Rapport général n° 115 (2022-2023) de M. Jérôme BASCHER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022

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N° 115

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 13

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX, COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : PRÊTS ET AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS

Rapporteur spécial : M. Jérôme BASCHER

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean- Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273 , 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374 , 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

Deuxième mission du budget de l'État en crédits de paiement (CP), la mission « Engagements financiers de l'État » se compose de sept programmes. Ses CP augmentent de 35,7 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) 2022, pour atteindre 60,19 milliards d'euros, dont 49,96 milliards d'euros affectés à la charge de la dette . Cette dernière représenterait ainsi, en ajoutant les 900 millions d'euros de reprise de la dette de SNCF Réseau par l'État, 10,8 % des dépenses du budget général.

C'est surtout l'augmentation de la charge de la dette et de la trésorerie de l'État (+ 31,5 %) et la multiplication par 3,5 des crédits utilisés dans le cadre du programme 369 (6,6 milliards d'euros) qui expliquent l'augmentation des dépenses de la mission. S'agissant de la hausse de la charge de la dette, une première augmentation de 11,9 milliards d'euros avait été votée lors de la première loi de finances rectificative (LFR) pour 2022 , ce qui explique la faible augmentation des dépenses portées par ce programme entre la prévision révisée pour 2022 et 2023.

De la prévision révisée pour 2022
au projet de loi de finances pour 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le besoin de financement de l'État atteindrait 305,5 milliards d'euros en 2023 1 ( * ) , soit seulement 200 millions d'euros de moins qu'en 2022. S'il se stabilise, il est bien plus élevé qu'en 2021 (+ 7,1 %). Il s'élevait à 220,5 milliards d'euros en 2019, soit près de 30 % de moins que celui prévu pour 2023. Les émissions nettes à moyen et long terme augmenteraient de 10 milliards pour s'établir à 270 milliards d'euros - l'équivalent de 10 % du PIB.

I. UNE AUGMENTATION DE LA CHARGE DE LA DETTE DONT LA STABILISATION EN 2023 EST TROP PEU CRÉDIBLE, ET DONT LA GESTION DOIT ÊTRE PLUS LISIBLE

A. LA REMONTÉE DE L'INFLATION CONJUGUÉE À UN EFFET TAUX DEVENU DÉFAVORABLE CONDUIT À UNE AUGMENTATION DE LA CHARGE DE LA DETTE QUI AURAIT PU ÊTRE FREINÉE PAR UNE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

Les crédits demandés pour le programme 117 dans le PLF 2023 progressent de 31,5 % par rapport à la LFI 2022, pour s'établir à 50,83 milliards d'euros. Ceux dédiés à la trésorerie de l'État diminuent (868 millions d'euros, en baisse de 28,2 %), tandis que ceux affectés à la charge de la dette connaissent une augmentation presque explosive (49,96 milliards d'euros, en hausse de 33,4 %) due à la remontée de l'inflation au cours de l'année 2022 , répercutée dès la première LFR pour 2022. On assiste donc, depuis 2020, à une augmentation spectaculaire de la valeur nominale des intérêts de la dette.

Évolution de la charge de la dette depuis 2012

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le rebond constaté en 2021 s'est fortement amplifié en 2022 et s'explique par la reprise de l'inflation . La provision pour indexation du capital des titres indexés s'élèverait en effet à 15,6 milliards d'euros en 2022 et 13,9 milliards d'euros en 2023, contre 458 millions d'euros en 2020 et trois milliards d'euros en 2021.

Les émissions indexées : un programme utile et neutre sur le long terme

Le financement en obligations indexées (11 à 12 % de l'encours) est une source de diversification. Elle permet d'attirer des investisseurs variés, en particulier ceux qui doivent adosser un passif exposé à l'inflation, et auxquels un accès privilégié est décisif pour absorber des volumes d'émission en constante augmentation depuis quinze ans. En l'absence de diminution substantielle du programme de financement, une baisse de la part des obligations indexées obligerait à augmenter les volumes d'émission sur le compartiment des titres nominaux, ce qui dégraderait les conditions d'emprunt sur ce segment et pèserait à son tour sur la charge de la dette en raison de taux moyens plus élevés.

L'émission d'obligations indexées a aussi un effet neutre sur le long terme . Durant la décennie 2010, la provision pour indexation a été très faible et systématiquement inférieure aux économies d'intérêts dues à ces émissions. Les titres indexés ont été source d'économie pour le budget de l'État en comparaison des titres nominaux principalement à partir de 2012, permettant des économies annuelles qui ont pu atteindre certaines années jusqu'à trois milliards d'euros. Au global, l'impact budgétaire cumulé pour le budget de l'État revient à une économie d'environ deux milliards d'euros.

Ce ne devrait toutefois plus être le cas à partir de 2023, puisque le cycle économique lié à une période d'inflation et de taux bas s'est achevé avec le début de la guerre en Ukraine et les tensions sur les approvisionnements en énergie.

Coût et économies induits par le programme d'émissions
indexées depuis sa création

Source : réponses de l'Agence France Trésor au questionnaire du rapporteur spécial

L'effet taux qui, jusqu'en 2022, contribuait à contenir la charge de la dette, deviendra défavorable à partir de 2023. Il s'ajoutera donc à l'effet volume, dont l'augmentation indique l'absence d'effort accompli sur la maîtrise de la dépense publique par le Gouvernement.

Le resserrement de la politique monétaire européenne et la volatilité des marchés obligataires ont contribué au relèvement du taux souverain français à 10 ans, qui tutoie depuis octobre 2022 les 3 %. La hausse du dollar, déjà amorcée, peut faire craindre une demande plus forte de titres américains dont le corollaire serait une désaffection relative des titres français. Au total, s'il est difficile de se prononcer, dans un contexte aussi volatil, sur une valeur autour de laquelle le taux à 10 ans viendra à se stabiliser, les prévisions du Gouvernement paraissent trop optimistes .

Les facteurs d'évolution de la charge de la dette depuis 2017

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

B. LE MAINTIEN DU PROGRAMME D' « AMORTISSEMENT DE LA DETTE DE L'ÉTAT LIÉE À LA COVID-19 » EST AUSSI CONTESTABLE QUE L'EXTRACTION HORS DE LA MISSION DE LA DETTE DE SNCF RÉSEAU REPRISE PAR L'ÉTAT

Le programme 369 vise à retracer l'amortissement du surcroît de la dette de l'État en 2020 et en 2021 liée à la crise sanitaire. 165 milliards d'euros ont été ouverts l'an dernier en AE sur ce programme et 1,9 milliard d'euros en CP. En 2023, 6,6 milliards seront ouverts pour financer ce programme, soit 3,5 fois plus qu'en 2022.

Le caractère contestable des modalités de calcul de cette « dette Covid » a déjà été démontré par le rapporteur spécial, qui réitère ici son propos : il n'y a aucun argument économique ou budgétaire de nature à justifier l'isolement de la « dette Covid », les recettes fiscales supplémentaires pouvant tout aussi bien servir à réduire le déficit budgétaire courant .

Un autre élément vient brouiller la compréhension de la mission : l'extraction des charges d'intérêt résultant de la reprise décidée en 2018 des 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau. Retracés dans la mission « Écologie », ces crédits représentent 900 millions d'euros pour 2023. Si l'objectif était d'isoler la gestion de la charge de cette dette, il aurait été tout à fait possible de conserver ce programme et de le rattacher à la présente mission.

Cette extraction est source de confusion : elle alimente un doute sur les crédits que doit consacrer l'État à la charge de la dette. Le montant de 50,8 milliards d'euros est en effet incomplet puisque doivent s'y adjoindre les 900 millions d'euros de la charge de la dette de SNCF Réseau pour obtenir le « vrai chiffre » de la charge de la dette, qui est de 51,7 milliards d'euros pour 2023 .

II. UNE DIMINUTION PROBABLEMENT TROP FORTE DES CRÉDITS PROVISIONNÉS POUR LES APPELS EN GARANTIE DE L'ÉTAT

Sur les autres programmes de la mission, le programme 114 « Appels en garantie de l'État » est le seul dont les crédits se maintiennent à un niveau supérieur au milliard d'euros . Par rapport à la LFI 2022, ils connaîtraient une baisse, passant de 3,50 milliards d'euros à 2,48 milliards d'euros (-29 %), après une forte hausse entre 2021 et 2022 (+ 34 %). Cette mobilisation toujours forte s'explique principalement par le fait que le programme porte les appels en garantie au titre des prêts garantis par l'État (PGE).

Si le calibrage opéré en loi de finances pour 2022 s'est avéré large - sur les 3,5 milliards d'euros votés le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022 prévoit d'en annuler deux milliards - il est à toutefois craindre qu'il soit trop optimiste pour 2023 . Il repose en effet sur un scénario macroéconomique dont le rapporteur général de la commission des finances du Sénat a démontré le caractère peu crédible.

Certains indices laissent déjà présager une dégradation de la situation des entreprises. Le nombre de défaillances d'entreprises , s'il demeure inférieur à celui de 2019 (51 200) a significativement augmenté sur la période allant de septembre 2021 à septembre 2022 : il atteint 37 000 . Selon la direction générale du Trésor, le risque d'augmentation du nombre de défaillances n'est pas à écarter, comme en témoigne la normalisation de leur nombre depuis le début de l'été, comparativement à la situation d'avant crise.

Nombre de défaillances d'entreprises par semaine, 2019-2022

Source : réponses de la direction générale du Trésor au questionnaire du rapporteur spécial

Le principal risque identifié à ce stade résulte de la crise énergétique, qui pourrait dégrader la situation financière de nombreuses entreprises. Ce pourrait être tout particulièrement le cas au moment de la renégociation des contrats d'approvisionnement énergétique qui a généralement lieu en décembre et qui pourrait fragiliser, si ce n'est étouffer les entreprises industrielles, fortement consommatrices d'énergie et le plus souvent incapables de répercuter ces hausses ni de se couvrir sur ces évolutions de coûts.

De ce point de vue, il convient de ne céder à aucun catastrophisme , mais plutôt de faire preuve de plus de prudence . À cet égard, les crédits proposés par le Gouvernement pour le programme 114 paraissent insuffisants.

III. LA NORMALISATION DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS DÉSORMAIS RENOMMÉ « PRÊTS ET AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

Le compte de concours financiers (CCF) « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » est renommé « Prêts et Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ». Le rapporteur spécial, qui avait déploré le décalage entre l'ancienne appellation et l'octroi de trop nombreuses avances sur des durées longues, ne peut que se réjouir de voir le Gouvernement en tirer les conclusions qui s'imposent.

Ce CCF retrace désormais neuf catégories d'organismes bénéficiaires d'avances : y figure depuis 2022 un programme dédié aux prêts destinés au financement des infrastructures des transports collectifs du quotidien de la métropole Aix-Marseille-Provence, tandis qu'un nouveau programme est créé par le présent projet de loi de finances, pour les prêts destinés à FranceAgriMer pour donner à cet établissement public, au début de chaque programmation des fonds européens, la possibilité de préfinancer des aides européennes avant un remboursement parfois tardif par l'Union européenne. Hormis ce nouveau programme, tous les crédits liés au compte de concours diminuent en 2023, conduisant le déficit du compte à un niveau de 24 millions d'euros , contre 758 millions d'euros pour 2022.

Réunie le jeudi 10 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et des crédits des comptes spéciaux associés.

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision.

Au 10 octobre, date limite prévue par la loi organique relative aux lois de finances pour l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire, le rapporteur spécial avait reçu 100 % des réponses pour la mission « Engagements financiers de l'État », 100 % pour le compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et 100 % pour le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux ».

PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

Désormais deuxième mission pour les crédits de paiement 2 ( * ) , la mission « Engagements financiers de l'État » se compose de sept programmes :

- le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » , dont 98 % des crédits sont alloués au paiement des intérêts de la dette. Ce programme doit permettre de répondre à deux objectifs : (1) garantir la solvabilité de l'État en lui permettant d'honorer ses engagements financiers dans les conditions les moins onéreuses et les plus sûres possibles et (2) s'assurer que le compte de l'État à la Banque de France, « le compte unique du Trésor », est créditeur à la fin de chaque journée 3 ( * ) ;

- le programme 114 « Appels en garantie de l'État » , qui retrace les crédits destinés à couvrir les appels des garanties octroyées par l'État. L'État garantit principalement des dettes émises par des tiers, soit pour leur permettre de bénéficier de conditions de financement plus favorables, soit pour les garantir sur un engagement qu'ils ont pris pour le compte de l'État. Le programme retrace en particulier les crédits engagés dans le cadre de la provision sur les prêts garantis par l'État (PGE) ;

- le programme 145 « Épargne » , qui est destiné à soutenir le secteur du logement et de l'accession à la propriété. Il se distingue toutefois par le poids des 26 dépenses fiscales qui lui sont rattachées, dont le coût est près de 98 fois supérieur aux crédits ouverts sur ce programme ;

- le programme 336 « Dotation du mécanisme européen de stabilité » , qui soutient la contribution française au capital du Mécanisme européen de stabilité (MES) ;

- le programme 338 « Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement », qui est le support budgétaire de la participation de la France à l'augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement. À l'instar des années précédentes, il n'est pas doté de crédits dans le projet de loi de finances pour 2023 et n'appellera donc pas de commentaire particulier de la part du rapporteur spécial ;

- le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » , qui vise à soutenir les collectivités territoriales ayant souscrit aux prêts structurés à risque ou « prêts toxiques ». Créé par l'article 92 de la loi de finances pour 2014 4 ( * ) , il intervient de trois manières : en apportant une aide au remboursement anticipé des emprunts 5 ( * ) , en prenant en charge une partie des intérêts dus sur les échéances dégradées (15 % des collectivités territoriales aidées) et en apportant une aide à la gestion de l'encours ;

- le programme 369 « Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 » , qui porte les crédits affectés à la Caisse de la dette publique pour rembourser une somme équivalente au montant de la dette de l'État liée à la covid-19, évaluée en 2022 par le Gouvernement à 165 milliards d'euros.

Dans le cadre du présent projet de loi de finances (PLF), les crédits demandés connaissent une évolution contrastée, entre une forte baisse en autorisations d'engagement et une hausse significative en crédits de paiements pour s'établir à :

- 53,42 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), soit une division par quatre par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022, qui s'explique par l'absence d'autorisations d'engagement prévue pour 2023 au titre du programme 369 « Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 » ;

- 60,19 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 35,73 % par rapport à la LFI 2022. Cette dynamique s'explique principalement par l'augmentation de 31,48 % de la charge de la dette et de la trésorerie de l'État, qui passe de 38,66 à 50,83 milliards d'euros, et, dans une moindre mesure par la multiplication par 3,5 des crédits utilisés dans le cadre du programme 369, qui passent de 1,885 à 6,586 milliards d'euros.

Le tableau ci-après détaille l'évolution des crédits de la mission entre 2022 et 2023 .

Évolution des crédits de la mission
« Engagements financiers de l'État »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Exécution 2021

LFI 2022

2022 (révisé 6 ( * ) )

PLF 2023

Part dans la mission en 2023

Évolution PLF 2023 / LFI 2022

[117] Charge de la dette et trésorerie de l'État

AE

37 807,41

38 656,00

50 544,00

50 825,00

95,15 %

+ 31,48 %

CP

37 807,41

38 656,00

50 544,00

50 825,00

84,44 %

+ 31,48 %

[114] Appels en garantie de l'État

AE

297,65

3 500,91

1 472,86

2 482,74

4,64 %

- 29,08 %

CP

297,65

3 500,91

1 498,91

2 482,74

4,12 %

- 29,08 %

[145] Épargne

AE

64,52

60,21

59,22

59,21

0,11 %

- 1,66 %

CP

64,90

60,21

59,22

59,21

0,10 %

- 1,66 %

[336] Dotation du Mécanisme européen de stabilité

AE

62,36

57,00

56,61

50,00

0,09 %

- 12,28 %

CP

62,36

57,00

56,61

50,00

0,08 %

- 12,28 %

[338] Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

AE

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00 %

CP

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00 %

[344] Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

AE

- 119,97

0,00

0,00

0,00

0,00 %

0,00 %

CP

191,25

185,64

182,58

185,85

0,31 %

+ 0,11 %

[369] Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 (nouveau)

AE

165 000,00

165 000,00

0,00

0,00 %

- 100 %

CP

1 885,00

1 885,00

6 586,49

10,94 %

+ 249,41 %

Total

AE

38 111,96

207 274,12

217 132,69

53 416,9

100 %

- 74,23 %

CP

38 423,57

44 344,81

54 226,32

60 189,28

100 %

+ 35,73 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

I. LE RETOUR DE L'INFLATION FAIT PORTER UNE MENACE SUR LA SOUTENABILITÉ BUDGÉTAIRE ET LA MESURE DE LA DETTE DE L'ÉTAT DOIT SE GARDER DE TOUT ARTIFICE COMPTABLE

Les conséquences de la hausse marquée de l'inflation sur les engagements financiers de l'État sont significatives et touchent particulièrement les crédits affectés au programme 117 (charge de la dette et de la trésorerie de l'État). La crise énergétique devrait fortement affecter les entreprises industrielles et pourrait avoir un effet sur le programme 114 (appels en garantie de l'État). Enfin, le programme 369 (amortissement de la dette de l'État liée à l'épidémie de covid-19) entame une augmentation des décaissements. Ensemble, ces trois programmes représentent plus de 99 % des crédits de la mission .

Il convient de rappeler ici que ces crédits, contrairement à ceux alloués à la majorité des programmes du budget général, ne sont pas limitatifs mais évaluatifs . Cette dérogation à l'autorisation parlementaire s'explique par la nécessité pour l'État de toujours être en mesure d'honorer ses engagements. Si ce principe rend ces programmes peu pilotables et limite les modifications pouvant être proposées au cours de l'examen parlementaire, il ne doit pas empêcher de s'interroger sur le niveau des crédits alloués aux programmes et sur les hypothèses qui sous-tendent ces abondements : en l'occurrence, ces crédits semblent sous-évalués .

A. DANS UN CONTEXTE DE REMONTÉE DE L'INFLATION ET DE MAINTIEN D'UN NIVEAU DE DÉPENSES PUBLIQUES TOUJOURS ÉLEVÉ, LA CHARGE DE LA DETTE A AUGMENTÉ EN 2022 MAIS DEVRAIT SE STABILISER EN 2023

1. Une forte augmentation de la charge de la dette en 2022 et une stabilisation dans le projet de loi de finances pour 2023 peu crédible
a) Un programme placé sous la responsabilité de l'Agence France Trésor

Le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » est placé sous la responsabilité de l'Agence France Trésor (AFT). Service à compétence nationale créé en 2001, l'AFT s'appuie sur un effectif de 42 personnes (25 fonctionnaires et 17 contractuels), pour une masse salariale prévisionnelle estimée à 4 millions d'euros en 2022, un montant en hausse de 300 000 euros par rapport à l'année 2021. Les dépenses de personnel de l'AFT sont retranscrites dans le programme 305 « Stratégies économiques » de la mission « Économie ».

