Rapport général n° 163 (2021-2022) de M. Bernard DELCROS , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2021

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N° 163

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 6b

COHÉSION DES TERRITOIRES - AMÉNAGEMENT DES TERRITOIRES

(Programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État »)

Rapporteur spécial : M. Bernard DELCROS

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

Le présent rapport porte sur deux programmes de la mission « Cohésion des territoires » : les programmes 112 « impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « interventions territoriales de l'État » .

Ces derniers représentent un total de 258,8 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 282,3 millions d'euros en crédits de paiement (CP), auxquels s'ajoutent 631 millions d'euros au titre des dépenses fiscales associées .

I. UNE POLITIQUE CONTRACTUELLE DE L'ÉTAT DANS LES TERRITOIRES EN COURS DE REFONTE

A. LE FINANCEMENT DES CONTRATS DE PLAN ÉTAT-RÉGIONS (CPER) BROUILLÉ PAR UNE INTÉGRATION D'UNE PARTIE DES CRÉDITS AU PLAN DE RELANCE

Comme en 2021, une partie des crédits CPER pour 2022 sont portés par la mission « plan de relance ». S'agissant du programme 112, 998,6 millions d'euros devraient être contractualisés dans les CPER sur l'ensemble de la période 2021-2027, et 155 millions d'euros au titre du plan France relance. Pour la seule année 2022, les montants accordés aux CPER sont en hausse pour s'établir à 137 millions d'euros .

Le choix de répartir les crédits CPER entre deux missions « plan de relance » et « cohésion des territoires » peut être discuté et complexifie la politique contractuelle de l'État , bien que répondant à un impératif de déploiement plus rapide des CPER.

B. UN DÉPLOIEMENT DES CONTRATS DE RELANCE ET DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE ACCOMPAGNÉ PAR L'AGENCE NATIONALE DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES (ANCT)

Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ont été créés en 2021. En octobre 2021, 843 périmètres CRTE ont été définis, dont 671 portés à l'échelle d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. 225 CRTE ont été signés et 377 devraient l'être d'ici la fin de l'année.

Afin d'aider les collectivités à conclure un CRTE, l'ANCT apporte un concours aux territoires pour leur élaboration. Au 20 septembre 2021, 364 territoires ont bénéficié d'un accompagnement , dont 253 par l'ANCT. Les CRTE représentent plus de la moitié (52 %) des projets accompagnés par l'ANCT en 2021 .

II. UNE STABILITÉ DES MONTANTS DÉDIÉS À L'INGÉNIERIE LOCALE AU TRAVERS DE L'ANCT

A. UNE STABILITÉ DES CRÉDITS EN 2022 SUITE AU DOUBLEMENT DES MONTANTS CONSACRÉS À L'INGÉNIERIE LOCALE EN 2021

Le montant de la subvention pour charges de service public (SCSP) de l'ANCT a été porté à 61 millions d'euros en 2021 pour permettre notamment le doublement du montant de l'ingénierie destinée à appuyer des projets sur mesure portés par les territoires, passé de 10 millions d'euros à 20 millions d'euros. Cette hausse est maintenue en 2022, ce qui répond à l'enjeu crucial pour les territoires ruraux que constitue le soutien à l'ingénierie .

Le champ d'action de l'agence s'est en parallèle étendu, à travers le déploiement de ses programmes dans les territoires, et d'autre part à travers la forte sollicitation de l'ANCT pour le déploiement de plusieurs dispositifs du plan de relance en 2021 et 2022 et la mise en place des CRTE.

B. UN RÔLE CENTRAL DE L'ANCT DANS LE DÉPLOIEMENT DES PROGRAMMES À DESTINATION DES TERRITOIRES RURAUX

1. De nombreuses mesures de l'Agenda rural sont portées par l'ANCT

Le déploiement postérieur à la création de l'ANCT des mesures de l'Agenda rural a également contribué à accroître les besoins de l'agence pour soutenir l'ingénierie locale.

D'après l'ANCT, sur les 181 mesures de l'Agenda rural, 92 ont été réalisées et 77 sont en cours de réalisation . Depuis le 1 er janvier 2020, 702 projets ont été accompagnés par l'agence. Cet accompagnement a revêtu plusieurs formes : dans près de la moitié des cas (46 %), le soutien de l'ANCT est en réalité passé par la mobilisation d'un ou plusieurs prestataires externes, et un quart des projets par la mobilisation des partenaires de l'agence. Pour 20 % des projets, l'ANCT a directement versé une subvention au porteur de projet, l'expertise interne de l'agence n'ayant concerné que 8 % des projets.

2. Le programme « petites villes de demain », une réelle avancée pour les territoires ruraux ?

Le programme Petites villes de demain, lancé au 1 er octobre 2020, complète utilement le programme Action coeur de ville. Près de 1 600 communes de moins de 20 000 habitants ont été sélectionnées et seront accompagnées par le programme. En octobre 2021, plus de 850 communes ont signé leur convention d'adhésion.

Sur la période 2021-2026, près de 3 milliards d'euros sont prévus pour Petites villes de demain, au travers de crédits de droit commun et de crédits « relance ». Dans le cadre du PLF 2022, le cofinancement par l'État des recrutements de chefs de projets « Petites villes de demain » bénéficiera d'une partie des 19 millions d'euros prévus sur le programme 112 pour la mise en oeuvre de l'Agenda rural, qui financeront également le recrutement de volontariat territoriaux en administration.

Le rapporteur spécial se réjouit de la mise en oeuvre de ce nouveau programme, qui s'adresse aux petites villes et aux bourgs-centres, car ils constituent un échelon territorial crucial et ne doivent pas être les oubliés de la politique de l'aménagement du territoire.

C. LES RÉSEAUX DES MAISONS FRANCE SERVICES : UNE MISE EN oeUVRE QUI S'ACCÉLÈRE MAIS REPOSE EN GRANDE PARTIE SUR LES FINANCEMENTS DES COLLECTIVITÉS

En 2022, les crédits dédiés aux maisons France Services augmentent de 8 millions d'euros, pour atteindre 36,4 millions d'euros en AE et en CP, contre 28,3 millions d'euros en 2021. Actuellement, 1 745 structures sont labellisées France services , pour un objectif de 2 500 maisons labellisées fin 2022.

Les maisons France services sont financées par un forfait de 30 000 euros par an et par maison, dont la moitié par le FNADT. Par ailleurs, la gamme de services proposés dans les maisons France services est bien plus large que celle des MSAP. Les 30 000 euros de financements par maison ne couvrent selon les informations transmises au rapporteur spécial en moyenne que 20 % du coût global de fonctionnement de ces maisons , dès lors que 2 ETP doivent être affectés à chaque maison France services. Ainsi, les collectivités portent la majeure partie des coûts relatifs au déploiement et au fonctionnement des maisons France services.

III. UNE RÉFORME DE LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE QUI DOIT ÊTRE ANTICIPÉE

Plusieurs dispositifs de zonage sont associés au programme 112, le plus souvent des exonérations ou des réductions d'impôt associées au classement dans divers dispositifs de zonages, pour un total de 631 millions d'euros en 2022 .

Le rapporteur spécial se félicite que les principaux dispositifs zonés, en particulier les zones de revitalisation rurale (ZRR) aient été prolongés en loi de finances pour 2021 de deux ans, jusqu'en décembre 2022, suivant une recommandation qu'il avait formulée dans un rapport de contrôle mené en 2019 avec ses collègues Frédérique Espagnac et Rémy Pointereau.

Cette prorogation ne doit cependant constituer qu'une étape de transition vers une réforme des dispositifs de zonage pour plus d'efficience et de lisibilité par les collectivités territoriales et les acteurs économiques.

Or, près d'un an après le vote de la poursuite de ces dispositifs jusqu'en 2022, et alors que ces deux années devaient être mises à profit pour poursuivre les travaux sur la géographie prioritaire et adapter l'ensemble des dispositifs nationaux qui ont été prorogés en 2021, il semble opportun de proroger d'une année supplémentaire afin de mieux anticiper la révision de ces zonages.

IV. LE PROGRAMME 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT », UN INSTRUMENT EFFICACE QUI PERMET DE RÉPONDRE À DES PROBLÉMATIQUES LOCALES COMPLEXES

Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » est composé d'actions territorialisées répondant à des enjeux divers , ce qui présente des avantages notables, en offrant une grande souplesse de gestion. Ce programme garantit également aux acteurs locaux une meilleure visibilité de l'engagement de l'État sur leur territoire.

Le programme devrait présenter en 2022 une baisse des AE à hauteur de 9,7 %, mais bénéficier d'une hausse des CP de 5,2 %, pour un montant total de 48 millions d'euros en AE et 40,3 millions d'euros en CP .

Le rapporteur spécial souligne une fois de plus le manque de sincérité de la programmation budgétaire du PITE, dans la mesure où quasiment toutes les actions sont alimentées par des transferts en gestion et où, par conséquent, les montants présentés ci-dessus ne correspondent pas au montant total et aux ressources réellement accordées aux politiques en question.

La commission a décidé de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, étaient parvenues au rapporteur spécial :

- 90 % des réponses relatives au programme 162 « Interventions territoriales de l'État » ;

- 70 % des réponses relatives au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ».

PREMIÈRE PARTIE

Le présent rapport porte sur deux programmes de la mission « Cohésion des territoires » : le programme 112 « impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et le programme 162 « interventions territoriales de l'État » .

Ces deux programmes représentent un total de 258,84 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 282,3 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Répartition des crédits de la mission « Cohésion des territoires »

(en %)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Bien que de faible ampleur en termes de crédits budgétaires, ces deux programmes ont un effet levier important sur les crédits affectés à d'autres missions. Ils permettent de détailler les actions traduisant l'implication de l'État pour maintenir la compétitivité et l'attractivité des territoires, en particulier des territoires ruraux .

En particulier, ces crédits permettent de garantir un « effet levier » important, l'intervention de l'État entraînant celles d'autres acteurs, et en particulier des collectivités territoriales.

Ils permettent également, en particulier le programme 162, de mettre l'accent sur quelques politiques sectorielles territorialisées, souvent cruciales pour les collectivités concernées.

Après plusieurs années d'évolutions successives, la maquette des programmes est stable en 2022 . Toutefois, une partie des crédits liés à l'aménagement du territoire, et qui devraient être à terme gérés dans le cadre du programme 112 figurent toujours sur la mission « plan de relance ».

À l'inverse, le plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC), porté en 2021 par la mission « plan de relance », est désormais intégré au programme 162, où il prend la suite du programme exceptionnel d'investissement en Corse.

Les crédits accordés aux programmes 112 et 162 étaient en baisse en 2021 par rapport à 2020, du fait du financement d'une partie des CPER par la mission « plan de relance ». Le PLF pour 2022 ne poursuit pas cette évolution, ce dont se félicite le rapporteur spécial.

Les crédits prévus pour le programme 112 évoluent à la hausse de 20 % en AE et 4,3 % en CP . Les crédits du programme 162 augmentent de 18,7 % en AE et de 5 % en CP, essentiellement du fait du PTIC.

Évolution des crédits accordés aux programmes 112 et 162

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

DEUXIÈME PARTIE

I. LE PROGRAMME 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE »

A. UNE LÉGÈRE HAUSSE DES CRÉDITS DU PROGRAMME DANS UN CONTEXTE DE STABILISATION DE SON PÉRIMÈTRE

1. Les dispositifs financés par le programme 112 se stabilisent après plusieurs années de modifications

Le projet de loi de finances pour 2022 prévoit d'affecter au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » 210,4 millions d'euros en AE et 240 millions d'euros en CP .

Cela correspond à une hausse de 20 % en AE par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2021, soit un retour au niveau de 2020 suite à la contraction de 15 % en AE en 2021. Les CP poursuivent quant à eux leur hausse en 2022 à 4,4 %, après une croissance de 5,5 % en 2021.

Évolution des crédits par action du programme 112

(en millions d'euros et en %)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution PLF 2022 / LFI 2021 (volume)

Évolution PLF 2022 / LFI 2021 (%)

FDC et ADP attendus en 2022

11 - FNADT section locale

AE

75,2

84,2

+ 9,0

+ 12,0 %

0,0

CP

103,0

89,9

- 13,1

- 12,7 %

0,0

12 - FNADT section générale

AE

34,4

60,8

+ 26,4

+ 76,7 %

37,9

CP

39,1

65,9

+ 26,8

+ 68,5 %

37,9

13 - Soutien aux Opérateurs

AE

65,3

65,3

- 0,0

- 0,0 %

0,0

CP

65,3

65,3

- 0,0

- 0,0 %

0,0

14 - Prime d'aménagement du territoire, contrats de ruralité et pacte État-métropoles

AE

0,0

0,0

0,0

0,0 %

0,0

CP

22,5

18,9

- 3,6

- 16,0 %

0,0

Total programme 112

AE

175,0

210,4

+ 35,4

+ 20,2 %

37,9

CP

230,0

240,0

+ 10,0

+ 4,4 %

37,9

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le périmètre du programme 112 a évolué au cours des dernières années, du fait de la mise en place de l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) en 2020 , de l'extinction de la génération de contrats de plan État-région (CPER) 2015-2020 et de la conclusion des contrats de la génération suivante, ainsi que de l'extinction en 2021 de la prime d'activité.

La mise en oeuvre par le programme 112 d'une partie des mesures de l'Agenda rural et de nouveaux programmes portés par l'ANCT, en particulier « Petites villes de demain » a également contribué à une hausse tendancielle du budget du programme au cours des dernières années .

Plusieurs autres facteurs expliquent l'évolution des crédits. Leur hausse s'explique notamment par la poursuite du déploiement des maisons France Services à hauteur de 36,3 millions d'euros , poursuivant la hausse de 9,8 millions d'euros enregistrée en 2021. Par ailleurs, 66,4 millions d'euros en AE sont prévus pour les contrats de plan régionaux et interrégionaux 2021-2027.

Une hausse est également prévue pour les pactes de développement territorial, au travers de l'attribution de 9 millions d'euros en AE et 2,37 millions d'euros en CP pour les pactes de développement territorial « renouvellement du bassin minier » et « Sambre-Avesnois-Thiérache ».

En revanche, contrairement à l'année précédente, la subvention pour charges de service public de l'ANCT est stable à hauteur de 60,5 millions d'euros.

2. Des crédits du plan de relance qui auraient pour certains davantage leur place sur le programme 112

Comme en 2021, un grand nombre des crédits potentiellement rattachés au titre du programme 112 sont ouverts dans la mission « Plan de relance » .

Le plan de relance contient ainsi 8 millions d'euros en AE et 96,1 millions d'euros en CP de crédits qui auraient pu être inscrits au programme 112 :

- 10 millions d'euros en AE et 7 millions d'euros en CP ciblés sur l'Agenda rural, notamment pour le financement du recrutement par les collectivités de 350 volontaires territoriaux en administration et de la mise en place de simulateurs de conduite au sein de missions locales ;

- 16,5 millions d'euros en CP pour les crédits relatifs au déploiement du programme « Fabriques de territoire ».

- 52,6 millions d'euros en CP pour les projets dans le cadre des CPER et CPIER au titre de la nouvelle génération des contrats de plan État-Région (CPER) et des contrats de plan interrégional État-région (CPIER) 2021-2027 ;

- 12 millions d'euros en CP consacrés à la mise en place du Plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC) ;

- 8 millions d'euros en AE et en CP pour financer la remise en état d'infrastructures transférées à la collectivité de Polynésie.

En incluant les dépenses inscrites au titre du plan de relance en 2022, les crédits du programme 112 augmentent de 8 % en AE et 15 % en CP. L'action 11, c'est-à-dire la section locale du FNADT est, si l'on se réfère à ce même périmètre, stable par rapport à 2021 en AE et en hausse de 13 % en CP, au lieu de la baisse de 17 % qui apparaît sur le seul programme 112

Le rapporteur spécial se félicite de la hausse des crédits consacrés à l'aménagement du territoire , qui semble enfin permettre de mettre en adéquation les moyens budgétaires et certaines ambitions de redynamisation des territoires ruraux, en particulier concernant l'ANCT, l'ingénierie territoriale ou les maisons France services.

Toutefois, comme l'année précédente, la pertinence de l'intégration d'une partie seulement des crédits liés à l'aménagement du territoire est discutable . Celle-ci conduit à une complexité accrue , difficilement compréhensible par les acteurs de terrains comme par les gestionnaires.

