DEUXIÈME PARTIE
LES
COMPTES SPÉCIAUX
I. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS » : UNE MOBILISATION MOINDRE QU'EN 2022 ET L'INTÉGRATION BIENVENUE DES PRÊTS DANS SON PÉRIMÈTRE
A. UN COMPTE MOINS MOBILISÉ EN 2023 QU'EN 2022
Le compte de concours financiers (CCF) « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », renommé par l'article 19 du présent PLF « Prêts et Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », retrace désormais neuf catégories d'organismes bénéficiaires d'avances :
- sur le programme 821 , les avances à l'Agence de services et de paiement (ASP) au titre du préfinancement des aides de la politique agricole commune . Ces avances sont généralement d'une durée très courte, en tout cas inférieure à un an ;
- sur le programme 823 , les avances du Trésor à des organismes distincts de l'État gérant des services publics , dont font partie par exemple l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, la Cité de la musique ou encore les chambres de commerce et d'industrie. Pour 2023, un montant de 100 millions d'euros est proposé pour FranceAgrimer pour répondre aux crises agricoles demandant la mise en place de dispositifs d'urgence. 8,8 millions d'euros sont par ailleurs de nouveau ouverts pour l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Des crédits plafonnés à 100 millions d'euros sont enfin prévus au titre de la réserve d'urgence pour répondre à des besoins de trésorerie imprévus et limités ;
- sur le programme 824 , renommé pour 2023, les prêts et avances du Trésor à des services de l'État , qui se résument en réalité exclusivement aux prêts et avances octroyés au budget annexe « contrôle et exploitation aériens » (Bacea). Au 15 septembre 2022, le montant des avances 73 ( * ) consenties au Bacea s'élevait, sur un montant de crédit ouvert de 707 millions d'euros en loi de finances pour 2022, à 352 millions d'euros, avec toujours une durée maximale de remboursement fixée à 10 ans. Aucun crédit n'est prévu pour 2023 ;
- sur le programme 825 , les avances du Trésor à l' office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) afin de couvrir l'indemnisation des victimes du Benfluorex si les Laboratoires Servier refusaient d'y accéder. Aucune avance n'a encore été demandée. Si cela fait maintenant quatre ans que ces avances ne sont pas utilisées, leur inscription en loi de finances initiale répond à un principe de précaution. En 2017 par exemple, les Laboratoires Servier avaient refusé de payer les indemnisations pour deux dossiers et l'Oniam les avait assignés en justice ;
- sur le programme 826 , les prêts aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité , créé par la troisième loi de finances rectificative (LFR) pour 2020 74 ( * ) . Ce programme , qui ne prévoyait jusqu'alors que des avances, est également renommé pour se limiter aux prêts . Ces prêts visent à compenser la chute des recettes de la taxe d'aéroport, acquittée par les compagnies aériennes et affectée au financement des dépenses de sûreté-sécurité. Versés en 2020, 2021 et 2022 à respectivement 86, 84 et 62 exploitants, elles ont une durée maximale de 10 ans , la première échéance de remboursement devant intervenir en 2024 . Aucun crédit n'est prévu en 2023 ;
- sur le programme 827 , les prêts à Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19 , créé par la quatrième loi de finances rectificative pour 2020 75 ( * ) . Ce programme, qui ne prévoyait jusqu'alors que des avances, est renommé pour se limiter aux prêts. L'avance, renommée « prêt » à partir de 2023, a été octroyée pour une durée maximale de 16 ans, avec une première échéance de remboursement en 2023. Aucun crédit n'est pour le moment prévu en 2023 ;
- sur le programme 828 , les prêts destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19, également créé par la quatrième LFR pour 2020. Encore une fois, ce programme qui ne prévoyait que des avances, se limite désormais aux prêts. Si la date de remboursement ne peut être ultérieure au 1 er janvier 2031 et la durée de remboursement inférieure à six ans 76 ( * ) , les AOM bénéficiaires peuvent toutefois choisir, dans le respect de ces conditions, de ne commencer à rembourser les avances qu'au moment où les recettes tarifaires et le versement mobilité sont revenus à leur niveau moyen pour les années 2017 à 2019 (clause dite de « retour à meilleure fortune »). Là encore, aucun crédit n'est ouvert en 2023 ;
- sur le programme 829 , les prêts destinés au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence , créé par la loi de finances pour 2022 77 ( * ) . Les avances se transforment également en prêts dans ce PLF pour 2023. Ce programme vise à permettre à l'État de contribuer au financement du volet « transports » du plan « Marseille en Grand » piloté par le groupement d'intérêt public Aix-Marseille-Provence Mobilité. Aucun prêt n'a été effectué, mais 100 millions d'euros sont ouverts en crédit de paiement pour 2023 ;
- sur le nouveau programme 830 , les prêts destinés à FranceAgriMer au titre du préfinancement des aides européennes . Il vise à sécuriser les modalités de financement du Fonds social européen (FSE+) dans le cadre du cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 et permettrait d'autoriser le préfinancement sous forme de prêts de l'Agence France Trésor des dépenses engagées par France AgriMer au titre de l'aide alimentaire. En effet, au début de chaque programmation des fonds européens, FranceAgriMer est amené à préfinancer des aides européennes avant un remboursement par l'Union européenne qui peut être tardif - cela a été le cas à de nombreuses reprises dans le cadre du CFP 2013-2020 en raison de difficultés de trésorerie du FEAD, elles-mêmes dues à la reprise, à un rythme insuffisant des appels de fonds auprès de la Commission européenne pour obtenir le remboursement des campagnes annuelles précédentes. Pour tenir compte de ces décalages, les prêts seraient sollicités pour une durée de cinq à six ans. 100 millions d'euros de crédit sont prévus pour 2023.
