C. UNE NOUVELLE GOUVERNANCE POUR UNE PLUS GRANDE EFFICIENCE

1. Une nécessaire harmonisation des règles de gouvernance

Le rapporteur spécial souhaite également souligner que l'intégration des crédits de France 2030 dans la mission a conduit à lui étendre les règles de gestion des fonds applicables aux PIA, telles que la doctrine d'investissement formalisée en cinq points 16 ( * ) :

- des investissements réservés aux financements innovants ;

- une sélection transparente des projets financés ;

- la recherche d'un retour sur investissement ;

- le cofinancement des projets (public-privé) ;

- et la publicité des décisions d'investissement.

Le nouvel objectif de la mission de consacrer son soutien aux projets dès l'innovation jusqu'au déploiement et son éventuelle industrialisation a conduit à redéfinir la gouvernance des projets, à l'aune de l'expérience des PIA pour y intégrer, en amont, plus d'interactivité, et en aval, plus d'agilité et de souplesse de gestion.

2. En amont : l'interactivité dans l'analyse des projets

Rappelons que le cycle de vie du projet comprend quatre phases.

a) La phase de cadrage de l'appel à projets ou appel à manifestation d'intérêt.

La phase de cadrage donne lieu à l'élaboration par le comité de pilotage ministériel opérationnel (CPMO) en lien avec l'opérateur, du cadrage stratégique, de la définition des critères d'éligibilité, de la sélection et des indicateurs de réalisation et d'impact.

Sur ce point, il convient de souligner qu'il existe des indicateurs « socle » et d'autres « spécifiques » limités à une quinzaine au total. Le cahier des charges est rédigé, puis validé et publié par arrêté au Journal officiel de la République française. Il est suivi par la publication d'un communiqué de presse.

b) La phase de dépôt et de pré-sélection

Le porteur de projet peut prendre contact avec l'opérateur chargé de l'action pour vérifier l'adéquation entre le projet envisagé et les projets attendus. Après candidature officielle, l'opérateur élabore une proposition de pré-sélection motivée sur la base d'une analyse de complétude du dossier, de l'éligibilité et du respect du cadrage stratégique. Des jurys et des experts peuvent aussi être sollicités pendant cette phase. Les projets sont soumis au Comité de pilotage ministériel opérationnel (CPMO).

c) La phase d'instruction

Le passage en instruction approfondie, opérée par le comité de sélection, à savoir un jury d'experts et l'opérateur, a pour objectif d'étudier notamment la pertinence technique du projet, son impact social, économique, environnemental.... à l'aune des objectifs et critères de l'appel à projets mais aussi de procéder à une évaluation financière, à une analyse des coûts et à une éventuelle modulation des taux d'aides selon le caractère incitatif. Cette phase d'instruction peut être assortie d'une audition organisée par l'opérateur, selon le cadre défini par la gouvernance du CPMO. À l'issue de l'instruction approfondie, l'opérateur propose, et envoie au CPMO, des propositions de financement.

Le rapporteur spécial relève aux termes des auditions que la durée de cette phase d'un cycle de projet est variable selon l'appel à projets. L'organisation semble être souple et flexible. Les CPMO peuvent se tenir de manière électronique si besoin est, avec des délais de réaction encadrés (de 48 heures à 5 jours). Le comité exécutif (COMEX) est généralement réuni une fois par mois afin de faire un point d'état d'avancement général en plus des points à valider.

d) La phase de sélection

La phase de validation par la gouvernance est suivie d'une phase de validation des propositions de financement, puis une décision d'engagement d'attribution est signée par la Première ministre (et par le Secrétariat général pour l'investissement ((SGPI) par délégation) autorisant l'opérateur à contractualiser avec le bénéficiaire.

Les lauréats sont annoncés publiquement et reçoivent un courrier de notification. Une durée de trois mois est généralement fixée pour établir ce contrat, au-delà de laquelle les décisions sont réputées caduques.

