EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 6 juillet 2022, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Marc Todeschini sur le projet de loi n° 525 (2021-2022) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Autorité bancaire européenne relatif au siège de l'Autorité bancaire européenne et à ses privilèges et immunités sur le territoire français.

M. Christian Cambon, président . - Nous examinons à présent le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Autorité bancaire européenne relatif au siège de l'Autorité bancaire européenne et à ses privilèges et immunités sur le territoire français, sur le rapport de notre collègue Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur . - Le système européen de surveillance a connu une réforme d'ampleur après la crise financière de 2008 qui a mis en exergue de graves lacunes. Sur la base du rapport Larosière, la Commission européenne a formulé plusieurs propositions pour pallier les dysfonctionnements identifiés, et ainsi mieux protéger les citoyens, rétablir la confiance en notre système financier, et prévenir tout risque susceptible de porter atteinte à sa stabilité.

Le Parlement européen a adopté ces propositions en septembre 2010. L'une d'elles consistait en la réforme du cadre de supervision financière existant, qui a donné naissance au Comité européen du risque systémique ainsi qu'à trois autorités européennes de surveillance que sont, pour le domaine assurantiel, l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, qui siège à Francfort ; pour les marchés financiers, l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF), située à Paris ; et pour le secteur bancaire, l'ABE, dont le siège est également installé dans notre capitale.

Le rôle de l'ABE est d'améliorer le fonctionnement du marché intérieur en garantissant une surveillance et une réglementation appropriées, efficaces et harmonisées à l'échelle de l'Union. L'ABE est indépendante, mais rend des comptes au Parlement européen, au Conseil de l'Union européenne et à la Commission européenne. Les autorités de régulation nationales -comme l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en France - participent aux prises de décisions.

Le siège de l'ABE était initialement situé à Londres, au coeur de la City. La décision prise par le Royaume-Uni de quitter l'Union européenne entraînait de facto le départ de cette agence européenne de son territoire. En novembre 2017, Paris a été choisie pour accueillir le siège de l'ABE, par tirage au sort face à Dublin, après trois tours de scrutin non concluants. L'Autorité s'est donc installée dans le quartier de La Défense, en mars 2019, avec ses quelque 200 employés, qui avaient exprimé leur préférence pour un déménagement à Paris ou à Vienne.

L'autre conséquence notable du Brexit fut la perte du passeport financier européen pour les entreprises du secteur - gérants d'actifs, banques et assurances - établies au Royaume-Uni, synonyme pour elles de la fin de l'accès au marché intérieur pour la vente de leurs produits et services. Les institutions financières ayant leur siège européen à Londres ont donc été contraintes de délocaliser des milliers de salariés au sein de l'Union européenne. D'après les études réalisées sur le sujet, Paris a attiré entre 2 800 et 4 500 emplois relocalisés, faisant de notre capitale la destination privilégiée devant Francfort et Dublin.

J'en viens à présent aux stipulations de l'accord qui sont conformes aux dispositions du protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l'Union européenne annexé au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Ces dispositions n'appellent aucune modification de notre droit national.

Le présent accord, de facture classique, est comparable aux accords de même nature récemment conclus par la France. Il permettra d'assurer le bon fonctionnement de l'ABE sur le sol français, ainsi que son indépendance.

L'accord prévoit les privilèges diplomatiques habituels tels que l'inviolabilité des locaux de l'autorité, de ses communications et de ses archives. À ce titre, il convient de préciser que la France a pris un engagement financier vis-à-vis de l'ABE pour l'installation de son siège dans la capitale, d'un montant de 8,5 millions d'euros sur neuf ans. D'autres villes européennes avaient proposé une prise en charge intégrale du loyer de l'ABE pour attirer l'agence sur leur territoire.

L'immunité de juridiction est conférée ès qualités aux membres du personnel, pour lesquels l'entrée sur le territoire français est également facilitée.

Sur le plan fiscal, l'autorité est exonérée d'impôts directs et indirects et de droits de douane sur les biens destinés à son usage officiel. Quant aux membres du personnel, ils bénéficient d'une exemption d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, à l'instar des fonctionnaires de l'Union européenne.

Enfin, l'accord comporte une disposition originale par laquelle le Gouvernement s'engage à développer une offre de scolarisation multilingue et à lancer une procédure d'agrément en vue de la création d'une école européenne en région parisienne. Cet établissement a ouvert ses portes à Courbevoie, en 2019 ; le tiers de ses élèves sont des enfants de membres du personnel d'institutions internationales, exerçant pour l'essentiel à l'ABE.

Pour conclure, bien que plusieurs dispositions de cet accord s'appliquent d'ores et déjà en vertu du protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l'Union européenne, la France a un double intérêt à le ratifier : d'une part, celui d'afficher notre volonté et notre capacité d'accueillir des institutions internationales sur notre sol en leur offrant les meilleures conditions possibles, et d'autre part, celui de favoriser l'image et l'attractivité de la place financière parisienne, dont les retombées en termes d'emplois et de recettes pour l'État peuvent s'avérer importantes.

En conséquence, je préconise l'adoption de ce projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale 17 février dernier. Son examen en séance publique au Sénat est prévu le mardi 19 juillet, selon la procédure d'examen simplifié, ce à quoi la conférence des présidents, de même que votre rapporteur, a souscrit.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.

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