise : ils sont considérés comme « assimilés salariés » dans la mesure où ils perçoivent une rémunération au titre de leurs fonctions 502 ( * ) . Il s'agit des présidents de conseil d'administration et des directeurs généraux des sociétés anonymes (SA), des gérants égalitaires ou minoritaires de sociétés à responsabilité limitée (SARL) et des présidents et dirigeants de sociétés par actions simplifiées (SAS).
Toutefois, à défaut de pouvoir justifier de la qualité de salariés à temps partiel, les mandataires sociaux ne pouvaient pas, jusqu'en 2022, bénéficier de la retraite progressive. Le législateur les a finalement inclus dans le champ des assurés éligibles au dispositif 503 ( * ) .
En cas de changement de la situation de l'assuré, le montant de la fraction de pension peut être modifié ou son versement suspendu ou supprimé :
- lorsqu'une modification de la durée de travail ayant une incidence sur la fraction de pension à laquelle l'assuré peut prétendre a lieu, la fraction de pension est modifiée à l'issue d'une période d'un an à compter de la date d'effet de la pension. Elle peut éventuellement être modifiée de nouveau à la fin de chaque période annuelle ;
- lorsque les conditions d'éligibilité au dispositif ne sont plus réunies, notamment si l'activité a cessé ou n'est plus exercée à titre exclusif, le versement de la fraction de pension est suspendu à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'assuré a cessé de remplir ces conditions. Le cas échéant, le versement de la fraction de pension reprend le premier jour du mois suivant celui au cours duquel ces conditions ont de nouveau été satisfaites ;
- par dérogation, lorsque l'assuré cesse d'être éligible à la retraite progressive du fait d'une modification de sa durée de travail, la suspension prend effet au premier jour du mois suivant la fin de la période annuelle au cours de laquelle ce changement est intervenu. Le cas échéant, le versement reprend le premier jour suivant la fin de la période annuelle au cours de laquelle l'assuré a de nouveau satisfait aux conditions d'éligibilité ;
- lorsque l'assuré reprend une activité à temps complet, la fraction de pension est définitivement supprimée à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel la reprise d'une telle activité est intervenue 504 ( * ) .
Dans chacun de ces cas, la caisse de retraite procède, le cas échéant, au remboursement des sommes dues à l'assuré ou au recouvrement des sommes trop perçues par celui-ci sur une période de douze mois ou, à la demande de l'assuré, sur une période plus courte.
Lorsque l'assuré cesse totalement son activité et atteint l'âge d'ouverture des droits, le service de la fraction de pension est remplacé, à sa demande, par celui de la pension complète, liquidée en tenant compte du montant de la pension initiale et de la durée d'assurance accomplie depuis son entrée en jouissance, sans pouvoir être inférieure au montant ayant servi de base au calcul de la fraction de pension servie durant la période de retraite progressive, le cas échéant revalorisé sur la base de l'inflation constatée 505 ( * ) .
Dans ces deux derniers cas, le service d'une fraction de pension ne peut pas être à nouveau demandé.
(2) Les travailleurs indépendants doivent justifier d'une diminution de leurs revenus professionnels
Les travailleurs indépendants peuvent également recourir à la retraite progressive 506 ( * ) . Celle-ci est conditionnée, comme pour les salariés, à l'atteinte de l'âge de 60 ans et à la justification d'une durée d'assurance d'au moins 150 trimestres.
De plus, les revenus professionnels tirés de l'activité indépendante exercée à titre exclusif par l'assuré au cours de l'année précédant celle de la demande de retraite progressive tels qu'ils sont retenus pour l'assiette de l'impôt sur le revenu doivent avoir diminué de 20 % à 60 % par rapport à la moyenne de ces mêmes revenus des cinq années précédant la demande revalorisés sur la base de l'inflation constatée 507 ( * ) . La fraction de pension servie est égale à la fraction de réduction des revenus professionnels. Le pourcentage de réduction de ces revenus est ensuite calculé au 1 er juillet de chaque année en comparant les revenus de l'année précédente et la moyenne de ceux des cinq années ayant précédé la demande de retraite progressive.
Compte tenu des spécificités du mode de calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants, qui font l'objet d'un appel provisionnel au cours de l'année N sur la base des revenus de N-1 et d'une régularisation en N+1 une fois les revenus de N connus, la fraction de pension est fixée à titre provisionnel au taux de 50 % des revenus professionnels pendant la première année et le premier semestre de l'année suivante 508 ( * ) . Une révision est éventuellement opérée à compter du 1 er juillet de la deuxième année et chaque 1 er juillet.
Dans le cas spécifique des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, le bénéfice de la retraite progressive est conditionné à la cessation progressive de l'activité professionnelle 509 ( * ) , qui est réalisée :
- pour les exploitations ou entreprises individuelles dont l'importance est appréciée par référence à la surface minimale d'assujettissement, par la diminution progressive des productions hors-sol et par la cession progressive des terres cessibles mises en valeur ;
- pour les exploitations ou entreprises individuelles dont l'importance ne peut être appréciée par référence à la surface minimale d'assujettissement, par la diminution du nombre annuel d'heures de travail afférentes à la conduite de cette exploitation ou entreprise ;
- pour les sociétés, par la cession progressive des parts détenues par le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole 510 ( * ) .
b) Un dispositif encore méconnu et peu attractif
D'après la direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques (Drees), seuls 23 020 assurés du régime général bénéficiaient du dispositif en 2020, dont 72 % de femmes, avec un âge moyen de 61,7 ans . Les bénéficiaires étaient alors au nombre de 800 au régime des salariés agricoles, dont 57 % de femmes, et étaient âgés en moyenne de 63,3 ans.