L'AFT doit en permanence contrôler les risques techniques et financiers qui pourraient nuire à sa mission . Le rapporteur spécial souligne l'expertise reconnue de l'agence dans ces deux domaines .

Au regard de la sensibilité des missions exercées par l'AFT, les dispositifs internes de pilotage des risques financiers et les procédures prudentielles mises en oeuvre sont soumis chaque année à une évaluation externe . L'audit doit mesurer l'adéquation des procédures internes de l'AFT à ses activités et aux risques associés, sous cinq angles 7 ( * ) , et en prenant comme référence les dispositions règlementaires en vigueur dans les établissements financiers. Les résultats sont transmis chaque année au Parlement : pour chacun de ces angles, l'AFT a reçu en 2021 la meilleure note possible, ce qui signifie que le dispositif existant permet de couvrir de manière satisfaisante les risques identifiés 8 ( * ) .

Sept incidents dans l'exécution des opérations de dette et de trésorerie et susceptibles d'affecter le solde du compte à la Banque de France ont été constatés en 2021, comme en 2020. Aucun d'entre eux n'a généré de risque pour la continuité financière de l'État. Le nombre total d'incidents s'est élevé à 71, du fait de difficultés techniques ou informatiques. Ils ont fortement diminué par rapport à 2020 (83), année marquée par le contexte de la crise sanitaire et la mise en place du télétravail 9 ( * ) . Ces incidents ne sont souvent pas le fait de l'Agence France Trésor : dans ce cas ils sont suivis de mesures correctives chez ses partenaires 10 ( * ) . Ils sont en tout cas toujours ou bien résolus avant la fin de la journée, ou bien, s'ils ont eu un impact sur le solde du compte à la Banque de France, au cours de la journée suivante.

b) Une hausse massive des crédits par rapport à la loi de finances initiale pour 2022

Les crédits demandés pour le programme 117 dans le PLF 2023 progressent de 31,5 % par rapport à la LFI 2022, pour s'établir à 50,83 milliards d'euros (AE=CP). Ils sont affectés à deux actions qui connaissent chacune, dans deux sens opposés, de nettes évolutions :

- l'action 01 porte les crédits liés à la gestion de la dette, soit 49,96 milliards d'euros en 2023 (83 % des crédits de la mission et 98,3 % des crédits du programme). Ce montant augmente considérablement par rapport à la LFI 2022 (+ 33,41 %), mais il se stabilise par rapport au chiffre retenu dans la première loi de finances rectificative pour 2022, qui s'élevait alors à 49,34 milliards d'euros à la suite d'une ouverture exceptionnelle de crédits de 11,9 milliards d'euros, et à la prévision révisée pour l'année 2022, la charge de la dette étant désormais attendue à 49,45 milliards d'euros ;

- l'action 03 correspond à la gestion de la trésorerie et recouvre 1,7 % des crédits du programme, soit un montant de 868 millions d'euros en 2023. Le montant prévu pour 2023 est en baisse de 28,2 % par rapport à la prévision en LFI 2022 (1,21 milliards) et de 8,9 % par rapport à la prévision révisée pour 2022 (953 millions d'euros). Structurellement déficitaire depuis quelques années, l'impact budgétaire de la gestion de la trésorerie de l'État devrait s'améliorer à compter de septembre 2022 : les dépôts sur le compte du Trésor à la Banque de France, qui étaient rémunérés négativement, bénéficieront au moins jusqu'au 30 avril 2023, d'un taux positif. Les dépôts de certains correspondants du Trésor bénéficient aussi d'une rémunération positive, mais elle diminuerait en 2022 et 2023.

La diminution constatée entre 2021 et 2022 provient pour partie d'une modification de périmètre, avec le transfert de la rémunération du Fond pour l'Innovation et l'industrie du programme 117 vers le programme 425 « Financement des écosystèmes d'innovation » de la mission « Investir pour la France 2030 ».

Évolution des crédits (AE=CP) des deux actions
du programme 117

(en millions d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Concernant la trésorerie de l'État , le Parlement a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi et destinées à prescrire le dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et d'organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public, sous conditions 11 ( * ) .

Comme la commission des finances l'avait relevé lors de l'examen de cette disposition 12 ( * ) , la centralisation des trésoreries permet à l'État de diminuer son besoin de financement en réduisant ainsi le besoin de recourir aux titres de court terme. Ce sont ces titres qui sont particulièrement mobilisés en cas de crise et de hausse brutale du besoin de financement. Entre 2000 et 2020, le niveau des emprunts aurait ainsi été réduit de 200 milliards d'euros, pour une économie cumulée de charge d'intérêts d'environ 70 milliards d'euros grâce à la centralisation des dépôts des correspondants.

L'ordonnance a été publiée le 2 décembre 2020 13 ( * ) et complétée par un décret du 14 janvier 2021 14 ( * ) . Elle liste les organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public et concernés, à compter du 1 er octobre 2021, par la centralisation au Trésor des disponibilités d'organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public 15 ( * ) . L'impact est estimé à 4,3 milliards d'euros 16 ( * ) .

c) La hausse de l'inflation explique l'essentiel de l'augmentation de la charge de la dette entre 2021 et 2022, et son maintien, en 2023, au niveau de 2022

La charge de la dette, si l'on inclut la dette de SNCF Réseau reprise par l'État, représenterait en 2023 10,8 % des dépenses du budget général , estimées à 480,3 milliards d'euros en incluant les prélèvements sur recettes, contre 10,5 % en révisé pour 2022 et 8 % en loi de finances pour 2022. L'augmentation du dénominateur entre la loi de finances pour 2022 et le PLF pour 2023 n'aura donc pas suffi à contrer la forte hausse du numérateur sur la même période.

Quant à la valeur nominale des intérêts de la dette de l'État, si elle a connu une nette diminution sur la décennie 2010 17 ( * ) , on constate une augmentation spectaculaire depuis 2020. Le rebond constaté en 2021 s'est fortement amplifié en 2022. Il s'explique, dans les deux cas, par la reprise de l'inflation, qui débutait en 2021 et s'est confirmée en 2022.

Évolution de la charge de la dette depuis 2012

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Or, en décomposant les facteurs d'évolution de la charge de la dette, il apparaît que l'effet inflation explique l'essentiel de son augmentation entre 2021 et 2022. L'effet taux, encore favorable en 2022, est loin d'avoir suffi à le compenser. S'ajoutent également les effets volume et calendaires (c'est-à-dire le moment de l'année auquel l'État procède aux opérations de financement 18 ( * ) ), qui sont venus encore davantage alourdir la charge de la dette pour 2022.

Effets des facteurs d'évolution de la charge de la dette
entre 2021 et la prévision révisée pour 2022

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

En 2023, le reflux de l'inflation, qui se maintient toutefois à un niveau élevé, permettrait toutefois de stabiliser la charge de la dette, en compensant les autres effets.

Effets des facteurs d'évolution de la charge de la dette
entre la prévision révisée pour 2022 et 2023

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'effet taux permettait jusqu'en 2022 de contenir la charge de la dette. Ce faisant, il exonérait le Gouvernement de tout effort significatif de maîtrise des dépenses publiques puisqu'il pouvait emprunter gratuitement voire en se faisant rémunérer. Cet effet ne fonctionnera plus à partir de 2023. À cet égard, les efforts fournis paraissent insuffisants puisqu'en 2023, les dépenses publiques progresseraient en volume d'1,4 % 19 ( * ) , ce qui finira par alourdir la charge de la dette.

Les facteurs d'évolution de la charge de la dette depuis 2017

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

(1) L'inflation explique l'essentiel de la hausse de la charge de la dette au cours de l'année 2022

Lors de l'examen de la mission « Engagements financiers de l'État » pour le PLF 2021, le rapporteur spécial relevait que la donnée inflation était une véritable inconnue, et potentiellement un facteur de risque très élevé 20 ( * ) . Si l'inflation contribue en effet à augmenter les recettes de l'État, ce qui lui facilite le remboursement d'une dette émise antérieurement à un taux fixe et dont le poids réel diminue donc, une partie des obligations assimilables du Trésor (OAT), qui représente au total un peu plus de 10 % de l'encours de dette négociable de l'État, est en effet indexée sur l'inflation française (OATi) et sur l'inflation en zone euro (OAT€i). Or, de manière mécanique, une augmentation de 0,1 point de l'inflation se traduit par une augmentation de l'ordre de 250 millions d'euros sur la charge de la dette.

La hausse brutale de l'inflation a ainsi conduit à augmenter les crédits affectés à la charge de la dette, en 2022 et en 2023.

Tandis qu'en 2021, la loi de finances rectificative (LFR) du 19 juillet avait déjà conduit à ouvrir 1,9 milliard d'euros de crédits supplémentaires du fait d'une inflation plus forte qu'anticipée, celle du 16 août 2022 a prévu un surcroît de crédits beaucoup plus important de 11,9 milliards d'euros pour 2022.

Cette augmentation s'explique également, et essentiellement, par une hausse attendue des inflations française (5,8 %) et européenne (8,4 %) pour 2022. Elle s'est répercutée sur la provision pour indexation du capital des titres indexés, puisque celle-ci est passée de trois milliards d'euros en 2021 à 15,6 milliards d'euros en prévision révisée pour 2022, gagnant donc 12,6 milliards en un an (dont un effet volume de 0,6 milliards d'euros).

Pour 2023 , l'estimation de la provision pour charge d'indexation du capital des titres indexés s'appuie sur un taux d'inflation (prix à la consommation hors tabac) de 4,3 % en France et 4,6 % en zone euro. Elle s'élèverait à 13,9 milliards d'euros , contre 15,6 milliards d'euros en prévision révisée pour 2022.

C'est cette baisse qui explique que l'effet inflation contribue à la diminution de la charge de la dette en 2023 par rapport à 2022, mais si l'on compare avec la provision de trois milliards d'euros pour 2021, l'effet de l'inflation continue d'alourdir significativement la charge de la dette. La maîtrise de l'inflation en France contribue toutefois à modérer ce facteur.

(2) Le retour d'un effet taux défavorable

La diminution de la charge de la dette sur la décennie 2010 provenait d'un contexte de taux extrêmement favorable, qui a longtemps permis à la France de financer ses nouvelles émissions et de refinancer ses titres à un coût toujours plus faible . Le taux apparent de la dette 21 ( * ) s'est ainsi établi à 1,5 % en 2021 22 ( * ) , contre 3,2 % en 2011.

Il devrait toutefois augmenter, en ligne avec le resserrement de la politique monétaire dans la zone euro, entamé en juillet 2022 avec le premier relèvement des taux directeurs de la BCE de 50 points de base (bp), et poursuivi les 8 septembre et 27 octobre de la même année par deux relèvements de 75 points de base chacun. Il est encore attendu une hausse de 50 bp de la part de la BCE d'ici la fin d'année. Il est à noter que cette hausse est l'une des plus rapides de l'histoire économique. Réagissant aux conséquences de la guerre en Ukraine, et anticipant ces décisions de politique monétaire, les marchés obligataires se sont montrés très volatils, avec une orientation à la hausse.

L'effet conjugué de ce resserrement et de l'augmentation marquée de la volatilité des marchés obligataires depuis février 2022 conduit à une hausse des taux sur la dette souveraine française, qui s'éloignent, mais de façon modérée, des taux allemands.

Évolution des écarts ( spreads ) avec le taux allemand sur une sélection de pays entre octobre 2021 et septembre 2022

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Comme l'a relevé lors de son audition M. Cyril Rousseau, directeur de l'Agence France Trésor, « les marchés cherchent où est le taux terminal de la Banque centrale » : une fois celui-ci connu, les taux souverains se stabiliseront autour de cette référence.

Ainsi, selon les données de l'AFT, le taux moyen pondéré sur les émissions de dette d'État à moyen et long terme, les obligations assimilables du Trésor (OAT), ressort sur les trois premiers trimestres de l'année 2022 à + 1,18 %, à comparer avec le taux de - 0,05 % en 2021 et celui, historiquement bas, de - 0,13 % en 2020. Il demeure toutefois inférieur à la moyenne de 1,26 % sur la période 2009-2020 et celle de 4,15 % sur la période 1998-2008.

Le constat est identique pour les titres de court-terme, les bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF). Leur niveau s'est élevé à - 0,36 % en moyenne sur les huit premiers mois 2022 , contre - 0,67 % en 2021 et - 0 ,56 % en 2020. L'évolution au cours de l'année 2022 est toutefois plus parlante : si le taux moyen s'élevait à - 0,66 % au premier trimestre 2022, il est passé à 0,03 % en juillet, puis 0,19 % en août. Sur les 13 émissions du mois d'octobre, seules trois avaient un taux pondéré inférieur à 1 %. Il est vrai qu'elles représentaient les maturités les plus courtes, de 12 ou 13 semaines.

Au total, si l'effet des taux d'intérêt sur la charge de la dette demeure négatif en 2022, un retournement est observable dès cette année. La hausse des taux donne en effet lieu, dès 2022, à une forte hausse des intérêts versés au titre des bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précomptés. Alors que l'État percevait en 2021 plus d'un milliard en échange de ses prêts à court terme, du fait de taux d'intérêt négatifs, il devra décaisser 195 millions d'euros en 2022.

En 2023, l'effet taux devient positif, et atteindrait un milliard d'euros, les données les plus récentes indiquant une contribution encore plus forte (2,2 milliards d'euros) à l'alourdissement de la charge de la dette 23 ( * ) .

(3) Une charge de la dette préservée du risque de dérapage, en dépit de l'héritage d'un niveau de dépense toujours élevé

S'ajoute enfin un effet volume en augmentation (+ 1,5 milliard d'euros), qui s'explique par l'augmentation de l'encours de la dette négociable, lui-même héritage d'un niveau de dépenses publiques trop élevé, non maîtrisé.

Ainsi, en six ans, l'encours de la dette négociable de l'État a augmenté de plus de 35 % . Il dépasserait les 2 400 milliards d'euros en 2023, contre 2 000 milliards d'euros en 2020 et 1 760 milliards d'euros à la fin de l'année 2018. Désormais, l'évolution de charge de la dette va dans le même sens que l'encours de dette négociable, mettant fin à une période de trajectoires paradoxalement inversées jusqu'en 2020.

Évolution de l'encours de la dette négociable
de l'État depuis 2018

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

D'après les projections du Gouvernement, la dette devrait atteindre, à la fin de l'année 2022, 111,5 % du PIB, soit plus de 2 900 milliards d'euros, contre 114 % du PIB initialement prévu, le déficit public devant atteindre 4,9 % 24 ( * ) du PIB, soit un point de moins que le solde stabilisant (-6 %). Elle connaîtrait une stabilisation en 2023 ( 111,2 points de PIB) , du fait d'une croissance plus faible et d'un maintien du déficit à son niveau de 2022.

Ce ratio, s'il est élevé, ne pourra pas être drastiquement réduit à court et à moyen terme sans aspect récessif, d'autant que la croissance peut justement conduire à le faire diminuer. Il demeure néanmoins un critère, parmi d'autres, à prendre en compte pour apprécier la soutenabilité de la dette publique française . Mais c'est la dynamique future du poids de la dette combinée avec la remontée des taux qui menace la soutenabilité budgétaire française.

Si ces éléments sont préoccupants, la charge de la dette française demeure à ce stade préservée de tout dérapage grâce aux mécanismes européens de la BCE.

Mais c'est aussi la qualité de la gestion par l'Agence France Trésor, reconnue de façon répétée par le rapporteur spécial, mais également par la Cour des comptes laquelle, dans un récent rapport, salue « une stratégie robuste qui a permis de faire face à l'augmentation des besoins de financement avec la crise sanitaire », qui repose notamment sur un suivi fin de la demande de marché et sur une adaptation à cette demande via des échanges fréquents avec les spécialistes en valeur du Trésor 25 ( * ) , qui crée de la stabilité à la dette française.

Cette stratégie a contribué à l'augmentation continue de la maturité moyenne de la dette depuis 2003 (5,8 ans) : elle s'élevait à 8,2 années fin 2019 et fin 2020 et à 8,4 années fin 2021. La part des BTF dans les émissions, qui avait crû au moment de la crise sanitaire, a en effet diminué en 2021, tandis que la maturité moyenne du stock des émissions de moyen et long terme a augmenté en 2021, sous l'effet d'une augmentation de la maturité moyenne des émissions : l'émission d'une OAT 50 ans a fait passer cette maturité moyenne à 12,6 ans en 2021, avant d'atteindre 10,9 ans en septembre 2022 26 ( * ) . Au 31 août 2022, la maturité moyenne de la dette atteignait 8,5 ans.

Cela permet de lisser les effets de la hausse de taux sur la charge de la dette, mais ne constitue en aucun cas, comme le rapporteur spécial a déjà eu l'occasion de le rappeler, une « solution miracle » pour diminuer la charge d'intérêts. Pour assurer la sécurité des émissions, et pour garantir le meilleur prix dans l'intérêt du contribuable, les titres choisis, avec leur maturité, doivent répondre à la demande des investisseurs, au risque sinon de nuire à la bonne exécution du programme de financement de l'État. Alors que la liquidité de la dette française constitue l'un de ses principaux atouts reconnus par tous les investisseurs, il serait extrêmement dommageable de la mettre en péril en choisissant d'émettre sur des titres de maturité très longue, pour profiter des « taux bas », alors même que la demande des investisseurs est plus faible sur ces segments. Le contribuable risquerait in fine de payer plus cher cet allongement de la maturité, ce qui en retour accroîtrait la charge de la dette sur sa durée de vie.

2. Alors que le besoin de financement de l'État se maintient à un niveau élevé, la vigilance et la maîtrise stricte des dépenses, et non l'alarmisme, s'imposent face à la charge de la dette de l'État
a) Un besoin de financement de l'État stable par rapport à 2022, mais toujours bien plus élevé que le niveau d'avant crise
(1) Le « retour à la normale » qui peine à arriver

Le besoin de financement de l'État devrait atteindre 305,5 milliards d'euros en 2023 sous les hypothèses favorables du gouvernment , contre 306 milliards d'euros après révision pour l'année 2022 (297,6 milliards d'euros dans la prévision initiale). S'il est stable, donc, par rapport à 2022, ce niveau est bien plus élevé qu'en 2021 (+ 7,1 %). Il retrouve ainsi le spectaculaire niveau de 2020 (309,5 milliards), et demeure donc bien plus élevé que celui d'avant-crise : il s'élevait à 220,5 milliards d'euros en 2019, soit près de 30 % de moins que celui prévu pour 2023.