Au 31 décembre 2021, le montant résiduel des « avances » octroyées depuis la création du compte s'élevait à 5,56 milliards d'euros .
Les avances - en réalité des prêts comme en témoigne la nouvelle dénomination du CCF - sur le programme 828 ont toutes été engagées en 2020, mais des avances sur le programme 827, visant également à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité côté Île-de-France, ont également été engagées fin 2021, à hauteur de 800 millions d'euros et pour 15 ans. Aucun prêt n'a en revanche été prévu pour ces deux programmes en 2022.
S'agissant du programme 826, dédié aux exploitants d'aéroports, l'avance complémentaire de 250 millions d'euros de crédits votée en loi de finances pour 2021 pour pallier les prévisions toujours dégradées du produit de la taxe d'aéroport, du fait d'un trafic aérien encore inférieur à son volume pré-crise sanitaire, a bien été utilisée dans le cadre de 84 conventions conclues du 6 août 2021 au 21 décembre 2021. Les crédits votés à hauteur de 150 millions d'euros en loi de finances pour 2022 ont également tous été utilisés dans le cadre de 62 conventions, conclues entre le 17 mai 2022 et le 18 juillet 2022.
A contrario , les programmes 821, 823 et 825 présentent une dotation en crédits indépendante des effets de la crise sanitaire.
Évolution des dépenses, des recettes et
du solde du compte
de concours financiers entre 2022 et 2023
(en crédits de paiement et en millions d'euros)
2021 (exécution) |
LFI 2022 |
PLF 2023 |
Évolution 2023 / LFI 2022 |
|
Dépenses |
||||
[821] Avances à l'Agence de services et de paiement |
8 067,9 |
10 000 |
10 000 |
0,00 % |
[823] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics |
105,6 |
349,4 |
208,8 |
- 40,24 % |
[824] Avances à des services de l'État |
1 100,6 |
707,0 |
198,4 |
- 71,94 % |
[825] Avances à l'Oniam |
0 |
15 |
15 |
0,00 % |
[826] Avances 78 ( * ) / Prêts 79 ( * ) aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité |
250,0 |
150 |
0 |
- 100,00 % |
[827] Avances remboursables 1 / Prêts 2 destinés à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 |
800,0 |
0 |
0 |
0 % |
[828] Avances remboursables 1 / Prêts 2 destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 |
647,3 80 ( * ) |
0 |
0 |
0 % |
[829] Prêts destinés au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence |
744,0 |
0 |
- 100 % |
|
[830] Prêts à FranceAgriMer au titre des préfinancements de fonds européens |
100,0 |
|||
Total des dépenses |
10 971,3 |
11 321,4 |
10 622,2 |
- 6,18 % |
Recettes |
||||
[821] Avances à l'Agence de services et de paiement |
8 067,9 |
10 000 |
10 000 |
0,00 % |
[823] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics |
93,9 |
224,8 |
186,4 |
- 17,08 % |
[824] Avances à des services de l'État |
221,9 |
321,9 |
367,2 |
+14,07 % |
[825] Avances à l'Ondiam |
0 |
15 |
15 |
0,00 % |
[826] Avances aux exploitants d'aéroports |
0,3 |
0 |
0 |
|
[827] Avances remboursables destinées à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 |
0 |
0 |
30 |
|
[828] Avances remboursables destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 |
0 |
0 |
0 |
|
Total des recettes |
8 384,1 |
10 561,7 |
10 598,6 |
+0,35 % |
Solde |
- 2 587,3 |
- 759,7 |
- 23,6 |
96,89 % |
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
Sur le volet « dépenses », et dans le présent PLF, la normalisation du CCF semble se confirmer, y compris pour le programme 824 concernant les avances et prêts octroyées au Bacea . Après une hausse significative en 2020 et 2021 expliquée par une augmentation du besoin de trésorerie due à la baisse du trafic aérien, ils connaîtraient une diminution de plus de 70 % entre la loi de finances pour 2022 et le PLF pour 2023. Leur montant (198,4 millions d'euros) resterait toutefois plus de trois fois plus élevé auquel le Bacea était parvenu en 2019 (59,7 millions d'euros) au terme d'une trajectoire de désendettement qui s'était traduite par une diminution du stock de prêts. Les remboursements des prêts octroyés aux exploitants d'aéroports reprendraient en 2024.
Cette normalisation se traduit par un rétablissement du solde , attendu en déficit de 23,6 millions d'euros en 2023 , contre près de 750 millions d'euros en prévision révisée pour 2022 81 ( * ) .
* 73 C'est cette terminologie qui est retenue pour 2022 puisque l'entrée en vigueur de la nouvelle maquette n'interviendrait qu'en 2023.
* 74 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 .
* 75 Loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020 .
* 76 Sauf accord du bénéficiaire.
* 77 Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021de finances pour 2022 .
* 78 Jusqu'en 2022.
* 79 À partir du PLF 2023.
* 80 Explications supra.
* 81 Le deuxième projet de loi de finances rectificatives pour 2022 prévoit en effet l'annulation de 11,4 millions d'euros de crédits de paiement.