Effectifs d'assurés en retraite progressive en 2020
Source : Drees, Les retraités et les retraites , édition 2022
En effet, comme le rappelle le rapport Bellon-Mériaux-Soussan (2020), seul un retraité sur trois indiquait savoir à quoi correspondait ce dispositif en 2017 511 ( * ) . De plus, l'effet de la diminution de l'activité sur le revenu global des assurés présente un caractère particulièrement dissuasif que le service d'une fraction de pension ne compense pas.
Bien que ce dispositif ne concerne qu'un nombre extrêmement faible d'assurés, il convient de souligner que le nombre de ses bénéficiaires a été multiplié par 4,4 depuis 2015, sous l'effet, notamment, de l'abaissement de l'âge d'éligibilité de 62 à 60 ans 512 ( * ) .
Évolution des effectifs d'assurés en retraite progressive au régime général depuis 1990
Source : Drees, Les retraités et les retraites , édition 2022
2. Le recours au cumul emploi-retraite est freiné par l'absence de droits acquis en contrepartie des cotisations versées
a) Le cumul d'une pension avec des revenus d'activité peut être intégral ou plafonné
Il est loisible à un retraité de reprendre une activité salariée et de cumuler celle-ci avec sa pension dans le cadre de deux dispositifs 513 ( * ) :
- le cumul emploi-retraite libéralisé , qui permet, à la condition soit que l'assuré ait atteint l'âge d'ouverture des droits et justifie de la durée d'assurance requise pour l'obtention du taux plein ou soit qu'il ait atteint l'âge d'annulation de la décote, et sous réserve qu'il ait liquidé ses pensions de retraite personnelles auprès de la totalité des régimes obligatoires de base et complémentaires dont il a relevé, de cumuler entièrement sa pension avec ses revenus d'activité ;
- le cumul emploi-retraite plafonné , qui limite le montant global de la pension et des revenus d'activité des retraités ne satisfaisant pas à ces conditions au montant le plus avantageux entre 160 % du Smic et la moyenne des salaires perçus au cours des trois mois d'activité avant la liquidation des pensions 514 ( * ) . Le cumul n'est possible que six mois après la date d'entrée en jouissance de la pension.
Une dérogation aux règles de délai de carence et de plafonnement des revenus en cas de cumul emploi-retraite est prévue pour diverses catégories d'activité, parmi lesquelles figurent les activités du spectacle et du mannequinat entraînant affiliation au régime général, les activités à caractère artistique, littéraire ou scientifique exercées accessoirement avant la liquidation de la pension, la participation aux activités juridictionnelles ou assimilées ou encore les activités correspondant à des vacations accomplies dans des établissements de santé ou dans des établissements ou services sociaux et médico-sociaux et à leur demande par des médecins ou infirmiers en retraite.
Les règles applicables aux professionnels libéraux 515 ( * ) et aux artisans et commerçants 516 ( * ) sont similaires. Toutefois, en cas de cumul plafonné, le plafond est fixé :
- pour les professionnels libéraux, au montant du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 43 992 euros au 1 er janvier 2023, rapporté à la durée d'affiliation au titre de l'activité libérale exercée postérieurement à l'entrée en jouissance de la pension lorsque cette durée est inférieure à un an 517 ( * ) ;
- pour les artisans et commerçants, au montant du PASS lorsque l'activité est exercée dans une zone urbaine sensible (ZUS) ou dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) et, dans les autres zones, à la moitié de ce montant, soit 21 996 euros, rapportée à la durée d'exercice de l'activité indépendante postérieurement à l'entrée en jouissance de la pension lorsque cette durée est inférieure à un an 518 ( * ) .
Les fonctionnaires, quant à eux, sont soumis à des règles de cumul spécifiques. Ils bénéficient ainsi du cumul libéralisé si leurs revenus bruts d'activité sont inférieurs au tiers du montant brut de la pension de retraite augmenté de la moitié de l'indice majoré 227, soit 7 549,92 euros au 1 er janvier 2023 519 ( * ) . Peuvent toutefois cumuler intégralement leur pension et des revenus d'activité :
- les titulaires de pensions militaires percevant une rémunération versée par un organisme privé ou un établissement public à caractère industriel ou commercial 520 ( * ) ;
- les titulaires de pensions civiles et militaires ou d'une solde de réforme allouée pour invalidité ;
- les titulaires de pensions militaires non officiers rémunérant moins de 25 ans de services ;
- les titulaires de pensions militaires atteignant la limite d'âge du grade qu'ils détenaient en activité ou la limite de durée de services qui leur était applicable en activité ;
- les titulaires de pensions civiles et militaires ayant atteint, avant le 1 er janvier 2004, la limite d'âge qui leur était applicable dans leur ancien emploi 521 ( * ) .
b) Depuis 2015, les cotisations versées en cumul emploi-retraite n'ouvrent plus de droits à pension supplémentaires
Depuis la réforme dite « Touraine » 522 ( * ) , la reprise d'une activité par le bénéficiaire d'une pension de retraite personnelle versée par un régime de retraite de base légalement obligatoire et ayant pris effet à compter du 1 er janvier 2015 n'ouvre pas de nouveaux droits à pension de base ou complémentaire 523 ( * ) , à l'exception du cas des bénéficiaires d'une pension militaire 524 ( * ) et des élus locaux 525 ( * ) .