Évolution du besoin de financement de l'État

(en milliards d'euros et en pourcentage)

2021

(exécuté)

LFI 2022

2022 (LFR 1)

2022 (révisé)

PLF 2023

Évolution 2023 / LFI 2022

Évolution 2023 / 2022 révisé

Besoin de financement

Amortissement de titres d'État à moyen et long terme

118,3

144,4

145,8

145,8

156,5

+8,38 %

+7,34 %

Valeur nominale

117,5

140,8

140,8

140,8

151,6

+7,67 %

+7,67 %

Suppléments d'indexation dus

0,8

3,6

5,0

5,0

4,9

+36 %

- 2 %

Amortissement des autres dettes (dettes reprises, etc...)

1,3

3,0

3,0

3,0

3,1

+3,3 %

+3,3 %

Déficit budgétaire

170,7

153,8

178,4

172,6

158,5

+3,06 %

- 8,17 %

Autres besoins de trésorerie

- 5,1

- 3,6

- 15,4

- 15,4

- 12,6

+250 %

- 18,2 %

Total

285,2

297,6

311,8

306,0

305,5

+2,64 %

- 0,16 %

Ressources de financement

Émissions de titres à moyen et long termes, nettes des rachats

260

260

260

260

270

+3,85 %

+3,85 %

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

0

1,9

1,9

1,9

6,6

+249 %

+249 %

Variation de l'encours de titres à court terme

- 6,2

0

0

0

10,4

Variation des dépôts des correspondants

18,7

0

0

0

0

0 %

0 %

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésoreries de l'État

- 4,4

32,2

52,2

49,8

18,0

- 44,1 %

- 63,9 %

Autres ressources de trésorerie 27 ( * )

17,2

3,5

- 2,3

- 5,7

0,5

- 86 %

Total

285,2

297,6

311,8

306,0

305,5

+2,64 %

- 0,16 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

83,6 % des émissions de titres à moyen et long terme prévues pour l'année 2022 ont été réalisées par l'AFT sur 9 mois , dans de très bonnes conditions 28 ( * ) .

270 milliards d'euros d'obligations à moyen et long terme devront également être émis par la France en 2023, un chiffre en augmentation par rapport à celui observé depuis 2020 et la déformation brutale du besoin de financement de l'État.

En 2022 et 2023, la part des bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF) dans les ressources de financement devrait se stabiliser autour de 7 %. Ils connaîtront ainsi une variation moins élevée qu'entre 2019 et 2020 29 ( * ) , où ces titres ont servi de variable d'ajustement pour éviter de trop bouleverser le programme d'émission de titres à moyen et long terme en cours d'année et pour donner de la visibilité aux investisseurs. Le stock de BTF était ainsi passé de 107 milliards d'euros fin 2019 à 155 milliards d'euros fin 2021.

Évolution de la part des BTF dans l'encours de dette négociable de l'État

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Les émissions nettes à moyen et long terme représenteraient l'équivalent de 9,8 % du PIB en 2023 , comme en 2022. Si ce rapport baisse par rapport à 2020 (11,3 % 30 ( * ) ) et 2021 (10,4 %), il s'écarte toujours significativement de la moyenne constatée sur la décennie 2010, où elle oscillait entre 8,0 % et 8,9 %.

Programme de financement à moyen et long terme
de la dette de l'État, en proportion du PIB

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les données publiées par l'Agence France Trésor dans le bulletin mensuel du mois de septembre 2022

La stabilisation de ce taux à 9,8 % et la persistance de cet écart avec le régime passé témoignent du choix du Gouvernement de ne pas maîtriser les dépenses publiques ordinaires, hors mesures d'urgence et de relance de l'économie.

En conséquence, l'endettement est devenu la première source de financement de l'État en 2020. Il ne le serait plus en 2023 puisque les ressources du budget général, c'est-à-dire fiscales et non fiscales représentent 286,7 milliards d'euros, après déduction des prélèvements sur recettes.

À l'instar des années 2020, 2021 et 2022, la majorité des ressources de financement sera par ailleurs affectée au financement d'un déficit toujours conséquent de 158,5 milliards d'euros (soit 5 % du PIB), et non à l'amortissement des titres de moyen et de long terme.

Décomposition du besoin de financement de l'État

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'augmentation à 270 milliards d'euros en 2023 des émissions de titres à moyen et long terme, après la hausse déjà inédite des 260 milliards, s'explique donc par la hausse des emprunts arrivant à maturité et appelés à être renouvelés (156,5 milliards d'euros). D'après les données figurant dans le compte général de l'État pour l'année 2021 31 ( * ) , 22 % des OAT devaient arriver à échéance d'ici la fin de l'année 2022 (14 %) et 2023 (8 %) . 25 % des titres négociables à moyen et long terme seront exigibles entre la fin de l'année 2023 et la fin de l'année 2026.

(2) De conditions d'émission toujours bonnes pour les titres de la dette française

Selon les informations communiquées en audition, les émissions de BTF et d'OAT se déroulent toujours dans de très bonnes conditions .

À titre d'illustration, les taux de couverture moyens des adjudications 32 ( * ) se sont élevés à 228 % pour les OAT en 2021 (218 % en 2020 et 235 % en 2019) et à 364 % pour les BTF (277 % en 2020 et 315 % en 2019). Ils demeurent très supérieurs aux cibles, fixées par convention à 200 % pour les adjudications de BTF et à 150 % pour celles d'OAT.

L'AFT procède également chaque année à des rachats anticipés de titres arrivant à échéance . Ces rachats ont ainsi atteint 25,1 milliards d'euros en 2021, dont 19,6 milliards d'euros à échéance 2022 et 5,5 milliards d'euros à échéance 2023, marquant une stabilisation par rapport à 2020 (25,5 milliards d'euros). Au 31 août 2022, les rachats effectués ont porté sur un volume de 12,3 milliards d'euros à échéance 2023 33 ( * ) .

(3) En dépit du retrait progressif de la BCE du marché des titres souverains, son bon fonctionnement semble garanti

La Banque centrale européenne avait évoqué en février, puis confirmé en juin, l'arrêt de son programme de rachat d'actifs ( asset purchase program , ou APP), qui s'est interrompu en juillet 2022. Si le conseil des gouverneurs a indiqué avoir l'intention de poursuivre les réinvestissements des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans ce cadre ainsi que dans le cadre du programme d'achats d'urgence face à la pandémie ( pandemic emergency purchase program , PEPP), il est indéniable qu'il s'agit là d'un tournant en matière de politique monétaire. Bien qu'il lui soit toujours possible d'utiliser des instruments monétaires puissants ( outright monetary transactions, OMT pour « opérations monétaires sur titres » ; transmission protection instrument , TPI pour « instrument de protection de la transmission ») en cas de crise, la BCE s'est bien retirée du marché des dettes souveraines, et ne constitue plus un acteur auprès duquel les investisseurs et établissements financiers pourraient revendre leurs titres de dette en échange de liquidités.

Toutefois, les principaux pays émetteurs « traditionnels » 34 ( * ) de la zone euro indiquent une tendance à la baisse des émissions, facilitant leur absorption par les marchés financiers. Il convient de garder en mémoire l'implication de l'Union Européenne sur le marché de la dette publique, puisqu'elle doit financer le plan de relance NextGenerationEU , avec un volume à émettre d'ici 2026 de 800 milliards d'euros, soit environ 150 milliards d'euros par an.

Évolution du montant des émissions brutes de moyen et long terme pour différents émetteurs européens depuis 2016

(en milliards d'euros et, pour le Royaume-Uni, de livres sterling)

NB : pour 2022, il s'agit d'une estimation à partir des rachats déjà effectués. La ligne rouge désigne l'Allemagne et la ligne violette l'Espagne.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Pour autant, selon un des spécialistes en valeur du Trésor entendus par le rapporteur spécial, qui a relégué au rang de la théorie les inquiétudes qui pourraient se faire jour, « le marché de la dette fonctionne très bien ». En ce qui concerne la France, il pourrait facilement absorber une hausse de 300 à 400 millions d'euros par adjudication (sur les deux par mois organisées par l'Agence France Trésor pour une dizaine de milliards d'euros en moyenne).

Les actifs sûrs que sont les titres de dette publique, qui sont déjà indispensables pour les acteurs financiers en temps normal, le sont d'autant plus aujourd'hui, pour au moins deux raisons.

D'une part, la réduction des achats par la BCE va entraîner une diminution des réserves des banques, utilisées pour remplir leurs obligations réglementaires. Pour continuer de respecter ces obligations, les actifs sûrs seront vraisemblablement remplacés par des titres de dette publique.

D'autre part, les actifs sans risque, ou actifs liquides de haute qualité, sont très recherchés par les banques, notamment pour servir de garantie, ou collatéral, à leurs transactions. Or, conformément à la directive « collatéral » de 2002 35 ( * ) , les titres de dette souveraine doivent être traités dans le cadre des transactions de repo comme des actifs sans risque. Signe du caractère indispensable des actifs souverains pour les marchés, en décembre 2020, dans 92 % des transactions de repo sur le marché européen, les collatéraux étaient des titres de dette publique 36 ( * ) . Cette donnée structurelle sert d'assise au phénomène conjoncturel actuel, selon lequel les acteurs financiers ayant voulu sécuriser leurs opérations dans un contexte de forte volatilité, le marché des actifs liquides de haute qualité était, en octobre 2022, en situation de pénurie 37 ( * ) , entraînant une demande accrue de titres souverains.

La prudence doit toutefois être de mise ici : ce n'est pas parce que la demande actuelle de collatéral est forte qu'elle s'orientera vers des titres de dette française. Tout au moins convient-il de remarquer que la dette française appartient à une famille d'actifs fortement demandés actuellement.

Enfin, comme l'a rappelé l'économiste Éric Monnet lors de son audition, l'excès structurel d'épargne dans l'économie mondiale ne s'est pas tari. Il conduit encore certains investisseurs à accepter des taux réels négatifs - comme les taux français actuels - ce qui constitue une garantie, au moins à moyen terme, de la solidité de la demande pour la dette française.

b) Évaluer les facteurs de risque à court, moyen et long terme pour la charge de la dette
(1) De façon générale, la crédibilité budgétaire de la France doit être maintenue

La crédibilité budgétaire, qui peut s'entendre de la capacité, pour un pays, d'adopter un budget financé, de le respecter, et de respecter les règles et le cadre dans lesquels il s'inscrit, est le premier prérequis pour accéder aux marchés financiers et se financer à des taux abordables. L'épisode britannique récent en est la preuve éclatante, puisque le Gouvernement d'Elizabeth Truss, qui aurait dû soumettre au bureau pour la responsabilité budgétaire (« office for budget responsibility ») le mini-budget non financé qu'elle a présenté en septembre 2022, s'est affranchi de cette formalité, ce qui a entraîné une remontée des taux sur les gilts , emprunts d'État au Royaume-Uni, allant jusqu'à 4,6 %.

Comme le soulignait M. Éric Monnet lors de son audition, pour les investisseurs, ce qui compte n'est pas tant un niveau particulier de dette en proportion du PIB, ou bien de charge de la dette, mais la stabilité politique. Le rapporteur spécial fait ainsi remarquer que l'article 49 alinéa 3 de la Constitution peut à cet égard être considéré comme l'assurance de notre dette, en ce qu'il permet d'adopter un budget malgré une majorité relative, à condition toutefois d'être correctement financé et de respecter le cadre constitutionnel et organique.

De même, dans l'appréciation de la dette souveraine française par les agences de notation 38 ( * ) , ce n'est pas tant le niveau en absolu qui est scruté, en particulier depuis la crise sanitaire, que les perspectives de redressement à moyen et long termes et le comportement passé. Par exemple, l'absence de consolidation dans la période précédant la crise est un facteur d'importance dans l'évaluation de la perspective (négative ou stable selon les agences) de l'évolution de la notation française, aujourd'hui AA (S&P, Fitch) ou Aa2 (Moody's). Or, de manière générale, la France se distingue par une absence d'effort antérieurement à la crise, avec une trajectoire du taux de dette/PIB qui restait bien supérieure à celle de la plupart de ses voisins et qui, surtout, ne diminuait pas. Ces dernières années, même en période de croissance, la France n'a pas saisi les opportunités qui s'offraient à elle pour restaurer ses finances publiques.

Dans la période actuelle, il convient donc pour la France d'attester sa capacité à définir une trajectoire susceptible de respecter le Pacte de stabilité et de croissance 39 ( * ) lors que la clause de suspension actuellement en vigueur aura expiré, au 1 er janvier 2024.

Or d'après les estimations du FMI 40 ( * ) , plus pessimistes que celles du Gouvernement, la France est l'un des rares pays avancés où la dette publique n'est pas dans une dynamique de réduction. À la différence du Gouvernement, qui anticipe un ratio d'endettement de 110,9 % du PIB en 2027 - en diminution donc de 0,6 point par rapport à 2022 - le FMI prévoit une augmentation continue de ce ratio entre 2022 et 2027, où il atteindrait 118,5 % du PIB.

Le rapporteur spécial reprendra ici les termes du Haut Conseil des finances publiques : « la soutenabilité à moyen terme des finances publiques continue donc à appeler à la plus grande vigilance » 41 ( * ) . Il importe à cet égard que la France retrouve rapidement une trajectoire de stabilisation puis d'assainissement de ses finances publiques, plus crédible que celle proposée dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.

(2) À court terme, la hausse des taux directeurs de la BCE et du dollar, ainsi que la volatilité des marchés financiers, pourraient nécessiter une révision des prévisions de taux du Gouvernement

En 2022, plusieurs facteurs ont conduit à une hausse des taux souverains. Au début de l'année, les anticipations de normalisation de la politique monétaire se sont traduites par une hausse des taux alimentée par les incertitudes entourant la guerre en Ukraine et les pressions inflationnistes entraînées par un choc mondial sur les prix des matières premières rapidement répercuté sur les prix à la production et à la consommation. Cette envolée des prix a conduit les investisseurs à anticiper des calendriers de resserrement monétaire plus rapides. En réaction à ces décisions, et en l'absence de communication avancée par les banques centrales, les marchés obligataires ont observé une période de volatilité haussière assez prononcée : entre mars et juin 2022, le rendement souverain nominal français à dix ans a augmenté de 156 points de base - son équivalent allemand enregistrant une progression comparable de 142 points de base 42 ( * ) .

La combinaison du resserrement monétaire dans la zone euro, entre juillet et octobre 2022, et des turbulences enregistrées sur les marchés de la dette souveraine britannique en septembre 2022, à l'origine d'une hausse des rendements souverains britanniques de 3,2 à 4,6 % qui s'est partiellement répercutée sur les taux souverains d'autres économies avancées comme la France avec des hausses de 20 à 25 points de base, a conduit à un mouvement de hausse inédit sur les taux à dix ans européens.

Évolution des rendements souverains à dix ans entre octobre 2021 et octobre 2022

Sources : Bloomberg, réponses de l'Agence France Trésor au questionnaire du rapporteur spécial

Concernant plus particulièrement la France, si les évolutions ont été loin d'être aussi erratiques qu'au Royaume-Uni, elles ont été particulièrement marquées, puisque le taux à dix ans a dépassé les 3 % le 21 octobre 2022.

Évolution du taux à dix ans 43 ( * ) en octobre 2022 en France

(en pourcentage)

Source : Banque de France

Au total, s'il paraît difficile de se prononcer, dans un contexte aussi volatil, sur une valeur autour de laquelle le taux français à dix ans viendra à se stabiliser, les prévisions du Gouvernement pourraient s'avérer trop optimistes, avec 2,5 % à la fin de l'année 2022 et 2,6 % à la fin de l'année 2023 en moyenne pour les OAT à 10 ans, soit bien en dessous du niveau évalué par le Consensus Forecasts . Au mois d'octobre 2022, le taux à 10 ans n'a été qu'un seul jour inférieur à 2,5 %. De même, le taux à 10 ans retenu pour 2023 est déjà systématiquement dépassé depuis le 7 octobre 2022.

Scénario de taux retenu pour la prévision de charge de la dette
dans la LPFP 2023-2027

Niveaux en fin d'année (hypothèses)

2022

2023

2024

2025

2026

2027

Taux courts

(BTF 3 mois)

1,20 %

2,10 %

2,30 %

2,40 %

2,50 %

2,60 %

Taux longs

(OAT à 10 ans)

2,50 %

2,60 %

2,70 %

2,80 %

2,90 %

3,00 %

Si l'impact des taux longs sur la charge de la dette ne se matérialisera qu'à leur échéance, celui des taux courts sera effectif dès 2023, et tout porte à croire que, si les prévisions sont trop optimistes pour les taux longs, elles le seront aussi pour les taux courts. Les crédits affectés à la charge de la dette en 2023 devront donc probablement être plus élevés que ceux prévus dans le programme 117.

De même, la hausse du dollar 44 ( * ) , qui a déjà débuté du fait d'une remontée particulièrement importante des taux par la Fed - les taux directeurs se situant dans une fourchette comprise entre 3 et 3,25 % depuis le 21 septembre 2022 -, et qui pourrait se poursuivre en 2023, peut faire craindre une demande plus forte de titres américains. Le corollaire serait une forme de désaffection relative de la demande de titres français qui, bien que sûrs, pourraient voir leur taux augmenter de façon plus forte que prévu pour continuer à attirer des investisseurs.

Enfin, les interrogations sur les effets de la fermeture de la Chine sur l'économie allemande, et de la politique allemande, persistent. La fermeture de la Chine pourrait conduire l'excédent commercial de l'Allemagne à baisser, alors même qu'il constituait, conformément à la théorie des déficits jumeaux, la contrepartie de son faible déficit budgétaire. Conjugué à une hausse importante de la dépense publique allemande, qui passera notamment par un plan de 200 milliards d'euros visant à soulager les entreprises et les ménages face à la flambée des prix, ce phénomène, qui peut indiquer les prodromes de la « fin de la grandeur économique de l'Allemagne » 45 ( * ) , pourrait rehausser les attentes des investisseurs vis-à-vis de la dette allemande. Le 18 octobre 2022, une adjudication de bund à 7 ans à hauteur de 4 milliards d'euros n'a d'ailleurs rencontré qu'une demande de 1,8 milliard. Si ce genre d'incident n'est pas, de l'avis des acteurs financiers auditionnés, réellement significatif, il indique tout de même que la dette allemande n'est pas vendue au prix demandé. En tout état de cause, on pourrait assister à une hausse supplémentaire des taux sur la dette allemande et à une réduction du spread vis-à-vis de l'Allemagne , ou bien encore à une désaffection relative des investisseurs vis-à-vis de cette dette. Compte tenu de l'existence d'un autre actif sûr et en hausse - les bons du Trésor américains - il est toutefois peu probable que les investisseurs renonçant à acheter de la dette allemande se replient sur la dette française.