Évolution des crédits du programme 112 et des crédits dédiés à l'aménagement du territoire dans le plan de relance

(en millions d'euros)

Actions et sous-actions

LFI 2020

LFI 2021

PLF 2022

PLF 2021 (112 +Plan de relance*)

PLF 2022 (112 +Plan de relance*)

Évolution 2022/2021 hors plan de relance

Évolution 2022/2020

Évolution 2022/2021

(Programme 112)

dont plan de relance

dont plan de relance

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 11 : FNADT section locale

124

111

75

103

84

90

164

126

162

142

12%

-13%

31%

28%

-1%

13%

Contrat de projets État-Régions

108

101

66

102

66

85

144

121

144

137

0%

-17%

33%

36%

0%

13%

Contrat de convergence et de transformation

5

4

5

1

5

2

5

1

5

2

0%

200%

21%

-41%

0%

200%

Pactes territoriaux

11

6

3

1

12

3

3

1

12

3

265%

465%

11%

-55%

265%

465%

Plan de transformation et d'investissement pour la Corse**

11

3

-100%

-100%

Action 12 : FNADT section générale

25

33

34

39

61

66

61

61

87

89

77%

68%

250%

174%

43%

47%

Restructuration des sites de défense

3

6

2

5

1

5

2

5

1

5

-33%

-4%

49%

5%

-33%

-4%

Maisons France services (anciennes maisons de service au public)

19

19

28

28

36

36

28

28

36

36

28%

28%

-22%

-22%

28%

28%

Centres bourgs

0

1

0

0

0

0

0

0

0

0

Crédits à la discrétion du ministre

2

4

2

4

2

4

2

4

2

4

0%

0%

0%

0%

0%

0%

Auto-développement en montagne

1

1

1

1

1

1

1

1

1

1

0%

0%

0%

0%

0

0%

Programmes ANCT - agenda rural

0

0

0

0

19

19

10

5

29

26

-47%

-74%

2

420%

Fabriques de territoire

0

0

0

0

0

0

17

17

17

17

0%

0%

Action 13 : Soutien aux opérateurs

56

56

65

65

65

65

65

65

65

65

0%

0%

16%

16%

0%

0%

Subvention pour charge de service public ANCT

Total ANCT

52

52

61

61

61

61

61

61

61

61

0%

0%

17%

17%

0%

0%

Dont ANCT programmes

10

10

20

20

20

20

20

20

20

20

0%

0%

100%

100%

0%

0%

Dont ANCT fonctionnement et T2

42

42

41

41

41

41

41

41

41

41

0%

0%

-3%

-3%

0%

0%

Business France

5

5

5

5

5

5

5

5

5

5

0%

0%

0%

0%

0%

0%

Action 14 : PAT, Pacte État-métropoles et contrats de ruralité

3

44

0

23

19

23

19

-16%

-100%

-57%

-16%

Prime d'aménagement du territoire

3

15

11

10

11

10

-13%

-100%

-36%

-13%

Contrats de ruralité 1

0

27

10

8

10

8

-17%

-69%

-17%

Pacte État-Métropole 2

0

2

2

1

2

1

-33%

-55%

-33%

TOTAL

208

244

175

230

210

240

291

275

315

316

20%

4%

51%

29%

8%

15%

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire.

B. UNE POLITIQUE CONTRACTUELLE DE L'ÉTAT DANS LES TERRITOIRES EN COURS DE REFONTE

1. Des crédits CPER toujours partagés entre le programme 112 et la mission « Plan de relance »
a) Les crédits CPER figurent en partie sur la mission « Plan de relance », mais devraient vraisemblablement être gérés par le gestionnaire du programme 112

Le programme 112 porte les crédits de trois générations de CPER , dont deux, les CPER 2007-2014 et ceux 2015-2020, sont clôturés et ne portent donc plus d'AE.

(1) La poursuite de l'exécution des CPER 2015-2020

L'État a contractualisé 12,6 milliards d'euros dans les CPER et CPIER métropolitains 2015-2020. Le taux d'engagement des AE fin 2020 est de 77 %, soit 9,8 milliards d'euros. Le taux de paiement est de 45 %, soit 5,7 milliards d'euros de CP versés. Le taux prévisionnel d'engagement des AE à fin 2021 est de 86 %, soit 10,9 milliards d'euros.

Exécution prévisionnelle des CPER 2015-2020 au 31 décembre 2021

(en milliards d'euros et %)

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

L'exécution, en 2020, des CPER 2015-2020 a dû tenir compte de deux évolutions. D'une part, les CPER ultramarins ont été clôturés plus tôt que prévu et remplacés par les contrats de convergence et de transformation (CCT) 2019-2022, faisant l'objet d'un suivi distinct réalisé par le ministère des Outre-mer. D'autre part, le volet « mobilité multimodale » des CPER 2015-2020 financé notamment par l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) a été prolongé jusqu'en 2022, et les crédits CPER seront transférés au plan de relance.

Concernant le volet territorial des CPER 2015-2020, soit 894 millions d'euros, auquel contribue le FNADT, son taux d'exécution en décembre 2021 devait s'élever à 84 % , soit une exécution correcte, dans la mesure où les CP devraient continuer à être décaissés en 2022. Les volets territoriaux des CPER recouvrent cinq axes principaux : le soutien aux territoires fragiles (quartiers de la politique de la ville, zones rurales, petites villes) ; les services au public et le numérique ; les coopérations territoriales (métropoles et coopérations transfrontalières) ; les dynamiques de développement local (projets culturels notamment) ; l'ingénierie territoriale.

(2) Une dispersion des crédits CPER qui nuit à la lisibilité de la politique contractuelle entre l'État et les régions

Comme indiqué plus haut et comme en 2021, une partie des crédits CPER sont portés par la mission « plan de relance ». Ce devrait toutefois être la dernière année, ces crédits devant financer en 2021 et 2022 des projets déjà prêts et immédiatement finançables, justifiant ainsi leur placement dans une autre mission. En tout état de cause, étant donnée la différence de temporalité entre des contrats de plan s'étalant sur cinq ans et le plan de relance, l'intégralité des crédits devrait revenir au sein du programme 112 en 2023 . Le rapporteur spécial sera attentif sur ce point.

Évolution des crédits des CPER et CPIER

(en CP en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La proportion de crédits CPER (en CP) hors programme 112 est par ailleurs plus importante en 2022 qu'en 2021, en parallèle d'une hausse globale des crédits CPER, laquelle n'est pas visible si l'on prend en compte uniquement le programme 112.

Toutefois, les crédits demandés en plan de relance ne correspondent qu'en partie à des crédits additionnels par rapport à ceux qui auraient pu être compris dans le programme 112 , du fait de l'élargissement du périmètre des CPER qui implique un abondement de crédits plus importants que les années précédentes.

Le choix de placer une partie des crédits CPER parmi la mission « plan de relance » peut être discuté et nuit à la lisibilité de la politique contractuelle de l'État, tout en répondant à un impératif de déploiement plus rapide des CPER en finançant un nombre plus important de projets au cours des deux premières années d'exécution. Dès lors, le rapporteur spécial veillera à ce que le taux d'exécution des deux prochaines années soit effectivement supérieur au taux moyen sur les précédents CPER, justifiant ainsi le transfert vers le plan de relance.

Ces crédits ont été transférés vers le programme 112 en gestion . Celui-ci a bénéficié d'un transfert pour un montant de 115,5 millions d'euros en AE et de 44,6 millions d'euros en CP en 2021, dont 77,6 millions d'euros en AE et 19,69 millions d'euros en CP pour les CPER 2021-2027.

Selon les informations transmises au rapporteur spécial, ce transfert est justifié par la nécessité de simplifier la gestion de ces crédits, relevant pour l'essentiel du FNADT et pour lequel des budgets opérationnels de programme (BOP) régionaux et interrégionaux dédiés existaient sur le programme 112.

Se pose également la question de l'articulation des deux dispositifs en termes de gouvernance . Tous les projets financés dans le cadre des CPER par les crédits du plan de relance seront définis par le comité de suivi du contrat de plan , coprésidé par le président de région et le préfet. Les comités de suivi régionaux du plan de relance , bien que rassemblant les mêmes acteurs, ne devraient jouer aucun rôle de programmation, de même que le sous-préfet à la relance. De ce point de vue, l'articulation en 2022 entre les crédits CPER du programme 112 et ceux de la mission « plan de relance » sera identique à celle établie en 2021.

b) L'essor de la nouvelle génération de CPER, élargie à de nouveaux domaines

Excepté la Corse et la Normandie, l'ensemble des accords régionaux de relance 2021-2022 et les protocoles d'accord CPER 2021-2027 ont fait l'objet d'une signature entre l'État et les régions avant les élections régionales de juin 2021. La signature définitive des CPER 2021-2027 devrait quant à elle intervenir d'ici la fin de l'année 2021 .

S'agissant du programme 112 , 998,6 millions d'euros ont été contractualisés dans les CPER et CPIER 2021-2027, et 155 millions d'euros au titre du plan France relance.

Répartition régionale des crédits contractualisés sur le programme 112 dans le cadre des CPER 2021-2027

(en euros)

Montants contractualisés

(2021-2027)

Montant plan de relance

(2021-2022)

Montant total

Auvergne - Rhône-Alpes

60 703 919

19 281 081

79 985 000

Bourgogne - Franche-Comté

53 925 081

5 318 919

59 244 000

Bretagne

67 465 414

5 318 919

72 784 333

Centre - Val de Loire

39 762 748

5 318 919

45 081 667

Corse

14 545 414

5 318 919

19 864 333

Grand Est

79 359 053

13 297 297

92 656 350

Hauts-de-France

71 505 642

26 594 595

98 100 237

Ile-de-France

18 255 414

5 318 919

23 574 333

Normandie

44 920 748

5 318 919

50 239 667

Nouvelle-Aquitaine

80 964 038

7 978 378

88 942 417

Occitanie

75 823 998

5 318 919

81 142 917

Pays de la Loire

26 696 248

5 318 919

32 015 167

Provence-Alpes-Côte-D'azur

25 239 369

13 297 297

38 536 667

Sous-total CPER

659 167 087

123 000 000

782 167 087

CPIER Alpes

38 332 000

7 168 000

45 500 000

CPIER Jura

17 972 667

2 944 000

20 916 667

CPIER Massif central

47 665 333

7 168 000

54 833 333

CPIER Pyrénées

31 034 667

5 632 000

36 666 667

CPIER Vosges

20 306 000

2 944 000

23 250 000

CPIER Garonne

1 464 000

1 536 000

3 000 000

CPIER Loire

3 309 333

1 024 000

4 333 333

CPIER Rhône - Saône

9 196 000

2 304 000

11 500 000

CPIER Vallée de la Seine

12 154 667

512 000

12 666 667

CPIER Vallée du Lot

3 065 333

768 000

3 833 333

Sous-total CPIER

184 500 000

32 000 000

216 500 000

Total général

843 667 087

155 000 000

998 667 087

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Le périmètre de contractualisation est par ailleurs élargi à de nouveaux volets , en parallèle des thématiques classiques que sont le développement économique, la transition écologique, la recherche ou l'enseignement supérieur, qui seront présentes dans l'ensemble des CPER.

Le sport et la culture devraient désormais être mieux identifiés dans les CPER, notamment pour articuler davantage l'action de l'État et du conseil régional dans ces domaines, en s'appuyant sur l'Agence nationale du Sport ou le PIA 4 régionalisé.

De nouveaux volets intégreront en outre les CPER : la santé, l'agriculture, la mer et le littoral, l'éducation et la jeunesse, l'égalité entre les femmes et les hommes .

Le rapporteur spécial rappelle qu'il avait insisté dans son rapport précédent sur l'impérieuse nécessité pour la nouvelle génération de CPER de comprendre un volet dédié à l'accès au soin afin de coordonner l'action des différents intervenants au niveau régional . Il se réjouit que cette recommandation trouve sa place dans la prochaine génération de CPER.

Du fait du plan de relance, le volet cohésion des territoires est renforcé , notamment via la mobilisation des programmes d'intervention déployés par l'Agence nationale de cohésion des territoires. Une partie des crédits CPER devrait concerner plus particulièrement la revitalisation des villes moyennes, des petites villes et des zones rurales , qui est un enjeu majeur auquel les différents dispositifs existants, en particulier le programme Action coeur de ville, n'ont pas permis de remédier.

Les documents budgétaires précisent que les projets qui n'auront pas pu être financés dans le cadre du CPER 2015-2020 pourront être financés par le plan de relance ou les CPER 2021-2027.

2. La contractualisation au niveau infra-régional passe désormais par les contrats de relance et de transition écologique
a) Le cadre des CRTE : des contrats ayant vocation à rassembler les contrats existants

Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ont été créés en 2021, émanation des contrats de cohésion territoriale prévus par la loi du 22 juillet 2019 portant création de l'ANCT 1 ( * ) .

Les CRTE ont vocation à être le seul instrument contractuel entre l'État et les collectivités locales , à l'exception des CPER qui demeurent au niveau régional.

Ils doivent regrouper l'ensemble des contrats signés entre l'État et les collectivités , comme les contrats de ville ou de ruralité, mais aussi les programmes des différents ministères, et leurs partenaires, comme Action coeur de ville, Petites villes de demain, France très haut débit ou Territoires d'industrie. Ils sont également un des outils principaux de la territorialisation du plan de relance lancé en 2021.

En octobre 2021, 843 périmètres CRTE ont été définis , dont 671 portés à l'échelle d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et 172 à l'échelle de groupements d'EPCI à fiscalité propre. En date du 20 septembre 2021, 225 CRTE ont été signés et 377 devraient l'être d'ici la fin de l'année.

Répartition des 843 CRTE signés en octobre 2021

Source : ANCT

Le rapporteur spécial se félicite de la simplification permise par ces contrats. En revanche, à la différence des CPER, aucune enveloppe de crédits n'est dédiée aux CRTE , sur le programme 112 ou sur d'autres missions.

Les documents budgétaires indiquent que « l'ensemble des crédits État, existants ou à venir, ont vocation à être mis au profit des CRTE ». Le rapporteur spécial le regrette, considérant notamment que toutes les dotations de l'État ne doivent pas être entièrement absorbées par les CRTE. En particulier la dotation d'équipement des territoires ruraux doit rester un instrument financier souple de financements annuels des projets communaux et intercommunaux . Par ailleurs, il insiste sur la nécessité de garantir aux élus une visibilité pluriannuelle des financements dans la construction et la mise en oeuvre des CRTE , sur le modèle des contrats de ruralité.

b) Le rôle de l'ANCT dans la mise en place des CRTE

Afin d'aider les collectivités à conclure un CRTE, l'ANCT apporte un concours aux territoires pour l'élaboration des CRTE. Au 20 septembre 2021, 364 territoires ont bénéficié d'un accompagnement , dont 253 par l'ANCT.

Les collectivités peuvent également être accompagnées par les partenaires de l'ANCT : 54 l'ont été par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) et 57 par l'Agence de la transition écologique (ADEME).

La collectivité peut demander un accompagnement de l'ANCT et des opérateurs partenaires, pour l'appuyer notamment dans la réalisation du diagnostic de territoire ou la définition des enjeux prioritaires et la mobilisation des acteurs du territoire.

Les projets liés à l'élaboration des CRTE représentent plus de la moitié (52 %) des projets accompagnés par l'ANCT en 2021.

C. LA STABILITÉ DES MONTANTS DÉDIÉS À L'INGÉNIERIE PERMET À L'ANCT DE DÉPLOYER SES PROGRAMMES DANS LES TERRITOIRES

1. Le rôle croissant de l'ANCT malgré des moyens limités

L'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) a été créée par la loi du 22 juillet 2019 2 ( * ) . Elle reprend une partie des missions du Commissariat général à l'égalité des territoires ( CGET ) ainsi que les missions de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux ( Epareca ) et de l' Agence du numérique .

L'ANCT déploie les grands programmes nationaux d'intervention, d'aménagement numérique et mobile, de revitalisation des centres-villes ou encore d'accès aux services, afin de soutenir les projets portés par les collectivités. Elle intervient également en appui spécifique aux territoires à travers la mobilisation d'une ingénierie au service des projets des collectivités.

a) Une stabilité des crédits en 2022 qui maintient le doublement des montants consacrés à l'ingénierie locale en 2021

Lors de sa mise en place au premier janvier 2020, l'agence disposait d'un soutien à hauteur de 54 millions d'euros en AE comme en CP au titre de sa subvention pour charges de service public (SCSP) , portée par le programme 112. Ce montant a été porté à 61 millions d'euros en 2021 pour permettre notamment le doublement du montant de l'ingénierie destinée à appuyer des projets sur mesures portés par les territoires, passant de 10 à 20 millions d'euros. Cette hausse est entérinée en 2022, dans la mesure où la SCSP est stable.

Le rapporteur spécial s'était félicité de cette hausse en 2021, dans la mesure où le soutien à l'ingénierie représente un enjeu crucial pour les territoires ruraux. Le maintien de cette hausse constitue donc à ce titre une avancée et correspond également à la recommandation n°20 formulée dans un rapport d'information de la délégation aux collectivités territoriales 3 ( * ) , à savoir pérenniser et renforcer l'enveloppe budgétaire dédiée à l'ingénierie « sur-mesure ».

