PREMIÈRE PARTIE
UNE MISSION DONT LES CRÉDITS CONTINUENT
D'AUGMENTER SANS OFFRIR DE VISION GLOBALE DES DÉPENSES LIÉES
À L'IMMIGRATION NI PERMETTRE UNE MAÎTRISE DES FLUX MIGRATOIRES
I. UNE MISSION, DONT LES CRÉDITS NE REPRÉSENTENT QU'UNE PART MINORITAIRE DES DÉPENSES LIÉES À L'IMMIGRATION ET QUI SOUFFRE D'UNE ABSENCE DE MAÎTRISE DES FLUX
A. UNE ABSENCE DE VISION D'ENSEMBLE DES DÉPENSES LIÉES À L'IMMIGRATION DANS LE BUDGET DE L'ÉTAT ET EN PARTICULIER DANS LA PRÉSENTE MISSION
L'examen de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances s'effectue cette année encore dans un contexte marqué par l'absence de données fiables permettant d'évaluer clairement la situation migratoire de la France, ce qui réduit grandement la portée de cet examen.
Ce problème d'insuffisance de chiffres fiables et de sincérité de la part de l'exécutif est accentué par l'absence de consolidation des différents coûts de l'immigration.
Les dépenses de l'État induites par l'immigration ne se limitent en effet pas à la mission « Immigration, asile et intégration ». Le coût estimé de la politique française de l'immigration et de l'intégration était ainsi de 6,4 milliards d'euros en 2020 et de 6,7 milliards d'euros en 2021 et en 2022. Il serait de 7,1 milliards d'euros en 2023.
En outre, ce coût, issu du document de politique transversale (DPT) « Politique française de l'immigration et de l'intégration » annexé au projet de loi de finances pour 2023, auquel contribuent 19 programmes répartis au sein de 13 missions budgétaires, ne prend en réalité en compte que les dépenses directes et orientées à titre principal vers les étrangers. Le coût des forces de sécurité intérieure, de l'hébergement d'urgence et de l'enseignement scolaire n'est par exemple que partiellement intégré.
Part des crédits de paiement de la mission
« Immigration, asile et intégration »
par rapport à l'ensemble des crédits de la « Politique
française
de l'immigration et de l'intégration » en
2023
(en %)
Source : commission des finances, d'après le document de politique transversale « Politique française de l'immigration et de l'intégration » annexé au présent projet de loi de finances
Le rapporteur spécial estime que certaines dépenses de l'État, comme celles relatives à l'aide médicale d'État (AME), intégralement destinées à des immigrés, pourraient être intégrées à la mission « Immigration, asile et intégration », afin d'apporter une vision davantage consolidée du coût réel de cette politique publique. Le rapporteur spécial de la mission « Santé » s'interrogeait d'ailleurs, en 2021 1 ( * ) , sur l'opportunité d'intégrer l'AME dans la mission « Immigration, asile et intégration » ; il posait déjà cette question en 2020, tout en précisant que cette prestation « constitue un facteur de croissance de l'immigration irrégulière » 2 ( * ) .
Il est regrettable, à cet égard, que le ministère de l'intérieur, pourtant chef de file de cette politique, ne soit pas en mesure d'apporter de réponse aux questions du rapporteur spécial 3 ( * ) relatives aux coûts de l'immigration supportés par les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale.
La difficulté d'accès aux données est cette année accentuée par le fait que seul un tiers des réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial ont été transmises à la date limite du 10 octobre 2022 fixée par les dispositions organiques 4 ( * ) .
* 1 Rapport général n° XX (2021-2022) de M. Christian Klinger, fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2021.
* 2 Rapport général n° 138 (2020-2021) de M. Christian Klinger, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2020.
* 3 Réponses aux questionnaires budgétaires.
* 4 Article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.