D. UNE SOUS-ESTIMATION PROBABLE DE L'INCIDENCE BUDGÉTAIRE DES MESURES DE SOUTIEN EN FAVEUR DES JEUNES CHERCHEURS
Afin de contrebalancer l'impact de la fermeture des laboratoires au cours du premier confinement sur les travaux des chercheurs, le Mesri a décidé d'autoriser, de manière exceptionnelle, une prolongation des contrats pour les jeunes chercheurs (contrats doctoraux, contrats d'attachés temporaires d'enseignement et de recherche, contrats postdoctoraux et enfin convention industrielle de formation par la recherche).
En pratique, au terme de la circulaire du 26 juin 2020 relative à la prolongation de ces contrats, les chercheurs concernés devaient déposer avant le 31 décembre 2020 une demande motivée de prolongation de leur contrat, démontrant un empêchement de poursuite des activités de recherche pendant la période de l'état d'urgence.
D'un point de vue budgétaire, le Mesri a décidé que le surcoût lié aux prolongations serait imputé sur la dernière année des contrats concernés . Partant, cette mesure de gestion décidée en 2020 aura un impact budgétaire jusqu'en 2023 , la plupart des contrats de recherche s'étirant sur trois années.
Or, si le surcoût constaté en 2020 s'est révélé relativement modéré, de l'ordre de 6,6 millions d'euros , l'impact budgétaire de cette mesure pourrait être nettement plus élevé dans les années à venir , la Cour des comptes évoquant le fait que « des dépenses globales attendues pour 2021 à 2023 pourraient atteindre 48,8 millions d'euros pour l'ensemble du programme 172 ».
Cependant, la budgétisation opérée en loi de finances pour 2021 n'anticipe aucune évolution de ce poste de dépense, ce qui rend tout à fait crédible l'hypothèse d'un dérapage budgétaire en cours de gestion. Ce dernier pourrait, en tout état de cause, être financé en gestion par un dégel partiel de la réserve de précaution, mais le rapporteur regrette néanmoins ce qui s'apparente à un manque de sincérité budgétaire .
En effet, si les difficultés du Gouvernement à établir et présenter un chiffrage précis de cette mesure sont pleinement justifiées eu égard au contexte de crise et au délai nécessaire pour instruire les demandes, rien ne s'opposait à ce qu'il informe la représentation nationale de l'existence d'un tel risque de dérapage.
E. LE SUIVI DES CRÉDITS DÉVOLUS AUX TGIR : DES EFFORTS QUI RESTENT À CONCRÉTISER
Dans une enquête réalisée à la demande du rapporteur, la Cour des comptes a relevé en 2019 dans un rapport intitulé « le pilotage et le financement des Très grandes infrastructures de recherche (TGIR) » que la maquette budgétaire actuelle du programme 172 rendait difficilement lisible le suivi des crédits dévolus à ces instruments . La Cour préconisait ainsi la production d'un document offrant une vision consolidée de ces crédits, dans un souci de transparence et de sincérité budgétaire.
Or, force est de constater qu'en 2020, l'emploi de ces crédits demeure tout aussi opaque que les années précédentes , ces derniers étant dispersés au sein de plusieurs actions du programme 172 .
Le rapporteur regrette donc que la représentation nationale ne dispose toujours pas, à ce jour, d'un document offrant une vision consolidée des crédits dédiés à l'ensemble des TGIR - françaises et internationales. Cette absence, conjuguée à la diversité des objectifs et indicateurs de performance retenus, entrave considérablement le suivi de ces crédits.
Il note cependant avec satisfaction que le jaune budgétaire 2021 relatif aux politiques nationales de recherche et de formations supérieures fait état de travaux destinés à « la mise en oeuvre des suites à donner au rapport de la Cour des comptes sur le pilotage et le financement des TGIR publié le 17 juillet 2019 ». Ainsi, « l'importance stratégique croissante du dispositif des infrastructures de recherche a conduit l'État à ouvrir un chantier « clarifier la gestion des TGIR » dans le cadre du Plan de Transformation Ministériel en vue d'en donner une plus grande lisibilité et visibilité » 16 ( * ) .
Si ces réflexions sont louables, elles doivent impérativement s'accompagner d'avancées concrètes, matérialisées par une clarification de la maquette budgétaire du programme 172 . Il serait donc opportun que les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2022 intègrent des évolutions tangibles quant à la présentation des moyens dévolus aux TGIR.
* 16 Rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, annexe au projet de loi de finances pour 2021.