La SCSP représente plus des deux-tiers des recettes de l'ANCT, le reste étant partagé entre des recettes liées aux activités commerciales de l'agence, des financements européens et des crédits budgétaires de droit commun dans une moindre proportion.

Comme en 2021, l'ANCT bénéficiera également de financements complémentaires par le biais du plan de relance. Viendront ainsi s'ajouter les crédits transférés sur le programme 112 au titre du plan de relance pour financer le dispositif des fabriques de territoires (16,5 millions d'euros en AE et CP) ainsi que les programmes portés par l'ANCT dans le cadre de l'Agenda rural (10 millions d'euros en AE et 7 millions d'euros en CP).

b) Des missions plus larges que celles anticipées lors de la mise en place de l'agence en 2020 du fait notamment de la mise en place de l'Agenda rural

Toutefois, la stabilisation des dépenses de fonctionnement de l'ANCT depuis 2020 est à mettre en perspective avec la forte mobilisation de l'agence au cours des deux dernières années , qui n'avait pas nécessairement été pleinement anticipée lors de sa création.

Le champ d'action de l'agence s'est notamment étendu, d'une part à travers le déploiement de ses programmes dans les territoires, et notamment « petites villes de demain », et d'autre part à travers la forte sollicitation de l'ANCT pour le déploiement de plusieurs dispositifs du plan de relance en 2021 et 2022 et la mise en place des CRTE.

Ce sera par exemple le cas du plan « Avenir Montagnes » à destination des territoires de montagne particulièrement affectés par la crise sanitaire, annoncé en mai 2021. En 2021, le plan devrait bénéficier de redéploiement de crédits internes à l'action Cohésion territoriale sur la mission « plan de relance ». En PLF 2022, 46,2 millions d'euros en CP et 116 millions d'euros sont prévus. Ces crédits devraient être ensuite transférés au programme 112. Ces montants sont destinés à financer d'une part le soutien à l'ingénierie des collectivités de montagne par l'Agence nationale de la cohésion des territoires, et d'autre part au financement du fonds Avenir Montagnes Investissement abondé à parité par l'État et les régions.

2. L'action de l'ANCT dans les territoires pour la mise en place de plusieurs mesures de l'agenda rural

Le déploiement postérieur à la création de l'ANCT des mesures de l'agenda rural , qui a impliqué le renforcement des programmes, a également contribué à accroître les besoins de l'agence en ingénierie locale.

L'agenda rural

À la demande de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, une mission composée d'élus locaux et de parlementaires a remis en juillet 2019 un rapport comportant 200 mesures destinées à favoriser le développement des territoires ruraux et à améliorer la vie quotidienne de leurs habitants, dans les domaines de l'éducation, de l'accès aux services, de la santé, du numérique, des transports, etc. Parmi celles-ci, 181 propositions ont été sélectionnées et sont mises en oeuvre par l'ensemble des ministères sous le pilotage de l'ANCT. D'après l'ANCT, sur les 181 mesures de l'Agenda rural, 92 des mesures portées ont été réalisées et 77 sont en cours de réalisation.

Ces mesures sont d'ampleur très variable , et concernent différents champs (scolaire au travers des cordées de la réussite, accès aux services administratifs avec les maisons France service, programmes localisés, etc.). Certaines mesures préexistaient d'ailleurs à l'Agenda rural mais y ont été intégrées.

Déploiement des principales mesures de l'Agenda rural

Source : ANCT

L'ANCT intervient principalement sous trois formes : au travers de programmes nationaux d'appui , par des dispositifs de contractualisation , notamment les CRTE, et enfin en proposant une offre d'ingénierie « sur mesure » aux collectivités territoriales dont les besoins ne recouvrent pas exactement les programmes.

Les programmes de l'ANCT sont divisés en trois axes, qui concernent respectivement la politique de la ville, le numérique et les territoires ruraux.

Depuis le 1 er janvier 2020, 702 projets ont été accompagnés par l'Agence . Cet accompagnement a revêtu plusieurs formes : dans près de la moitié des cas (46 %), le soutien de l'ANCT est en réalité passé par la mobilisation d'un ou plusieurs prestataires externes , et un quart des projets par la mobilisation des partenaires de l'agence. Pour 20 % des projets, l'ANCT a directement versé une subvention au porteur de projet , l'expertise interne de l'agence n'ayant concerné que 8 % des projets.

Les projets accompagnés sont majoritairement liés à l'élaboration des contrats de relance et de transition écologique (52 %) ou à des projets de revitalisation commerciale ou artisanale (13 %).

a) Le programme « petites villes de demain », une avancée pour les territoires ruraux

Le programme Petites villes de demain est une des mesures de l' Agenda rural , dans le prolongement du programme Action coeur de ville, qui a bénéficié à peu de petites villes et dont la réalisation a pu être considérée comme décevante . Il a été lancé au 1 er octobre 2020 et, sur la période 2021-2026, 3 milliards d'euros sont prévus pour le programme, au travers de crédits de droit commun et de crédits « relance ».

Piloté par l'ANCT, ce programme est très déconcentré , puisque les modalités et le calendrier de la sélection, la sélection des bénéficiaires et le déploiement appartiennent aux préfets. Le programme est conçu pour 6 ans .

Le déploiement de Petites villes de demain comprend deux phases :

- une phase d' initialisation : la convention d'adhésion, approuvée par délibération du conseil municipal et du conseil communautaire, officialise l'engagement de la collectivité dans la définition de son projet stratégique de revitalisation et prévoit un délai maximal de 18 mois pour le finaliser. Cette convention permet à la collectivité de bénéficier sans attendre des premières mesures d'accompagnement.

- une phase de contractualisation : la convention prévoit le détail du projet de revitalisation, défini par la collectivité et approuvé par l'État, ainsi que sa déclinaison en plan d'action pluriannuel. Une annexe financière annuelle fixe les contributions respectives de chaque partenaire, au regard des budgets disponibles et des priorités définies par le comité local de projet, coprésidé par le maire et le préfet.

Près de 1 600 communes de moins de 20 000 habitants sélectionnées seront accompagnées par le programme. En octobre 2021, plus de 850 communes ont signé leur convention d'adhésion au programme.

Le rapporteur spécial se félicite que, suivant la recommandation qu'il avait formulée, il soit possible d'effectuer une candidature groupée au niveau de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), échelon qui paraît particulièrement pertinent pour prendre en compte les interactions entre les centres villes et les communes voisines.

6 millions d'euros sont mobilisés annuellement par l'ANCT à ce titre sur son enveloppe de 20 millions d'euros de crédits d'ingénierie . En outre, dans le cadre du PLF 2022, le cofinancement par l'État des recrutements de chefs de projets « Petites villes de demain » bénéficiera d'une partie des 19 millions d'euros prévus sur le programme 112 pour la mise en oeuvre de l'Agenda rural. La Banque des territoires mobilise quant à elle 250 millions d'euros d'ingénierie dédiée au programme « Petites villes de demain », dont 45 millions d'euros pour le soutien au financement des chefs de projet .

Une délégation des crédits a été réalisée en 2021 à hauteur de 10,5 millions d'euros pour les chefs de projets et de 1,04 millions d'euros pour l'ingénierie. Le recrutement des premiers chefs de projet est en cours et devrait s'effectuer jusqu'aux premiers mois de l'année 2022. D'après les informations transmises au rapporteur spécial, le besoin de financement serait de 933 postes de chefs de projets au niveau national .

Le rapporteur spécial ne peut que se réjouir de l'attention portée aux petites villes et aux centres-bourgs, qui constituent un échelon territorial crucial et ne doivent pas être les oubliées de la politique de l'aménagement du territoire.

Il considère toutefois que, comme d'autres programmes de l'ANCT, Petites villes de demain devrait bénéficier de crédits dédiés au sein de la section générale du FNADT.

b) L'accroissement des crédits à destination du programme « territoires d'industrie »

Le programme Territoires d'industrie a été lancé en 2018, et 146 territoires sont aujourd'hui labellisés . Les objectifs du programme consistent à accompagner la reconversion des friches industrielles, l'acquisition de foncier et l'immobilier d'entreprise, les projets d'aménagement et de transition écologique ainsi que la sécurisation des chaines d'approvisionnement.

Le programme « Territoires d'industrie » mobilise 1,3 milliard d'euros sur cinq ans , dont 4 millions par an pour le cofinancement de 50 postes de chefs de projet sur le FNADT et dont des financements par le plan de relance au titre du fonds d'accélération des investissements industriels dans les territoires. Celui-ci était doté initialement de 400 millions d'euros de l'État sur 2020-2022, puis abondé en avril 2021 de 300 millions d'euros, financés à parité par l'État et les régions dans le cadre du partenariat pour la relance industrielle.

Répartition des territoires d'industrie

Source : ANCT

c) Les volontaires territoriaux en administration, une initiative positive mais laissant en suspens la pérenisation de ces postes

Dans le cadre de l'Agenda rural, le Gouvernement a annoncé la mise en place en 2021 du volontariat territorial en administration (VTA) , dispositif permettant par des contrats de mission pour de jeunes diplômés de niveau bac +2 minimum d'effectuer une mission de 12 à 18 mois au service du développement des projets de territoires ruraux.

Une partie des crédits du plan de relance transférés sur le programme 112, soit 5,25 millions d'euros, ont été consacrés à la mise en place des VTA en 2021 . 350 volontaires territoriaux en administration ont pour l'instant été recrutés.

L'objectif est à terme d'atteindre 800 volontaires territoriaux en administration (VTA). Dans le cadre du PLF 2022, ils bénéficieront d'une partie des 19 millions d'euros supplémentaires prévus sur le programme, en parallèle des chefs de projets petites villes de demain.

Le rapporteur spécial salue sur le fond cette initiative, qui pallie en partie les grandes difficultés des petites collectivités en matière d'ingénierie . Il insiste néanmoins sur le fait que les VTA ne peuvent être une solution de long terme . D'une part, les VTA ont tendance à candidater dans les territoires les moins isolés. D'autre part, le recrutement pour 12 à 18 mois de VTA, cofinancés certes par l'État pendant cette période, ne constitue pas une solution durable. Le rapporteur spécial souligne la nécessité de pérenniser les efforts en matière d'ingénierie au-delà des 12 à 18 mois du VTA.

3. Les réseaux des maisons France services : une mise en oeuvre qui s'accélère mais repose en grande partie sur les financements des territoires
a) Une montée en charge rapide et la fin du financement des maisons de services au public non labellisées en 2022

Le Président de la République a annoncé en avril 2019 le déploiement de France Services, réseau de services publics mutualisés, devant permettre aux usagers de procéder aux principales démarches administratives du quotidien dans un lieu unique, à moins de 30 minutes de leur domicile. Ces maisons France services s'appuient sur le réseau existant des maisons de services au public (MSAP) .

Les services proposés dans les France Services couvraient initialement ceux de neuf partenaires : La Poste, Pôle emploi, les caisses nationales d'assurance maladie, d'assurance familiale et d'assurance vieillesse, les ministères de l'Intérieur et de la Justice, et la direction générale des finances publiques (DGFiP). Un dixième opérateur a été ajouté en septembre 2020, l'Association générale des institutions de retraite des cadres-Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (AGIRC-ARRCO).

Ces maisons France services ont été formellement initiées le 1 er janvier 2020 et leur nombre devrait augmenter d'ici fin 2022 en s'appuyant notamment sur la montée en gamme des MSAP. L'homologation des structures France services est conditionnée au respect de 30 critères obligatoires de qualité de service. À partir du 1 er janvier 2022, les MSAP qui ne répondent pas aux critères France Services ne seront plus labellisées et ne bénéficieront plus de financements de l'État et de ses partenaires .

b) Des crédits d'État en hausse pour suivre l'augmentation du nombre de maisons France services

On constate depuis 2018 une augmentation continue des crédits programmés pour les MSAP et le programme France Services. Cette augmentation s'explique en grande partie par le développement du réseau sur la période.

En 2022, les crédits dédiés aux maisons France Services augmentent de 8 millions d'euros, pour atteindre 36,4 millions d'euros en AE et en CP, contre 28,3 millions d'euros en 2021 . La part des crédits pour France Service augmente ainsi au niveau du programme, passant de 6 % des AE et 4 % des CP programmés en LFI 2018 à 16 % des AE et 12 % des CP en LFI 2021. Ils représentent l'essentiel de l'action 12 (85 %).

Actuellement, 1 745 structures sont labellisées France services dont 1 214 structures non postales. Parmi ces dernières, 673 sont d'anciennes maisons de services au public (soit 55 % du réseau). D'ici 2022, il est prévu que les anciennes MSAP représentent 82 % du réseau France services. Les créations nettes représenteraient 18 % du réseau.

À ce jour, la répartition des Frances services par type de structure est la suivante :

- portage par les collectivités territoriales : 62 % ;

- par la Poste : 18 % ;

- par des associations locales ou réseaux d'associations : 16 % ;

- par des sous-préfectures et par la mutualité sociale agricole : 4 %.

Deux nouvelles vagues de labellisations d'espaces France Services ont eu lieu récemment ou sont prévues, en octobre 2021 et janvier 2022. Ce rythme soutenu permettra d'atteindre l'objectif de 2 500 maisons France services labellisées fin 2022, dont 400 postales .

Au 1 er février 2020, 70 % de la population des communes situées en France métropolitaine, soit 64 millions d'habitants, résidaient à moins de 30 minutes d'une maison France Services. À la fin de l'année 2021, 95 % de la population devrait pouvoir accéder à une maison France services en moins de 30 minutes et l'objectif est de 100 % fin 2022.

Répartition des maisons France services

Source : ANCT

En outre, les crédits prévus au plan de relance ouverts en 2022 doivent financer le recrutement de 4 000 conseillers numériques France services . Alors que le plan de relance devrait prendre fin début 2023, le rapporteur spécial s'interroge sur le financement de ces recrutements au-delà de 2022, alors que le besoin d'accompagnement des publics fragiles sur les territoires est réel et ne saurait se résoudre par un renfort aussi ponctuel , limité à l'année 2022.

c) Un financement forfaitaire de l'État par maison stable malgré l'extension des services offerts, faisant reposer l'essentiel du fonctionnement des maisons France services sur les collectivités

Afin de permettre la transformation d'un grand nombre de MSAP en maisons France services, le financement des MSAP a été forfaitisé à hauteur de 30 000 euros par an et par structure . Ce forfait se décompose comme suit :

- pour les structures postales, le fonds postal national de péréquation territoriale finance les deux-tiers du forfait, soit 26 000 euros ;

- le fonds national France Services (FNFS) finance à hauteur de 4 000 euros les structures postales ; pour les structures non postales, il les finance à hauteur de 15 000 euros ;

- le FNADT apporte également un financement de 15 000 euros par an et par maison pour les structures non postales .

La contribution de chaque partenaire (opérateur ou ministère) au fonds national France Services (FNFS) a été calculée à partir des visites annuelles constatées et de leurs usagers potentiels au niveau national, ce qui conduit à trois blocs de contributeurs finançant chacun à hauteur de :

- 15 % pour plus de 12 millions de contacts physiques/usagers potentiels du service public par an ;

- 13 % entre 5 et 12 millions de contacts physiques/usagers potentiels par an ;

- 6 % pour moins de 5 millions de contacts physiques/usagers potentiels par an.

Le rapporteur spécial avait déploré l'année passée que les financements n'étaient pas au rendez-vous, les nouveaux moyens affectés au renforcement des MSAP étant restés relativement limités au regard des objectifs affichés.

Il considère donc que l'augmentation des crédits en faveur des maisons France services est bienvenue , en ce qu'elle permet d'accroître le nombre de maisons réparties sur le territoire et donc de rapprocher les services publics des citoyens, notamment en zone rurale. Toutefois, si l'objectif d'une maison par canton semble louable, c'est oublier que ces derniers n'ont pas les mêmes besoins en termes d'accessibilité des services au public. Dans certains territoires très ruraux, un maillage plus dense est nécessaire.

La circulaire relative à la création de France Services 4 ( * ) a acté ce financement forfaitaire de 15 000 euros en crédits FNADT, qui se devait être une réponse à l'augmentation de l'offre de services induite par le label France Services. Auparavant, le soutien apporté aux MSAP pouvait officiellement être inférieur à 15 000 euros. En réalité, les MSAP bénéficiaient fréquemment d'un soutien à hauteur du plafond.

