C. LA RECONDUCTION DU DISPOSITIF D'EXONÉRATION TO-DE
1. Le TO-DE, un outil de maintien de la compétitivité des exploitations agricoles
Le dispositif d'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale dit « travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi » ou TO-DE, bénéficie aux employeurs relevant du régime de protection sociale agricole qui emploient en CDD des travailleurs saisonniers. Cette exonération tend à faciliter l'emploi de la main d'oeuvre nécessaire à la réalisation de leurs travaux saisonniers.
Institué par un arrêté interministériel du 9 mai 1985, il est prévu aujourd'hui à l'article L 741-16 du code rural et de la pêche maritime et vise à soutenir la compétitivité des filières concernées.
L'an dernier, les rapporteurs spéciaux rappelaient que le Gouvernement avait prévu la suppression du TO-DE pour 201931(*) tandis que les débats parlementaires avaient conduit à son maintien. Toutefois, le dispositif avait été substantiellement redéfini dans le cadre de la loi de financement pour la sécurité sociale (LFSS) pour l'année 2019, avec la modification du « plateau » d'exonération totale. La LFSS avait réservé l'exonération totale jusqu'à 1,20 SMIC (au lieu de 1,25 SMIC) puis avait prévu au-delà un barème dégressif linéaire d'exonération, cette dernière devenant nulle à partir de 1,6 SMIC (au lieu de 1,5 SMIC). (cf infra).
Le dispositif devait s'éteindre fin 2020. La LFSS pour l'année 202132(*) l'a prolongé pour 2021 et 2022.
Dispositif en vigueur du TO-DE
Principes généraux
Les employeurs relevant du régime de protection sociale agricole qui embauchent en CDD des travailleurs saisonniers (ou en CDI des demandeurs d'emploi sous certaines conditions) bénéficient d'une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale. Le champ des cotisations visées par l'exonération a été révisé par la LFSS pour 2019 afin de l'aligner sur celui des allègements généraux de cotisations et contributions sociales. Les cotisations conventionnelles ne sont ainsi désormais plus visées par l'exonération TO-DE.
Celle-ci est limitée à une période maximum d'emploi de 119 jours ouvrés, consécutifs ou non, par année civile pour un même salarié.
Au cours d'une même année civile, le bénéfice de l'exonération ne peut être cumulé simultanément ou successivement avec celui d'une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales ou avec l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou montants forfaitaires de cotisations. Ainsi, au-delà de la période maximale de 119 jours, l'employeur ne peut par la suite pas bénéficier, au titre d'un même salarié, d'une autre exonération de cotisation. Il dispose toutefois de la possibilité de renoncer au bénéfice de l'exonération TO-DE au profit des allègements généraux renforcés sur l'ensemble de la période d'activité de son salarié si l'application de ce dispositif se révèle plus avantageuse pour lui.
Plateau d'exonération
L'exonération est déterminée conformément à un barème dégressif linéaire en fonction de la rémunération perçue par le salarié, dans les conditions suivantes : celle-ci est totale pour une rémunération mensuelle inférieure ou égale à 1,20 SMIC mensuel (1,25 SMIC avant 2019), dégressive pour les rémunérations comprises entre 1,20 SMIC mensuel et 1,6 SMIC (1,5 SMIC avant 2019) puis nulle pour une rémunération mensuelle égale ou supérieure à 1,6 SMIC.
Source : extrait de la réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux pour le PLF 2023
Aux interrogations des rapporteurs spéciaux sur les bénéficiaires de l'exonération TO-DE, le secrétariat général du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a apporté les précisions suivantes :
- 73 000 établissements ont recours à 900 000 contrats TO-DE pour un volume d'heures de 170 millions d'heures et une masse salariale de plus de 1,8 milliard d'euros ;
- ces établissements représentent près de la moitié des entreprises du secteur de la production agricole utilisatrices de main d'oeuvre ;
- et 90 % des contrats saisonniers concernent les filières « viticulture », « arboriculture » et « horticulture ».
S'agissant du coût du dispositif, il s'est établi en 2021 à 509 millions d'euros, soit un montant identique à 2020 et en légère progression par rapport à 2019 (506 millions d'euros). En 2022, le coût du dispositif TO-DE a été estimé à 525 millions d'euros, sous réserve d'une saisonnalité normale.
2. La reconduction du TO-DE en 2023
Cette exonération est maintenue en 2023 avec une dotation de 134 millions d'euros en AE et en CP, à l'action 25 « protection sociale », en augmentation de 4 millions d'euros en AE et CP par rapport à la LFI pour 2022.
Elle est, en effet, prolongée dans le cadre du PLFSS 2023.
3. Un financement intégral du dispositif par les programmes 149 et 381
En 2023, le dispositif sera financé intégralement, comme avant 2019, sur crédits budgétaires du ministère chargé de l'agriculture via les programmes 149 et 381, contrairement à la période 2019-2022.
En effet, entre 2019 et 2022, le coût du TO-DE était financé par une fraction de la TVA et par les crédits budgétaires du ministère chargé de l'agriculture sur l'action 25 du programme 14933(*).
En 2023, la part des exonérations correspondant aux allègements généraux ne sera pas compensée par une fraction de TVA34(*) mais par des crédits ouverts sur le nouveau programme budgétaire 381 créé à cette fin.
Quant au surplus d'exonération lié au maintien d'un plateau d'exonération totale à 1,2 SMIC par rapport aux allègements généraux, il reste compensé sur le programme budgétaire 149.
Le montant total de la compensation est évalué en 2023 à 561 millions d'euros répartis respectivement à hauteur de 427 millions d'euros sur le programme 381 et 134 millions d'euros sur le programme 149.
Les rapporteurs spéciaux réitèrent leurs observations de l'an dernier sur la réduction du seuil d'exonération complète qui tend à fragiliser un secteur déjà soumis à des fortes pressions, portant ainsi atteinte à sa compétitivité en raison du coût du travail auquel il est exposé.
En outre, la reconduction du dispositif pour une année 2023 ne permet pas aux bénéficiaires de se projeter dans la durée. C'est pourquoi les rapporteurs spéciaux souhaitent que le dispositif soit pérennisé.
* 31 Dans le cadre du basculement du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) vers un allègement des cotisations sociales, et d'un renforcement des allégements généraux, le Gouvernement avait proposé de supprimer le régime TO-DE particulier au secteur agricole.
* 32 Loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.
* 33 Le schéma de compensation de la Caisse centrale de la MSA (CCMSA) et de l'Union Nationale Interprofessionnelle pour l'Emploi dans l'Industrie et le Commerce (UNEDIC) pour le coût de la mesure a été révisé. Entre 2019 et 2022, la mesure d'exonération a fait l'objet d'une compensation à la Caisse centrale de la MSA (CCMSA) et à l' Union Nationale Interprofessionnelle pour l'Emploi dans l'Industrie et le Commerce (UNEDIC), d'une part, par l'affectation d'une fraction de TVA pour les exonérations correspondant au socle des allègements généraux et, d'autre part, par le versement de crédits budgétaires du MASA pour le surplus des exonérations par rapport aux allégements généraux (plateau d'exonération maximale entre 1 et 1,2 SMIC).
* 34 « En 2021, le surplus des exonérations a été compensé sur crédits du MASA sur le programme 149 (action 25 - Protection sociale - de la mission AAFAR à hauteur de 121,9 millions d'euros (127 millions d'euros de crédits LFI déduction faite de la réserve de 4 %) et par une fraction de TVA de 389 millions d'euros pour la partie correspondant aux allègements généraux fléchée uniquement vers la CCMSA. » In réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux pour le PLF 2023.