B. UNE POLITIQUE CONTRACTUELLE DE L'ÉTAT DANS LES TERRITOIRES EN COURS DE REFONTE
1. Des crédits CPER toujours partagés entre le programme 112 et la mission « Plan de relance »
a) Les crédits CPER figurent en partie sur la mission « Plan de relance », mais devraient vraisemblablement être gérés par le gestionnaire du programme 112
Le programme 112 porte les crédits de trois générations de CPER , dont deux, les CPER 2007-2014 et ceux 2015-2020, sont clôturés et ne portent donc plus d'AE.
(1) La poursuite de l'exécution des CPER 2015-2020
L'État a contractualisé 12,6 milliards d'euros dans les CPER et CPIER métropolitains 2015-2020. Le taux d'engagement des AE fin 2020 est de 77 %, soit 9,8 milliards d'euros. Le taux de paiement est de 45 %, soit 5,7 milliards d'euros de CP versés. Le taux prévisionnel d'engagement des AE à fin 2021 est de 86 %, soit 10,9 milliards d'euros.
Exécution prévisionnelle des CPER 2015-2020 au 31 décembre 2021
(en milliards d'euros et %)
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
L'exécution, en 2020, des CPER 2015-2020 a dû tenir compte de deux évolutions. D'une part, les CPER ultramarins ont été clôturés plus tôt que prévu et remplacés par les contrats de convergence et de transformation (CCT) 2019-2022, faisant l'objet d'un suivi distinct réalisé par le ministère des Outre-mer. D'autre part, le volet « mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 financé notamment par l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) a été prolongé jusqu'en 2022, et les crédits CPER seront transférés au plan de relance.
Concernant le volet territorial des CPER 2015-2020, soit 894 millions d'euros, auquel contribue le FNADT, son taux d'exécution en décembre 2021 devait s'élever à 84 % , soit une exécution correcte, dans la mesure où les CP devraient continuer à être décaissés en 2022. Les volets territoriaux des CPER recouvrent cinq axes principaux : le soutien aux territoires fragiles (quartiers de la politique de la ville, zones rurales, petites villes) ; les services au public et le numérique ; les coopérations territoriales (métropoles et coopérations transfrontalières) ; les dynamiques de développement local (projets culturels notamment) ; l'ingénierie territoriale.
(2) Une dispersion des crédits CPER qui nuit à la lisibilité de la politique contractuelle entre l'État et les régions
Comme indiqué plus haut et comme en 2021, une partie des crédits CPER sont portés par la mission « plan de relance ». Ce devrait toutefois être la dernière année, ces crédits devant financer en 2021 et 2022 des projets déjà prêts et immédiatement finançables, justifiant ainsi leur placement dans une autre mission. En tout état de cause, étant donnée la différence de temporalité entre des contrats de plan s'étalant sur cinq ans et le plan de relance, l'intégralité des crédits devrait revenir au sein du programme 112 en 2023 . Le rapporteur spécial sera attentif sur ce point.
Évolution des crédits des CPER et CPIER
(en CP en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
La proportion de crédits CPER (en CP) hors programme 112 est par ailleurs plus importante en 2022 qu'en 2021, en parallèle d'une hausse globale des crédits CPER, laquelle n'est pas visible si l'on prend en compte uniquement le programme 112.
Toutefois, les crédits demandés en plan de relance ne correspondent qu'en partie à des crédits additionnels par rapport à ceux qui auraient pu être compris dans le programme 112 , du fait de l'élargissement du périmètre des CPER qui implique un abondement de crédits plus importants que les années précédentes.
Le choix de placer une partie des crédits CPER parmi la mission « plan de relance » peut être discuté et nuit à la lisibilité de la politique contractuelle de l'État, tout en répondant à un impératif de déploiement plus rapide des CPER en finançant un nombre plus important de projets au cours des deux premières années d'exécution. Dès lors, le rapporteur spécial veillera à ce que le taux d'exécution des deux prochaines années soit effectivement supérieur au taux moyen sur les précédents CPER, justifiant ainsi le transfert vers le plan de relance.
Ces crédits ont été transférés vers le programme 112 en gestion . Celui-ci a bénéficié d'un transfert pour un montant de 115,5 millions d'euros en AE et de 44,6 millions d'euros en CP en 2021, dont 77,6 millions d'euros en AE et 19,69 millions d'euros en CP pour les CPER 2021-2027.