Par ailleurs, la gamme de services proposés dans les maisons France services est bien plus large que celle des MSAP . Les 30 000 euros de financements par maison ne couvrent selon les informations transmises au rapporteur spécial en moyenne que 20 % du coût global de fonctionnement de ces maisons , dès lors que 2 ETP doivent être affectés à chaque maison France services. Ainsi, les collectivités portent la majeure partie des coûts relatifs au déploiement et au fonctionnement des maisons France services.

Toutefois, l'engagement financier de l'État a essentiellement un effet levier , dès lors que sa participation au travers du FNADT constitue une incitation majeure à la participation des divers opérateurs.

D. DE NOMBREUSES DÉPENSES FISCALES EN FAVEUR DE L'ATTRACTIVITÉ DES TERRITOIRES SONT ASSOCIÉES À CE PROGRAMME

a) Plusieurs dispositifs de zonage sont associés au programme 112

16 dépenses fiscales sur impôt d'État sont rattachées à ce programme en 2022, dont huit s'élevaient à moins d'un million d'euros. Ce sont le plus souvent des exonérations ou des réductions d'impôt associées au classement dans divers dispositifs de zonages, pour un montant de 631 millions d'euros en 2022, contre 588 en 2021, dont une partie importante imputables aux exonérations en faveur de la Corse. Ce faisant, les documents budgétaires anticipent un retour aux évaluations antérieures à la crise sanitaire.

En outre, neuf dépenses fiscales sur des impôts locaux , mais prises en charge par l'État, sont également rattachées au programme 112, pour un total de 7 millions d'euros.

Ces dépenses fiscales sont en hausse de 6,2 % entre 2021 et 2022 et de 36,26 % entre 2017 et 2022.

Principales dépenses fiscales associées au programme

(en millions d'euros et en %)

Crédit d'impôt

2019

2020

2021 (prévision)

2022 (prévision)

Évolution 2021/2022 (en %)

Taux particuliers applicables à divers produits et services consommés ou utilisés en Corse

220

185

195

205

+ 5,13

Exonération d'impôt sur les bénéfices dans les ZRR pour les entreprises créées ou reprises entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2022

162

223

193

209

+ 8,29

Crédit d'impôt pour investissement en Corse

100

113

100

110

+ 8,70

Exonération totale ou partielle des bénéfices réalisés par les entreprises nouvelles qui se créent entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2020 dans les zones d'aide à finalité régionale ou qui se sont créées entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 2010 dans les zones de revitalisation rurale et de redynamisation urbaine

81

81

69

75

+ 10

Exonération temporaire des mutations par décès portant sur des immeubles et des droits immobiliers situés en Corse

20

20

20

20

0

Exonération d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises qui exercent ou créent entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2017 une activité dans les bassins d'emploi à redynamiser

6

8

6

7

+ 16,67

Exonération de la partie du trajet effectué à l'intérieur de l'espace maritime national pour les transports aériens ou maritimes de personnes et de marchandises en provenance ou à destination de la Corse

5

3

4

4

0

Exonération du droit budgétaire de 2 % de mutation pour les acquisitions de fonds de commerce dans certaines zones prioritaires d'aménagement du territoire

0

0

0

0

0

Majoration de la base de calcul des amortissements des immobilisations acquises au moyen de primes de développement régional, de développement artisanal ou d'aménagement du territoire

1

1

0

0

0

Détaxe applicable aux supercarburants et essences consommés en Corse

1

1

1

1

0

Réduction de 25 % des bases imposées en Corse au profit des communes et des EPCI.
Suppression des parts départementales et régionales

7

7

7

7

0

Autres dépenses fiscales du programme

0

0

0

0

0

Total

631

642

595

638

+ 7,23

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

b) Une réforme en cours des zonages à laquelle le rapporteur spécial est attentif

Le rapporteur spécial s'était félicité dans son dernier rapport budgétaire du fait que les principaux dispositifs zonés aient été prolongés en LFI 2021 de deux ans jusqu'en décembre 2022.

Il avait salué l'ambition affichée par le Gouvernement de mener une réforme de grande ampleur des différents dispositifs de zonage de la géographie prioritaire de la ruralité , recommandation qui figurait par ailleurs dans le travail de contrôle sur l'avenir des ZRR mené par le rapporteur spécial avec ses collègues Frédérique Espagnac et Rémy Pointereau.

Les principales conclusions du rapport sur les zones de revitalisation rurale (ZRR) d'octobre 2020

M. Bernard Delcros, Mme Frédérique Espagnac et M. Rémy Pointereau, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des finances

Créées en 1995 par la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT), les zones de revitalisation rurale (ZRR) ont pour objectif de compenser le différentiel d'attractivité que subissent les territoires ruraux .

Les ZRR permettent d' adapter le niveau de la fiscalité pour favoriser le développement de territoires moins bien dotés en services , tant publics que privés et dont la faible densité de population a des conséquences importantes sur le niveau d'activité.

Les rapporteurs recommandent, dès l'examen du projet de loi de finances pour 2020, de proroger la totalité des mesures en vigueur dans les ZRR pour l'ensemble des communes bénéficiant actuellement du dispositif et ce jusqu'à l'élaboration de critères plus adaptés pour tenir compte des fragilités des territoires et d'améliorer le ciblage ainsi que l'efficience des dispositifs associés au zonage.

La prorogation est donc un préalable qui permettrait d'associer dans de bonnes conditions les rapporteurs au travail sur la nouvelle géographie prioritaire de la ruralité.

Les rapporteurs sont convaincus de la nécessité d'adopter une vision plus fine du zonage et souhaitent voir réhabilitée une approche plus qualitative des ZRR. Aussi, ils proposent de préparer une réforme des ZRR d'ici au 31 décembre 2021, à partir de plusieurs pistes de travail.

Celle-ci passerait notamment par de nouveaux critères de classement en ZRR pour définir trois niveaux de zonage (ZRR1/ZRR2/ZRR3) avec un critère principal de densité démographique et cinq critères secondaires. En fonction du nombre de critères remplis, un indice de fragilité permettra de classer le territoire concerné en ZRR 1, 2 ou 3 et de bénéficier des mesures associées à chaque niveau de zonage.

Les rapporteurs proposent également de mettre en place un panel de mesures dont l'ampleur serait adaptée à chaque niveau de zonage. Des moyens renforcés devront être consacrés aux territoires les plus fragiles sur la base des différents leviers identifiés par les rapporteurs :

1. des exonérations fiscales facilitant l'installation, la reprise et le maintien de l'ensemble des secteurs d'activité ;

2. des exonérations de cotisations patronales mieux ciblées sur les niveaux de revenus appropriés et la suppression de la condition d'augmentation nette d'effectif afin d'étendre le dispositif à toute nouvelle embauche ;

3. la création d'un fonds spécifique aux ZRR accordant des aides directes aux entreprises localisées dans les territoires les plus fragiles ;

4. une bonification de la dotation globale de fonctionnement, en particulier de la dotation de solidarité rurale, et une majoration des dotations de soutien à l'investissement des collectivités territoriales proportionnées à la fragilité des territoires concernés.

Enfin, les rapporteurs proposent de clarifier la gouvernance de la politique de l'État en matière de ZRR, en confiant à l'ANCT un rôle d'animation territoriale, et de créer une section dédiée au suivi des ZRR au sein de l'Observatoire des territoires.

Source : rapport d'information n° 41 (2019-2020), Sauver les zones de revitalisation rurale (ZRR), un enjeu pour 2020 de Bernard Delcros, Frédérique Espagnac et Rémy Pointereau

Comme indiqué par le rapporteur spécial au cours des années précédentes, la prorogation des dispositifs d'exonération fiscale était indispensable . Il ne partage pas l'intégralité des conclusions de la mission interministérielle 5 ( * ) ayant rendu ses travaux en 2020, en particulier l'idée que les exonérations fiscales et sociales afférentes à ces dispositifs n'ont pas démontré leur pleine efficacité en matière de création d'entreprises et d'emploi dans les territoires. Il souligne que la mission a également conclu que les zonages étaient perçus par les entreprises et les collectivités concernées comme un signal positif et une reconnaissance de la vulnérabilité de leur territoire.

L'annonce récente de la ministre de la cohésion des territoires de son intention de prolonger les ZRR jusqu'au 31 décembre 2023 permettra de garantir le temps nécessaire à la préparation de la révision des zonages.

Tout comme le rapporteur spécial l'avait déjà indiqué en 2021, cette prorogation ne doit cependant constituer qu'une étape de transition vers une réforme des dispositifs de zonage pour plus d'efficience et de lisibilité par les collectivités territoriales et les acteurs économiques.

Or, près d'un an après le vote de la poursuite de ces dispositifs jusqu'en 2022, et alors que ces deux années devaient être mises à profit pour poursuivre les travaux sur la géographie prioritaire et adapter l'ensemble des dispositifs nationaux qui ont été prorogés en 2021, il semble opportun de proroger d'une année supplémentaire afin de mieux anticiper la révision de ces zonages.

Seule la réforme des zones d'aides à finalité régionale (AFR) a été pour l'instant menée à bien, dans la mesure où la prolongation de ces zones n'avait été prévue en 2021 que pour un an et où le zonage arriverait à échéance à la fin de l'année 2021.

La révision de la carte française des aides à finalité régionale (AFR) 2022-2027

Les zones AFR correspondent aux territoires de l'Union européenne présentant des retards de développement, et sont définies par l'ANCT en concertation avec les préfets et les collectivités territoriales. La Commission européenne autorise les autorités françaises à octroyer des aides à finalité régionale devant contribuer au développement de ces zones.

Les entreprises implantées en zone AFR sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création.

La nouvelle carte AFR sera conçue sur la base des propositions de cartes régionales, qui seront transmises fin octobre par les préfets de région, à l'issue d'une concertation avec les conseils régionaux. Elle vise à prendre en compte l'augmentation de la couverture totale de population pour la France prévue par le le droit européen, soit une couverture de 31,95 % (contre 24,17 % pour la période 2014-2020, soit une augmentation de quasi 8 points).

II. LE PROGRAMME 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT »

Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) , créé en 2006 , est composé de sept actions territorialisées répondant à des enjeux divers.

Contrairement aux années précédentes, la maquette du programme 162 reste inchangée en 2022, après la création d'une action concernant les services d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna et la clôture de celle portant sur le Marais poitevin en 2021. L'action 04 est néanmoins élargie et dorénavant intitulée « plans d'investissement pour la Corse » afin de porter en 2022, d'une part, les dernières opérations du programme exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse (PEI) qui ne porte plus d'AE depuis cette année et, d'autre part, le plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC) .

Évolution par action des crédits du programme 162 « Interventions territoriales de l'État »

(en millions d'euros et en %)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution PLF 2022 / LFI 2021 (volume)

Évolution PLF 2022 / LFI 2021 (%)

FDC et ADP attendus en 2022

02 - Eau - Agriculture en Bretagne

AE

2,0

2,0

+ 0,0

+ 0,0 %

0,0

CP

2,0

2,0

- 0,0

- 0,0 %

0,0

04 - Plans d'investissement pour la Corse

AE

16,7

23,0

+ 6,3

+ 37,9 %

5,9

CP

17,7

17,7

0,0

0,0 %

20,2

08 - Volet territorialisé du plan national d'action chlordécone

AE

3,0

4,3

+ 1,3

+ 43,7 %

0,0

CP

3,0

4,3

+ 1,3

+ 43,9 %

0,0

09 - Plan littoral 21

AE

5,9

5,9

+ 0,0

+ 0,0 %

0,0

CP

4,4

4,4

- 0,0

- 0,0 %

0,0

10 - Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane

AE

11,9

11,9

0,0

0,0 %

42,8

CP

11,3

11,9

+ 0,6

+ 5,6 %

63,9

11 - Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire

AE

0,1

0,1

0,0

0,0 %

0,0

CP

0,7

0,7

0,0

0,0 %

0,0

12 - Service d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna

AE

1,3

1,3

0,0

0,0 %

0,0

CP

1,3

1,3

0,0

0,0 %

0,0

Total programme 162

AE

40,8

48,4

+ 7,6

+ 18,7 %

84,1

CP

40,4

42,3

+ 1,9

+ 4,8 %

84,1

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires.

Les montants prévus en 2022 sont comme les années précédentes nettement supérieurs à la programmation pluriannuelle , notamment en raison de la création de deux nouvelles actions en 2020 et 2021.

Comparaison entre la programmation pluriannuelle et la trajectoire du programme 162

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

2022

LPFP

27,30

25,81

27,81

25,41

24,41

LFI / PLF

27,33

25,67

38,55

40,35

42,30

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires.

A. LE PITE, UN OUTIL DONT L'EFFICACITÉ DOIT ÊTRE RELEVÉE MAIS DONT LE BUDGET INITIAL DOIT ÊTRE NUANCÉ DU FAIT DE MULTIPLES TRANSFERTS EN GESTION

1. Un programme permettant de mettre en avant des politiques publiques interministérielles et territorialisées

Le PITE présente deux caractéristiques qui le distinguent des autres programmes budgétaires :

- il se compose d'actions répondant à des enjeux locaux spécifiques , dont la mise en oeuvre est limitée à un périmètre géographique donné et non à une politique publique nationale ;

- il est financé par des contributions issues de programmes de différents ministères, rendus fongibles au niveau de chaque action . Le PITE a ainsi vocation à mutualiser des moyens déjà consacrés par chaque ministère à la réalisation de l'action et non à créer de nouvelles lignes de dépenses.

Ce programme représente un faible enjeu budgétaire en termes de montants de crédits. Il est toutefois pertinent pour répondre à certaines problématiques locales complexes , sur lesquelles l'État souhaite mettre l'accent.

En outre, le PITE présente l'avantage de constituer un effet levier pour les partenaires de l'État sur les politiques publiques concernées, la mobilisation financière de l'État entraînant généralement celle d'un certain nombre de cofinanceurs.

Enfin, le PITE présente des avantages notables pour les gestionnaires, en leur offrant une grande souplesse de gestion , tandis qu'il garantit aux acteurs locaux une meilleure visibilité de l'engagement de l'État sur leur territoire, en complément de crédits de droit commun des ministères concernés par la politique publique en question.

2. Une programmation initiale à nuancer du fait du financement des principales actions par des transferts en cours de gestion

En PLF 2022, 48,4 millions d'euros en AE et 42,3 millions d'euros en CP sont prévus. Toutefois, ces crédits ne reflètent que partiellement les montants accordés aux différentes actions au cours de l'exécution.

Le rapporteur spécial souligne une fois de plus le manque de sincérité de la programmation budgétaire du PITE, dans la mesure où quasiment toutes les actions sont alimentées par des transferts en gestion et où, par conséquent, les montants présentés ci-dessus ne correspondent pas au montant total et aux ressources réellement accordées aux politiques en question.

En 2020, l'exécution du programme était supérieure de 38 millions d'euros en AE et 16,9 millions en CP, soit près de 40 % des crédits votés par le Parlement en loi de finances initiale.

Exécution des crédits par action du programme 162 en 2020

(en millions d'euros)

LFI 2020

Exécution 2020

Variation prévision / exécution

02 - Eau - Agriculture en Bretagne

AE

2,0

6,8

4,8

CP

1,8

6,4

4,6

04 - Programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse

AE

16,8

45,8

29

CP

17,8

33,4

15,6

06 - Plan gouvernemental sur le Marais Poitevin - Poitou Charentes

AE

0,0

- 0,0

0

CP

1,4

1,4

0

08 - Volet territorialisé du plan national d'action chlordécone

AE

5,0

4,3

- 0,7

CP

5,0

3,8

- 1,2

09 - Plan littoral 21

AE

4,8

4,6

- 0,2

CP

4,4

3,1

- 1,3

10 - Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane

AE

16,8

19,0

2,2

CP

7,4

6,7

- 0,7

11 - Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire

AE

0,1

3,3

3,2

CP

0,7

0,7

0

Total programme

AE

45,4

83,7

38,3

CP

38,6

55,5

16,9

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette question se posera avec d'autant plus d'acuité en 2022 que l'action 04 - Plans d'investissement pour la Corse devrait, selon les informations transmises au rapporteur spécial, être abondée en gestion par des financements spécifiques à hauteur de 30,4 millions d'euros en AE et 12 millions d'euros en CP issus du plan de relance.

S'agissant de l'action 02, depuis 2018, le financement du plan de lutte contre les algues vertes (PLAV), soit 5 millions d'euros en AE et en CP et donc les deux tiers de l'action, intervient par voie de transfert en gestion en provenance du programme 149 - compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture. Lors du vote du Parlement sur la loi de finances, l'axe 5 de l'action 02, qui finance le PLAV, n'est donc pas doté .

Le transfert en gestion intervient en outre de plus en plus tard dans l'été - en 2020, il a eu lieu en juillet - ce qui entraîne un manque de disponibilité des crédits pour assurer les échéances à la date normale et limite la visibilité du responsable de BOP. La gestion conduit ainsi chaque année à une faiblesse de l'exécution à la fin du premier semestre .