(3) À moyen terme, la remontée des taux alourdira progressivement la charge de la dette contractée en 2022 et 2023, dans des proportions qui restent difficiles à estimer

Dans la continuité des remarques récurrentes de la Cour des comptes sur le sujet, le rapporteur spécial avertissait déjà, l'an dernier, sur le risque que pourrait faire courir un choc de taux sur une dette publique française devenue énorme : « c'est à ce titre que la vigilance s'impose, sans pour autant céder à l'alarmisme et réduire drastiquement et indistinctement le déficit, au risque de pénaliser la croissance » 46 ( * ) .

Le contexte de taux devient en effet défavorable. Certes, la hausse des taux n'aura qu'un impact progressif sur la charge de la dette. Toutefois, le taux implicite 47 ( * ) de la dette négociable de l'État, après une forte diminution ces 25 dernières années, de 6,6 % en 1996 à 1,3 % en 2020, remonte. Il atteindrait 2,1 % en 2026, voire 2,7 % en cas de choc de taux de 1 %.

Ainsi, la France, qui était exposée à une remontée des taux, devrait voir ce risque se matérialiser, lentement puisque la maturité moyenne de la dette française est de 8,5 ans, mais sûrement, compte tenu de la taille de l'encours.

En comptabilité budgétaire, les dépenses engagées au titre du programme 117 devraient ainsi diminuer en 2024 à 47,8 milliards d'euros compte tenu d'une inflation plus faible qu'en 2023, mais ré-augmenter en 2025, avec une prévision à 51,2 milliards d'euros.

En comptabilité maastrichtienne, le rapport annexé à la LPFP indique d'ailleurs une augmentation de la charge de la dette à partir de 2024, après une baisse en 2023 expliquée par un effet inflation de -10,5 milliards 48 ( * ) d'euros et un effet taux de +5,8 milliards d'euros.

Scénario d'évolution de la charge de la dette, en comptabilité maastrichtienne, dans la LPFP 2023-2027

(en milliards d'euros)

2022

2023

2024

2025

2026

2027

Scénario minimaliste

(- 2 points sur toute la trajectoire)

-

32,7

32,3

30,5

29,1

30,2

Scénario central

42,2

37,5

44,1

48,7

53,6

60,6

Scénario maximaliste

(+ 2 points sur toute la trajectoire)

-

42,4

56,2

67,8

79,9

93,9

Dans ce contexte, une hausse supplémentaire des taux de 1 % 49 ( * ) induirait une croissance de la charge de la dette dans les années à venir, et au fur et à mesure que le stock se renouvellerait, plus importante que précédemment. D'année en année, ce supplément de charge augmente : la charge de la dette pourrait quasiment doubler en dix ans .

Impact d'un choc de taux de 1 % sur la charge
des OAT et des BTF

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

(4) À long terme, le changement climatique fait peser un risque élevé et peu pris en compte et illustre encore davantage l'utilité des OAT vertes

Les analyses contenues dans les documents budgétaires concernant l'impact d'un choc de taux sont particulièrement éclairantes et constituent un exercice de prospection utile au travail du Parlement.

Ces documents gagneraient toutefois à s'enrichir d'évaluations relatives aux conséquences des chocs « climatiques ». Les paramètres de ces évaluations, nécessairement complexes, restent à déterminer, mais elles ne manqueraient pas d'être utiles dans la mesure où ces chocs sont assurément appelés à se répéter, et à avoir des lourdes conséquences sur la charge de la dette, passant à la fois par la hausse du déficit qu'elles induiraient, et par la variation des taux demandés par les acteurs financiers sur la dette publique.

Il faut toutefois noter que l'Agence France Trésor a intégré ces questions dans son programme d'émission : elle émet depuis janvier 2017 des « OAT vertes » 50 ( * ) .

À la suite des deux abondements de 2021, l'encours de l'OAT verte 1,75 % 25 juin 2039 a atteint en 2022 30,9 milliards d'euros. Les réémissions sont soumises à une double-condition : l'expression d'une demande en ce sens des spécialistes en valeur du Trésor et l'existence d'un montant suffisant de dépenses vertes éligibles. Il incombe en effet à l'AFT de justifier d'un montant équivalent de dépenses éligibles. Chaque année, le respect de ce dernier principe est en effet certifié par des contrôleurs indépendants 51 ( * ) , la certification ayant toujours été positive jusqu'ici.

L'encours de l' OAT verte 0,50 % 25 juin 2044, lancée au mois de mars 2021 , a atteint à l'été 2022 les 16,5 milliards d'euros, à la suite de trois émissions en 2021 et deux en 2022.

Enfin, l'Agence France Trésor a encore innové en la matière avec le lancement, au 25 mai 2022 et par syndication, de la première obligation souveraine verte indexée sur l'inflation : l'OAT€i verte 0,10 % 25 juillet 2038. Quatre milliards d'euros de titres avaient été placés sur cette émission inaugurale, marquée par un volume et un nombre record d'ordres pour une syndication d'OAT indexée sur l'inflation. En effet, près de 230 investisseurs finaux ont participé à l'opération et la demande totale a dépassé 27 milliards d'euros.

L'encours total des OAT vertes s'élevait donc, au 31 août 2022, à 51,4 milliards d'euros, soit plus de 10 milliards de plus qu'un an auparavant. Cela fait de la France le premier État émetteur souverain. Elle devrait céder la place à la Commission européenne, dont le programme d'obligations vertes devrait atteindre 250 milliards d'euros d'ici la fin de l'année 2026.

Le montant des dépenses éligibles en 2021
selon les quatre objectifs de l'OAT verte

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances, d'après les données publiées dans « OAT verte. Rapport d'allocation et de performance 2021 »

Le montant des dépenses vertes éligibles auxquelles seront adossées les émissions des obligations vertes de l'État, initialement prévu à 15 milliards d'euros, s'élève finalement à 10 milliards d'euros pour l'année 2022 52 ( * ) . En effet, selon la commission de régulation de l'énergie, les charges pour le soutien aux énergies renouvelables seront négatives en 2022, annulant la subvention du tarif de rachat des énergies renouvelables. L'enveloppe des dépenses vertes éligibles aux OAT vertes, dont font partie les subventions publiques aux énergies renouvelables, est en conséquence revue à la baisse.

c) Une situation qui ne doit pas conduire à raviver de « faux débats » sur la gestion de la dette de l'État
(1) La nécessité d'une obligation indexée, pour laquelle la demande est forte, et dont l'effet se révèle neutre sur le long terme

En réaction à la hausse de l'inflation et à l'augmentation de la provision pour indexation du capital des titres indexés qui en a résulté, d'aucuns s'interrogent sur la nécessité de continuer à émettre des OAT indexées sur l'inflation, lesquelles représentent 11 à 12 % de l'encours. Certains parlementaires remettent même en cause l'intérêt de cette pratique 53 ( * ) . La provision pour indexation du capital des titres indexés s'élèverait en effet à 15,6 milliards d'euros en 2022 et 13,9 milliards d'euros en 2023, après 458 millions d'euros en 2020 et trois milliards d'euros en 2021.

Part d'OAT indexées dans l'encours total de dette

Source : réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Il se trouve pourtant que le financement en obligations indexées (OATi à hauteur de 30 % et OAT€i pour 70 %) non seulement est une source de diversification, mais a également un effet neutre sur le long terme.

L'émission d'obligations indexées est une source importante de diversification, à laquelle recourent au demeurant tous les pays du G7, qui permet d'attirer des investisseurs variés, en particulier ceux qui doivent adosser un passif exposé à l'inflation (investisseurs rémunérant leurs propres clients en fonction de l'inflation, comme les déposants du Livret A). L'accès à des investisseurs les plus variés possibles est important puisque les volumes d'émission ont fortement augmenté depuis quinze ans.

Si la France n'émettait pas d'obligations indexées, elle se priverait de cette diversification. En l'absence de diminution substantielle du programme de financement, une baisse de la part des obligations indexées dans ce programme obligerait à monter les volumes d'émission sur le compartiment des titres nominaux, ce qui aurait pour effet de dégrader les conditions d'emprunt sur ce segment par le biais de taux moyens plus élevés, pesant à leur tour sur la charge de la dette.

Les titres indexés permettent également de diversifier les risques auxquels est exposée la dette de l'État. L'évolution future des taux comme de l'inflation étant inconnue, cette diversification conduit à une répartition des risques entre ceux auxquels sont exposées la dette de court terme, la dette de moyen terme, la dette de long terme, la dette de très long terme et la dette indexée sur l'inflation. Si la France n'émettait pas d'obligations indexées, elle se priverait là-aussi de cette diversification.

Les volumes émis semblent d'ailleurs en ligne avec la demande, laquelle s'est accrue ces derniers mois, au point qu'en valeur ajustée comparée aux OAT nominales, les OAT indexées longues se sont renchéries 54 ( * ) .

L'émission d'obligations indexées a, en outre, un effet neutre, voire contracyclique sur le long terme.

En effet, en période de stabilité des prix, le « stock réel de dette publique » (ratio entre la dette et le PIB nominal) diminue peu et la part d'obligations indexées permet de diminuer la charge de la dette. En période d'inflation accrue, le ratio entre la dette et le PIB nominal diminue spontanément et en contrepartie la charge d'indexation des OATi et OAT€i augmente, ce qui illustre leur caractère contracyclique.

Ainsi, durant la décennie 2010, la provision pour indexation a été très faible et systématiquement inférieure aux économies d'intérêts dues à ces émissions. Les titres indexés ont été source d'économie pour le budget de l'État en comparaison des titres nominaux principalement à partir de 2012, permettant des économies annuelles qui ont pu atteindre certaines années jusqu'à trois milliards d'euros. Au global, si l'on prend pour hypothèse une émission au taux du marché de même maturité à chaque émission de titres indexés depuis le début du programme en 1999, l'impact budgétaire cumulé pour le budget de l'État revient à une économie d'environ deux milliards d'euros.

Ce ne devrait toutefois plus être le cas à partir de 2023, puisque le cycle économique lié à une période d'inflation et de taux bas s'est achevé avec le début de la guerre en Ukraine et les tensions sur les approvisionnements en énergie.

L'impact du programme d'émissions indexées sur le budget de l'État

En prenant pour hypothèse une émission au taux du marché de même maturité (hypothèse simplificatrice qui fait abstraction de l'effet de diversification de la base d'investisseurs que permettent les obligations indexées sur l'inflation - a priori , sans obligations indexées sur l'inflation, tous les autres titres auraient connu des taux plus élevés, mais cet effet est difficile à quantifier faute de contrefactuel) à chaque émission de titres indexés depuis le début du programme indexés en 1999, l'impact budgétaire cumulé actuel pour l'État est évalué à date à une économie pour le budget de l'État d'environ 2 milliards d'euros (illustré par la courbe bleue dans le graphique ci-dessous, qui avait dépassé 10 milliards d'euros avant de refluer brutalement en 2022), mais ce ne devrait plus être la cas à partir de 2023 compte tenu de la provision anticipée pour 2023.

Les titres indexés ont été source d'économie pour le budget de l'État en comparaison aux titres nominaux principalement à partir de 2012 permettant des économies annuelles qui ont pu atteindre certaines années jusqu'à trois milliards d'euros. Le cycle économique lié à une période d'inflation et de taux bas s'est achevé avec le début de la guerre en Ukraine et les tensions sur les approvisionnements en énergie.

Coût et économies induits par le programme d'émissions indexées pour le budget

Source : réponses de l'Agence France Trésor au questionnaire du rapporteur spécial

(2) La détention de la dette par les non-résidents : un « faux problème » qui ne doit toutefois pas empêcher la réflexion sur une possible mobilisation de l'épargne nationale

La détention de la dette française est fréquemment au coeur des débats sur l'endettement public . De nombreuses informations relatives à la répartition de la dette française, par groupe de porteurs et entre résidents et non-résidents sont ainsi désormais comprises dans le rapport sur la dette des administrations publiques prévu par l'article 48 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, dans sa version résultant de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques. Parmi les détenteurs des titres de la dette négociable de l'État, la part des résidents a augmenté significativement depuis 2016, représentant depuis mars 2021 plus de la moitié des détenteurs, en raison de la mise en place du programme d'achats d'actifs de la BCE réalisé par la Banque de France. Retraité de cet effet, la part des investisseurs nationaux est beaucoup plus faible, mais stable avec le temps. Elle atteint toutefois un plancher en juin 2022 avec 30,9 % des titres de la dette négociable de l'État retraitée des achats d'actifs de la BCE 55 ( * ) .

De manière générale, c'est moins l'origine géographique des investisseurs qui importe que leur typologie et, surtout, leur diversité, entre des investisseurs institutionnels qui se positionnent à long terme et d'autres plus spéculatifs qui revendent très rapidement les titres acquis. Pour assurer la liquidité de la dette française et la sécurité des émissions de l'État, y compris en cas de choc susceptible d'affecter un segment de la demande, il faut des investisseurs de toute origine et de toute catégorie, intéressés par tout type de maturité .

Il est fréquent que des observateurs questionnent l'absence de données plus précises sur les détenteurs de la dette française, allant jusqu'à s'interroger sur un éventuel problème de transparence . Ce n'est pas le cas .

Ces points résolus, il pourrait toutefois s'avérer utile, dans le moment d'incertitude radicale sur l'économie et le comportement des investisseurs qui est le nôtre, d'envisager une utilisation plus directe de l'épargne nationale. M. Éric Monnet 56 ( * ) , lors de son audition, a en effet rappelé cette leçon de l'histoire selon laquelle pour maintenir la confiance dans les titres souverains, l'État devait montrer aux marchés que, s'ils commençaient à avoir des doutes sur ses capacités de refinancement, le pays pourrait utiliser trois moyens : la Banque centrale, l'impôt et l'épargne nationale.

À l'heure où la BCE se retire progressivement du marché des dettes souveraines, où l'augmentation des prélèvements obligatoires n'est légitimement pas à l'ordre du jour, et où la France dispose d'une épargne massive héritée, notamment, de la crise sanitaire, une réflexion sur les modalités de mobilisation de cette épargne pourrait avoir lieu. S'il n'est pas nécessairement question d'utiliser cet outil dès aujourd'hui, l'État devrait être capable d'imaginer les scénarios qui pourraient justifier son recours. Des institutions comme la Caisse des dépôts et des consignations, qui dispose d'une expertise déjà reconnue dans ce domaine pourraient être mises à contribution.

B. LE MAINTIEN DU PROGRAMME 369 POUR AMORTIR LA DETTE DE L'ÉTAT LIÉE À LA COVID-19 NE RÉPOND À AUCUNE JUSTIFICATION ET EST AUSSI CONTESTABLE QUE L'EXTRACTION HORS DE LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT » DE LA DETTE DE SNCF RÉSEAU REPRISE PAR L'ÉTAT

1. Un isolement de la dette covid qui, comme l'an dernier, ne répond à aucune justification économique ou de crédibilité budgétaire

Le programme 369 vise à retracer l'amortissement du surcroît de la dette de l'État en 2020 et en 2021 liée à la crise sanitaire, 70 milliards d'euros ayant déjà été repris au titre des années 2020 et 2021 pour la sphère sociale par le biais de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) 57 ( * ) . 165 milliards d'euros ont été ouverts l'an dernier en AE sur ce programme et 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement. En 2023, 6,6 milliards seront ouverts pour financer ce programme, soit 3,5 fois plus qu'en 2022.

Le caractère contestable des modalités de calcul de cette « dette Covid » a déjà été démontré par le rapporteur spécial, qui avait proposé la suppression du programme dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2022 58 ( * ) .

Pour rappel, les crédits de paiement inscrits sur le programme 369 correspondent à une part, par défaut fixée à 5,9 %, de la hausse des recettes fiscales due à la croissance par rapport à celles de 2020 (256 milliards d'euros). Par ailleurs, la formule de calcul peut être modifiée au cours du temps , l'objectif initial étant d' amortir la « dette covid » d'ici 2042 . Si les recettes fiscales nettes sont en baisse par rapport à la prévision, alors la dotation au programme 369 diminue par rapport à l'échéancier prévisionnel, et inversement. Les recettes fiscales nettes devant augmenter en 2023 par rapport à l'échéancier prévisionnel, elles sont donc plus élevées que prévu, puisque le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'État » sur le projet de loi de finances pour 2022 prévoyait des crédits de paiement de 2,3 milliards d'euros en 2023.

Les crédits du programme sont affectés à la Caisse de la dette publique (CDP), via une dotation au programme 732 du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » 59 ( * ) . Un contrat devra également être conclu entre l'État et la CDP pour détailler le circuit de remboursement et les montants en provenance de la CDP seront ensuite utilisés pour amortir les titres de dette arrivant à échéance.

Le rapporteur spécial réitère ici son propos : il n'y a aucun argument économique ou budgétaire de nature à justifier l'isolement de la « dette covid », les recettes fiscales supplémentaires pouvant tout aussi bien servir à réduire le déficit budgétaire courant. Il ne s'agit d'ailleurs pas là d'un cantonnement de la dette covid : il n'y a pas création d'une « caisse » séparée chargée de la gestion de cette dette, il n'y a toujours bien qu'une seule dette de l'État. Le programme porte d'ailleurs bien le nom d' « amortissement » et non de cantonnement. Cantonner la dette, en la « fragmentant », aurait d'ailleurs coûté plus cher en gestion à l'État, et donc au contribuable. Dans ses choix, le Gouvernement a au moins pris la peine de ne pas perturber la gestion de la dette, ce qui illustre par ailleurs le fait que la création de ce programme est avant tout et seulement une opération de communication, dénuée de tout effet budgétaire.

Il faut par ailleurs souligner que les crédits ainsi ouverts sur le programme 369 ne financent pas d'hypothétiques titres émis pour la « dette covid », l ' Agence France Trésor n'ayant pas émis de souches « spéciales covid » en 2020 et en 2021 qu'elle pourrait ensuite retracer : elle a simplement exécuté le programme de financement de la France, dont les émissions servent à la fois à financer le déficit (dont une part n'était pas liée à l'épidémie) et à refinancer les titres arrivés à échéance.

2. Une extraction hors de la mission « Engagements financiers de l'État » de la charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État qui introduit de la confusion

La réforme du système ferroviaire décidée en 2018 s'était accompagnée de la décision de l'État de reprendre 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau, reprise mise en oeuvre en deux temps : 25 milliards d'euros en loi de finances pour 2020, et 10 milliards d'euros en loi de finances pour 2022.

Les charges d'intérêt résultant de cette reprise de dette font l'objet du programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie », et représentent 900 millions d'euros pour 2023.

Si la création de ce programme peut être considérée comme la matérialisation de l'engagement pris par le Gouvernement en 2018 de mettre en évidence cette dette dans les comptes de la Nation, la justification du rattachement de ce programme à la mission « Écologie » n'a rien d'évident.

En effet, si l'objectif de ce programme était d'isoler la gestion de la charge de la dette résultant de SNCF Réseau, il aurait été tout à fait possible de conserver ce programme et de le rattacher à la mission « Engagements financiers de l'État ». C'est d'ailleurs ce qu'a fait le Gouvernement avec le programme 369, et selon des modalités pourtant beaucoup plus contestables.