Selon les informations transmises au rapporteur spécial, ce transfert est justifié par la nécessité de simplifier la gestion de ces crédits, relevant pour l'essentiel du FNADT et pour lequel des budgets opérationnels de programme (BOP) régionaux et interrégionaux dédiés existaient sur le programme 112.
Se pose également la question de l'articulation des deux dispositifs en termes de gouvernance . Tous les projets financés dans le cadre des CPER par les crédits du plan de relance seront définis par le comité de suivi du contrat de plan , coprésidé par le président de région et le préfet. Les comités de suivi régionaux du plan de relance , bien que rassemblant les mêmes acteurs, ne devraient jouer aucun rôle de programmation, de même que le sous-préfet à la relance. De ce point de vue, l'articulation en 2022 entre les crédits CPER du programme 112 et ceux de la mission « plan de relance » sera identique à celle établie en 2021.
b) L'essor de la nouvelle génération de CPER, élargie à de nouveaux domaines
Excepté la Corse et la Normandie, l'ensemble des accords régionaux de relance 2021-2022 et les protocoles d'accord CPER 2021-2027 ont fait l'objet d'une signature entre l'État et les régions avant les élections régionales de juin 2021. La signature définitive des CPER 2021-2027 devrait quant à elle intervenir d'ici la fin de l'année 2021 .
S'agissant du programme 112 , 998,6 millions d'euros ont été contractualisés dans les CPER et CPIER 2021-2027, et 155 millions d'euros au titre du plan France relance.
Répartition régionale des crédits contractualisés sur le programme 112 dans le cadre des CPER 2021-2027
(en euros)
Montants contractualisés (2021-2027) |
Montant plan de relance (2021-2022) |
Montant total |
|
Auvergne - Rhône-Alpes |
60 703 919 |
19 281 081 |
79 985 000 |
Bourgogne - Franche-Comté |
53 925 081 |
5 318 919 |
59 244 000 |
Bretagne |
67 465 414 |
5 318 919 |
72 784 333 |
Centre - Val de Loire |
39 762 748 |
5 318 919 |
45 081 667 |
Corse |
14 545 414 |
5 318 919 |
19 864 333 |
Grand Est |
79 359 053 |
13 297 297 |
92 656 350 |
Hauts-de-France |
71 505 642 |
26 594 595 |
98 100 237 |
Ile-de-France |
18 255 414 |
5 318 919 |
23 574 333 |
Normandie |
44 920 748 |
5 318 919 |
50 239 667 |
Nouvelle-Aquitaine |
80 964 038 |
7 978 378 |
88 942 417 |
Occitanie |
75 823 998 |
5 318 919 |
81 142 917 |
Pays de la Loire |
26 696 248 |
5 318 919 |
32 015 167 |
Provence-Alpes-Côte-D'azur |
25 239 369 |
13 297 297 |
38 536 667 |
Sous-total CPER |
659 167 087 |
123 000 000 |
782 167 087 |
CPIER Alpes |
38 332 000 |
7 168 000 |
45 500 000 |
CPIER Jura |
17 972 667 |
2 944 000 |
20 916 667 |
CPIER Massif central |
47 665 333 |
7 168 000 |
54 833 333 |
CPIER Pyrénées |
31 034 667 |
5 632 000 |
36 666 667 |
CPIER Vosges |
20 306 000 |
2 944 000 |
23 250 000 |
CPIER Garonne |
1 464 000 |
1 536 000 |
3 000 000 |
CPIER Loire |
3 309 333 |
1 024 000 |
4 333 333 |
CPIER Rhône - Saône |
9 196 000 |
2 304 000 |
11 500 000 |
CPIER Vallée de la Seine |
12 154 667 |
512 000 |
12 666 667 |
CPIER Vallée du Lot |
3 065 333 |
768 000 |
3 833 333 |
Sous-total CPIER |
184 500 000 |
32 000 000 |
216 500 000 |
Total général |
843 667 087 |
155 000 000 |
998 667 087 |
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Le périmètre de contractualisation est par ailleurs élargi à de nouveaux volets , en parallèle des thématiques classiques que sont le développement économique, la transition écologique, la recherche ou l'enseignement supérieur, qui seront présentes dans l'ensemble des CPER.