Un constat identique peut être formulé concernant l'action 11 - qualité des eaux en pays de la Loire. Les AE de l'action proviennent du transfert en gestion du ministère de l'agriculture et de l'alimentation destiné à l'engagement des mesures agroenvironnementales et climatiques. Cet abondement trop tardif entraîne une absence de consommation au premier semestre, ce qui apparaît regrettable.

Les modalités liées à ces transferts en gestion sont difficilement compréhensibles . Elles n'apportent aucune garantie, ni quant au montant qui sera in fine transféré en faveur du plan ni quant au calendrier de ce versement. Le rapporteur spécial en appelle depuis des années à un rebasage des crédits, ce qui permettrait de clarifier la gestion et de restaurer l'autorisation budgétaire donnée par le Parlement, qui ne se prononce actuellement en loi de finances initiale que sur un tiers des crédits .

À défaut, il semble indispensable d'anticiper la date du transfert pour permettre au responsable de BOP de disposer le plus tôt possible des crédits . En 2017, le secrétariat général du ministère de l'intérieur a ainsi confirmé la nécessité de pouvoir disposer de l'abondement dès le début du printemps afin d'entreprendre les actions liées au plan. Force est de constater que ce n'est toujours pas le cas.

B. UN RAPATRIEMENT DES CRÉDITS DU PLAN DE TRANSFORMATION ET D'INVESTISSEMENT EN CORSE (PTIC) DEPUIS LA MISSION « RELANCE »

L'action 04 est désormais rebaptisée « plans d'investissement pour la Corse », du fait de la coexistence des derniers engagements du programme exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse (PEI) et du plan de transformation et d'investissement en Corse (PTIC). Elle s'élèverait à 23 millions d'euros en AE et 17,7 millions d'euros en CP, soit près de 60 % des crédits du programme 162 .

1. Une augmentation en partie liée à la fin du PEI

La dotation de l'action 04 enregistre une augmentation, notamment de 6,3 millions d'euros en AE afin d'engager les dernières opérations du PEI. Concernant 2022, le PEI augmente à hauteur de 23 millions d'euros en AE et 17,7 millions d'euros en CP, contre respectivement 16,7 et 17,7 millions d'euros en CP en 2021 .

Le PEI a été institué par l'article 53 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse. Prévu initialement pour une durée de quinze ans (2002-2017), il vise à « aider la Corse à surmonter les handicaps naturels que constituent son relief et son insularité » , et à « résorber son déficit en équipements et en services collectifs ».

Les opérations soutenues par le PEI sont essentiellement des équipements publics, dans les domaines des infrastructures de transport, de l'eau et de l'assainissement et des équipements culturels et sportifs.

La loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) a prorogé jusqu'à la fin 2022 le PEI en permettant l'engagement de crédit jusque 2022, les CP pouvant être débloqués jusqu'en 2026. Le programme 162 ne porte donc plus d'AE sur cette action à partir de 2022 . Sont ainsi prévus 40 millions d'euros pour la construction d'une nouvelle voie dans Ajaccio ; 24 millions d'euros pour des réparations dans le port de Bastia ou 11 millions d'euros pour le réseau ferré corse.

L'État s'était engagé à verser 416 millions d'euros sur l'intégralité du plan, auxquels s'ajoutent 552 millions d'euros de l'Agence pour le financement des infrastructures de transport de France (AFITF) versés par fond de concours.

Ce faisant, les effets des retards d'exécution constatés au cours sur la période 2014-2018 s'estompent . Depuis 2017 et la mise en place du PEI IV, seuls les crédits du fonds de concours versés par l'AFITF donnent lieu à des reports de crédits en raison notamment du retard pris dans la réalisation d'importantes opérations routières et du volume conséquent des restes à payer relatifs aux mesures routières, ferroviaires et portuaires du PEI.

2. Une hausse des crédits à anticiper du fait du financement en gestion du PTIC

Le Plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC), dont les crédits étaient portés en 2021 par le plan de relance à hauteur de 42 millions d'euros d'AE et 3 millions d'euros de CP, a vocation à prendre la suite du PEI.

L'augmentation de l'action 04 est également liée au rapatriement d'une partie des crédits du PTIC portés en 2021 par la mission Plan de relance . En outre, comme indiqué plus haut, 30,4 millions d'euros en AE et 12 millions d'euros en CP issus du plan de relance interviendront en gestion.

Ces contributions en gestion financeront des actions de développement territorial pour 18 millions d'euros en AE et 6,6 millions d'euros en CP ; de la maîtrise du risque d'inondations dans les secteurs urbains pour 4,2 millions d'euros en AE et de 5 millions d'euros en AE et en CP pour le téléphérique et le port d'Ajaccio.

Les objectifs du PTIC s'inscrivent dans la continuité de ceux du PEI. Celui-ci doit contribuer au développement durable de la Corse et répondre aux besoins prioritaires de ses habitants, par une politique ciblée d'investissements structurants dans différents domaines. Il se concentrera sur un nombre limité de projets, qui feront l'objet d'une contractualisation spécifique entre l'État et chacun des maîtres d'ouvrages concernés.

Cette politique de grands travaux répond en partie aux remarques soulevées par le rapporteur spécial dans son rapport précédent, où il dénonçait le risque de saupoudrage sur de nombreux projets et appelait à concentrer les financements sur des projets structurants.

Il s'interroge toutefois sur la logique conduisant à rattacher le PTIC au programme 162, dans la mesure où il s'agit d'un programme classique d'investissements .

C. L'AMBITION DU PLAN CHLORDÉCONE DANS LES ANTILLES DOIT ÊTRE POURSUIVIE ET APPROFONDIE DANS LE CONTEXTE DE MISE EN PLACE DU PLAN IV

L es crédits l'action 08 - Volet territorialisé du plan national d'action chlordécone sont en augmentation du fait du lancement du plan chlordécone IV.

Le plan chlordécone est mis en oeuvre en réponse à la problématique de l'impact sanitaire de la dispersion du pesticide chlordécone , utilisé pour la culture des bananes dans les milieux terrestres et aquatiques de la Martinique et de la Guadeloupe.

Quatre plans successifs ont été mis oeuvre depuis 2008 : le premier sur la période 2008-2010, le deuxième sur 2011-2013 et le troisième sur 2014-2020. Le plan chlordécone IV (2021-2027) a été mis en place pour la première année en 2021. Celui-ci est structuré en 6 stratégies dont 5 comportent des mesures mises en oeuvre dans le cadre du PITE :

- un axe « communication » doté en 2022 de 392 355 euros en AE et 433 884 euros en CP pour informer la population sur les comportements à adopter dans un contexte de pollution à long terme ;

- un axe « recherche » sous le pilotage d'un comité scientifique, à hauteur de 450 000 euros en AE et 360 000 euros en CP ;

- un axe « santé-environnement-alimentation » (2,45 millions d'euros en AE et 2,534 millions d'euros en CP) visant à effectuer un suivi de l'état de santé de la population et à tendre vers le zéro chlordécone dans l'alimentation ;

- un axe « socio-économique » pour 750 000 euros en AE et 730 000 euros en CP pour accompagner les professionnels de la pêche et de l'agriculture et indemniser les préjudices économiques liés à la pollution à la chlordécone ;

- un axe « santé-travail » destiné à améliorer la prévention des risques professionnels, mobiliser les acteurs de la santé au travail et faciliter l'information des salariés et des non-salariés agricoles dans les entreprises qui ont utilisé la chlordécone ou utilisent actuellement dans leurs procédés de travail des pesticides, améliorer la réparation des travailleurs exposés à la chlordécone et à d'autres pesticides à usage agricole. 250 000 euros en AE et 240 000 euros en CP y seraient consacrés en 2022 ;

- enfin, un axe « formation et éducation » pour sensibiliser le public scolaire, les professionnels de santé ainsi que les professionnels (agriculteurs, éleveurs, pêcheurs) aux problématiques liées à la chlordécone, non financé par le PITE ;

En 2021, 5,15 millions d'euros en AE et 5,41 millions d'euros en CP devaient être consacrés au plan chlordécone. La mise en place du plan chlordécone IV a en outre donné lieu à des transferts complémentaires, en gestion 2021, pour un montant total de 1,45 million d'euros.

Actions financées par l'action 08 du PITE en 2020 et 2021

(en dizaine de milliers d'euros)

AE

CP

Plan III - principales actions mises en oeuvre en 2020

Axe 1 : Stratégies de développement durable / Communication

Accélération de la cartographie des sols

307

313

Renforcement du programme JAFA

1100

960

Mise en place du dosage de chlordécone dans le sang

1300

1040

Investissement dans l'équipement des laboratoires

880

704

Dosage de chlordécone dans le sang (conventionnement avec les laboratoires, information des publics, formation des personnels)

420

336

Information et communication

128

30

Axe 2 : Favoriser une approche de prévention du risque sanitaire et de

protection des populations

Renforcement des contrôles sur les denrées alimentaires

440

360

Axe 3 : Poursuivre les actions de recherche

Fonctionnement de l'observatoire de la pollution agricole aux Antilles

161

118

Projet de recherche sur la

dépollution de l'eau par des hémicryptophanes

50

45

Axe 4 : Enjeux sociaux-économiques

Étude juridique et financière sur les modalités d'exploitation de futurs

navires de pêche en Martinique

5

4

Accompagnement des agriculteurs (diagnostic - conseil - développement de marques de qualité)

500

170

Plan IV - Principales actions mises en oeuvre au premier semestre 2021

Stratégie santé - environnement - alimentation

Contrôles des denrées alimentaires et analyses/cartographie des sols

680

370

Stratégie socio-économique

Accompagnement individuel ou collectif des éleveurs et agriculteurs

410

370

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2022, l'action 08 est dotée de 4,3 millions d'euros, soit une hausse de 1,3 % par rapport à 2021. La question de l'adéquation de ces montants avec les besoins réels demeure, comme souligné par un rapport interministériel d'évaluation en 2020 .

Les conclusions de la mission d'évaluation du plan chlordécone III (2014-2020)

Cette mission a été confiée à l'inspection générale des affaires sociales, au conseil général de l'environnement et du développement durable, au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et à l'inspection générale de l'administration, de l'éducation nationale et de la recherche, qui a rendu son rapport en février 2020. Le bilan du plan III dressé par la mission est assez sévère.

Celle-ci conclut à d'importantes lacunes dans l'organisation du pilotage du plan , jugée « peu efficace » du fait de l'absence d'implication directe des trois ministères de l'agriculture et du développement durable et de la recherche, à la direction générale de la santé (DGS) et à la direction générale des outre-mer (DGOM).

En outre, le financement des 30 millions d'euros du plan pour les premières années (2014-2017) reposait sur une articulation avec des crédits européens. Mais, selon la mission, les collectivités territoriales gestionnaires des fonds structurels européens ne se sont pas senties engagées par un plan auquel elles n'avaient pas été associées.

La mission fait également le constat d'un état d'avancement très inégal des actions . Selon elle, « des actions aussi essentielles que la surveillance médicale des professionnels et anciens professionnels de la banane et la cartographie des sols n'ont pas ou ont été insuffisamment réalisées ».

Autre critique, le volet recherche du plan présente un bilan mitigé au regard des objectifs du plan : « en continuité des deux plans précédents avec des actions et des projets largement autonomes, sans réelles hiérarchie ni cohérence avec les autres actions du plan, sa conception apparaît déficiente ». La mission pointe en particulier une absence de clarté sur la gouvernance du plan, entraînant un manque d'efficacité du pilotage.

La mission recommande en conclusion de revoir en profondeur le pilotage du plan IV afin de créer une synergie entre toutes les parties prenantes. Le Gouvernement semble avoir entendu cette recommandation et met en avant la « co-construction » du plan IV avec l'ensemble des acteurs.

Une déléguée interministérielle vient d'être nommée afin d'assurer une bonne coordination du plan IV et notamment afin d'améliorer le suivi entre national et local. Le rapporteur spécial considère que cette nomination est effectivement une avancée , d'autant plus qu'il s'agissait d'une recommandation de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale ayant rendu ses travaux en 2019 6 ( * ) .

La commission d'enquête avait également noté le faible niveau de consommation des crédits accordés au plan Chlordécone . Le taux d'utilisation des CP alloués au plan I était de 75,89 %, et celui des AE était de 83,39 %. Cette sous-consommation a perduré dans les plans suivants. En 2020, les crédits de l'action étaient sous exécutés à hauteur de - 13,5 % en AE et - 24,4 % en CP.

D. LE PLAN LITTORAL 21 EN OCCITANIE : UN FINANCEMENT PAR LE PROGRAMME 162 QUI PEUT INTERROGER

La loi de finances pour 2018 a créé une nouvelle action « plan littoral 21 » au sein du PITE. Celle-ci a pour objectif de participer au financement du plan de reconversion du littoral de la région Occitanie à l'horizon 2050 , défini conjointement par l'État et la région accompagnés de la Caisse des dépôts.

Ce plan veut répondre au vieillissement des stations touristiques, à l'inadaptation des infrastructures, aux conséquences du réchauffement climatique et de l'urbanisation qui menacent l'intégrité des espaces naturels. Le plan Littoral 21 s'inscrit dans le cadre de la stratégie nationale pour la mer et le littoral .

Le coût total prévisionnel du plan littoral 21 est estimé à près de 1 milliard d'euros , mobilisant 300 millions d'euros de la région pour la période 2017-2020 et 218,5 millions d'euros de l'État, dont une partie seulement passe par le PITE, le reste étant financé par des crédits de droit commun, les CPER et des crédits européens.

Le plan littoral 21 bénéficierait en 2022 de financements identiques à l'année précédente, soit 6 millions d'euros en AE et 4,4 millions en CP .

Il comporte trois orientations. La première « pour une vitrine française de la résilience écologique et de la valorisation patrimoniale », a permis par exemple de financer l'équipement de 1 000 postes d'amarrage à Port Camargue ou de mener une étude sur le suivi des risques littoraux. Cet axe devrait en 2022 bénéficier de 800 000 euros en CP et 1,05 million d'euros en AE.

Le deuxième axe « pour une économie globale portée par l'innovation qui irrigue tout le territoire » a notamment financé l'aménagement du front de mer de Port la Nouvelle ou la construction d'un plan d'actions pour la promotion d'une offre oenotouristique durable. Cet axe représenterait en 2022 2,9 millions d'euros en AE et 2,36 millions d'euros en CP.

Enfin, le dernier axe, « pour un littoral symbole d'attractivité, d'accueil et de cohésion républicaine » a par exemple permis de requalifier les ports de Béziers. Il est doté de 1,95 million d'euros en AE et 1,26 million d'euros en CP.

De manière plus générale, le plan Littoral 21 finance trois types d'interventions : des études à caractère général et souvent prospectives, des études préalables à la réalisation de dossiers complexes, qui doivent également permettre de mettre en cohérence ces projets avec les objectifs du Plan Littoral 21, et la réalisation d'investissements entrant dans le plan d'aménagement du territoire littoral.

Les principaux projets portés par l'action concernent le développement et l'accompagnement de la filière halieutique ; la valorisation de l'offre culturelle du littoral occitan ; la connaissance des risques et la gestion de l'eau ; le développement de la filière sportive en particulier concernant les sports de glisse ; l'amélioration des ports de plaisance ; la modernisation et le développement équilibré des stations littorales ou encore l'aménagement des voies de circulation douce le long de la côte.

Si le rapporteur spécial partage l'objectif de revitalisation du littoral de la région Occitanie, il s'interroge toutefois sur le bien-fondé de faire passer son financement par le programme 162, dans la mesure où il ne répond pas à un besoin ponctuel et mesurable, à l'instar des autres actions, mais où il répond à une politique d'aménagement plus large, dans lesquels les financements apportés par le PITE restent mineurs .

E. UNE ATTENTION SOUTENUE À PORTER À L'ACTION EAU ET AGRICULTURE EN BRETAGNE, SUPPORT DES FINANCEMENTS POUR L'ÉTAT DE LA LUTTE CONTRE LES ALGUES VERTES

La part « État » du financement de la lutte contre les algues vertes passe entièrement par l'action 02 « Eau et agriculture en Bretagne » . Il s'agit de l'action la plus ancienne du programme, inscrite depuis 2006. Elle ne compte que pour 4,8 % des crédits accordés au PITE en loi de finances pour 2021 avec 1,876 million d'euros . Toutefois, ces chiffres ne tiennent pas compte du transfert en gestion de 5 millions d'euros, soit deux tiers du montant de l'action .

Le rapporteur spécial a consacré un récent rapport de contrôle à cette action, découlant sur 23 recommandations 7 ( * ) . La Cour des comptes a également rendu un rapport sur la lutte contre les algues vertes, portant aussi sur le financement des collectivités locales 8 ( * ) .