En outre, ce programme, dont le responsable est le directeur général du Trésor, est géré par l'Agence France Trésor, qui assure la mise en paiement des échéances de la dette reprise de SNCF Réseau. Il paraîtrait de ce point de vue logique de le rattacher à la mission « Engagements financiers » de l'État, dont l'AFT gère déjà une partie avec les programmes 117 et 369.

Enfin, l'extraction de la charge de la dette de SNCF Réseau en dehors de la mission « Engagements financiers de l'État » est source de confusion, en ce qu'elle alimente un doute sur les crédits que doit consacrer l'État à la charge de la dette et rend mal aisée la lecture des chiffres qui en rendent compte.

Le montant de 50,8 milliards d'euros , que représentent les crédits affectés au programme 117 « Charge de la dette et de la trésorerie de l'État », est en effet incomplet puisque doivent précisément s'y adjoindre les 900 millions d'euros de la charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État pour obtenir le « vrai chiffre » de la charge de la dette, qui est de 51,7 milliards d'euros pour 2023 .

Au total, le rattachement du programme 355 à la mission « Écologie » ne paraît pas présenter un avantage tel qu'il doive être maintenu au détriment de la création d'un programme spécifique au sein de la mission « Engagements financiers de l'État ». L'option qui consisterait à inclure directement cette dépense dans le programme 117 présenterait l'avantage d'une plus grande clarté, en ce qu'elle représenterait plus fidèlement l'ensemble des crédits affectés à la charge de la dette.

C. UNE DIMINUTION FORTE DES CRÉDITS DÉDIÉS AUX APPELS EN GARANTIE DE L'ÉTAT

1. Des appels en garantie plus élevés en 2022 qu'en 2021, en raison de l'entrée en phase d'amortissement des PGE depuis mars.

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, les crédits du programme 114 « Appels en garantie de l'État » connaissent cette année une baisse et passent de 3,50 milliards d'euros à 2,48 milliards d'euros (-29 %), après une forte hausse entre 2021 et 2022 (+34 %).

Hormis l'action 04, qui présente une hausse de 5,1 % due à l'augmentation des crédits affectés à la garantie du risque exportateur, toutes les actions du programme voient leurs crédits diminuer, le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022 présenté en conseil des ministres le 2 novembre 2022 ayant même conduit à annuler 2,03 milliards d'euros d'AE et deux milliards d'euros de CP pour 2022.

Évolution des crédits des actions du programme 114
entre 2021 et 2023 (AE = CP)

(en millions d'euros et en pourcentage)

2021

LFI 2022

PLF 2023

Part dans les crédits du programme

Évolution 2023 / LFI 2022

Évolution 2023 / 2021

01 - Agriculture et environnement

0

0,85

0,1

0 %

- 88,2 %

02 - Soutien au domaine social, logement, santé

31

50,4

39,7

1,60 %

- 21,2 %

+28,06 %

03 - Financement des entreprises et industrie

191,94

2 807,65

1 906,20

76,78 %

- 32,11 %

+893,1 %

04 - Développement international de l'économie française

74,19

128,00

121,5

4,89 %

+5,08 %

+63,77 %

04.02 Assurance-prospection

74,19

109,00

97,50

3,93 %

-10,55 %

+31,42 %

04.03 Garantie de change

0,00

1,00

1,00

0,04 %

0,00 %

04.06 Garantie du risque exportateur

0

18,00

23,00

0,93 %

+27,8 %

05 - Autres garanties

0,52

514,01

415,24

16,73 %

- 19,22 %

+79753 %

Total

297,65

3 500,91

2 482,74

100,00 %

- 29,08 %

+734,11 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La mobilisation toujours forte de l'action 03 , dont les crédits ouverts en PLF 2023 (1,91 milliard d'euros) sont 10 fois supérieurs à l'exécution constatée en 2021 mais baissent par rapport à 2022 , s'explique par le fait que cette action supporte l'un des plus importants dispositifs mis en place par le Gouvernement pour soutenir les entreprises : les prêts garantis par l'État (PGE), ouverts initialement jusqu'au 31 décembre 2021, prolongés ensuite jusqu'au 30 juin 2022, avant d'être « remplacés » par un nouveau dispositif, les PGE Résilience, mis en place en avril 2022 pour soutenir les entreprises affectées économiquement par la guerre en Ukraine et censé durer jusqu'au 31 décembre 2022. Au 20 octobre 2022, seuls 668 prêts « Résilience » avaient été octroyés pour un montant total de 433 millions d'euros.

Ce dispositif a été plébiscité en 2020 avec un taux de recours par près d'un tiers des entreprises et au-delà de 50 % dans les secteurs les plus touchés. Au 31 juillet 2022, on dénombrait près de 800 000 entreprises bénéficiaires de PGE, pour un encours total de 142,7 milliards d'euros.

Un nouvel objectif de qualité de gestion des PGE est introduit à partir de 2023, reposant sur deux indicateurs : l'un relatif à la part de dossiers PGE faisant l'objet d'un contrôle documentaire, l'autre concernant les délais d'indemnisation des banques et de paiement des commissions par Bpifrance, au nom et pour le compte de l'État.

Répartition des entreprises bénéficiaires
de prêts garantis par l'État mi-2022

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Au 30 septembre 2022, le montant total des indemnisations versées depuis le démarrage du dispositif PGE s'élevait à 1,257 milliard d'euros pour 19 180 PGE. Ces indemnisations étaient de 300,2 millions d'euros en 2021 et ont fortement augmenté en 2022 puisque, sur les neuf premiers mois de cette année, ils ont atteint 935,6 millions d'euros 60 ( * ) . Cette augmentation est cohérente avec le fait que trois quarts des PGE ont été accordés entre mars et septembre 2020, et sont donc entrés entre mars et septembre 2022 en phase d'amortissement, qui est statistiquement une période de hausse de la sinistralité.

Parallèlement, le dispositif de garantie de l'État sur des fonds investis dans des prêts participatifs « Relance » et obligations « Relance » octroyés à des PME ou à des ETI, créé par la loi de finances pour 2021, est prévu pour durer jusqu'au 31 décembre 2023, au lieu du 30 juin 2022, date initialement décidée. Le dispositif de garantie prévoit la possibilité de couvrir jusqu'à 30 % de l'encours total des fonds bénéficiant de la garantie, plafonné à 20 milliards d'euros.

Concernant les autres actions du programme, passant de 50,4 à 39,7 millions d'euros, la baisse des crédits de l'action 02, qui finance les appels de garantie des prêts à l'accession sociale, s'explique probablement par la constatation d'une sous-exécution massive de l'action en 2021. En effet, des crédits à hauteur de 57 millions d'euros avaient été prévus pour abonder le fonds de garantie de l'accession sociale afin de lui permettre de prendre en charge les sinistres sur les prêts, mais seulement 31 millions d'euros ont été exécutés.

La hausse des crédits sur l'action 04 provient essentiellement du maintien de mesures de soutien, tandis que les crédits affectés aux mesures de relance diminuent.

Sur le volet soutien, dans le cadre des mesures d'urgence pour répondre à la crise sanitaire, les quotités maximales pour les produits « garantie des cautions » et « garantie des préfinancements » ont été relevées pour les garanties « risque exportateur » délivrées aux entreprises avant le 31 décembre 2020. Le montant des appels en garantie a donc augmenté en 2022, hausse qui devrait se poursuivre en 2023 en raison de deux dossiers d'indemnisations élevés.

Sur le volet relance, les dispositifs de soutien aux PME dans leur démarche de prospection à l'export avaient été renforcés dans le cadre de la crise. Ils diminuent cette année, puisque seulement 8 millions d'euros sont ouverts à ce titre sur l'action 03 « Plan de soutien à l'export » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance », là où 14,8 millions d'euros étaient prévus en loi de finances pour 2022. De même, les crédits attribués à l'assurance prospection diminuent fortement par rapport à 2022, passant de 109 millions d'euros à 97,5 millions d'euros en 2023. Ils demeurent toutefois bien plus élevés qu'en 2021.

Parmi les sous-actions ne comportant pas de crédits pour 2023 61 ( * ) , il convient de mentionner la mission de stabilisation de taux, qui en cas d'adoption de l'article 38 du projet de loi de finances pour 2023, serait transférée à Bpifrance Assurance Export à partir du 1 er janvier 2023. Cette sous-action sera retracée sur le compte de commerce 915 « Soutien financier au commerce extérieur ».

Hors la provision pour risque d'appel en garantie pour le Fonds paneuropéen créé par la Banque européenne d'investissement (cf. infra ), l'action 05 porte un autre risque d'appel lié à la crise sanitaire, au titre des prêts et garanties consentis par l'Agence française de développement (AFD). En particulier, une dotation nouvelle tenant compte de la prévision de sinistralité de 12,3 millions d'euros est destinée à couvrir les appels sur la garantie octroyée à 80 % sur les prêts consentis par les banques locales du secteur privé africain aux PME affectées par la crise sanitaire.

2. Les prévisions, quoique prudentes pour 2023, pourraient devoir être révisées pour tenir compte de l'impact de la crise énergétique sur les entreprises

Les crédits du programme 114 sont évaluatifs et s'appuient sur de multiples hypothèses quant aux risques de défaillances des acteurs bénéficiaires de la garantie de l'État. Il s'agit là d'un exercice difficile , les prévisions étant construites au début du second semestre de l'année n-1 , en regardant à la fois les appels en garantie passés et les risques à venir, compte tenu du contexte macroéconomique et des comportements des agents, par définition incertains.

Ainsi, le calibrage opéré en loi de finances pour 2022 s'est avéré large puisque sur les 3,5 milliards d'euros votés, le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022 prévoit d'en annuler deux milliards. Cette annulation s'explique par un taux de sinistralité moindre qu'anticipé, de surcroît dans le contexte où la plupart des entreprises ont opté pour la possibilité de disposer d'une seconde année de différé de remboursement.

Si la programmation des crédits s'est avérée particulièrement prudente dans le cadre du PLF pour 2022, il est possible qu'elle le soit un peu moins dans le cadre du présent PLF alors même qu'il est préférable de conserver une marge de précaution.

Pour les principaux dispositifs de garantie, les hypothèses étaient, au moment du dépôt du texte devant l'Assemblée nationale, les suivantes :

- 1,90 milliard d'euros prévus pour les appels au titre des PGE , contre 2,65 milliards d'euros en 2022. La diminution prévue n'est qu'assez faible, dans la mesure où, le remboursement du PGE s'étend sur six années avec un différé d'amortissement d'un an ou deux en cas d'année supplémentaire de différé (option prise par 51 % des entreprises bénéficiaires), l'année 2023 marquera le début des remboursements pour la quasi-totalité des PGE octroyés et pourrait donner lieu, dans ce cadre, à une augmentation de la mobilisation des crédits 62 ( * ) ;

- 377,3 millions d'euros prévus pour le risque d'appel au titre de la garantie apportée par la France au Fonds de garantie paneuropéen porté par la Banque européenne d'investissement (BEI). Ce fonds a été créé en 2020 pour attribuer des financements au profit des PME européennes, par le biais d'instruments de partage de risques. La France, qui en est le troisième bénéficiaire, s'est engagée pour 4,7 milliards d'euros, sur les 25 milliards d'euros de garantie prévus pour l'ensemble des États membres contributeurs. La BEI estime que le taux brut de sinistralité serait de 33,6 %, soit un impact budgétaire potentiel de 1,6 milliard d'euros pour la France, qui pourrait être concentré sur les premières années d'existence du fonds, puisqu'il vise surtout à garantir les portefeuilles de prêts de court-terme. Toutefois, la sinistralité nette , qui tient compte de la rémunération de la garantie et des gains escomptés sur le portefeuille, serait plutôt de l'ordre de 20 %, compte tenu de la vulnérabilité des entreprises ciblées. En raison d'un déploiement retardé par rapport au calendrier initial, le coût pour la France a été en 2021 de 200 000 euros, et s'élèverait à 266 millions d'euros en 2022, avant d'atteindre 377 millions d'euros en 2023.

Le rapporteur spécial s'est, comme l'année dernière, plus particulièrement intéressé aux PGE , qui portent, en termes de crédits budgétaires, le risque d'appel le plus important sur le programme .

Au 30 septembre 2022, le montant total des indemnisations versées depuis le démarrage du dispositif PGE s'élevait à 1,257 milliard d'euros pour 19 180 PGE. Ces indemnisations étaient de 300,2 millions d'euros en 2021 et ont fortement augmenté en 2022 puisque, sur les neuf premiers mois de cette année, ils ont atteint 935,6 millions d'euros 63 ( * ) . Cette augmentation est cohérente avec le fait que trois quarts des PGE ont été accordés entre mars et septembre 2020, et sont donc entrés entre mars et septembre 2022 en phase d'amortissement, qui est statistiquement une période de hausse de la sinistralité.

Le taux de pertes utilisé pour le PLF 2023 s'élève à 4,6 % sur la durée du dispositif, correspondant à un montant de pertes brutes totales de 6,5 milliards d'euros 64 ( * ) . Ce taux dépasse celui estimé en janvier 2022 (3,1 %) mais rejoint le scénario prudent retenu par la direction générale du Trésor en janvier 2021 (5,2 %). Sur le plan méthodologique, l'estimation des pertes s'appuie sur la ventilation des montants octroyés selon la cotation FIBEN à fin mai 2022, qui existe depuis 1987 et se fonde, pour 2022, sur les comptes de 2021. Elle renseigne sur la probabilité de défaut d'une entreprise à horizon un an. La Banque de France utilise, pour déterminer ses estimations, le scénario macroéconomique fourni par la direction générale du Trésor.

Estimation des pertes enregistrées sur les PGE sur la base d'un encours de 139,51 milliards d'euros, selon la Banque de France (août 2022)

(en pourcentage et en millions d'euros)

On constate que, pour l'année 2022, la Banque de France a surestimé les pertes enregistrées sur les PGE, mais que les crédits prévus par la loi de finances pour 2022 ont été bien supérieurs (2,65 milliards d'euros) aux estimations. Pour l'année 2023, le différentiel est plus resserré puisque les estimations de pertes en août 2022 pour 2023 s'élevaient à 1,744 milliard d'euros, alors que les crédits prévus pour les appels en garantie au titre des PGE par le PLF pour 2023 se limitent à 1,895 milliard d'euros.

Ces prévisions semblent pourtant optimistes. Elles reposent en effet sur un scénario macroéconomique dont le rapporteur général de la commission des finances du Sénat a démontré le caractère peu crédible 65 ( * ) .

Si ces propos sont à considérer dans un contexte de faible sinistralité au moment de l'écriture de ce rapport, Bpifrance affirme ainsi, dans des réponses au questionnaire du rapporteur spécial : « Nous pensons que la sinistralité va s'accroître dès fin 2022 et que le montant des indemnisations sur 2023 devrait être supérieure à 2022 ». Pour rappel, en septembre 2022, 7 % des dirigeants ayant utilisé un PGE craignaient de ne pas être en mesure de le rembourser 66 ( * ) .

Certains indices laissent déjà présager une dégradation de la situation des entreprises. Ainsi, le nombre de défaillances d'entreprises , s'il demeure inférieur à celui de 2019 (51 200) a significativement augmenté sur la période allant de septembre 2021 à septembre 2022 : il atteint 37 000 67 ( * ) . Selon la direction générale du Trésor, le risque d'augmentation du nombre de défaillances n'est pas à écarter, comme en témoigne la normalisation de leur nombre depuis le début de l'été, comparativement à la situation d'avant crise.

Nombre de défaillances d'entreprises par semaine, 2019-2022

Source : réponses de la Direction générale du Trésor au questionnaire du rapporteur spécial

D'un point de vue sectoriel, la direction générale du Trésor perçoit les premiers signaux de relative difficulté à rembourser les PGE pour certains secteurs. Ainsi, au 20 octobre 2022, le montant des appels en garantie était de 220 millions d'euros pour le secteur construction (soit 1,82 % des montants octroyés au secteur), 180 millions d'euros pour le secteur commerce (soit 0,53 %) et 90 millions d'euros pour le secteur hébergement-restauration (soit 0,88 %). Ces appels en garantie concernent très majoritairement des TPE (pour 480 millions d'euros) et des PME (pour 340 millions d'euros).

Si les entreprises semblent être sorties de la crise sanitaire avec des fondamentaux solides, l'endettement net s'étant stabilisé, signe que les niveaux de trésorerie sont élevés et que les entreprises n'ont pas forcément toutes utilisé leurs PGE, le principal risque identifié à ce stade résulte de la crise énergétique, qui pourrait dégrader la situation financière de nombreuses entreprises. Ce pourrait être tout particulièrement le cas au moment de la renégociation des contrats d'approvisionnement énergétique qui a généralement lieu en décembre et qui pourrait fragiliser, si ce n'est étouffer les entreprises industrielles, fortement consommatrices d'énergie et le plus souvent incapables de répercuter ces hausses ni de se couvrir sur ces évolutions de coûts.

Ces risques pourraient entraîner, pour les entreprises qui ont contracté des PGE et avant même le défaut, le recours à la possibilité, prévue depuis janvier 2022, de restructuration amiable des PGE via la médiation du crédit. Le passage par cette procédure, qui conduit les banques à classer les entreprises qui l'utilisent en « prêt non performance » aboutit toutefois à interdire l'accès des entreprises au crédit bancaire, ce pourquoi seulement 450 dossiers ont été restructurés depuis janvier 2022.

La crise énergétique pourrait, en effet, donner lieu à des défauts qui ne se seraient pas produits autrement et qui entraînerait davantage d'appels de garantie qu'anticipé. Le rapporteur spécial insiste en particulier sur la possibilité que les difficultés soient en train de s'amonceler sans que les indicateurs statistiques permettent de les repérer aisément, et finir par se révéler d'un coup.

De ce point de vue, il convient pourtant de ne céder à aucun catastrophisme, mais plutôt de faire preuve de prudence. S'il est possible que les crédits proposés par le Gouvernement sur le programme 114 s'avèrent insuffisants, le rapporteur spécial note que les prévisions en la matière sont toujours particulièrement difficiles à établir et souligne que le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022 a finalement proposé l'annulation de deux milliards d'euros de crédits au titre de ce programme, ce qui atteste du caractère prudent des estimations de la Banque de France. L'ensemble des observations formulées à propos des PGE ne saurait, dès lors, conduire à rejeter les crédits de la mission.