Concrètement, les revenus tirés de l'activité professionnelle reprise sont assujettis à cotisations, mais celles-ci sont versées au titre de la solidarité, donc sans contrepartie, puisqu'elles ne permettront pas d'augmenter le montant de la pension de l'assuré une fois l'activité cessée.
N'ayant jamais été saisi de cette disposition de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014, le Conseil constitutionnel n'a pu jusqu'alors se prononcer sur sa constitutionnalité, qui paraît particulièrement incertaine. En effet, la jurisprudence du Conseil établit que, contrairement à l'impôt, la cotisation sociale ouvre des droits à prestations sociales 526 ( * ) .
c) Plusieurs assouplissements ont été apportés aux modalités de cumul emploi-retraite applicables aux professionnels de santé depuis la crise sanitaire
En 2020, la survenue de la crise sanitaire a nécessité une mobilisation d'ampleur des professionnels de santé qui s'est notamment traduite par la poursuite ou la reprise d'activité des retraités.
Le législateur a donc permis, à titre exceptionnel, de cumuler entièrement une pension de retraite avec une activité professionnelle exercée dans un établissement de santé ou médico-social pendant la première période d'état d'urgence sanitaire, entre le 24 mars et le 10 juillet 2020 527 ( * ) .
Dans le cadre de la deuxième période d'état d'urgence sanitaire 528 ( * ) , par une lettre ministérielle du 23 mars 2021, le ministre des solidarités et de la santé et le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail ont demandé, pour toute demande de reprise d'activité médicale ou paramédicale du personnel soignant hospitalier relevant de la quatrième partie du code de la santé publique 529 ( * ) et des professionnels de santé libéraux relevant de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), de la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes (CARCDSF), de la Caisse d'assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) et de la Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes (Carpimko), jusqu'au 1 er juin 2021 :
- à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (Ircantec) d'autoriser le cumul d'une pension de retraite et d'une telle activité auprès du dernier employeur sans opposer le délai de six mois à compter de la date d'entrée en jouissance de la pension ;
- à la Cnav, à l'Ircantec, à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), à la CARMF, à la CARCDSF, à la CAVP et à la Carpimko de ne pas prendre en compte les revenus des personnes concernées relatifs à une telle activité pendant toute la période en cause pour l'application des règles du cumul emploi-retraite plafonné.
Une lettre ministérielle du 9 avril 2021 a également prévu un assouplissement des règles de cumul pour les retraités de la fonction publique d'État et territoriale.
Enfin, une lettre ministérielle du 15 septembre 2021 a ouvert le bénéfice de ce dispositif à tous les professionnels de santé d'octobre 2020 à décembre 2021. Le législateur l'a finalement régularisé fin 2021 530 ( * ) , puis a dispensé les professionnels de santé exerçant en zone de désertification médicale, caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins 531 ( * ) , du délai de six moins préalable à la reprise d'une activité chez le dernier employeur et du plafonnement des revenus dans le cadre du cumul emploi-retraite 532 ( * ) .
Les exonérations sociales accordées aux médecins en cumul emploi-retraite
Les médecins retraités reprenant une activité médicale bénéficient de plusieurs dispositifs d'exonération de cotisations sociales :
- les médecins retraités reprenant une activité en qualité de médecin dans une zone de désertification médicale et dont les revenus d'activité non salarié de l'avant-dernière année sont inférieurs à 80 000 euros sont dispensés de l'affiliation à leur régime de prestations complémentaires de vieillesse (PCV) et donc du paiement des cotisations afférentes 533 ( * ) ;
- les médecins retraités continuant à exercer leur activité ou effectuant des remplacements dans une zone de désertification médicale en montagne sont exonérés par moitié du paiement des cotisations dues à leur régime de base 534 ( * ) ;
- sous réserve que leur revenu professionnel non salarié annuel soit inférieur à un montant fixé par décret 535 ( * ) , les médecins remplissant les conditions du cumul emploi-retraite libéralisé sont exonérés au titre de leur activité professionnelle en qualité de médecin des cotisations dues au titre de l'année 2023 à leurs régimes de retraite de base 536 ( * ) , de retraite complémentaire 537 ( * ) et de prestations complémentaires de vieillesse 538 ( * ) .
d) Les effectifs de retraités en cumul emploi-retraite sont encore particulièrement faibles
D'après l'Insee, s eules 495 000 personnes résidant en France déclaraient cumuler une pension de retraite et un revenu d'activité en 2020 (en incluant la retraite progressive).
Effectifs de retraités en situation de cumul d'une activité avec la retraite de 2014 à 2020
Source : Drees, Les retraités et les retraites , édition 2022
En effet, le cumul emploi-retraite pâtit lui aussi d'un déficit de notoriété : comme le souligne, le rapport Bellon-Mériaux-Soussan moins de 60 % des nouveaux retraités savaient à quoi correspondait ce dispositif en 2017. Les cumulants relèveraient principalement de trois catégories :
- des retraités hommes ayant eu une carrière longue ;
- des retraités cadres, majoritairement masculins et ayant des revenus d'activité élevés ;
- des personnes à carrière incomplète, très majoritairement des femmes, contraints de cumuler du fait de pensions trop faibles.