L'action contribue également au financement du plan de lutte contre les algues vertes (PLAV) mis en oeuvre pour la période 2010-2015, renouvelé pour la période 2017-2021, puis prolongé de deux à trois années et qui devrait être inscrit dans le CPER 2021-2027 . Ce plan permet un suivi spécifique de la concentration moyenne des eaux en nitrates de plusieurs bassins versants dans huit baies prioritaires bretonnes . Il finance également des projets de territoire préventifs destinés à limiter les rejets d'azote dans l'environnement.

Le plan de lutte contre la prolifération des algues vertes se veut évolutif et construit autour de trois axes : un volet préventif visant à faire évoluer les pratiques et systèmes agricoles pour réduire les flux de nitrates dans les cours d'eau, un volet curatif axé sur la sécurité des personnes grâce au ramassage et au traitement des algues échouées sur les plages et un volet scientifique visant à renforcer la connaissance du phénomène.

Lors de sa création en 2006, l'action Eau et agriculture en Bretagne ne comportait que trois axes :

- axe 1 : inciter les agriculteurs et les autres acteurs à supprimer les atteintes à l'environnement ;

- axe 2 : mesurer l'évolution de la situation environnementale des milieux et faire appliquer les solutions correctives par l'action réglementaire. Cet axe, quoique conservé aujourd'hui, vise désormais à faire appliquer des « solutions collectives » et non plus correctives, changement révélateur de la différence d'approche de l'État depuis la mise en oeuvre des plans de lutte contre les algues vertes (PLAV).

- axe 3 : améliorer l'évaluation des résultats , développer le retour d'expérience et amplifier la gestion prospective et le pilotage à long terme.

À ces trois axes s'est ajouté un quatrième, portant les dispositifs spécifiquement prévus pour les neuf bassins versants visés par le « plan d'urgence nitrates ». Cet axe est aujourd'hui clos.

Le plan de lutte est supporté quant à lui par l'axe 5, intitulé « lutter contre la prolifération des algues vertes en application du plan algues vertes » .

Les dépenses de collecte des algues remboursées aux communes ont été financées par un transfert, non pérenne, en provenance du programme 122 - concours spécifiques et administration de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Le suivi des crédits par programme contributeur n'a pas été mis en place lors de la création de l'action, et il est donc difficile aujourd'hui de retracer les crédits initialement versés par chacun des ministères. Depuis 2018, le programme 149 - compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture finance par un transfert en gestion le PLAV, à hauteur de 5 millions d'euros.

L'État contribue à hauteur de 40 % au financement du PLAV, via le PITE. Il contribue cependant de manière différenciée aux différents volets.

L'État finance seul le volet curatif , au travers de remboursements aux collectivités territoriales. Pour 2020, le montant mobilisé était de 1,07 million d'euros en AE et CP . À chaque programmation, un montant prévisionnel de 1,3 million d'euros, correspondant à la moyenne pluriannuelle du PLAV 1, est fléché vers le volet curatif au titre de l'axe 5, auxquels s'ajoutent 50 000 euros pour les actions de ramassage dans le Morbihan.

Le PITE finance également une partie du volet recherche du PLAV, à hauteur de 200 000 euros annuels. S'agissant du volet préventif du plan, l'État contribue annuellement à hauteur de 3,7 millions d'euros pour l'ensemble des huit baies.

Les dépenses de transfert représentent environ la moitié des dépenses de l'action Eau et agriculture en Bretagne, essentiellement à destination des collectivités. L'action ne finance pas de dépense de personnel (titre 2).

Ventilation des dépenses de l'action Eau et agriculture en Bretagne par titre et par catégorie en 2021 (en %) hors PLAV

Source : rapport d'information « algues vertes en Bretagne : pour une ambition plus forte »

Le graphique ci-dessus, élaboré sur la base des documents budgétaires ne prend toutefois pas en compte les cinq millions versés à l'axe 5 lors du transfert en gestion, et n'est donc pas entièrement représentatif.

La subvention pour charges de service public correspond à une subvention à l'Agence régionale de santé au titre des axes 2 et 3 de l'action Eau et agriculture en Bretagne, établie sur la base d'une convention annuelle 9 ( * ) . Elle s'élevait à 240 000 euros en 2021 et pourraient être augmentée à hauteur de 270 000 euros en 2022.

Les transferts aux collectivités territoriales financent les actions de ramassage et de traitement des algues . Les autres transferts recouvrent quant à eux des financements versés à l'institut national de la recherche agronomique (INRA), à la chambre régionale d'agriculture de Bretagne et au conservatoire de l'eau.

Les partenaires financiers ont mis en place pour le PLAV 2 un décroisement des aides afin de simplifier les dossiers de subvention . Il est donc désormais plus facile de retracer l'origine des différents financements, difficulté qui a été soulevée par l'ensemble des acteurs à l'issue du PLAV 1.

Le financement apporté par le PITE constitue la principale valeur ajoutée du PLAV, dans la mesure où les financements apportés par le Conseil régional et par l'Agence de l'eau sont des aides de droit commun.

Concernant le ramassage des algues vertes échouées, il est désormais pris en charge à 100 % sur fonds PITE, tout comme la moitié des frais de traitement de ces algues.

Concernant le volet préventif du PLAV, l'État finance au travers du PITE plusieurs dispositifs destinés à limiter les fuites de nitrates en améliorant les pratiques agricoles. Ceux-ci portent notamment sur le conseil agricole ciblé pour les exploitants sur différentes thématiques (diagnostic individuel, changement de système, gestion de l'herbe, gestion de l'azote et gestion de l'interculture), des chantiers collectifs de semis précoces de couverts végétaux et le remplacement pour congés ou formation des exploitants agricoles. Le PITE finance également des dispositifs de conseils individuels aux agriculteurs, effectués par des prestataires privés et par la chambre d'agriculture.

Un suivi nécessaire au cours des prochains mois

Le rapporteur spécial ainsi que la Cour des comptes ont soulevé dans leurs rapports respectifs de nombreux points d'amélioration. L'État a en outre été condamné le 4 juin 2021 par le tribunal administratif de Rennes pour carence de la politique publique de lutte contre les algues vertes.

La politique de lutte contre les algues vertes est donc amenée à fortement évoluer au cours des prochains mois, d'autant plus qu'une consultation citoyenne a été lancée par les services de l'État en Bretagne dans la perspective de la construction du prochain programme régional d'action nitrates (2022-2026). Le rapporteur spécial considère qu'un suivi détaillé est nécessaire et devrait être conduit de manière approfondie début 2022 , notamment afin de s'assurer que ses recommandations contribuent à la refonte de la politique de lutte contre les algues vertes.

F. LA POURSUITE DE L'ACTION RECONQUÊTE DE LA QUALITÉ DES COURS D'EAU EN PAYS DE LA LOIRE

L'action 11 - Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire résulte du contrat d'avenir des Pays de la Loire , signé en février 2019 par le Premier ministre et la Présidente du conseil régional. Elle vise à permettre à l'État de poursuivre et intensifier son action pour répondre aux enjeux écologiques, économiques, d'aménagement du territoire et de santé publique liés à la qualité des eaux ligériennes très dégradées . Elle a pour objectif de mobiliser les maîtres d'ouvrage pour lancer des programmes d'action efficaces, accompagner la transition agro-écologique des exploitations agricoles et renforcer la connaissance des facteurs de dégradation des cours d'eau et des leviers d'actions.

La présente action est stable par rapport à 2020 et 2021 et est dotée de 59 000 euros seulement en AE et 700 000 en CP. Ces crédits ne concernent que l'axe 2 de l'action « accompagner la transition agro-écologique des exploitations agricoles ».

Les autres axes de l'action ne sont pas dotés en PLF. Par conséquent et comme les années précédentes, le rapporteur spécial ne peut sur cette action que réitérer ses critiques, pour laquelle les transferts en gestion nuisent à la sincérité budgétaire de la présentation.

Les crédits de l'action proviennent du transfert en gestion du ministère de l'agriculture et de l'alimentation et de l'agence de l'eau Loire Bretagne. Ces crédits ne sont mis à disposition que tardivement. Ce constat entraîne une absence de consommation des crédits de l'action au premier semestre.

G. LE FONDS INTERMINISTÉRIEL POUR LA TRANSFORMATION DE LA GUYANE, RELAIS DU CONTRAT DE CONVERGENCE

L'action 10 - Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane se substitue au contrat de convergence et de transformation 2019-2022 . L'action est inscrite au PLF 2022 à hauteur de 12 millions d'euros en AE et en CP, soit une légère hausse en CP et une stabilité en AE.

L'État s'est engagé à mobiliser 294,2 millions d'euros dans le cadre de ce contrat pour la période 2019-2022 , dont 178 millions d'euros issus d'opérateurs (l'AFITF à hauteur de 157,1 millions d'euros, l'agence française de la biodiversité pour 10,4 millions d'euros, l'agence nationale du sport à hauteur de 4,5 millions d'euros et l'ADEME pour 6 millions d'euros). La dotation en CP progresse conformément à ce tendanciel pluriannuel .

Le PITE porte les cinq volets inscrits dans le contrat de convergence et de transformation signé par l'État avec la Guyane : cohésion des territoires, mobilité multimodale, territoires résilients, territoires d'innovation et de rayonnement ainsi que cohésion sociale et employabilité. Les crédits sont notamment consacrés à la réhabilitation de collèges et de campus universitaires, à des opérations de revitalisation urbaines et à la mise en place d'une plateforme d'appui aux collectivités territoriales guyanaises.

En dehors des crédits de droit commun, l'action bénéficiera également de crédits issus de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), de l'office français de la biodiversité (OFB), et de l'agence de la transition écologique (ADEME) et d'un transfert en gestion de 200 000 euros du ministère chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes.

En 2022, 40 millions d'euros en AE et 60 millions d'euros en CP devraient provenir de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour financer l'axe 2 de l'action, c'est-à-dire la mobilité multimodale par voie de fonds de concours.

En outre, 1,4 million d'euros en AE et en CP de l'agence de la transition écologique (Ademe) pour l'ingénierie de projet et la gestion et la valorisation des déchets, et 2 millions d'euros en AE et 2,8 millions d'euros en AE et 2,5 millions d'euros en CP de l'office français de la biodiversité (OFB) pour l'alimentation en eau potable et l'assainissement des eaux usées sont prévus. Ces contributions complèteront les crédits (1 million en AE et CP) sur le troisième axe consacré à l'amélioration de la résilience des territoires.

Au total, en 2022, 42,8 millions d'euros en AE et 64 millions d'euros en CP sont attendus par fonds de concours.

La majorité des crédits PITE, soit 7,8 millions d'euros en AE et 7,4 millions d'euros en CP, sont consacrés à l'axe 1 « cohésion des territoires ».

H. LE FINANCEMENT TRANSITOIRE DES SERVICES DE SECOURS À WALLIS-ET-FUTUNA

Une nouvelle action a été créée en 2021, concernant les services d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna . L'État délègue transitoirement, par convention, sa compétence en matière de sécurité civile à la collectivité de Wallis-et-Futuna et un budget annexe est créé pour gérer les crédits du service d'incendie et de secours au sein du budget de cette dernière.

Les crédits seront versés, par voie de subvention, au budget annexe du territoire créé spécialement pour la gestion du service d'incendie et de secours de Wallis et Futuna, en l'attente de la révision du statut qui attribuera cette compétence à l'assemblée territoriale.

L'enveloppe de 1,3 million d'euros par an, fermée sur les trois années à venir, allouée à cette action a été définie par une mission conjointe d'audit de l'Inspection générale de la sécurité civile (IGSC) et de la direction générale des outremer (DGOM). Ces fonds proviennent pour 700 000 euros du programme 161 - sécurité civile et pour 576 000 euros du programme 123 - conditions de vie outre-mer.

Cette solution n'est cependant censée être que transitoire. Le rapporteur spécial rappelle que le PITE n'a pas vocation à servir de plateforme de transit s'agissant de versements à des collectivités territoriales.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 16 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Bernard Delcros, rapporteur spécial, sur les programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État » de la mission « Cohésion des territoires ».

M. Claude Raynal , président . - Nous examinons cet après-midi quatre missions. Nous commençons nos travaux par l'examen du rapport sur la mission « Cohésion des territoires ». Je salue la présence de Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, et de Jean-Michel Houllegatte, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

M. Bernard Delcros , rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État » . - Le volet « Politique des territoires » de la mission « Cohésion des territoires » concerne les programmes 112 et 162, pour un total de 258,8 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 282,3 millions d'euros en crédits de paiement (CP), auxquels il faut ajouter 631 millions d'euros au titre des dépenses fiscales prévues dans le programme 112, incluant notamment les zones de revitalisation rurale (ZRR) ou les zones d'aide à finalité régionale (AFR).

Concernant le programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », les crédits demandés s'élèvent à 210 millions d'euros en AE et 240 millions d'euros en CP, soit une hausse de 20 % par rapport aux crédits prévus dans loi de finances initiale (LFI) de 2021 à un niveau similaire par rapport à 2020. Cette hausse s'inscrit dans un objectif de redynamisation des territoires ruraux, en particulier du renforcement de leur ingénierie.

Par ailleurs, 96,1 millions d'euros en CP et 8 millions d'euros en AE concernent des crédits potentiellement rattachés au programme 112, mais ouverts dans la mission « Plan de relance ».

Je dirai quelques mots sur l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dont le programme 112 porte la subvention pour charge de service public, à hauteur de 61 millions d'euros.

Cette subvention est stable, alors que les missions de l'ANCT, en lien avec la mise en place de l'agenda rural, sont, quant à elles, étendues. Par ailleurs, le projet de budget pour 2022 prévoit de conserver les 10 millions d'euros supplémentaires accordés à l'ANCT en 2021 afin de financer l'ingénierie des collectivités - cela correspond au doublement des crédits par rapport à 2020. Cette mesure satisfait une demande que nous avions formulée parce qu'il s'agissait de répondre un réel besoin pour les territoires ruraux.

Ainsi, les dispositifs de soutien en ingénierie aux territoires ruraux répondent à la fois au besoin d'ingénierie interne avec les chefs de projets du programme « Petites Villes de demain (PVD) », les chargés de mission du programme « Fabrique de territoires » ou les chargés de projets dans le cadre du volontariat territorial en administration (VTA) et à des besoins plus spécifiques et ponctuels sous forme de prestations de bureaux d'études dans le cadre du marché à bons de commande passé par l'État.

L'ANCT soutient également plusieurs programmes à destination des territoires, notamment « Action coeur de ville », en faveur de 222 villes ; « Territoires d'industrie », avec 146 territoires retenus ; « Fabrique de territoires », qui concerne aujourd'hui 300 territoires ; ou encore « Petites Villes de demain », qui vise à redynamiser les bourgs-centres ruraux - 933 candidatures ont été retenues et visent 1 600 communes.

L'agence accompagne également les collectivités pour la mise en place des contrats de relance et de transition écologique (CRTE). Ainsi, 377 CRTE devraient être signés d'ici à la fin de l'année, certains à l'échelle des intercommunalités et d'autres à l'échelle plus large des pôles d'équilibre territorial et rural (PETR).

Le programme 112 comprend également les crédits de trois générations de contrats de plan État-région (CPER). Pour la génération 2021-2027, ce sont au total 998,6 millions d'euros qui seront contractualisés au titre du programme 112, et 155 millions d'euros au titre du plan France Relance, ce qui représente une nette augmentation par rapport à la génération précédente.

Concernant les maisons France Services, les crédits qui leur sont dédiés augmentent de 8 millions d'euros, pour atteindre 36,4 millions d'euros. Cette hausse accompagne l'augmentation du nombre de maisons labellisées « France Services » : 1 745 sont actuellement labellisées, pour un objectif de 2 500 maisons fin 2022.

Notons que, à partir du 1 er janvier prochain, les maisons de services au public (MSAP) qui ne répondent pas aux critères des maisons France Services ne seront plus labellisées et ne bénéficieront plus de financements de l'État. Il me paraît important de relayer cette information aux collectivités concernées afin que les élus puissent anticiper cette réalité.

Je veux également revenir sur le sujet des zonages, notamment les ZRR, dont nous avons voté en décembre 2020 la prolongation jusqu'à la fin 2022.

Afin de laisser le temps nécessaire pour finaliser les nouvelles modalités de soutien aux territoires ruraux qui pourraient succéder aux ZRR, la ministre de la cohésion des territoires a bien voulu proroger les dispositifs attachés à l'ensemble des zonages, notamment les ZRR jusqu'au 31 décembre 2023, ce qui répond à notre demande. Les 4 000 communes qui ne sont plus éligibles au dispositif des ZRR au regard de la réforme de 2015 continueront à en bénéficier durant cette prorogation.