Dans ce contrat, les jalons techniques et de réalisation du projet sont assortis d'échéanciers de paiements (phase de décaissement). Les opérateurs veillent à ce que, outre les jalons ou étapes clés, le contrat avec le bénéficiaire contienne les dispositions nécessaires à la remontée des données indispensables à la mise en oeuvre des indicateurs de réalisation, de résultats ou d'impacts déterminés par le cadrage et permettant une évaluation de l'appel à projets et de la stratégie dans laquelle il s'insère, et de France 2030 au global.

Gouvernance France 2030

Source : SGPI - Réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

3. En aval : une souplesse de gestion pour une meilleure utilisation des dotations
a) La phase de suivi et d'évaluation in itinere

Le suivi financier des projets est piloté par le SGPI en lien avec les opérateurs via son système d'information . Des bilans d'étape sont effectués annuellement dans les instances de gouvernance appropriées sur les bases des remontées bénéficiaires sur les indicateurs déterminés en phase de cadrage.

Les versements s'effectuent en plusieurs tranches au cours de la vie du projet et sont conditionnés à l'avis favorable de l'opérateur (et du CPMO) rendu à l'issue des étapes clés intermédiaires .

Des bilans d'étape annuels seront tenus pour valider les impacts. Cette évaluation in itinere vise précisément à vérifier, lors de ces points d'étape annuels, la conformité des réalisations aux engagements pris contractuellement, l'atteinte des jalons techniques définis et les perspectives de commercialisation. Les critères ont été définis en amont dès le cadrage stratégique de l'appel à projets, sous la forme d'une grille d'impact.

Sur cette base , des recommandations sur la prolongation ou l'arrêt du projet pourront être émises.

À la fin du projet, l'aide définitive est régularisée. Si le projet a finalement été moins coûteux qu'initialement prévu, la quote-part d'aide associée est « désengagée » et devient disponible pour le financement de nouveaux projets d'innovation.

L'arrêt du projet pourra intervenir de manière anticipée si ces critères ne sont pas respectés et les financements réorientés vers de nouveaux besoins.

b) Les redéploiements de crédits

Les redéploiements budgétaires sont prévus par la loi de finances rectificative pour 2010 17 ( * ) . Toute réorientation du budget d'une action vers une autre est examinée généralement en loi de finances rectificative dès lors que la finalité de la dépense ou la nature est modifiée.

Ces redéploiements doivent être distingués de la réorientation des crédits provenant du désengagement ou arrêt d'un projet vers d'autres projets au sein d'une même action. Les fonds à réemployer devront alors suivre la procédure décrite supra . En effet, à ce stade opérationnel, les crédits sont disponibles mais sont toujours gérés par le même opérateur. À titre d'illustration, si des reliquats sont constatés au sein de l'action « Programmes et équipements prioritaires de recherche » (PEPR) car des projets ont été arrêtés, un autre PEPR pourrait être lancé après validation de l'État et donner lieu à la sélection de nouveaux projets mobilisant in fine ces financements disponibles. En revanche, des crédits du PEPR ne pourraient pas être employés sans redéploiement préalable en LFR pour être mobilisés sur une procédure d'industrialisation.

Redéploiements en 2021

Source : Rapport relatif à la mise en oeuvre et au suivi des investissements d'avenir France 2030 & investissements d'avenir, annexé au projet de loi de finances pour 2023, page 34


* 16 Cf . Article 8 de la loi n° 2010- 237 du 9 mars 2010 modifiée de finances rectificative pour 2010.

* 17 L'alinéa 3 du III de l'article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 dispose : « Les redéploiements modifiant la répartition initiale des fonds entre les différentes actions des programmes d'investissements sont approuvés par le Premier ministre, après information des commissions chargées des finances et des autres commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Les commissions concernées peuvent adresser au Premier ministre toutes observations qui leur paraissent utiles à propos de ces redéploiements. »

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