B. Le développement des transitions entre l'emploi et la retraite est un enjeu prioritaire
1. La retraite progressive doit désormais être assouplie et ouverte à de nouveaux publics
a) La retraite progressive serait étendue aux professionnels libéraux, aux avocats, aux assurés des régimes spéciaux et aux fonctionnaires
Le Gouvernement propose d'harmoniser les dispositions législatives relatives à la retraite progressive applicables aux salariés ( 7° et 14° du I ), aux travailleurs indépendants ( 16° du I ) et aux non-salariés agricoles ( 1° du III ) et d' ouvrir le dispositif aux assurés des régimes spéciaux, aux professionnels libéraux et aux avocats ( articles L. 161-22-1-5, L. 161-22-1-7 et L. 161-22-1-8 nouveaux du code de la sécurité sociale ). L'âge d'éligibilité au dispositif, inférieur à l'âge d'ouverture des droits, serait déterminé par décret, le Gouvernement envisageant de le porter de 60 à 62 ans . Il serait par conséquent procédé à diverses coordinations légistiques ( 9° du I ).
En parallèle, la retraite progressive serait rendue accessible, en sus des agents contractuels de la fonction publique exerçant leur activité à titre exclusif dans le cadre d'un service à temps incomplet ou d'un ou plusieurs emplois à temps non complet, aux fonctionnaires territoriaux et hospitaliers occupant à titre exclusif un ou plusieurs emplois permanents à temps non complet, effectuant un nombre d'heures de travail inférieur au seuil d'affiliation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), fixé à 28 heures hebdomadaires 539 ( * ) , et affiliés, par conséquent, au régime général et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non-titulaires de l'État et des collectivités publiques (Ircantec) 540 ( * ) . Ces agents bénéficieraient de la retraite progressive sous réserve que leur durée totale de travail n'excède pas un pourcentage annuel, qui serait fixé par décret, de la durée annuelle de travail effectif des fonctionnaires 541 ( * ) ( 7° du I , article L. 161-22-1-6 nouveau du code de la sécurité sociale ).
En cas de départ en retraite progressive, les dispositions législatives prévoyant la substitution de la pension de retraite à la pension d'invalidité lorsque l'assuré atteint le futur âge de départ en retraite anticipée au titre de l'inaptitude au travail, soit 62 ans 542 ( * ) , ou, s'il exerce une activité professionnelle, lorsqu'il demande l'attribution de sa pension de retraite, et au plus tard à 67 ans 543 ( * ) , ne feraient pas obstacle à la substitution de la fraction de pension à la pension d'invalidité de l'assuré lorsque celui-ci atteint l'âge de 62 ans ( 7° du I , article L. 161-22-1-9 nouveau du code de la sécurité sociale ).
Ces nouvelles dispositions du code de la sécurité sociale seraient organisées en quatre sous-paragraphes ( 2° du I ).
Le Gouvernement propose également d'ouvrir la retraite progressive aux fonctionnaires exerçant à titre exclusif leur activité à temps partiel , dans des conditions similaires à celles qui s'appliquent aux salariés ( 6° du II , articles L. 89 bis et L. 89 ter nouveaux du code général de la fonction publique ).
Dans la fonction publique, toutes les périodes de services accomplies à temps partiel - et non plus seulement les périodes accomplies à temps partiel sur autorisation - seraient désormais prises en compte comme du temps complet dans la constitution du droit à pension, c'est-à-dire pour le calcul de la durée minimale d'affiliation ouvrant droit à une pension 544 ( * ) ( 1° du II ). En parallèle, ces périodes ne seraient prises en compte dans la durée de services et bonifications qu'à proportion de la durée de service rapportée à un temps plein ( a du 2° du II ), sauf celles prises en compte comme du temps plein au titre de divers dispositifs, à savoir :
- le temps partiel de droit pour élever un enfant 545 ( * ) ;
- le temps partiel exercé dans le cadre du congé de présence parentale 546 ( * ) ;
- le cas échéant, dans les conditions prévues par les textes qui le prévoient, le temps partiel accordé dans les cas exceptionnels 547 ( * ) ;
- le temps partiel exercé dans le cadre du congé de proche aidant 548 ( * ) ;
- le temps partiel thérapeutique 549 ( * ) ( b du 2° du II ).
L'ensemble des temps partiels étant désormais pris en compte et pour la constitution du droit à pension et pour le calcul de la durée de services et bonifications, une disposition devenue superfétatoire serait supprimée ( 3° du II ).
Du reste, il serait précisé qu'en cas de retraite progressive, la durée de travail pourrait être inférieure à la durée minimale de travail hebdomadaire 550 ( * ) ( 5° du V ).
b) La charge de la preuve reposerait désormais sur l'employeur
À défaut de réponse à la demande de retraite progressive formulée par un salarié dans un délai de deux mois à compter de la réception de cette demande, l'employeur serait réputé y donner son accord. Tout refus devrait être justifié par l'incompatibilité de la durée de travail souhaitée par le salarié avec l'activité économique de l'entreprise ( 3° et 4° du V , articles L. 3121-60-1 et L. 3123-4-1 nouveaux du code du travail ).
c) Le versement des indemnités journalières ne serait plus limité en cas d'arrêt maladie
Les dispositions limitant à 60 jours la durée de versement des indemnités journalières (IJ) maladie aux assurés ayant atteint l'âge d'ouverture des droits et bénéficiant d'un avantage de vieillesse 551 ( * ) ne seraient plus applicables aux assurés bénéficiant de la retraite progressive à compter du 1 er septembre 2023 ( 8° du I ), de même qu'à ceux qui en bénéficieront déjà à cette date ( X ).
d) L'information sur la retraite progressive serait renforcée
L'estimation indicative globale (EIG) du montant des pensions de retraite auxquelles chaque assuré a droit, qui lui est adressée tous les cinq ans à partir de l'âge de 55 ans 552 ( * ) serait accompagnée d'une information non seulement sur le cumul emploi-retraite, la retraite progressive et la possibilité, pour un salarié travaillant à temps partiel, de demander à cotiser sur la base du salaire correspondant à son activité exercée à temps plein, mais également sur la possibilité, pour un agent public travaillant à temps partiel, de demander à cotiser sur la base du traitement correspondant à son activité exercée à temps plein 553 ( * ) et sur le dispositif de retraite progressive applicable aux fonctionnaires ( a du 1° du I ). De plus, une simulation de liquidation partielle dans le cadre d'une retraite progressive serait jointe à l'IEG ( b du 1° du I ).