Je serai plus bref sur le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE), dont la maquette n'est pas modifiée.

Le PITE est composé d'actions répondant à des enjeux locaux spécifiques. Il rassemble des contributions issues de programmes de différents ministères. C'est un outil utile, qui permet de prendre en compte les spécificités des actions locales et de garantir la souplesse et la cohérence de l'action de l'État.

Le projet de budget propose de doter ce programme de 48 millions d'euros en AE et 40,3 millions d'euros en CP, soit une hausse de près de 20 % pour ce qui concerne les AE. Cette augmentation provient essentiellement de la fusion de deux programmes en faveur de la Corse, qui concernent près des deux tiers des crédits.

Ces chiffres doivent toutefois être relativisés dans la mesure où le programme est chaque année abondé de manière importante par des transferts en gestion. En réalité, l'exécution correspond quasiment au double des crédits prévus en loi de finances initiale, ce qui limite quelque peu la portée de l'autorisation parlementaire.

Concernant l'action qui porte sur le plan de lutte contre le développement des algues vertes, je vous avais présenté, au printemps dernier, un travail de contrôle sur ce sujet, à l'issue duquel j'avais présenté 23 propositions pour renforcer son efficacité. Plusieurs d'entre elles sont d'ores et déjà en cours d'application, et le principe de mise en place d'un nouveau programme d'actions à partir de 2023 que nous demandions est aujourd'hui validé. Néanmoins, le suivi de ces recommandations me semble mériter un travail plus approfondi, que je conduirai au début de l'année prochaine.

En conclusion, étant donné que l'on enregistre de réelles avancées en faveur de la ruralité qui répondent à nos propositions, je vous invite à adopter les crédits de la partie « Politique des territoires » de la mission.

Toutefois, je souhaite formuler quelques observations sur plusieurs points pour l'avenir.

Premièrement, avec la montée en gamme des maisons France Services, qui nécessitent désormais deux équivalents temps plein (ETP) et la reprise de missions qui incombaient précédemment à l'État, comme, par exemple, celle qui a été transférée à l'occasion de la réforme des trésoreries, le coût de fonctionnement de ces maisons a augmenté de façon significative. Aujourd'hui, les 30 000 euros de financements apportés à chaque structure, pour moitié au travers du programme 112 et pour autre moitié par les opérateurs via le Fonds national France Services (FNFS), ne représentent en moyenne que 25 à 30 % du coût global de fonctionnement. Aussi, il importera de réexaminer cette question.

Deuxièmement, les différents dispositifs mis en place pour renforcer l'ingénierie locale étaient absolument nécessaires, mais ils devront faire l'objet d'une évaluation, en vue d'envisager des mesures de pérennisation.

Troisièmement, concernant les CRTE, la contractualisation entre l'État et les territoires à l'échelle infra-régionale, que nous soutenons bien sûr, devrait en toute logique permettre aux élus locaux de planifier leurs projets sur la durée du contrat avec toute la visibilité nécessaire. En réalité, cette première année de mise en place des CRTE montre qu'il n'en est rien sur le terrain. Il faut absolument revenir, dès 2022, au principe même d'un contrat, à savoir donner de la visibilité.

Quatrièmement, enfin, comme je l'avais indiqué l'année dernière, la dispersion, dans plusieurs missions, des crédits liés à l'aménagement du territoire complexifie et affaiblit la lisibilité de la politique globale de l'État en faveur de la cohésion des territoires. J'aimerais que nous puissions réexaminer cette question.

M. Claude Raynal , président . - Merci pour ce bel hymne à la ruralité.

M. Jean-Baptiste Blanc , rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » . - C'est avec une grande modestie que je reprends le flambeau de Philippe Dallier pour vous présenter ces programmes.

Il est de plus en plus difficile de se loger dans notre pays. De nombreux observateurs évoquent même une grave crise du logement à venir, peut-être la plus grave depuis fort longtemps.

La mission « Cohésion des territoires », avec des crédits de 17,1 milliards d'euros en CP, connaîtra une hausse de ses crédits de 1,2 milliard d'euros en 2022, due pour l'essentiel aux programmes 177 et 109. Je vous présenterai ces deux programmes, ainsi que les programmes 135 et 147, c'est-à-dire ceux qui traitent de l'hébergement, du logement, de l'urbanisme et de la ville.

Le programme 177 porte sur la politique d'hébergement d'urgence et d'accès au logement pour les personnes les plus défavorisées. Les crédits demandés pour 2022 s'élèvent à 2,7 milliards d'euros en CP, soit une augmentation de 0,5 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021.

Pour la première fois depuis longtemps, aucun crédit n'est ouvert sur l'hébergement d'urgence dans le collectif budgétaire de fin d'année, parce que 700 millions d'euros ont été rajoutés en juillet dernier.

Le niveau élevé des crédits ouverts en 2022 est la conséquence du choix retenu de maintenir le parc d'hébergement au niveau atteint pendant la crise sanitaire, avec quelque 200 000 logements, et une prévision de diminution à 190 000 d'ici à la fin 2022. C'est une politique qui est en mutation, avec une nouvelle administration responsable qui se montre volontariste. Il restera à voir si elle parvient à améliorer l'accès au logement des personnes défavorisées afin de réduire le temps de passage par l'hébergement d'urgence, l'objectif de cette politique devant être la diminution de ses besoins.

Plusieurs problèmes devront être résolus.

Tout d'abord, l'hébergement en hôtel, qui a été fort utile pendant la crise sanitaire, mais qui ne facilite pas les actions d'insertion des personnes, concerne plus de 70 000 personnes, contre 50 000 il y a deux ans et 20 000 il y a dix ans. Par ailleurs, le parc d'hébergement d'urgence, en application du principe d'inconditionnalité de l'accueil, reçoit encore une proportion importante de personnes qui devraient plutôt trouver leur place dans les structures du ministère de l'intérieur dédiées aux demandeurs d'asile ou aux personnes à droits incomplets.

Ensuite, le conventionnement des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) a pris du retard, et il faudra reporter la date limite du 31 décembre 2022.

Le programme 109, qui concerne les aides personnalisées au logement (APL), mobilise 13,1 milliards d'euros, ce qui représente les trois quarts des crédits de la mission. Il s'agit toutefois d'une aide de guichet, sur laquelle l'État a peu de prise sauf lorsque les règles sont modifiées, ou lorsqu'il fait appel à d'autres financeurs. Action Logement a ainsi contribué deux années de suite au financement des APL, à hauteur de 1 milliard d'euros en 2021. Ce ne sera pas le cas en 2022, et il faut s'en réjouir, car ce n'est pas la vocation de cette structure. En conséquence, la participation de l'État augmente, mais à hauteur de 583 millions d'euros seulement, car certains effets réduisent le coût des APL, en particulier le fait que la réforme du versement contemporain des aides sera pleinement en vigueur.

Cette réforme, par ses retards successifs, aura accompagné la plus grande partie de ce quinquennat, qui se sera illustré par une recherche constante d'économies portant, non sur les structures de l'État, comme l'a déjà exposé le rapporteur général, mais sur cette aide de guichet que sont les APL. Le « rabot » de cinq euros appliqué aux APL en 2017 a marqué les esprits par son effet direct sur les ressources des personnes concernées. L'instauration de la réduction de loyer de solidarité (RLS), quant à elle, a fait supporter une baisse du coût des APL par les organismes de logement social : il conviendra d'évaluer la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan). Enfin, le versement contemporain, une réforme d'une haute technicité, qui a pris plusieurs années de retard, s'est mis en place cette année avec des dysfonctionnements. Elle se fonde sur un principe difficilement contestable, puisqu'il s'agit d'adapter plus rapidement qu'auparavant les ressources aux revenus. En pratique, son objectif est le même que les réformes précédentes, à savoir réduire le montant consacré par l'État aux APL : l'économie obtenue sera d'environ 1,25 milliard d'euros en 2022. La contribution de l'État passera ainsi de 15,5 milliards d'euros en 2017 à 13 milliards d'euros en 2022, tandis que le cofinancement assuré par les employeurs demeure stable entre 2,5 et 2,8 milliards d'euros. La RLS est une usine à gaz, qui démontre l'absence de vision stratégique de l'État.

Le programme 135 porte des actions diverses relatives à la construction, l'habitat et l'urbanisme, pour un montant de crédits de 535 millions d'euros. Sa particularité est qu'il va « doubler » de taille en cours d'exécution en raison des fonds de concours versés par le secteur du logement social au travers du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), et les dépenses fiscales rattachées au programme représentent un montant bien plus important, de 13,3 milliards d'euros. Ce programme est le pivot des politiques du logement et de l'urbanisme.

Quels sont les principaux défis de la politique du logement ?

Le premier est déjà très présent dans les discussions budgétaires, c'est celui de la rénovation énergétique, avec l'impact important de MaPrimeRénov', financé sur d'autres missions budgétaires, mais aussi les programmes de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), partiellement financés sur le programme 135, et dont la dynamique pousse à une ouverture de crédits à hauteur de 92 millions d'euros dans le collectif budgétaire que nous a présenté ce matin le rapporteur général.

Toutefois, un autre enjeu s'impose, qui lui est lié, mais concerne les collectivités encore plus que l'État : c'est celui de la lutte contre l'artificialisation des sols, avec l'objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN), fixé par la loi Climat et résilience. Le succès du fonds Friches le démontre : les collectivités ne manquent pas de projets, de sorte que ce fonds de 300 millions d'euros a dû être porté à 650 millions d'euros, et le Président de la République a annoncé sa pérennisation. Toutefois, il faudra en préciser rapidement les modalités concrètes pour ne pas décevoir les attentes, car le véhicule budgétaire actuel, qui est le plan de relance, ne sera plus disponible. Il conviendra d'accompagner les territoires avec de nouveaux outils et de nouveaux financements, car les ressources propres des collectivités territoriales sont insuffisantes pour mener les projets nécessaires à la réutilisation du foncier disponible. À ce titre, les établissements publics fonciers, qui figurent dans le programme 135, ont tout leur rôle à jouer. Ils sont financés sur ce programme à hauteur de 182,3 millions d'euros, en compensation de la diminution du produit des taxes spéciales d'équipement. Ce financement devra être pérennisé. Il sera aussi nécessaire de réviser les documents d'urbanisme. Or les aides de l'État à ce titre sont en baisse.

Par-delà ces deux tendances majeures qui concernent l'ensemble du secteur de la construction, il faut voir où en est le logement lui-même. Ce quinquennat, qui a commencé par l'annonce d'un choc de l'offre sur le logement, s'achève sur un choc de la demande et une crise de l'offre sans précédent.

Le secteur de la construction tourne en effet à plein régime pour ce qui concerne les commandes, mais manque d'offre de logements. Les permis de construire sont en chute libre et le bâtiment doit faire face à la montée du coût des matériaux de construction - on évoque une augmentation au minimum de 10 % depuis un an. Pour l'avenir, s'y ajoute le surcoût réglementaire, estimé par l'Union sociale pour l'habitat à 30 000 euros par logement, avec, notamment, la nouvelle réglementation environnementale.

Plus généralement, l'Insee souligne dans une note parue la semaine dernière que le parc de logements augmente de moins en moins vite en France. L'évolution est aussi structurelle : le parc de logements collectifs progresse désormais deux fois plus vite que le parc de logements individuels, alors que leur progression était comparable jusqu'à la fin des années 2000.

Comme je l'ai souligné dans mon introduction, il est de plus en plus difficile de se loger en France : on construit moins de 350 000 logements par an et moins de 100 000 logements sociaux. Il faut un véritable plan de relance pour répondre à la demande de logements sociaux de 2,2 millions de ménages, soit une augmentation de 20 % en huit ans.

Dans ces conditions, la situation du logement social soulève des questions qui n'ont pas été résolues. L'instauration de la RLS n'a pas, pour l'instant, mis en difficulté majeure les organismes, mais c'est au prix de mesures d'aide importantes de la part, notamment, d'Action Logement et de la Caisse des dépôts et consignations. Or ces aides prolongent l'endettement dans le temps.

Concernant Action Logement, on peut se demander pendant combien de temps cet organisme va continuer à porter à bout de bras tant de politiques publiques. La réponse de ses responsables est simple : ils vont devoir revenir à un régime d'activité plus sobre et il sera difficile de leur demander, à partir de 2023, plus que les financements pour lesquels ils se sont déjà engagés, c'est-à-dire notamment le financement de l'ANRU. Dès lors, que deviendront les aides à la pierre si Action Logement n'apporte plus 350 millions d'euros en 2023 ? De même, le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) pourrait avoir du mal à réaliser ses actions si Action Logement ne lui apporte plus 10 millions d'euros par an. Ces questions devront être traitées en 2022, ainsi que celle de la méthode de calcul des surcompensations d'aides d'État - probablement après l'élection présidentielle. De nombreuses questions sont renvoyées après cette échéance...

Dans ces conditions, l'objectif fixé par le Gouvernement d'agréer 250 000 logements sociaux en deux ans ne sera certainement pas atteint ; la ministre elle-même a reconnu devant la commission des affaires économiques que le nombre serait inférieur à 110 000 en 2021, ce qui est sans doute encore optimiste.

Le dernier programme, le programme 147, porte sur les crédits de la politique de la ville à hauteur de 558 millions d'euros, en hausse de 45 millions d'euros.

Le principal fait est l'augmentation de 2 milliards d'euros du financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) pour la réalisation du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), qui passe de 10 à 12 milliards d'euros. La participation de l'État doit passer de 1 à 1,2 milliard d'euros, mais versera seulement 15 millions d'euros en 2022 sur le programme 147, comme les années précédentes. C'est encore une fois Action Logement qui assurera la majeure partie du financement.

Or permettez-moi de souligner quelques constats du rapport de Jean-Louis Borloo intitulé Vivre ensemble, vivre en grand pour une réconciliation nationale : sur 1 500 quartiers de la politique de la ville (QPV), 216 d'entre eux connaissent des difficultés urbaines, 60 sont en risque de fracture et 15 en risque de rupture. En outre, 10 millions de nos concitoyens se considèrent comme relégués.

Enfin, je présenterai les trois articles rattachés à la mission.

L'article 42 bis prévoit que les logements-foyers en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion et à Mayotte peuvent donner droit à l'aide personnalisée au logement sur convention. C'est une mesure d'équité qui facilitera le développement des résidences sociales dans des conditions proches de celles qui sont en vigueur en métropole.

L'article 42 ter entérine l'augmentation de l'enveloppe financière du NPNRU, en accord avec les acteurs du secteur.

Enfin, l'article 42 quater prévoit une compensation aux communes de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), pendant une durée de dix ans, pour les projets de logements sociaux agréés ou financés entre 2021 et la mi-2026. Le Sénat vote chaque année une mesure plus ambitieuse puisque celle-ci ne porte que sur les nouveaux projets. Cette mesure est attendue de tous les acteurs, elle est importante pour les communes et devrait, on l'espère, contribuer à l'acceptabilité locale des projets de logement social.

Je vous propose donc de donner un avis défavorable aux crédits de la mission et favorable à ces trois articles.

M. Claude Raynal , président . - Félicitations pour ce premier rapport spécial sur un dossier complexe.

Mme Dominique Estrosi Sassone , rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques . - Je partage les propos du rapporteur spécial. S'il est vrai que le projet de budget pour le logement est le plus élevé de ce quinquennat, n'oublions pas pour autant la politique du logement menée depuis 2017, avec, notamment, la baisse des APL de 5 euros dans le parc privé et dans le parc public, suivie d'une RLS, avec, pour conséquence, une perte d'autofinancement pour les bailleurs sociaux. Le Gouvernement a économisé 10 milliards d'euros sur des aides au logement destinées aux ménages les plus modestes.

L'année dernière, nous avions exprimé des inquiétudes au sujet d'Action Logement, que Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, Viviane Artigalas et moi-même avons relayées dans un rapport d'information. Nous avons réussi à faire reculer le Gouvernement sur le projet de réforme engagé, mais il convient de rester particulièrement vigilant, car le risque de démantèlement est toujours réel.

La relance de la construction neuve est en panne. Nous n'avons jamais connu une telle crise du logement depuis de très nombreuses années. Le Gouvernement, dans le cadre de ce projet de loi de finances, n'a pas pris les mesures susceptibles de conduire à une relance efficace de la construction neuve dans notre pays. La commission Rebsamen a fait un certain nombre de propositions qui ne se traduisent pas toutes dans le cadre budgétaire, hormis l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties sur les logements sociaux. Le Gouvernement a pris l'engagement de compenser intégralement cette mesure, mais ce n'est pas le cas pour les logements existants. Elle ne sera compensée que pour les nouveaux logements agréés entre le 1 er janvier 2021 et le mois de juin 2026. Certes, c'est un pas en avant, mais le cadre de l'exonération est très précis et restreint. À partir de juin 2026, les maires se retrouveront face à de nouvelles difficultés. Le Gouvernement s'exonère de cette politique de construction en faisant peser la responsabilité sur les maires qui ne délivreraient pas autant d'autorisations de construire qu'ils devraient ou pourraient le faire.