Le sport et la culture devraient désormais être mieux identifiés dans les CPER, notamment pour articuler davantage l'action de l'État et du conseil régional dans ces domaines, en s'appuyant sur l'Agence nationale du Sport ou le PIA 4 régionalisé.
De nouveaux volets intégreront en outre les CPER : la santé, l'agriculture, la mer et le littoral, l'éducation et la jeunesse, l'égalité entre les femmes et les hommes .
Le rapporteur spécial rappelle qu'il avait insisté dans son rapport précédent sur l'impérieuse nécessité pour la nouvelle génération de CPER de comprendre un volet dédié à l'accès au soin afin de coordonner l'action des différents intervenants au niveau régional . Il se réjouit que cette recommandation trouve sa place dans la prochaine génération de CPER.
Du fait du plan de relance, le volet cohésion des territoires est renforcé , notamment via la mobilisation des programmes d'intervention déployés par l'Agence nationale de cohésion des territoires. Une partie des crédits CPER devrait concerner plus particulièrement la revitalisation des villes moyennes, des petites villes et des zones rurales , qui est un enjeu majeur auquel les différents dispositifs existants, en particulier le programme Action coeur de ville, n'ont pas permis de remédier.
Les documents budgétaires précisent que les projets qui n'auront pas pu être financés dans le cadre du CPER 2015-2020 pourront être financés par le plan de relance ou les CPER 2021-2027.
2. La contractualisation au niveau infra-régional passe désormais par les contrats de relance et de transition écologique
a) Le cadre des CRTE : des contrats ayant vocation à rassembler les contrats existants
Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ont été créés en 2021, émanation des contrats de cohésion territoriale prévus par la loi du 22 juillet 2019 portant création de l'ANCT 1 ( * ) .
Les CRTE ont vocation à être le seul instrument contractuel entre l'État et les collectivités locales , à l'exception des CPER qui demeurent au niveau régional.
Ils doivent regrouper l'ensemble des contrats signés entre l'État et les collectivités , comme les contrats de ville ou de ruralité, mais aussi les programmes des différents ministères, et leurs partenaires, comme Action coeur de ville, Petites villes de demain, France très haut débit ou Territoires d'industrie. Ils sont également un des outils principaux de la territorialisation du plan de relance lancé en 2021.
En octobre 2021, 843 périmètres CRTE ont été définis , dont 671 portés à l'échelle d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et 172 à l'échelle de groupements d'EPCI à fiscalité propre. En date du 20 septembre 2021, 225 CRTE ont été signés et 377 devraient l'être d'ici la fin de l'année.
Répartition des 843 CRTE signés en octobre 2021
Source : ANCT
Le rapporteur spécial se félicite de la simplification permise par ces contrats. En revanche, à la différence des CPER, aucune enveloppe de crédits n'est dédiée aux CRTE , sur le programme 112 ou sur d'autres missions.
Les documents budgétaires indiquent que « l'ensemble des crédits État, existants ou à venir, ont vocation à être mis au profit des CRTE ». Le rapporteur spécial le regrette, considérant notamment que toutes les dotations de l'État ne doivent pas être entièrement absorbées par les CRTE. En particulier la dotation d'équipement des territoires ruraux doit rester un instrument financier souple de financements annuels des projets communaux et intercommunaux . Par ailleurs, il insiste sur la nécessité de garantir aux élus une visibilité pluriannuelle des financements dans la construction et la mise en oeuvre des CRTE , sur le modèle des contrats de ruralité.
b) Le rôle de l'ANCT dans la mise en place des CRTE
Afin d'aider les collectivités à conclure un CRTE, l'ANCT apporte un concours aux territoires pour l'élaboration des CRTE. Au 20 septembre 2021, 364 territoires ont bénéficié d'un accompagnement , dont 253 par l'ANCT.
Les collectivités peuvent également être accompagnées par les partenaires de l'ANCT : 54 l'ont été par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) et 57 par l'Agence de la transition écologique (ADEME).
La collectivité peut demander un accompagnement de l'ANCT et des opérateurs partenaires, pour l'appuyer notamment dans la réalisation du diagnostic de territoire ou la définition des enjeux prioritaires et la mobilisation des acteurs du territoire.
Les projets liés à l'élaboration des CRTE représentent plus de la moitié (52 %) des projets accompagnés par l'ANCT en 2021.
* 1 Loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une l'Agence nationale de la cohésion des territoires.