Par ailleurs, Pôle emploi serait chargé de participer à l'information du public sur les dispositifs de transition entre emploi et retraite, et notamment sur la retraite progressive ( 6° du V ).
e) Les effectifs de bénéficiaires de la retraite progressive devraient plus que doubler d'ici à 2027
D'après le Gouvernement, ces mesures permettraient de faire entrer près de 30 000 assurés de plus dans le dispositif à l'horizon 2027, pour un coût estimé à 200 millions d'euros en 2027 et à 100 millions d'euros en 2030 . Plus de la moitié de ces effectifs supplémentaires seraient issus de la fonction publique de l'État.
Effectifs projetés des bénéficiaires de la retraite progressive avant et après la réforme
Source : Rapport sur les objectifs et les effets du projet de réforme des retraites
2. Il est urgent de lever les entraves au développement du cumul emploi-retraite
a) Le cumul emploi-retraite serait désormais créateur de droits
Le Gouvernement propose que les dispositions faisant obstacle à la constitution de droits à pension supplémentaires en contrepartie des cotisations versées en cumul emploi-retraite par le bénéficiaire d'une pension de retraite personnelle servie par un régime de retraite de base légalement obligatoire ne soient plus opposables :
- aux assurés demandant le bénéfice de la retraite progressive ;
- aux assurés remplissant les conditions du cumul emploi-retraite libéralisé, sous réserve que la reprise d'activité, lorsqu'elle a lieu chez le dernier employeur, intervienne au plus tôt six mois après la date d'entrée en jouissance de la pension ( 4° et 5° du I ).
Pour ces deux catégories d'assurés, les droits seraient constitués au titre des seuls régimes de base, les régimes complémentaires demeurant libres de choisir ou non de permettre également la constitution de droits. Sans incidence sur le montant de la pension résultant de la première liquidation, une nouvelle pension, constituée au titre du cumul emploi-retraite, serait liquidée au moment de la cessation de l'activité reprise, automatiquement au taux plein. Dans ce cadre :
- seules seraient retenues les périodes d'assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré, à l'exclusion des trimestres ayant fait l'objet d'un rachat 554 ( * ) ;
- aucune majoration, aucun supplément ni aucun accessoire ne pourraient être accordés au titre de la nouvelle pension et de l'éventuelle pension de réversion qui en serait issue ;
- les dispositions permettant le remboursement des cotisations versées au régime général par les assurés n'ayant cotisé auprès d'aucun autre régime de base et ayant validé au plus 8 trimestres 555 ( * ) et le cumul, par les assurés ayant appartenu successivement ou alternativement au régime général et à un régime spécial, des avantages auxquels ils pourraient prétendre du fait de leur affiliation à ces régimes 556 ( * ) ne s'appliqueraient pas à la nouvelle pension ;
- le montant de la nouvelle pension ne pourrait excéder un plafond annuel, qui serait fixé par décret 557 ( * ) ( 6° du I , article L. 161-22-1-1 nouveau du code de la sécurité sociale ).
Après la liquidation de cette nouvelle pension, aucun droit ne pourrait plus être acquis dans un régime de retraite de base. Dans le cas où plusieurs pensions seraient liquidées simultanément après la première liquidation, des droits seraient acquis au titre de chacune de ces pensions. Certaines catégories d'assurés pourraient toutefois toujours, dans des conditions fixées par décret, se constituer des droits supplémentaires, à savoir :
- les assurés relevant du régime de retraite des marins 558 ( * ) ;
- les artistes du ballet relevant de la caisse de retraite des personnels de l'Opéra national de Paris ;
- les anciens agents, relevant du régime de retraite des mines, d'une entreprise minière ou ardoisière ayant fait l'objet d'une garantie par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, lorsque la cessation définitive de cette activité ou la mise en liquidation a eu lieu avant le 31 décembre 2015 ( 6° du I , article L. 161-22-1-2 nouveau du code de la sécurité sociale ).
En outre, la constitution de droits à pension supplémentaires en cumul emploi-retraite ne ferait pas obstacle à l'attribution des droits ou prestations dont le bénéfice est subordonné à la liquidation des droits à retraite, notamment les différents minima de pension ( 6° du I , article L. 161-22-1-3 nouveau du code de la sécurité sociale ).
Diverses modifications d'ordre rédactionnel et coordinations légistiques seraient opérées au sein des dispositions législatives relatives au cumul emploi-retraite des salariés ( 3° du I ), des travailleurs indépendants ( 17° du I ) et des professionnels libéraux ( 18° du I ).