II. LES CRÉDITS DES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION NE SONT PAS AFFECTÉS PAR LES EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE ET S'INSCRIVENT DANS LA DYNAMIQUE CONSTATÉE CES DERNIÈRES ANNÉES

A. LES PRIORITÉS DU PROGRAMME 145 SONT DAVANTAGE PORTÉES PAR LES DÉPENSES FISCALES QUI LUI SONT ATTACHÉES QUE PAR LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES OCTROYÉS EN LOI DE FINANCES

1. Des crédits budgétaires qui poursuivent leur baisse...

Le programme 145 « Épargne » se compose de deux actions :

- l'action 01 - Épargne logement , qui porte plus de 99,9 % des crédits du programme . Ces crédits correspondent aux primes que peuvent obtenir, sous certaines conditions (date d'ouverture et souscription d'un prêt épargne logement), les détenteurs d'un compte épargne-logement (CEL) ou d'un plan d'épargne logement (PEL) ;

- l'action 02 - Instrument de financement du logement , qui retrace l'intervention de l'État au niveau des prêts du secteur aidé géré par le Crédit foncier et des prêts conventionnés contrôlés par la SGFGAS (Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété). Ce dispositif est en voie d'extinction .

Le tableau ci-dessous illustre la poursuite de la diminution des crédits attribués au programme , qui s'explique principalement par l'utilisation des produits d'épargne logement non plus comme un outil d'accession à la propriété mais comme un outil d'épargne. Un second effet devrait jouer à plus long-terme, la suppression de la prime pour les produits ouverts à compter du 1 er janvier 2018. Cette trajectoire baissière, qui devrait s'inscrire dans la durée, demeure toutefois conditionnée au comportement des épargnants. Le dispositif de prime est en effet une dépense de guichet, le nombre de PEL ou de CEL bénéficiaires et le montant global des primes à payer n'étant pas contingentés.

Évolution des crédits du programme 145

(en crédits de paiement et en millions d'euros)

2021

LFI 2022

PLF 2023

Évolution 2023/2022

Épargne logement

64,23

60,13

59,11

- 1,70 %

Instrument de financement du logement social

0,29

0,08

0,1

+ 30,64 %

Total

64,52

60,21

59,21

- 1,66 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

2. ... et des dépenses fiscales dont le coût ne cesse de progresser, à l'inverse de leur évaluation

À l'instar des années précédentes, force est de constater que ce sont moins les crédits budgétaires que les dépenses fiscales qui portent les politiques publiques attribuées au programme 145. La Cour des comptes avait par le passé attiré l'attention sur la diversité des moyens consacrés aux politiques publiques de l'État, en particulier ceux autres que le budget général, et qui faisaient généralement l'objet d'un moindre suivi 68 ( * ) . Le programme 145 est particulièrement représentatif de cette tendance : le coût des 26 dépenses fiscales serait au moins 98 fois supérieur aux crédits budgétaires demandés dans le PLF 2023.

Cela est particulièrement notable alors même que ces dépenses fiscales sont moins nombreuses qu'en 2022, l'exonération des lots d'obligations et primes de remboursement attachées à des emprunts négociables émis avant le 1 er janvier 1992 et l'exonération du prélèvement libératoire pour les produits des emprunts contractés hors de France et pour les intérêts des obligations et des titres de créances négociables souscrits par un non-résident ayant été supprimées en loi de finances pour 2022 69 ( * ) .

Le rapporteur spécial appelle depuis plusieurs années à une meilleure évaluation de ces dépenses fiscales et de leur pertinence , en se concentrant d'abord sur celles dont le coût n'est pas du tout évalué ainsi que sur celles qui présentent un coût inférieur à 500 000 euros, avec quelques milliers de bénéficiaires. Un tel exercice est en effet de nature à permettre de proposer la suppression des dispositifs obsolètes .

Au-delà des deux actions sur lesquelles sont ouverts les crédits, et c'est d'ailleurs ce qui justifie le rattachement de ces 26 dépenses fiscales, le programme 145 est en effet destiné à encourager les placements dans plusieurs produits d'épargne réglementée ainsi que la constitution d'une épargne de long terme . Ces objectifs sont bien sûr absolument légitimes et certaines dépenses fiscales doivent être préservées , par exemple celle exonérant de prélèvements les intérêts des livrets réglementés ou encore celles encourageant le développement des plans d'épargne salariale et de retraite d'entreprise, ou encore l'assurance vie.

Ce qui est beaucoup plus problématique en revanche, c'est bien l'absence de progrès constatée d'années en années sur l'évaluation du nombre de bénéficiaires et du coût de ces dépenses fiscales . La seule amélioration observable est imputable à la suppression de dépenses fiscales non estimées, mais pas au renforcement de l'évaluation.

Évaluation des dépenses fiscales
dans les PLF 2022 et 2023

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Les deux tiers des dépenses fiscales ne font pas l'objet d'une évaluation dont le niveau de fiabilité est au moins « bon ». C'est bien loin de la moyenne constatée sur l'ensemble des 471 dépenses fiscales du PLF 2022 où plus de la moitié ont été chiffrées avec une fiabilité « bonne » ou « très bonne » 70 ( * ) . Le principal facteur d'explication sur le défaut d'évaluation, pour le nombre de bénéficiaires, serait l'absence d'obligation déclarative, et donc de données fiscales liées, même si la direction de la législation fiscale a également indiqué qu'il revenait d'abord à chaque administration compétente au fond de procéder à l'évaluation de ses dispositifs 71 ( * ) .

Évolution des estimations des cinq plus grandes dépenses fiscales
attachées au programme 145 et de leur coût total depuis 2020

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Dans le graphique ci-dessus, les prévisions du coût total n'incluent pas deux dépenses fiscales pour lesquelles l'estimation chiffrée n'est pas encore disponible, leur coût total s'étant élevé à 1,18 milliard d'euros en 2020 et à 828 millions d'euros en 2021. L'une d'entre elles, l'exonération des sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable » a vu son coût pour 2021 être réévalué, entre le PLF 2022 et le PLF 2023, de « non chiffrable » à 660 millions d'euros . Il est à la fois curieux et dommageable que le chiffrage, même évaluatif, de cette dépense fiscale ne soit pas disponible dès le projet de loi de finances initiale.

B. POUR LA TROISIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE, LES CRÉDITS AU TITRE DU PROGRAMME 336 SONT OUVERTS DÈS LA LOI DE FINANCES INITIALE

Le programme 336 soutient la contribution française au capital du mécanisme européen de stabilité (MES) . La contribution de la France au MES est légèrement supérieure à 20 % de son capital, composé à la fois de parts libérées (80,5 milliards d'euros au total dont 16,3 pour la France) et de parts appelables (624,3 milliards d'euros au total dont 126,3 pour la France). La participation de la France aux parts libérées a déjà été versée, sous la forme de cinq tranches de 3,3 milliards d'euros.

En parallèle de cette contribution au capital, la France s'est engagée à rétrocéder au MES les intérêts perçus sur les dépôts placés auprès de la Banque de France. L'Allemagne a pris un engagement similaire pour les dépôts placés auprès de la Bundesbank.

Or, malgré cet engagement réciproque, et quasiment certain, le programme n'était pas, jusqu'en 2021, doté de crédits dès la loi de finances initiale , alimentant, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, une critique sur l'insincérité de la budgétisation du programme 336 . En cours d'année, le Gouvernement était ainsi obligé soit de recourir à la mission « Crédits non répartis » au titre des dépenses accidentelles, ce qui peut sembler critiquable pour une dépense qui résulte d'un engagement de l'État, soit de faire voter une disposition en loi de finances rectificative. La Cour des comptes appelait également à ouvrir ces crédits dès l'examen du PLF. Il est donc bienvenu que le programme 336 soit désormais doté de crédits budgétaires dès l'examen par le Parlement du projet de loi de finances.

Ainsi, tandis que la loi de finances pour 2021 avait prévu un montant de 79 millions d'euros pour 2021, la France n'a eu à rétrocédé que 62,4 millions d'euros cette année-là au titre des intérêts de 2019 et 2020. La rétrocession s'élève, en 2022, à 54,3 millions d'euros au titre des intérêts 2021, alors que la loi de finances pour 2022 prévoyait un crédit de 57 millions d'euros. 2,7 millions d'euros devraient par conséquent être annulés dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022.

50 millions d'euros sont prévus dans le PLF 2023 pour couvrir les rétrocessions au MES au titre de l'année 2022. Le montant définitif sera notifié en début d'année. La baisse de 4,3 millions d'euros prévue entre 2022 et 2023 est liée à la diminution des intérêts versés par le MES aux banques centrales nationales auprès desquelles il a placé une partie de son capital. Cette baisse est elle-même liée à la remontée des taux directeurs de la BCE à compter du deuxième semestre 2022.

C. L'ACCOMPAGNEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AYANT SOUSCRIT DES EMPRUNTS TOXIQUES, PAR LE BIAIS DU PROGRAMME 344, CONTINUE

Le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » a été créé en loi de finances pour 2014 pour accompagner les collectivités territoriales ayant souscrit à des prêts dits « toxiques » . Il est aujourd'hui en voie d'extinction.

Le fonds est à la fois financé par l'État (environ 85 millions d'euros) et par le secteur bancaire , par le biais d'une taxe additionnelle à la taxe systémique 72 ( * ) , qui devrait représenter près de 100 millions d'euros en 2023, comme en 2022. À ces crédits de paiement s'ajoutent, sous la forme de fonds de concours , 11,5 millions d'euros en provenance de la société de financement local et de sa filiale la Caisse française de financement local (10 millions d'euros), ainsi que de Dexia (1,5 million d'euros), toutes trois non assujetties à la taxe systémique. Le montant total des crédits de paiement proposés dans le présent projet de loi de finances s'élève à 185,85 millions d'euros, soit une hausse de 0,1 % par rapport à la LFI 2022 (185,64 millions d'euros) et de 4,3 % par rapport au montant révisé pour 2022 (178,21 millions d'euros). Il correspond à l'échéancier établi pour les décaissements du fonds, avec une hypothèse maximaliste sur le taux de recours.

La programmation et l'exécution de ces crédits n'appellent pas de remarque particulière, aucune difficulté de gestion n'ayant été remontée.

Rappelons simplement que les engagements à honorer d'ici la fin de vie du fonds de soutien et non couverts par des paiements au 31 décembre 2022 s'élèvent à 1,188 milliard d'euros, tandis que le niveau d'AE, de 2,54 milliards d'euros, correspond quasiment au besoin de financement réel de 2,53 milliards d'euros portés par les conventions signées avec les bénéficiaires grâce à une annulation d'AE à hauteur de 120 millions d'euros intervenue en août 2021.

DEUXIÈME PARTIE
LES COMPTES SPÉCIAUX

I. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS » : UNE MOBILISATION MOINDRE QU'EN 2022 ET L'INTÉGRATION BIENVENUE DES PRÊTS DANS SON PÉRIMÈTRE

A. UN COMPTE MOINS MOBILISÉ EN 2023 QU'EN 2022

Le compte de concours financiers (CCF) « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », renommé par l'article 19 du présent PLF « Prêts et Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », retrace désormais neuf catégories d'organismes bénéficiaires d'avances :

- sur le programme 821 , les avances à l'Agence de services et de paiement (ASP) au titre du préfinancement des aides de la politique agricole commune . Ces avances sont généralement d'une durée très courte, en tout cas inférieure à un an ;

- sur le programme 823 , les avances du Trésor à des organismes distincts de l'État gérant des services publics , dont font partie par exemple l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, la Cité de la musique ou encore les chambres de commerce et d'industrie. Pour 2023, un montant de 100 millions d'euros est proposé pour FranceAgrimer pour répondre aux crises agricoles demandant la mise en place de dispositifs d'urgence. 8,8 millions d'euros sont par ailleurs de nouveau ouverts pour l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Des crédits plafonnés à 100 millions d'euros sont enfin prévus au titre de la réserve d'urgence pour répondre à des besoins de trésorerie imprévus et limités ;

- sur le programme 824 , renommé pour 2023, les prêts et avances du Trésor à des services de l'État , qui se résument en réalité exclusivement aux prêts et avances octroyés au budget annexe « contrôle et exploitation aériens » (Bacea). Au 15 septembre 2022, le montant des avances 73 ( * ) consenties au Bacea s'élevait, sur un montant de crédit ouvert de 707 millions d'euros en loi de finances pour 2022, à 352 millions d'euros, avec toujours une durée maximale de remboursement fixée à 10 ans. Aucun crédit n'est prévu pour 2023 ;

- sur le programme 825 , les avances du Trésor à l' office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) afin de couvrir l'indemnisation des victimes du Benfluorex si les Laboratoires Servier refusaient d'y accéder. Aucune avance n'a encore été demandée. Si cela fait maintenant quatre ans que ces avances ne sont pas utilisées, leur inscription en loi de finances initiale répond à un principe de précaution. En 2017 par exemple, les Laboratoires Servier avaient refusé de payer les indemnisations pour deux dossiers et l'Oniam les avait assignés en justice ;

- sur le programme 826 , les prêts aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité , créé par la troisième loi de finances rectificative (LFR) pour 2020 74 ( * ) . Ce programme , qui ne prévoyait jusqu'alors que des avances, est également renommé pour se limiter aux prêts . Ces prêts visent à compenser la chute des recettes de la taxe d'aéroport, acquittée par les compagnies aériennes et affectée au financement des dépenses de sûreté-sécurité. Versés en 2020, 2021 et 2022 à respectivement 86, 84 et 62 exploitants, elles ont une durée maximale de 10 ans , la première échéance de remboursement devant intervenir en 2024 . Aucun crédit n'est prévu en 2023 ;

- sur le programme 827 , les prêts à Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19 , créé par la quatrième loi de finances rectificative pour 2020 75 ( * ) . Ce programme, qui ne prévoyait jusqu'alors que des avances, est renommé pour se limiter aux prêts. L'avance, renommée « prêt » à partir de 2023, a été octroyée pour une durée maximale de 16 ans, avec une première échéance de remboursement en 2023. Aucun crédit n'est pour le moment prévu en 2023 ;

- sur le programme 828 , les prêts destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19, également créé par la quatrième LFR pour 2020. Encore une fois, ce programme qui ne prévoyait que des avances, se limite désormais aux prêts. Si la date de remboursement ne peut être ultérieure au 1 er janvier 2031 et la durée de remboursement inférieure à six ans 76 ( * ) , les AOM bénéficiaires peuvent toutefois choisir, dans le respect de ces conditions, de ne commencer à rembourser les avances qu'au moment où les recettes tarifaires et le versement mobilité sont revenus à leur niveau moyen pour les années 2017 à 2019 (clause dite de « retour à meilleure fortune »). Là encore, aucun crédit n'est ouvert en 2023 ;

- sur le programme 829 , les prêts destinés au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence , créé par la loi de finances pour 2022 77 ( * ) . Les avances se transforment également en prêts dans ce PLF pour 2023. Ce programme vise à permettre à l'État de contribuer au financement du volet « transports » du plan « Marseille en Grand » piloté par le groupement d'intérêt public Aix-Marseille-Provence Mobilité. Aucun prêt n'a été effectué, mais 100 millions d'euros sont ouverts en crédit de paiement pour 2023 ;

- sur le nouveau programme 830 , les prêts destinés à FranceAgriMer au titre du préfinancement des aides européennes . Il vise à sécuriser les modalités de financement du Fonds social européen (FSE+) dans le cadre du cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 et permettrait d'autoriser le préfinancement sous forme de prêts de l'Agence France Trésor des dépenses engagées par France AgriMer au titre de l'aide alimentaire. En effet, au début de chaque programmation des fonds européens, FranceAgriMer est amené à préfinancer des aides européennes avant un remboursement par l'Union européenne qui peut être tardif - cela a été le cas à de nombreuses reprises dans le cadre du CFP 2013-2020 en raison de difficultés de trésorerie du FEAD, elles-mêmes dues à la reprise, à un rythme insuffisant des appels de fonds auprès de la Commission européenne pour obtenir le remboursement des campagnes annuelles précédentes. Pour tenir compte de ces décalages, les prêts seraient sollicités pour une durée de cinq à six ans. 100 millions d'euros de crédit sont prévus pour 2023.

Au 31 décembre 2021, le montant résiduel des « avances » octroyées depuis la création du compte s'élevait à 5,56 milliards d'euros .

Les avances - en réalité des prêts comme en témoigne la nouvelle dénomination du CCF - sur le programme 828 ont toutes été engagées en 2020, mais des avances sur le programme 827, visant également à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité côté Île-de-France, ont également été engagées fin 2021, à hauteur de 800 millions d'euros et pour 15 ans. Aucun prêt n'a en revanche été prévu pour ces deux programmes en 2022.

S'agissant du programme 826, dédié aux exploitants d'aéroports, l'avance complémentaire de 250 millions d'euros de crédits votée en loi de finances pour 2021 pour pallier les prévisions toujours dégradées du produit de la taxe d'aéroport, du fait d'un trafic aérien encore inférieur à son volume pré-crise sanitaire, a bien été utilisée dans le cadre de 84 conventions conclues du 6 août 2021 au 21 décembre 2021. Les crédits votés à hauteur de 150 millions d'euros en loi de finances pour 2022 ont également tous été utilisés dans le cadre de 62 conventions, conclues entre le 17 mai 2022 et le 18 juillet 2022.

A contrario , les programmes 821, 823 et 825 présentent une dotation en crédits indépendante des effets de la crise sanitaire.

Évolution des dépenses, des recettes et du solde du compte
de concours financiers entre 2022 et 2023

(en crédits de paiement et en millions d'euros)

2021 (exécution)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution 2023 / LFI 2022

Dépenses

[821] Avances à l'Agence de services et de paiement

8 067,9

10 000

10 000

0,00 %

[823] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

105,6

349,4

208,8

- 40,24 %

[824] Avances à des services de l'État

1 100,6

707,0

198,4

- 71,94 %

[825] Avances à l'Oniam

0

15

15

0,00 %

[826] Avances 78 ( * ) / Prêts 79 ( * ) aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

250,0

150

0

- 100,00 %

[827] Avances remboursables 1 / Prêts 2 destinés à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

800,0

0

0

0 %

[828] Avances remboursables 1 / Prêts 2 destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

647,3 80 ( * )

0

0

0 %

[829] Prêts destinés au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence

744,0

0

- 100 %

[830] Prêts à FranceAgriMer au titre des préfinancements de fonds européens

100,0

Total des dépenses

10 971,3

11 321,4

10 622,2

- 6,18 %

Recettes

[821] Avances à l'Agence de services et de paiement

8 067,9

10 000

10 000

0,00 %

[823] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

93,9

224,8

186,4

- 17,08 %

[824] Avances à des services de l'État

221,9

321,9

367,2

+14,07 %

[825] Avances à l'Ondiam

0

15

15

0,00 %

[826] Avances aux exploitants d'aéroports

0,3

0

0

[827] Avances remboursables destinées à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

0

0

30

[828] Avances remboursables destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

0

0

0

Total des recettes

8 384,1

10 561,7

10 598,6

+0,35 %

Solde

- 2 587,3

- 759,7

- 23,6

96,89 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Sur le volet « dépenses », et dans le présent PLF, la normalisation du CCF semble se confirmer, y compris pour le programme 824 concernant les avances et prêts octroyées au Bacea . Après une hausse significative en 2020 et 2021 expliquée par une augmentation du besoin de trésorerie due à la baisse du trafic aérien, ils connaîtraient une diminution de plus de 70 % entre la loi de finances pour 2022 et le PLF pour 2023. Leur montant (198,4 millions d'euros) resterait toutefois plus de trois fois plus élevé auquel le Bacea était parvenu en 2019 (59,7 millions d'euros) au terme d'une trajectoire de désendettement qui s'était traduite par une diminution du stock de prêts. Les remboursements des prêts octroyés aux exploitants d'aéroports reprendraient en 2024.