En outre, d'autres mesures auraient pu être mises en place dans ce PLF ; je pense en particulier à la baisse du taux de TVA à 5,5 % sur toutes les opérations de construction et de réhabilitation de logements sociaux, une mesure que le Gouvernement a toujours balayée d'un revers de la main. Je pense aussi à la création d'un véritable statut du bailleur privé. Il importe de considérer que l'investisseur immobilier est un entrepreneur de logements et non pas un rentier improductif. Dans le cadre de la loi Climat et résilience, nous avions soutenu des amendements en ce sens. Bien des logements vacants pourraient ainsi être remis sur le marché.

En conclusion, même s'il s'agit du meilleur projet de budget pendant ce quinquennat, on ne peut pas y être favorable. La politique du logement menée depuis cinq ans a affaibli les logements, a paupérisé nos concitoyens - ils consacrent plus d'un tiers de leur budget au logement -, et n'est donc pas à la hauteur des besoins identifiés sur tout le territoire, et pas seulement dans les zones tendues. Force est de constater que le Gouvernement n'aura pas relancé la machine.

M. Jean-Michel Houllegatte , rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Je suis rapporteur sur l'aménagement numérique des territoires, qui s'intègre dans la cohésion des territoires.

Le plan France Très haut débit (PFTHD) est en train de remplir ses objectifs. Financièrement, la France est divisée en plusieurs parties : les zones très denses connaissent une forte appétence des opérateurs privés, qui y installent la fibre optique. Dans certaines zones moins denses, les appels à manifestation d'intention d'investissement (AMII) incitent les opérateurs à s'engager pour une couverture numérique de l'ensemble de ces territoires. Enfin, dans les zones peu denses, ce sont les collectivités qui développent des réseaux d'initiative publique.

Vingt-cinq départements n'arrivent pas à couvrir leurs besoins en financement pour ces zones. La crise du coronavirus a montré l'acuité de la problématique d'une bonne couverture numérique. Ces territoires ont obtenu des crédits complémentaires : 30 millions d'euros au titre d'un projet de loi de finances rectificative (PLFR) l'année dernière, 240 millions d'euros par le plan de relance et 300 millions d'euros de crédits recyclés, afin de boucler les plans de financement du guichet numérique.

En France, il reste 39 millions de locaux à raccorder à la fibre : 6 millions dans des zones urbaines très denses, 14 millions dans les zones dépendant des AMII, sur lesquels les opérateurs ont pris des engagements auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). Il reste 17 millions de locaux à fibrer pour les collectivités locales.

Le déploiement de la fibre dans les réseaux d'initiative publique est important : plus de 6 millions de raccordements ont été faits en un an. C'est un record.

Dans les zones très denses, le taux de couverture est de 94 %, toutes technologies confondues, même s'il y a une grande hétérogénéité selon les zones. À Lille, le taux de couverture n'est que de 54 %, en raison du manque d'intérêt des opérateurs privés à couvrir certaines zones. Il est nécessaire d'alerter l'Arcep sur ce sujet. Ce taux de couverture atteint 87 % dans les zones AMII et 53 % dans les zones d'initiative publique. Il y a eu un million de commercialisations de la fibre.

J'émets également un avis favorable sur l'adoption des crédits qui sont suffisants - de même que le déploiement -, mais soyons vigilants sur quelques points : il faudra terminer les raccordements, avec parfois des difficultés de base d'adressage, d'absence de compétence de certains opérateurs, et de raccordements complexes.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je remercie les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis.

On voit que les maisons France Services fonctionnent bien, selon le principe « l'offre crée le besoin ». Monsieur Delcros, quelle somme complémentaire aux 30 000 euros de dotation faudrait-il allouer à l'ensemble de ces maisons pour qu'elles fonctionnent correctement ? Il faut revoir cette répartition des frais entre l'État et les collectivités.

Les aides à l'ingénierie de l'ANCT, à partir du moment où elles produisent des effets, ont un effet d'aspiration pour conduire des projets. Les dispositifs d'accompagnement financier postérieurs au diagnostic et à la phase d'ingénierie sont-ils suffisants ? La région Grand Est a noué avec l'État des pactes territoriaux de relance et de transition écologique (PTRTE), fondés sur un périmètre plus large que les CRTE, pour assurer des solidarités territoriales entre zones urbaines et rurales ou sur de grands territoires.

Les crédits de l'État sur le fonds Friches sont-ils suffisants ? Dispose-t-on d'une cartographie des superficies concernées ? Les friches industrielles, économiques et urbaines se situent dans différents territoires. L'État et les collectivités territoriales ont-ils un oeil identique dans leur appréciation de ces espaces, selon qu'ils se situent dans des territoires urbains très denses ou plus excentrés ? Certaines zones ont des superficies énormes, mais bénéficient de peu d'actions.

M. Stéphane Sautarel . - Je partage l'essentiel des remarques des rapporteurs spéciaux, notamment l'insuffisante lisibilité des politiques, du fait de leur présentation.

Monsieur Delcros, où en est la territorialisation de l'ANCT ? Quels sont les moyens prévus pour accompagner les projets ? Certes, cela ne rentre peut-être pas dans le périmètre de cette mission.

Je me réjouis de la prorogation d'un an des ZRR.

Le développement de la fibre est très hétérogène ; nous devons persévérer. Quels leviers de la commande publique pourraient être utilisés ?

Concernant le programme 135, il y a eu un rapport sur la lutte contre l'artificialisation des sols. Au-delà des sommes allouées au fonds Friches, comment celui-ci est-il mis en oeuvre selon les territoires ? Si cette mise en oeuvre est trop aveugle, les maires ne pourront plus aménager durablement leur territoire.

Le programme 147 sur l'ANRU et les NPNRU est un budget magique : entre les annonces, l'inscription de crédits et les volumes globaux engagés, il y a un écart considérable, qui nuit à l'avancée des projets. Quels sont réellement les engagements de l'État dans ce domaine ?

Mme Christine Lavarde . - Merci pour ces exposés très clairs. J'abonde dans le même sens. Les objectifs de réduction de 15 % de la précarité énergétique en cinq ans sont loin d'être atteints, car certains dispositifs d'aide à la rénovation thermique ne sont pas efficients.

Monsieur Delcros, pour quelles raisons les crédits dédiés aux Territoires d'industrie augmentent-ils dans le plan de relance ?

M. Antoine Lefèvre . - Je voudrais protester vivement sur la situation du logement en France. Les prêts à taux zéro sont en chute libre : 123 000 prêts contractés en 2017, contre 90 000 en 2019 et 66 000 en 2020. Jusqu'où va-t-on descendre ? Si l'on veut que les Français sortent du parc social et accèdent à la propriété, il faut poursuivre l'effort. Plus on vote de lois sur le logement, moins on produit de logements ; c'est dramatique !

Mme Isabelle Briquet . - Le budget pour le logement est en hausse pour 2022, mais c'est un peu tard ; la politique du logement est la grande perdante du quinquennat. Elle a appauvri les ménages modestes, avec la baisse des APL, et a affaibli les capacités d'intervention des organismes d'HLM. Depuis 2017, la construction de logements s'est contractée de 14 % - 36 % pour les seuls logements sociaux, ce n'est pas rien ; 10 milliards d'euros ont été économisés sur le dos des ménages les plus modestes.

L'État doit redonner au logement social la place qu'il mérite. Ce modèle social a été attaqué : le Gouvernement oblige les bailleurs sociaux à participer à la réduction des déficits publics en les forçant à se regrouper, ce qui a fait grincer des dents... Dispose-t-on d'un bilan sur la pertinence de ces regroupements ? Ont-ils permis des économies ?

M. Sébastien Meurant . - C'est un paradoxe : plus on met d'argent, moins on construit. C'est le budget logement le plus élevé du quinquennat, mais encore faudrait-il que le Gouvernement ait une stratégie... Au lieu de cela, c'est une politique de gribouille.

Comment inciter les bailleurs privés à mettre en location un logement vide alors qu'il est très difficile d'expulser des locataires indélicats ? Ceux-ci peuvent rester en place pendant trois ans, il y a des frais de justice... Cela ne rassure pas les propriétaires !

Hier ont été annoncées des incitations fiscales en zone tendue. Aboutiront-elles à la mise sur le marché de nouveaux logements ?

Les nuitées hôtelières ont été multipliées par sept en quinze ans, ce qui ne manque pas de nous interroger. À qui bénéficient-elles ? Quelle est la proportion de réfugiés et de migrants ?

Que pensez-vous des mesures d'incitation à la construction de logements sociaux ? Comment sont-elles acceptées par les collectivités ?

M. Jean-Marie Mizzon . - Monsieur Delcros, les conseillers numériques de l'ANCT prennent progressivement leurs fonctions localement. Les besoins sont importants : 13 à 14 millions de Français souffrent d'illectronisme. En 2017, le programme Action publique 2022 promettait de dématérialiser les 250 démarches les plus courantes. Le travail est énorme. Des crédits du plan de relance y sont consacrés, mais ce soutien est conjoncturel. Sera-t-il poursuivi ?

M. Bernard Delcros , rapporteur spécial . - Monsieur le rapporteur général, la dotation de 30 000 euros des maisons France Services se répartit ainsi : 15 000 euros sont financés par l'État et 15 000 euros par le Fonds national France Services. Ces 30 000 euros étaient déjà attribués aux maisons de service au public avant la labellisation France Services. Or le soutien ne devrait pas être au même niveau, car ces maisons ont connu une montée en gamme et ont récupéré des missions autrefois assurées par l'État. Cette somme ne représente que 30 % du coût moyen de fonctionnement d'une maison. J'ai prévu de mener l'année prochaine une mission de contrôle budgétaire sur les maisons France Services, et je ferai des propositions concrètes.

Les périmètres des actions financées par l'ANCT relèvent de l'initiative locale. Les CRTE sont signés tantôt à l'échelle d'intercommunalités, tantôt à l'échelle des schémas de cohérence territoriale (SCoT) ou des pôles d'équilibre territorial et rural... Il en est de même pour d'autres programmes comme Petites villes de demain, avec des candidatures communales ou intercommunales. L'ingénierie s'adapte au périmètre choisi par les collectivités.

Monsieur Sautarel, il y a différentes formes d'ingénierie locale. L'enjeu principal repose dans la pérennisation de cet accompagnement territorial, qui a progressé. L'ANCT a annoncé avoir accompagné 702 projets depuis 2020.

L'accompagnement est réalisé soit par les référents de l'ANCT localement - mais le système est peu identifié et complexe -, soit par les marchés à bons de commande de l'État, qui recourt à des bureaux d'études, sur des projets spécifiques, soit par des chargés de projet ingénierie dans les différents programmes. Mais l'identification de l'ingénierie spécifique de l'ANCT dans les territoires commence juste. Nous verrons comment cela évoluera.

La part des moyens pour chaque programme est un sujet de préoccupation. L'État veut rassembler tous les contrats dans un CRTE. J'y suis favorable, à condition que des crédits spécifiques dédiés à certains programmes - comme Petites villes de demain - et à certaines dotations, en particulier la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), soient conservés. Les communes doivent disposer de crédits pour les projets qui ne sont pas dans des CRTE. Nous devons faire des propositions.

Madame Lavarde, pour le dispositif Territoires d'industrie, les crédits de la mission « Plan de relance » du PLF prévoient le recrutement de 50 chefs de projets supplémentaires, financés à parité par l'État et les régions.

Monsieur Mizzon, les conseillers numériques des maisons France Services sont extrêmement importants pour l'animation des territoires. Le recrutement de 4 000 conseillers supplémentaires est actuellement mis en place, mais sera-t-il pérennisé, sans être à la charge des collectivités territoriales ?

M. Jean-Baptiste Blanc , rapporteur spécial . - Monsieur le rapporteur général, le budget du fonds Friches a doublé, pour passer de 300 à 650 millions d'euros. Il connaît un certain succès, qu'il va falloir gérer : les sommes prévues suffiront-elles ? Le fonds sera-t-il pérennisé ? La loi Climat et résilience prévoyait, pour lutter contre l'artificialisation des terres, de lutter contre la vacance et d'utiliser ce fonds - il devra être abondé. Il faudra aussi repenser l'accompagnement, le financement et la fiscalité locale.

Il n'y a pas de cartographie. C'est l'objectif de la loi Climat et résilience, qui se fonde sur le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).

Monsieur Sautarel, nous avons voté la territorialisation des objectifs permettant aux présidents des SCoT de faire des propositions dans les six mois suivant la promulgation de la loi. Les territoires sont très mobilisés, mais inquiets. Ensuite, ces propositions sont accueillies - ou non - par les régions qui devront modifier les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).

Il y a plusieurs saisons de l'ANRU... Il faut plus de huit ans pour qu'un projet voie le jour. C'est illisible. L'ANRU doit bénéficier d'un nouveau souffle. Le rapport Borloo dénonçait « l'inefficacité et l'éparpillement », « l'absence de définition claire, de stratégie et de méthode » de la politique de la ville, ce qui suscite de l'incompréhension. Sur 1,2 milliard d'euros de financement de l'État promis pour l'ANRU, seuls 93,8 millions d'euros ont été débloqués, dont 15 millions d'euros prévus en 2022. L'ANRU reste largement financée par Action Logement, les collectivités territoriales et les bailleurs sociaux.

Madame Briquet, marier deux pauvres ne fait pas un riche. Je l'ai vu dans mon département du Vaucluse. Sans accompagnement à la conduite du changement, c'est un enfer administratif et cela ne marche pas. Il n'y a pas de bilan du regroupement des offices publics de l'habitat (OPH) prévu par la loi Élan. Ces ensembles sont plus grands et plus privés. Nous devons les évaluer, d'autant que la politique du logement est à repenser.

Monsieur Meurant, l'incitation fiscale fonctionne jusqu'à un certain point. Il y a un effet guichet puis gadget... Il faut simplifier et adapter. L'État a fait voter une réforme du « Louer abordable » en zone tendue, mais il est trop tôt pour évaluer ses impacts.

Nous ne connaissons pas le nombre de migrants qui sont hébergés à l'hôtel, mais ils sont nombreux... Nous n'avons donc pas les moyens de contrôler cette politique.

La commission a décidé de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

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* *

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL)

- M. Olivier BENOIST, sous-directeur de la cohésion et de l'aménagement du territoire.

Direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT)

- Mme Perrine SERRE, adjointe au sous-directeur de l'administration territoriale ;

- Mme Séverine GRASSET, chargée de mission, bureau des moyens de l'administration territoriale ;

- M. Rémi PRADALIER, chargé de mission, bureau des moyens de l'administration territoriale.

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

- M. Yves LE BRETON, directeur général, préfet ;

- M. Jérôme GUTTON, Directeur général délégué territoires et ruralités ;

- M. Xavier GIGUET, secrétaire général.

Table-ronde associations d'élus

- M. Nicolas PORTIER, délégué général d'Intercommunalités de France ;

- M. Romain BRIOT, conseiller cohésion d'Intercommunalités de France ;

- M. Ludovic ROCHETTE, président de l'Association des Maires de la Côte-d'Or pour l'Association des maires de France (AMF) ;

- Mme Pauline DELAERE-PAPIN, conseillère ruralité de l'AMF.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2022.html


* 1 Loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

* 2 Loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.

* 3 Les collectivités et l'ANCT au défi de l'ingénierie dans les territoires, rapport n° 591 (2019 2020) - 2 juillet 2020.

* 4 Circulaire n° 6094-SG du 1 er juillet 2019 relative à la création de France Services.

* 5 Dispositifs zonés de soutien du développement économique et de l'emploi dans les territoires IGF-IGA-IGAS-CGEDD, juillet 2020.

* 6 Rapport fait au nom de la commission d'enquête sur l'impact économique, sanitaire et environnemental de l'utilisation du chlordécone et du paraquat comme insecticides agricoles dans les territoires de Guadeloupe et de Martinique, sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires, Assemblée nationale, novembre 2019.

* 7 Algues vertes en Bretagne : de la nécessité d'une ambition plus forte, rapport d'information de M. Bernard Delcros n° 633, fait au nom de la commission des finances, mai 2021.

* 8 La politique publique de lutte contre la prolifération des algues vertes en Bretagne, cour des comptes, juillet 2021.

* 9 Comme pour tous les organismes bénéficiant d'une charge de service public, au titre du décret n? 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

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