Du reste, la possibilité de se constituer des droits à pension supplémentaires en cumul emploi-retraite serait également accordée aux non-salariés agricoles ( 2° du III ). Les règles de cumul ne leur seraient pas applicables lorsqu'ils seraient autorisés par le préfet, au motif de l'impossibilité de céder leur exploitation dans les conditions normales du marché, à poursuivre la mise en valeur de leur exploitation tout en bénéficiant d'une pension de retraite ( 3° du III ).
Il en irait de même pour les marins ( IV ). Les élus locaux, quant à eux, conserveraient cette possibilité, dont ils bénéficient déjà, au titre de leurs indemnités de fonction ( VII ).
b) Divers ajustements seraient apportés dans ce cadre au dispositif
Par ailleurs, il serait précisé que :
- la pension ou la solde de réforme servie aux anciens militaires peuvent être cumulés avec une pension d'invalidité jusqu'à un seuil et dans des conditions déterminés par décret en Conseil d'État ( 10° du I ).
- les dispositions législatives prévoyant la substitution de la pension de retraite à la pension d'invalidité d'un assuré exerçant une activité professionnelle lorsqu'il demande l'attribution de sa pension de retraite, et au plus tard à 67 ans 559 ( * ) , renvoient à la première liquidation de la retraite, et non à celle de la nouvelle pension constituée en cumul emploi-retraite ( 11° du I et VIII ). Une coordination légistique en découlerait ( 12° du I ) ;
- la nouvelle pension de retraite constituée par un assuré en cumul emploi-retraite ouvrirait droit à pension de veuve ou de veuf ou à pension de réversion au bénéfice de son conjoint survivant ( 13° et 15° du I , 4° du II et 4° du III ) ;
- les dispositions réservant la constitution de droits à pension supplémentaires aux assurés satisfaisant aux conditions d'éligibilité au cumul emploi-retraite libéralisé et faisant obstacle à la constitution de nouveaux droits après la liquidation de la nouvelle pension constituée en cumul emploi-retraite ne seraient pas applicables aux bénéficiaires d'une pension militaire ( a du 5° du II ) ;
- les conditions dans lesquelles les fonctionnaires se constitueraient des droits supplémentaires en cumul emploi-retraite seraient les mêmes que celles qui s'appliqueraient au secteur privé ( b du 5° du II ) ;
- les règles de cumul applicables dans la fonction publique ne le seraient pas aux assurés qui demanderaient ou bénéficieraient d'une pension au titre de la retraite progressive ( c du 5° du II ) ;
- chaque salarié ne pourrait bénéficier que d'une seule indemnité de départ ou de mise à la retraite attribuée lors de la première liquidation complète de la pension ( 1° et 2° du V ) ;
- les médecins en cumul emploi-retraite libéralisé bénéficiaires de l'exonération de l'ensemble des cotisations de retraite dues au titre de l'année 2023 ne se constitueraient, en contrepartie, aucun droit à retraite de base en vue d'une seconde pension ( XI ).
c) En cas d'urgence, le Gouvernement serait autorisé à lever par décret certaines restrictions au cumul emploi-retraite
Le plafond de revenu et le délai de carence de six mois à compter de la date d'entrée en jouissance de la pension applicables en cas de cumul emploi-retraite plafonné pourraient être suspendus par décret pour une durée maximale d'un an pouvant être renouvelée pour une durée maximale de six mois dans le cas où des circonstances exceptionnelles nécessiteraient, en urgence, la poursuite ou la reprise d'activités par des assurés susceptibles de les exercer.
Le décret préciserait alors les catégories d'activités et d'assurés concernés par les dérogations. Il pourrait prévoir l'application rétroactive de la suspension des plafonds concernés, dans la limite d'un mois avant la date de sa publication, et, le cas échéant, suspendre, dans les mêmes conditions, les règles de plafond ou de délai minimal de reprise d'activité appliquées par les régimes complémentaires ( 6° du I , article L. 161-22-1-4 nouveau du code de la sécurité sociale ).
d) Une augmentation du recours au cumul emploi-retraite résulterait de ces assouplissements
Le Gouvernement évalue le coût de ces mesures à 200 millions d'euros en 2027 et à 300 millions d'euros en 2030 (dont 100 millions pour les régimes complémentaires) à comportements inchangés. Elles amélioreraient toutefois le taux de recours au dispositif, ce qui permettrait de générer 100 millions d'euros de cotisations supplémentaires en 2027, en se basant sur une hausse de 10 % du nombre de cumulants.