Cette normalisation se traduit par un rétablissement du solde , attendu en déficit de 23,6 millions d'euros en 2023 , contre près de 750 millions d'euros en prévision révisée pour 2022 81 ( * ) .

B. L'INTÉGRATION BIENVENUE DES PRÊTS DANS LE PÉRIMÈTRE DU NOUVEAU COMPTE « PRÊTS ET AVANCES AUX DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

L'article 24 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) 82 ( * ) prévoit l'unification du régime des comptes de concours financiers, qui relevaient auparavant de deux catégories : les comptes d'avances et les comptes de prêts. Il définit les CCF, qui retracent les prêts et avances consentis par l'État, lesquels sont accordés pour une durée déterminée. Pour les prêts comme pour les avances, le taux ne peut être inférieur aux obligations du Trésor à même échéance.

Sur ce fondement, le V de l'article 46 de la loi de finances pour 2006 83 ( * ) avait prévu l'ouverture, dans les écritures du Trésor, d'un CCF intitulé « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

A la différence du CCF « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », créé par le même article, le V de l'article 46 excluait donc expressément la possibilité d'accorder des prêts aux services de l'État et organismes gérant des services publics.

Selon le recueil des normes comptables de l'État, et plus précisément la partie normative de sa règle n° 7, la durée des avances est fixée à deux ans maximum, renouvelable une fois sur autorisation expresse, tandis que sur une durée supérieure à quatre ans, l'État doit consentir un prêt.

Or, si le CCF « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » visait originellement à apporter un soutien ponctuel à la trésorerie de certains opérateurs - d'où son intitulé -, de nombreuses avances octroyées lors des exercices précédents avaient des durées excédant très largement les deux et quatre ans.

À titre d'exemple, les avances aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité (programme 826) versées en 2020 et 2021 avaient une durée maximale de dix ans tandis celles réservées à Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19 (programme 827) ont été octroyées pour une durée maximale de 16 ans.

Au total, en 2021 84 ( * ) comme en 2022, plus de 95 % des avances avaient une maturité résiduelle supérieure à cinq ans 85 ( * ) . Il s'agit pour la majorité d'avances accordées à des exploitants d'aéroports entre 2020 et 2022.

Le rapporteur spécial avait, dès l'examen de la loi de finances pour 2021, remarqué cette disjonction s'agissant du programme 826 et observé que l'on « s'éloign[ait] un peu plus de l'esprit de ce dispositif » 86 ( * ) . Constatant le manque de réaction du Gouvernement, il réaffirmait, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, que « le caractère répété des avances revient également à contourner cette limitation. Dans ces situations, l'octroi d'une avance s'éloigne de l'esprit du dispositif, supposé ne servir que de relais de trésorerie temporaire pour les organismes bénéficiaires » 1 .

Tenant compte du décalage croissant entre l'intitulé du compte et son contenu réel, l'article 19 du PLF modifie ainsi le V de l'article 46 de la loi de finances pour 2006 et remplace le compte « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » par un compte renommé « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

En conséquence, il précise que ce compte retrace, entre autres, le versement et le remboursement des prêts et avances du Trésor octroyées à d'autres services de l'État ou organismes gérant des services publics.

243 avances accordées à partir de crédits ouverts sur les programmes 824, 826 et 827 seraient ainsi requalifiées en prêts.

Le rapporteur spécial ne peut que se réjouir de voir le Gouvernement tirer les conclusions qui s'imposent des observations qu'il avait formulées 87 ( * ) .

Une telle adaptation est particulièrement nécessaire pour des raisons de clarté et de transparence de l'information du Parlement. L'importance des montants des nombreux prêts consentis aux exploitants d'aéroports en réaction à la crise sanitaire, ainsi que les lenteurs dont peut faire preuve la Commission européenne dans ses versement aux opérateurs de l'État rendaient d'autant plus indispensable cette évolution.

II. LA CLÔTURE DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE » AU 31 DÉCEMBRE 2022

Conformément à l'article 91 de la loi de finances pour 2020, le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » sera clos au 31 décembre 2022.

Cette prolongation par rapport au dispositif initial, qui prévoyait une clôture au 31 décembre 2020, s'expliquait par le retard pris dans le versement à la Grèce des revenus perçus par la Banque de France sur les obligations grecques qu'elle détenait, soit pour son propre compte au titre du programme ANFA ( Agreement on Net Financial Assets ), soit pour le compte de la Banque centrale européenne dans le cadre du programme pour les marchés de titres SMP ( Security market programme ).

Ces revenus constituaient, au moment de leur perception, les recettes du CAS et, au moment de leur reversement, ses dépenses. La décision de reverser ces produits à la Grèce se justifiait par la volonté d'aider la Grèce à réduire son besoin de financement , pour participer au rétablissement de la soutenabilité de sa dette publique

Le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » se composait ainsi de deux programmes :

- le programme 795 pour les dépenses au titre du versement de la France à la Grèce des revenus perçus sur les titres grecs ;

- et le programme 796 pour les dépenses au titre des rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France. Mettant en oeuvre une clause de rendez-vous en cas de non-respect des conditions d'exécution à la charge de la Grèce et en contrepartie de son aide financière, ce programme aurait été doté des crédits nécessaires au reversement à la Banque de France des montants agréés, mais il n'a jamais été abondé.

Au total, la France aura rétrocédé 2,01 milliards d'euros à la Grèce, dont 499 millions d'euros au titre du programme ANFA et 1,51 milliards d'euros au titre du programme SMP.

Sommes rétrocédées par la France à la Grèce (programme 795)
durant l'existence du CAS

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015-2018

2019

2020

2021

2022

Total

Action 01 Rétrocession des profits ANFA

198,7

149

101,8

0

30

11

8,3

0

498,8

Action 02 Rétrocession des profits SMP

0

450

399

0

181,91

146,79

201

132,77

1 511,47

Total

198,7

599

500,8

0

211,91

157,79

209,3

132,77

2 010,27

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Au regard des normes budgétaires, deux raisons justifiaient le recours à un compte d'affectation spéciale (CAS) :

- l'article 123 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne interdit formellement aux banques centrales nationales de financer les États membres de la zone euro ;

- la nécessité d'isoler les flux vers la Grèce au sein du budget de l'État, qui n'est que le vecteur de l'opération de reversement.

Cette opération de reversement avait été interrompue en 2015 avec l'arrêt du programme d'assistance financière à la Grèce pour non-respect de ses engagements, avant d'être réactivée par un accord de l'Eurogroupe du 22 juin 2018. La Banque de France et le ministre de l'économie et des finances ont donc signé, le 13 mai 2019, une troisième convention par laquelle la Banque de France s'est engagée à verser 116,92 millions d'euros en 2019 et 84,08 millions d'euros en 2020 au titre des revenus qu'elle a reçus de la détention d'obligations grecques dans le cadre du SMP .

Les revenus correspondants ont ainsi reversés à la Grèce depuis le MES et deux fois par an, de 2018 à 2022, sous réserve que la Grèce satisfasse aux conditions fixées pour cette période. Par exemple, l'un des versements prévus au mois de juillet 2021 a été reporté au mois de janvier 2022 (33,9 millions d'euros), faute d'un accord au sein du groupe de travail de l'Eurogroupe dans le cadre de la surveillance renforcée de la Grèce.

III. À L'INSTAR DES ANNÉES PRÉCÉDENTES, LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX » N'EST PAS DOTÉ DE CRÉDITS

Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » n'est plus abondé depuis plusieurs années , du fait des niveaux de réserves importants détenus par les banques centrales concernées et, par conséquent, de la faible probabilité d'un appel en garantie de l'État pour assurer la convertibilité des monnaies de la Zone franc 88 ( * ) . Il ne fait d'ailleurs plus l'objet de documents annuels de performance.

Bien que non doté en crédits, ce compte ne peut être supprimé puisqu'il constitue le pendant budgétaire des accords de coopération monétaires passés entre la France et 15 pays africains, dans le cadre de la Zone franc.

Pays

Unité monétaire

Parité fixe

Union monétaire ouest-africaine (UMOA)

Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo

Franc CFA émis par la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (XOF)

1 euro = 656 XOF

Union monétaire d'Afrique centrale (UMAC)

Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad

Franc CFA émis par la Banque des États de l'Afrique centrale (XAF)

1 euro = 656 XAF

Union des Comores

Franc comorien émis par la Banque centrale des Comores (KMF)

1 euro = 492 KMF

Le Parlement a adopté au mois de janvier 2021 le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l'Union monétaire ouest-africaine (UMOA) 89 ( * ) .

Le nouvel accord, signé le 21 décembre 2019 à Abidjan, a mis fin à l'obligation faite à la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest de centraliser au moins 50 % de ses réserves de change auprès du Trésor 90 ( * ) , tout en maintenant les piliers de la coopération monétaire entre la France et l'UMOA, à savoir la parité fixe avec l'euro et la garantie de convertibilité illimitée et inconditionnelle apportée par la France 91 ( * ) . La BCEAO a depuis retiré une partie de ses dépôts auprès du Trésor.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

SUR LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

La mission a été modifiée par un amendement du Gouvernement ouvrant 100 millions d'euros sur le programme 114 « Appels en garantie de l'État ».

Cet amendement vise à faire porter par ce programme les dépenses budgétaires découlant de la mise en jeu des garanties octroyées par l'État dans le cadre de la création d'un fonds chargé d'apporter une garantie publique pour les garanties exigées par un fournisseur en vue de la souscription d'un contrat de fourniture de gaz ou d'électricité et pour les contrats d'affacturage et risques d'assurance-crédit liés à ces mêmes contrats.

Les crédits du programme 114 passeraient ainsi de 2,48 milliards d'euros à 2,58 milliards d'euros, et ceux de la mission de 60,19 milliards d'euros à 60,29 milliards d'euros.

SUR LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « PRÊTS ET AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

En conséquence, un amendement du Gouvernement a été adopté ouvrant 20 millions d'euros supplémentaires sur le programme 823 « Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics » du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ». Ces 20 millions d'euros serviraient à doter le fonds en question. L'amorçage serait fait sous forme d'avance qui sera remboursée par les primes ou cotisations versées par les établissements de crédit, les entreprises d'assurance ou les sociétés de financement et perçues par le fonds en contrepartie du risque pris. Les crédits du programme passeraient donc de 208,8 millions d'euros à 228,8 millions d'euros.

Par ailleurs, pour répondre à l'augmentation à hauteur de 256,6 millions d'euros en 2023 du montant prévisionnel de recours aux avances du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », un amendement du Gouvernement a été adopté ouvrant 58,2 millions d'euros supplémentaires sur le programme 824 « Prêts et avances à des services de l'État ». Les crédits du programme passeraient donc de 198,4 millions d'euros à 256,6 millions d'euros.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 10 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission a examiné le rapport de M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial, sur la mission « Engagements financiers de l'État » et les comptes de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et « Accords monétaires internationaux ».

Mme Christine Lavarde , président . - Nous examinons la mission « Engagements financiers de l'État », et les comptes de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et « Accords monétaires internationaux ».

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l'État » et des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » . - La charge de la dette étant en forte augmentation, les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État  » et des comptes spéciaux rattachés sont ceux qui augmentent le plus. C'est par eux que je commencerai puisqu'ils me donnent la rare occasion d'accorder un satisfecit au Gouvernement.

Depuis la crise de la dette grecque, nous accordions des prêts à la Grèce et elle nous versait des charges d'intérêts que nous lui rétrocédions, ce qui revenait à lui accorder un prêt à taux zéro. C'est une bonne nouvelle, le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participation de la France au désendettement de la Grèce » sera clôturé au 31 décembre 2022.

Le compte de concours financiers (CCF) « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » est renommé « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ». Cela fait deux ans que j'ai mis en évidence le décalage entre l'ancienne appellation et l'octroi de nombreuses avances qui s'apparentaient à des prêts. Je me félicite de ce changement de sémantique.

En ce qui concerne les crédits de la mission, le seul point positif est l'ouverture en loi de finances des crédits au titre de la contribution française au capital du mécanisme européen de stabilité (MES) dans le cadre du programme 336. En revanche, je le dénonçais déjà l'année dernière et je le dénonce encore aujourd'hui très fortement, les modalités de calcul de la dette Covid mélangent capital et charges d'intérêt et donc l'isolement budgétaire à travers le programme 369 « Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 » n'a aucun sens. Il s'agit d'un programme d'affichage sans justification budgétaire, que l'Agence France Trésor gère d'ailleurs avec l'ensemble de la dette.

Autre artifice comptable, la reprise de la dette de SNCF Réseau, qui ne figure pas parmi les crédits dévolus à la charge de la dette alors qu'elle le devrait. Or les charges d'intérêt s'élèveront à près de 1 milliard d'euros en 2023 - avec Emmanuel Macron, le milliard est devenu l'unité de compte monétaire ! -, précisément 900 millions d'euros.

Je souhaite ici établir une comparaison avec le budget général. Les dépenses du budget général se situent à hauteur de 443,9 milliards d'euros, dont 27,3 milliards d'euros pour les dépenses d'investissement et 416,6 milliards d'euros pour les dépenses de fonctionnement, ce qui correspond à un déficit primaire, c'est-à-dire le déficit budgétaire retraité des intérêts de la dette, de 108,6 milliards d'euros. L'amortissement de la dette à moyen et long termes, en remboursement du capital, s'élève à 155,5 milliards d'euros. Les émissions de dettes à moyen et long termes à 270 milliards d'euros. Nous qui avons géré des collectivités, nous savons que notre dette doit correspondre exactement aux dépenses d'investissements réalisés, or nous voyons ici que nos émissions de dettes, qui pour une part significative viennent amortir une dette déjà émise, vont représenter l'équivalent de dix fois ce que nous investissons !

Avant, plus on s'endettait, moins on payait cher : la théorie de l'évaporation suit celle du ruissellement. La corrélation négative entre la charge de la dette et l'endettement effectif a évolué. Exposée aux mouvements de l'inflation, la charge de la dette a diminué de 25,8 % entre 2012 et 2020, mais elle augmente de 45,5 % de 2020 à 2023. Il s'agit d'une explosion inattendue. J'attire votre attention sur la hausse tout aussi impressionnante des taux d'intérêt, au cours des six derniers mois : jamais ils n'ont tant augmenté en si peu de temps, il s'agit d'une hausse historique. L'État prévoit une stabilisation l'année prochaine, une hypothèse à laquelle je ne crois pas trop.

En 2021, la charge de la dette s'élevait à 36,3 milliards d'euros. Plusieurs effets se sont conjugués pour aboutir à une charge de la dette de 49,4 milliards d'euros en 2022 : l'effet volume, provenant du déficit supplémentaire, de 1,3 milliard, l'effet taux de - 300 millions d'euros, l'effet inflation - 10 % de la dette environ sont indexés sur l'inflation - de 12 milliards d'euros, et un effet calendaire. L'effet inflation est massif en 2022 en raison de la hausse de la provision pour indexation du capital des titres indexés, mais sera plus favorable en 2023 (-2,2 milliards d'euros) en raison d'une inflation moins forte qu'en 2022, l'effet taux devenant défavorable. Il s'ajoutera à l'effet volume dont l'augmentation (+1,5 milliard d'euros) indique l'absence d'effort accompli sur la maîtrise de la dépense publique par le Gouvernement.

Malgré la volatilité du contexte, nous pouvons miser sur une décélération de l'inflation en 2023, si la récession que nous pressentons se confirme. Il en a toujours été ainsi dans l'histoire économique.

Grosso modo , tous ces crédits sont très évaluatifs. Si les taux remontaient de 10 %, si l'inflation s'accélérait, la France honorerait de toute façon ses engagements.

J'évoquerai maintenant un sujet dont nous avons beaucoup entendu parler cette année : la hausse des crédits des obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation (OATi) et des obligations assimilables du Trésor indexées sur l'indice des prix de la zone euro (OAT€I). De nombreux acheteurs de notre dette ont besoin d'être couverts par l'inflation. La Caisse des dépôts et des consignations est l'un des plus grands propriétaires d'OATi, les intérêts des livrets A sont en partie indexés sur l'inflation. Les OATi offrent une excellente gestion de l'actif et du passif. Le programme, qui porte la réputation d'être trop cher, s'avère utile et neutre sur le long terme. Ainsi, son impact budgétaire est longtemps resté neutre de 1999 à 2013, mais il a généré beaucoup de recettes entre 2013 et 2021, jusqu'à ce que l'inflation nous fasse revenir, cette année, au point zéro.

Un dernier sujet, les prêts garantis par l'État (PGE), pose un problème. Avec la loi d'écoulement, le remboursement aura lieu avec deux ans de décalage par rapport à la première échéance. Or en cas de défaut de paiement, les autres échéances sont payées par la garantie d'État. Le calibrage opéré en loi de finances pour 2022 s'est avéré large. Sur les 3,5 milliards d'euros votés, le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022 prévoit d'annuler 2 milliards d'euros. La somme de 2 milliards est conséquente et nous sommes dans le flou en ce qui concerne cette opération. Il n'est pas interdit de penser qu'à hauteur de 2,48 milliards d'euros pour 2023, le budget se révèle, a contrario , trop optimiste. Aussi, nous avons beaucoup de doutes, et je souhaiterais examiner le calibrage du PGE pour 2023 jusqu'au dernier moment.

À ce stade, je vous propose d'adopter les crédits de cette mission.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - La provision chiffrée en milliards d'euros n'a rien de neutre dans le jeu d'écriture, au moment où le ministre de l'économie demande au Parlement de faire des économies. Et comme le ministre est attentif à l'euro près, il y a même là quelque chose de paradoxal.

M. Patrice Joly . - Le montant de dette à rembourser est sous-estimé. Il reste une part d'incertitude, notamment sur les prévisions de taux et les risques de sinistralité liés aux PGE. Se pose une nouvelle fois la question du désarmement fiscal, que notre groupe a dénoncée cette année. Nous constatons une absence de remise en cause des choix fiscaux par le Gouvernement, ce qui fragilise la situation financière de notre pays.

Certains économistes questionnent la stratégie d'endettement du Gouvernement. Si l'État avait su faire des choix plus judicieux et adaptés, notamment en matière de performance énergétique, il ne se trouverait pas dans cette fragilité financière. C'est paradoxal, mais aujourd'hui, la dette peut être facteur de sécurité budgétaire. Encore convient-il d'avoir une stratégie au regard des besoins d'investissements.

