II. LA LISIBILITÉ ET LA SOUTENABILITÉ DES CRÉDITS DE LA MISSION À MOYEN TERME SONT AFFECTÉES PAR LA HAUSSE TENDANCIELLE DE CERTAINES DÉPENSES IMPORTANTES ET PAR LE DÉFICIT DE COHÉRENCE ET D'ÉVALUATION DES CRÉDITS ET DES DÉPENSES FISCALES DE LA MISSION

A. LES DÉPENSES LIÉES AU PLAN FRANCE TRÈS HAUT DÉBIT, À LA COMPENSATION CARBONE ET ÀUX COMPENSATIONS VERSÉES À LA POSTE CONNAISSENT UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE, SANS RÉPONDRE À TOUS LES BESOINS ACTUELS ET À VENIR

Hors effets de la crise et hors programme 367, la hausse des dépenses de la mission (de 331,6 millions d'euros en CP) repose essentiellement sur l'augmentation des dépenses d'intervention (de 336,8 millions d'euros en CP).

Ces dépenses d'intervention de la mission sont portées par trois postes dynamiques : deux dépenses de guichet, d'une part, le PFTHD et la compensation carbone et, d'autre part, les compensations versées à La Poste .

La consommation des CP du programme 343 liés au PFTHD 7 ( * ) s'établit à 435,5 millions d'euros en 2021 , contre 225 millions d'euros en 2020, en lien avec le déploiement effectif des projets de réseaux d'initiative publique (RIP).

Le coût du dispositif de compensation carbone (programme 134) connaît également une hausse importante et s'établit à 391,2 millions d'euros en 2021, en hausse de 125 millions d'euros par rapport à 2020 . Cette évolution s'explique par l'augmentation du prix de la tonne de CO2 en 2019 par rapport à 2018, qui a largement surcompensé la réduction des consommations électriques des entreprises concernées dans le contexte de la crise sanitaire.

Les deux dispositifs précités constituent des dépenses de guichet ; en conséquence, leur augmentation annuelle relève d'une évolution tendancielle de la dépense , à politique inchangée.

S'agissant du PFTHD , le profil de la consommation des crédits est étroitement lié aux projets portés par les collectivités territoriales et à leur exécution opérationnelle, ce qui rend leur pilotage difficile. Néanmoins, les rapporteurs spéciaux constatent qu'environ 1,7 milliard d'euros de crédits de paiement resteront à être décaissés sur le programme 343 sur les 2,5 milliards d'euros ouverts, selon un rythme qui est régulièrement, comme en 2021 et 2020, inférieur à la prévision en LFI . Ainsi, le montant exécuté en 2021 est inférieur à celui des CP ouverts par la LFI pour 2021, qui était de 609,3 millions d'euros. Au surplus, les rapporteurs spéciaux constatent que si la dynamique de déploiement est positive dans les zones financées par le plan FTHD, des sujets d'inquiétude doivent alerter dans les zones non-RIP. Dans les zones très denses (ZTD), seulement 239 000 nouvelles prises FttH (fibre optique jusqu'à l'abonné) ont été déployées sur le premier semestre 2021. En juillet dernier, aucune zone très dense n'était couverte en fibre à plus de 97 % et 5 villes qui avaient été couvertes auparavant à plus de 95 % en fibre ne l'étaient plus. En zone AMII (appel à manifestation d'intention d'investissement), les opérateurs privés n'atteignent aucun des engagements fixés par le Premier ministre, ce qui inquiète les rapporteurs spéciaux. De surcroît, la dynamique de déploiement des opérateurs ralentit considérablement : les zones AMII rendaient raccordables 1 057 locaux au quatrième trimestre 2020, contre 584 000 au premier trimestre 2021 et 474 000 au second trimestre. Les rapporteurs spéciaux considèrent que l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) doit se saisir de son pouvoir de sanction, afin de permettre d'assurer la complétude des réseaux.

S'agissant de la compensation carbone , les rapporteurs spéciaux soulignent que dans le cas où le coût de la tonne de CO2 se maintenait aux niveaux actuels - comme le prévoit d'ailleurs la direction générale de l'énergie et du climat, le dynamisme de cette dépense perdurera. Selon la Cour des comptes 8 ( * ) , son coût pourrait s'établir à plus de 700 millions d'euros en 2023 et à plus de 1 milliard d'euros à partir de 2024.

Enfin, la compensation versée à La Poste au titre de sa mission de transport postal de presse atteint 137,8 millions d'euros en 2021 (programme 134), en hausse de 44,1 % par rapport à 2020. En effet, 50 millions d'euros de crédits ont été ouverts en cours d'année et ont été versés, en plus des 87,8 millions d'euros prévus en LFI en lien avec la réforme du transport postal de presse. Si cette hausse est liée à la réforme et au système de versement de la compensation et ne se reproduira pas en 2022, les différentes compensations versées à La Poste sont en hausse continue, au titre du service postal universel (520 millions d'euros) d'une part, et au titre de sa mission d'aménagement du territoire (174 millions d'euros au total sur les années 2020 à 2022), d'autre part. Ces compensations, pour légitimes qu'elles soient, représentent une charge en augmentation constante pour la mission.


* 7 Le PFTHD est financé par le programme 343 mais est également abondé par d'autres biais : abondement initial du PIA 1 de 900 millions d'euros et ouverture de 240 millions d'euros de crédits en LFI dans le cadre du Plan de relance.

* 8 Cour des comptes, Note d'analyse de l'exécution budgétaire, Mission « Économie », 2021.

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