3. Ces mesures seraient effectives dès le 1 er septembre 2023
Les dispositions du présent article entreraient en vigueur le 1 er septembre 2023. Toutefois :
- les dispositions accordant au Gouvernement la faculté de suspendre par décret le plafond de revenu et le délai de carence de six mois à compter de la date d'entrée en jouissance de la pension applicables en cas de cumul emploi-retraite plafonné seraient applicables à compter du 1 er janvier 2023 ( 1° du XII ) ;
- les dispositions lui permettant de suspendre, dans les mêmes conditions, les règles de plafond ou de délai minimal de reprise d'activité appliquées par les régimes complémentaires entreraient en vigueur le lendemain de la publication de la LFRSS pour 2023 ( 2° du XII ) ;
- la liquidation des pensions de droit direct ou dérivé intervenant à compter du 1 er septembre 2023 prendrait en compte, le cas échéant, les droits en vue d'une nouvelle pension de retraite constitués à partir du 1 er janvier 2023 ( 3° du XII ) ;
- les anciennes dispositions relatives à la retraite progressive continueraient de s'appliquer aux assurés recourant à ce dispositif à la date d'entrée en vigueur du présent article. Pour autant, leur seraient applicables le nouvel âge d'ouverture des droits, 64 ans, et l'allongement de la durée d'assurance requise pour l'obtention du taux plein ( 4° du XII ) ;
- seraient également applicables aux bénéficiaires de la retraite progressive à la date d'entrée en vigueur du présent article les dispositions permettant, dans ce cadre, de fixer une durée de travail inférieure à la durée minimale de travail hebdomadaire ( 5° du XII ) ;
- les dispositions supprimant la limitation à 60 jours de la durée de versement des indemnités journalières (IJ) maladie aux salariés, des travailleurs indépendants et des non-salariés agricoles en retraite progressive entreraient en vigueur à compter du premier jour du mois suivant la publication de la LFRSS pour 2023 ( 6° du XII ) ;
- le délai de carence de six mois à compter de la date d'entrée en jouissance de la pension au respect duquel est conditionnée la constitution de droits à pension supplémentaires en cas de cumul emploi-retraite ne serait pas applicable aux assurés ayant liquidé leur pension de retraite au plus tard six mois après le lendemain de la publication de la LFRSS pour 2023 ( 7° du XII ) ;
- les dispositions prévoyant que l'accord de l'employeur à la demande de retraite progressive formulée par un salarié serait réputé acquis à défaut de réponse dans un délai de deux mois à compter de la réception de cette demande ne s'appliqueraient qu'aux demandes présentées à partir de l'entrée en vigueur du présent article ( 8° du XII ).
Par ailleurs, les dispositions relatives au cumul emploi-retraite et à la retraite progressive des fonctionnaires seraient applicables aux assurés relevant de la CNRACL ainsi qu'à ceux relevant du régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État ( VI ).
Enfin, les dispositions du présent article seraient rendues applicables à Mayotte ( IX ).
II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification
L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article LO. 111-7 du code de la sécurité sociale.
III - La position de la commission : mieux prendre en compte la pénibilité du travail en maintenant à 60 ans l'âge d'éligibilité à la retraite progressive
Dans le souci de favoriser l'emploi des seniors, d'améliorer par le travail la situation des retraités à faibles pensions et d'assurer la conformité de la loi à la Constitution, la commission propose de longue date que le cumul emploi-retraite soit rendu créateur de droits.
Elle se réjouit donc de cette mesure de bon sens, sans doute plus justifiée que des exonérations de cotisations sociales, qui devrait s'avérer particulièrement incitative à la reprise d'une activité par les retraités.
De même, l'assouplissement de la retraite progressive et son extension à de nouvelles catégories de bénéficiaires, en particulier les fonctionnaires, participeront très certainement du même mouvement de soutien à l'emploi des seniors.
La commission regrette toutefois, dans ce dernier cas, que l'âge d'éligibilité au dispositif soit porté de 60 à 62 ans. Considérant que la retraite progressive doit constituer un outil de prise en compte des carrières pénibles en permettant l'allègement de la charge de travail de l'assuré en fin de carrière, elle a adopté un amendement n° 2168 du rapporteur prévoyant le maintien de l'âge d'éligibilité à 60 ans pour les bénéficiaires actuels de ce dispositif comme pour les nouveaux.
Toutefois, à défaut d'éléments permettant d'estimer le taux de recours des publics nouvellement éligibles à la retraite progressive, notamment dans la fonction publique, la condition de diminution de l'activité de l'assuré évoluerait en fonction de l'âge de l'assuré, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État. Dans ce cadre, entre 60 et 62 ans, la quotité de travail ne pourrait être réduite de plus de 20 % par rapport à un temps plein. À compter de 62 ans, la réduction pourrait atteindre jusqu'à 60 % de la durée de travail à temps complet, comme c'est le cas aujourd'hui dès 60 ans.
Au surplus, la commission a adopté seize amendements rédactionnels, de coordination et de précision n os 2166, 2167, 2169, 2170, 2171, 2172, 2173, 2174, 2175, 2176, 2177, 2178, 2179, 2180, 2181 et 2182 du rapporteur.
La commission vous demande d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.
* 482 Loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 relative à la sécurité sociale, article 2.
* 483 Article L. 3123-1 du code du travail.
* 484 Article L. 351-15 du code de la sécurité sociale.
* 485 Article R. 351-39 du code de la sécurité sociale.
* 486 Article R. 351-41 du code de la sécurité sociale.
* 487 Les professionnels libéraux ne bénéficient pas de la retraite progressive s'ils en demandent le bénéfice alors qu'ils exercent une activité libérale. En revanche, un assuré qui aurait exercé une activité libérale dans le passé mais qui aurait cessé cette activité et exercerait une activité salariée au moment où il demande le bénéfice de la retraite progressive peut percevoir une fraction de sa pension de professionnel libéral dans les mêmes proportions que sa pension de salarié.
* 488 Article L. 3121-55 du code du travail.
* 489 Article L. 3121-56 du code du travail.
* 490 Article L. 3121-58 du code du travail.
* 491 Article L. 3121-62 du code du travail.
* 492 Article L. 3121-64 du code du travail.
* 493 Article L. 3121-60 du code du travail.
* 494 Article L. 3121-61 du code du travail.
* 495 Cour de cassation, Civ. 2 ème , 3 novembre 2016, n° 15-26.275 et n° 15-26.276.
* 496 Article L. 3123-1 du code du travail.
* 497 DC n° 2020-885 QPC du 26 février 2021.
* 498 Loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, article 110.
* 499 Article L. 241-3-1 du code de la sécurité sociale.