Le rapporteur spécial partage-t-il mon point de vue sur l'absence de vision en matière d'endettement de la part du Gouvernement ?

M. Roger Karoutchi . - M. Joly veut simplement casser le thermomètre, réviser la gestion de la dette publique, or elle atteint les 3 000 milliards d'euros. D'année en année, on regarde le même tableau et j'entends les mêmes choses, que le gouvernement soit de gauche ou macroniste, et on accumule la dette.

Le rôle du Parlement porte historiquement sur l'impôt, le contrôle des finances. Qu'attend donc le Parlement pour prendre une initiative forte afin de réduire la dette ? Alors que la Cour des comptes publie des rapports et que le Parlement débat du budget, il ne se passe rien. Pourquoi ne disons-nous pas : « Stop, nous refusons de continuer à valider le budget, sans propositions offensives concernant la réduction de la dette ! » Klaxonnons, car nous allons dans le mur !

Mme Christine Lavarde , président . - Nous aurons l'occasion de revenir sur le cadre général du PLF lors de la discussion générale.

M. Vincent Segouin . - Le budget est aussi une question de confiance. Or, à un moment, tout peut basculer. En témoigne le Royaume-Uni avec le Brexit. Certains veulent plus d'impôts, mais la France détient le record absolu du taux de prélèvement ! Quand serons-nous unis pour demander une diminution de nos dépenses ? Devenons raisonnables, nous vivons au-dessus de nos moyens. Comment arrêter ce système, cette folie meurtrière du recours à la dette ? La charge de la dette va dépasser le budget de la défense !

M. Michel Canévet . - Je remercie le rapporteur spécial pour sa présentation très pédagogique des conséquences de la dette. Nous avons longuement évoqué la dette et les PGE, mais la mission des engagements financiers de l'État ne se limite pas là. Quel est l'impact de la dette des organismes rattachés à l'État ?

M. Vincent Capo-Canellas . - À propos des PGE, sait-on où nous en sommes par rapport au stock de prêts déjà remboursés par les entreprises en 2022 ? A-t-on établi des prévisions sur les remboursements de 2023 ? Nous gardons en effet à l'esprit une conjonction défavorable, un contexte de quasi-récession.

M. Christian Bilhac . - C'est l'investissement qui trace la voie de l'avenir. Or ici on ne prépare pas l'avenir. En tant que paysan, j'ai appris qu'il convient de dépenser moins que ce qu'on gagne et de toujours mettre une petite part de côté. L'État n'a toujours pas compris cela. Il va falloir supprimer la moitié des ministères non régaliens et tous les doublons de la haute administration, rationaliser le service public au bénéfice des collectivités locales, qui gèrent mieux que l'État.

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - Monsieur Bilhac, les dépenses du budget général s'élèvent à 444 milliards d'euros, financées par un déficit de 159 milliards d'euros, dont le financement nécessite lui-même des émissions de dettes de moyen et long terme de 270 milliards d'euros - qui vient également amortir les dettes précédentes - contre 260 milliards l'an passé. Les émissions de dette représentent donc l'équivalent de plus de la moitié des dépenses. Sans la dette, le budget devient impossible. C'est, pour citer Audiard, une « béchamel infernale ».

Monsieur Capo-Canellas, en 2022, la règle 80/20 s'est appliquée aux PGE : l'enveloppe a été répartie à hauteur de 80 % vers les grosses entreprises et à 20 % vers les moyennes et petites entreprises. Ainsi, le risque de non-remboursement vient principalement des grandes entreprises. Les trésoreries sont abondantes en 2022 malgré l'inflation, nombre d'entreprises ont remboursé leur prêt par anticipation : le risque anticipé a diminué par rapport à la prévision de défaillance initiale, passée de 5,1 % à 4,6 %. Mais c'est sans compter l'année prochaine avec le retour des cotisations Urssaf, le remboursement du PGE, et l'explosion du surcoût énergétique. Dans un contexte si volatile, les prévisions ne semblent toutefois pas si mauvaises. Bien malin celui qui saurait avancer de meilleures prévisions !

Monsieur Canévet, la dette de la SNCF reprise par l'État est gérée par l'Agence France Trésor. La Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) est, elle aussi, gérée par l'Agence France Trésor. D'ailleurs, oui, monsieur Joly, la France a une stratégie de gestion de dette, car elle gère sa dette avec prudence. Avec la Cades, nous faisons de la dette sociale et dans d'autres devises, ce qui permet de diversifier le marché de la dette.

Nous avons la dette la plus liquide au monde, monsieur Karoutchi. C'est notre force. Les marchés étrangers sont toujours intéressés par la dette française, liquide, bien remboursée. La France est la mieux armée. Par comparaison, un exemple : l'Allemagne, après un premier déboire, a raté une émission de dette en octobre dernier. Elle voulait placer 4 milliards de dettes et a dû se contenter de 1,8 milliard à cause de ses taux trop bas. C'est la dette américaine qui est aujourd'hui la dette de référence. Je souligne une nouvelle fois l'excellente gestion de la dette par l'Agence France Trésor.

C'est la remontée des taux qui coûte cher au pays en 2022, mais ce sera pire en 2024 et, si la tendance se confirme, dans trois ou quatre ans, cette mission sera le premier budget, devant celui de l'éducation nationale !

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

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* *

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Agence France Trésor (AFT)

- M. Cyril ROUSSEAU, directeur général ;

- M. Mathieu MARCEAU, chef du bureau Trésorerie.

Direction générale du Trésor

- M. Pierre CHABROL, sous-directeur du financement des entreprises et du marché financier - FINENT ;

- M. Clément ROBERT, chef du bureau du financement et du développement des entreprises - FINENT2 ;

- Mme Adèle CHARTOUNY, adjointe du chef de bureau.

Banque de France

- M. Olivier GARNIER, directeur général des statistiques et des études Internationales ;

- M. Hervé GONSARD, directeur général des services à l'économie et du réseau ;

- M. Paul BRAC de la PERRIÈRE, chargé de mission auprès de la conseillère parlementaire.

Bpifrance

- M. Nicolas DUFOURCQ, directeur général ;

- M. Jean-Baptiste MARIN-LAMELLET, chargé des relations parlementaires.

Société Générale, banque spécialiste en valeurs du Trésor

- Mme Michala MARCUSSEN, cheffe économiste ;

- M. Olivier VION, responsable des marchés de capitaux.

Deutsche Bank, banque spécialiste en valeurs du Trésor

- M. Emmanuel DUCLOS, managing director , dirigeant effectif de la succursale de Paris et responsable des activités Marchés ;

- M. Arnaud LENGELÉ, director ;

- Mme Anne-Sophie BEAUMONT, managing director , responsable de l'activité DCM origination .

Standard & Poor's Global Ratings

- M. Rémy CARASSE, directeur des notations souveraines ;

- Dr Sylvain BROYER, économiste en chef, EMEA ;

- Mme Solange FOUGÈRE, juriste.

M. Éric MONNET, prix du meilleur jeune économiste 2022, professeur à l'École d'économie de Paris.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2023.html


* 1 Il peut toutefois évoluer au fur et à mesure de l'examen du texte.

* 2 Hors remboursements et dégrèvements.

* 3 L'article 123 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose qu'il « est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées "banques centrales nationales", d'accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l'Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres; l'acquisition directe, auprès d'eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite ». Concrètement, la Banque de France ayant l'interdiction d'autoriser l'État à être en découvert, le compte unique du Trésor doit toujours être positif en fin de journée.

* 4 Article 92 de la loi n°2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 .

* 5 L'aide au remboursement est apportée dans la limite d'un taux maximal de 75 % des indemnités de remboursement anticipé, auquel s'ajoute un taux complémentaire maximal de 5 % pour les situations les plus graves.

* 6 Dans le présent rapport, le montant révisé pour 2022 s'entendra du montant révisé indiqué dans les documents budgétaires du projet de loi de finances 2023, auxquels sont ajoutées ou soustraites les ouvertures ou les annulations de crédits proposées dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2022 et du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022.

* 7 Les cinq angles sont les suivants : le système de contrôle des opérations et des procédures internes, l'organisation comptable et du traitement de l'information, les systèmes de mesure des risques et des résultats, les systèmes de surveillance et de maîtrise des risques, et enfin le système de documentation et d'information.

* 8 Selon les résultats de l'audit, repris également dans le rapport annuel d'activité de l'Agence France Trésor pour 2021 .

* 9 Les périodes de travail à distance sont, comme en 2020, source d'incidents.

* 10 D'après les informations figurant dans le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'État » annexé au projet de loi de finances pour 2023 et les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 11 Article 58 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne .

* 12 Avis n° 444 (2019-2020) de M. Albéric de MONTGOLFIER, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 mai 2020 sur le projet de loi portant diverses dispositions urgentes pour faire face aux conséquences de l'épidémie de covid-19.

* 13 Ordonnance n° 2020-1496 du 2 décembre 2020 relative à la centralisation des disponibilités de certains organismes au Trésor et prise en application de l'article 58 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.

* 14 Décret n° 2021-29 du 14 janvier 2021 relatif à la centralisation des disponibilités de certains organismes au Trésor et au régime des dérogations à l'obligation de dépôt au Trésor.

* 15 Le Fonds de garantie des dépôts et de résolution, l'IFP-Énergies nouvelles, le Commissariat à l'énergie atomique, France Compétences, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, Pôle Emploi, l'Institut de France et ses académies, l'Institut national de l'audiovisuel, la Monnaie de Paris, l'EPIC Bpifrance, le Conseil économique, social et environnemental, les autorités publiques indépendantes, l'Agence française d'expertise technique internationale et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.

* 16 Estimation hors rapatriement de la trésorerie de Pôle Emploi. Un arrêté ministériel doit en effet venir fixer les conditions de dépôt des fonds de Pôle Emploi.

* 17 Si on rapport cet encours nominal au PIB, on constatera qu'il a encore davantage diminué, du moins jusqu'en 2019.

* 18 Selon les réponses apportées au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, « l'effet calendaire est la variation du coût budgétaire des opérations d'émission et de rachats de titres à moyen et long terme l'année où elles ont lieu. Cette variation retrace les différences entre les dates, les volumes et les taux des opérations conduites les deux années ».

* 19 Chiffres obtenus en utilisant le déflateur du PIB, et retenus par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2023 : Avis n° HCFP-2022-4 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2023 , 21 septembre 2022.

* 20 Annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme BASCHER , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François HUSSON.

* 21 Le taux apparent de la dette publique mesure le rapport entre le montant de la charge de la dette au titre d'une année N et le stock de dette de l'année N-1.

* 22 « Finances publiques : une inflation qui rapporte ? », billet de blog d'Agnès Bénassy-Quéré, cheffe économiste de la Direction générale du Trésor, 5 juillet 2022.

* 23 Réponses de l'Agence France Trésor au questionnaire du rapporteur spécial.

* 24 Selon les chiffres retenus dans le deuxième projet de loi de finances rectificatives pour 2022.

* 25 « La gestion de la dette publique et l'efficience du financement de l'État par l'Agence France Trésor », Cour des comptes. Communication à la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale, février 2022.

* 26 Rapport sur la dette des administrations publiques, annexé au projet de loi de finances pour 2023.

* 27 Il s'agit des primes à l'émission. Pour une description détaillée de ce dispositif, se reporter à l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme BASCHER , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François HUSSON.

* 28 Agence France Trésor, Bulletin mensuel du mois de septembre 2022 .

* 29 Pour une discussion détaillée du recours par l'Agence France Trésor aux BTF durant l'année 2020, se reporter à l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme BASCHER , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François HUSSON.

* 30 Chiffre définitif.

* 31 Compte général de l'État . Annexe au projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes pour l'année 2021.

* 32 Le taux de couverture moyen est égal à la moyenne pour chaque adjudication du rapport entre volume demandé et volume servi, pondéré par le volume servi.

* 33 Selon les données inscrites dans le rapport annuel d'activité de l'Agence France Trésor pour l'année 2020 et les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 34 La Belgique, qui était le cinquième émetteur de la zone euro de 2016 à 2020, a été détrônée par les Pays-Bas, avec 58 milliards d'euros émis en 2021.

* 35 Directive 2002/47/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 juin 2002 concernant les contrats de garantie financière.

* 36 International Capital Market Association Européen Repo Market Survey, n° 40, mars 2021.

* 37 Voir par exemple : « Cette pénurie de titres qui contrarie la transmission de la politique monétaire de la BCE » , Les Echos, Guillaume Benoit, 28 octobre 2022.

* 38 Le rapporteur spécial avait consacré un plus ample développement aux agences de notation dans le cadre de l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme BASCHER , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François HUSSON.

* 39 Il s'agirait toutefois d'un PSC réformé, dont le contenu n'est pas encore connu au moment de l'écriture de ce rapport. Il serait notamment question de l'introduction d'un seuil intermédiaire de dette publique de 90 % du PIB.

* 40 Fiscal Monitor. « Helping People Bounce Back », octobre 2022.

* 41 Haut Conseil des finances publiques. Avis n° HCFP-2022-4 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2023 , 21 septembre 2022.

* 42 Réponses de l'Agence France Trésor au questionnaire du rapporteur spécial.

* 43 Il s'agit de l'indice quotidien TEC-10, « taux de l'échéance constante 10 ans », correspondant au taux de rendement actuariel d'une valeur du Trésor fictive dont la durée de vie serait à chaque instant égale à dix années.

* 44 Au 1 er novembre, 1 dollar = 1,01 euro. Au moment de l'écriture de ce rapport, le pic a été atteint le 27 septembre 2022, où 1 dollar s'échangeait contre 1,04 euro. Pour rappel, entre 2019, le dollar valait environ 0,9 euro, avant de baisser pour passer sous 0,85 euro fin 2020, et de remonter à partir de mai-juin 2021 jusqu'aux niveaux actuels.

* 45 Selon les termes de M. Éric Monnet, auditionné par le rapporteur spécial.

* 46 Annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial M. Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 163 (2021-2022) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022, par M. Jean-François Husson.

* 47 Le taux implicite de la dette correspond à la charge de la dette en comptabilité maastrichtienne divisée par l'encours de dette en début d'année.

* 48 La référence d'inflation est prise en fin d'exercice en comptabilité maastrichtienne.

* 49 Par convention, à déficit constant.

* 50 Pour une discussion plus détaillée de ces obligations, se reporter au rapport d'information n° 773 (2021-2022) de M. Jérôme Bascher, fait au nom de la commission des finances.

* 51 Agence France Trésor, « OAT verte. Rapport d'allocation et de performance 2020 ».

* 52 Communiqué de presse de l'Agence France Trésor en date du 30 août 2022 : « OAT verte : révision du montant des dépenses vertes éligibles pour l'année 2022 ».

* 53 Voir par exemple le débat du 10 octobre 2022 sur la dette publique organisé à l'Assemblée nationale .

* 54 Réponses d'un spécialiste en valeurs du Trésor au questionnaire du rapporteur général.

* 55 Rapport sur la dette des administrations publiques annexé au PLF 2023, pp. 22 à 24.

* 56 Professeur à l'école d'économie de Paris et prix du meilleur jeune économiste 2022.

* 57 Lois organique n° 2020-991 et ordinaire n° 2020-992 du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et l'autonomie.

* 58 Annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme BASCHER, dans le rapport général n° 163 (2021-2022) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022, par M. Jean-François HUSSON.

* 59 Les crédits ouverts sur le programme 369 alimentent le programme 732 du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », qui alimente en retour la Caisse de la dette publique.

* 60 Réponses de Bpifrance au questionnaire du rapporteur spécial.

* 61 Assurance-crédit ; garantie du risque économique ; réassurances de court terme Cap Francexport et Cap Francexport + ; stabilisation de taux.

* 62 Réponses de la Direction générale du Trésor au questionnaire du rapporteur spécial.

* 63 Réponses de Bpifrance au questionnaire du rapporteur spécial.

* 64 Il existe depuis janvier 2022 une possibilité de restructuration amiable des PGE via la médiation du crédit , peu utilisée (450 dossiers ont été restructurés) car elle entrave, par la suite, les capacités d'emprunts de l'entreprise, classée en « non performing loans ».

* 65 Voir le tome I du présent rapport sur « le budget de 2023 et son contexte économique et financier ».

* 66 Baromètre Bpifrance - Rexecode, 29 septembre 2022.

* 67 Chiffres Banque de France, octobre 2022.

* 68 Cour des comptes, Le budget de l'État en 2019 (résultats et gestion) , 28 avril 2020.

* 69 Article 35 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 70 Selon les données inscrites dans le projet annuel de performance de la mission « Gestion des finances publiques » , annexé au projet de loi de finances pour 2023.

* 71 En réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 72 Article 26 de la loi n°2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 73 C'est cette terminologie qui est retenue pour 2022 puisque l'entrée en vigueur de la nouvelle maquette n'interviendrait qu'en 2023.

* 74 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 .

* 75 Loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020 .

* 76 Sauf accord du bénéficiaire.

* 77 Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021de finances pour 2022 .

* 78 Jusqu'en 2022.

* 79 À partir du PLF 2023.

* 80 Explications supra.

* 81 Le deuxième projet de loi de finances rectificatives pour 2022 prévoit en effet l'annulation de 11,4 millions d'euros de crédits de paiement.

* 82 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 83 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 84 Rapport spécial n° 163 (2021-2022) de M. Jérôme Bascher sur la loi de finances pour 2022, annexe n° 13 « Engagements financiers de l'État » au rapport général.

* 85 Réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial. Ce chiffre est établi avant modification du périmètre du compte de concours financiers, qui ne serait juridiquement effective qu'en cas d'adoption du projet loi de finances pour 2023.

* 86 Rapport spécial n° 138 (2020-2021) de M. Jérôme Bascher sur la loi de finances pour 2021, annexe n° 13 « Engagements financiers de l'État » au rapport général.

* 87 La Cour des comptes, dans sa note d'exécution budgétaire de 2021 sur la loi de finances pour 2020, avait d'ailleurs également mis en avant les anomalies du compte de concours financier. Voir note d'exécution budgétaire, Compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », Cour des comptes, 2021.

* 88 Pour une discussion détaillée des principes de fonctionnement de la Zone franc, se reporter au rapport d'information n° 729 (2019-2020) de Mme Nathalie Goulet et M. Victorin Lurel, fait au nom de la commission des finances, déposé le 30 septembre 2020.

* 89 Promulguée et désormais loi n° 2021-108 du 3 février 2021 autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l'Union monétaire ouest-africaine.

* 90 Dans les faits, il arrivait fréquemment que cette part soit dépassée.

* 91 Pour une description détaillée du contenu, du contexte et des conséquences de ce nouvel accord de coopération, se reporter au rapport n° 289 (2020-2021) de M. Jérôme Bascher, sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre la France et l'UMOA, fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 janvier 2021.

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