* 500 Article R. 241-0-3 du code de la sécurité sociale.
* 501 Articles L. 311-3 et D. 351-14-4 du code de la sécurité sociale. Ne sont pas éligibles à la retraite progressive plusieurs catégories d'assimilés-salariés, à savoir les assurés exerçant à titre exclusif une activité incompatible avec un départ en retraite progressive, à savoir les personnes bénéficiaires d'un appui à la création ou à la reprise d'une activité économique et les personnes ayant souscrit un service civique, ou certaines activités accessoires.
* 502 Article L. 311-3 du code de la sécurité sociale.
* 503 Loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, article 110.
* 504 Articles L. 351-16 et R. 351-42 du code de la sécurité sociale.
* 505 Article D. 351-15 du code de la sécurité sociale.
* 506 Articles L. 634-3-1 et D. 634-16 du code de la sécurité sociale.
* 507 Article D. 634-16 du code de la sécurité sociale.
* 508 Article D. 634-18 du code de la sécurité sociale.
* 509 Article L. 732-29 du code rural et de la pêche maritime.
* 510 Article D. 732-169 du code rural et de la pêche maritime.
* 511 Sophie Bellon, Olivier Mériaux, Jean-Manuel Soussan, Favoriser l'emploi des travailleurs expérimentés , rapport remis au Gouvernement le 14 janvier 2020.
* 512 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, article 18.
* 513 Article L. 161-22 du code de la sécurité sociale.
* 514 Article D. 161-2-7 du code de la sécurité sociale.
* 515 Article L. 643-6 du code de la sécurité sociale.
* 516 Article L. 634-6 du code de la sécurité sociale.
* 517 Article D. 643-10 du code de la sécurité sociale.
* 518 Article D. 634-11-2 du code de la sécurité sociale.
* 519 Articles L. 84 et L. 85 du code de pensions civiles et militaires de retraite.
* 520 Articles L. 84 et L. 86-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
* 521 Article L. 86 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
* 522 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'équilibre et la justice du système de retraite, article 19.
* 523 Article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale.
* 524 Article L. 84 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
* 525 Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, article 11.
* 526 Conseil constitutionnel, décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012, loi de finances rectificative pour 2012, considérant 57.
* 527 Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, article 14.
* 528 Du 17 octobre 2020 au 1 er juin 2021.
* 529 Professions médicales, professions de la pharmacie et de la physique médicale, auxiliaires médicaux, aides-soignants, auxiliaires de puériculture, ambulanciers et assistants dentaires.
* 530 Loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, article 3.
* 531 Article L. 1434-4 du code de la santé publique.
* 532 Loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023, article 111.
* 533 Arrêté du 28 mai 2019 fixant le seuil d'affiliation au régime des prestations complémentaires de vieillesse des médecins libéraux prévu à l'article L. 645-1 du code de la sécurité sociale, article 1 er .
* 534 Article L. 642-3 du code de la sécurité sociale.
* 535 Loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023, article 13.
* 536 Article L. 642-1 du code de la sécurité sociale.
* 537 Article L. 644-1 du code de la sécurité sociale.
* 538 Articles L. 645-2 et L. 645-2-1 du code de la sécurité sociale.
* 539 Décret n° 2022-244 du 25 février 2022 déterminant le seuil d'affiliation à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales des fonctionnaires territoriaux nommés dans un emploi permanent à temps non complet, article 1 er ; décret n° 2022-754 du 29 avril 2022 déterminant le seuil d'heures minimales de travail pour l'affiliation des fonctionnaires hospitaliers à temps non complet à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, article 1 er .
* 540 Articles L. 613-6 et L. 613-10 du code général de la fonction publique.
* 541 1 607 heures ; article L. 611-1 du code général de la fonction publique.
* 542 Article L. 351-1-5 du code de la sécurité sociale créé par l'article 8 du présent projet de loi.
* 543 Articles L. 341-15 et L. 341-16 du code de la sécurité sociale.
* 544 Cette durée s'établit actuellement à deux ans. En-deçà, le fonctionnaire est affilié rétroactivement au régime général et ses droits auprès du régime de la fonction publique sont annulés.
* 545 Article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
* 546 Idem .
* 547 Idem .
* 548 Article L. 634-2 du code général de la fonction publique.
* 549 Article L. 823-1 du code général de la fonction publique.
* 550 Cette durée est fixée par dispositions conventionnelles ou, à défaut, à 24 heures ; articles L. 3123-19 à L. 3123-27 du code du travail.
* 551 Articles L. 323-2 et R. 323-3 du code de la sécurité sociale.
* 552 Articles L. 161-17 et D. 161-2-1-8 du code de la sécurité sociale.
* 553 Article L. 11 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite.
* 554 Articles L. 173-7 et L. 634-2-1 du code de la sécurité sociale ; loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2021, article 108.
* 555 Article L. 161-22-2 du code de la sécurité sociale.
* 556 Article L. 173-1 du code de la sécurité sociale.
* 557 D'après la direction de la sécurité sociale, « le plafond de la nouvelle pension issue d'un cumul emploi-retraite n'est pas déterminé à ce stade pour le régime général et la fonction publique. Il sera fixé de manière à ne pas décourager le cumul emploi-retraite créateur de droits nouveaux tout en ne décourageant pas la poursuite d'activité sans liquidation afin de bénéficier d'une pension améliorée grâce à la surcote ».
* 558 Article L. 5551-1 du code des transports.
* 559 Article L. 341-16 du code de la sécurité sociale.