N° 138 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020 |
RAPPORT GÉNÉRAL FAIT au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 , Par M. Jean-François HUSSON, Rapporteur général, Sénateur |
TOME III LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES (seconde partie de la loi de finances) |
ANNEXE N° 4 AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS |
Rapporteurs spéciaux : MM. Michel CANEVET et Jean-Claude REQUIER |
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean Bizet, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel. |
Voir les numéros : Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500 Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021) |
LES
PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
1. Pour l'exercice 2021, les crédits demandés s'élèvent à 5,12 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 4,90 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) , soit respectivement une baisse de 30 % des AE et une hausse de 50 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. Après neutralisation des crédits du nouveau programme 365, qui constitue une opération transparente pour le budget de l'État, les crédits demandés pour 2021 s'élèvent respectivement à 4,16 milliards d'euros en AE et 3,95 milliards d'euros en CP, soit une baisse de 43 % en AE et une hausse de 21 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. 2. La hausse continue des crédits de la mission « Aide publique au développement » s'inscrit en conformité avec les conclusions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) du 8 février 2018 qui fixent l'objectif de consacrer 0,55 % de notre revenu national brut (RNB) en 2022 à l'aide publique au développement. Cet objectif sera d'ailleurs atteint dès 2020, essentiellement à la faveur des conséquences économiques de la crise sanitaire qui entraînent une contraction du RNB, soulignant ainsi les limites du « fétichisme » de la conduite d'une politique publique à partir d'un ratio économique. 3. La forte volatilité des crédits inscrits au programme 110 s'explique par la reconstitution triennale des contributions de la France aux fonds et organisations multilatéraux , pour lesquels un nouveau cycle a été initié en 2020. 4. Le programme 209 est quant à lui marqué par un renforcement de l'aide bilatérale , conformément aux priorités définies en 2018. Ainsi, l'aide-projet gérée par l'AFD s'élève à 1 milliard d'euros en AE (+25 millions d'euros) et 732,8 millions d'euros en CP (+339 millions d'euros), la forte progression des CP reflétant la montée en charge des engagements en la matière depuis plusieurs années. De plus, l'aide-projet gérée directement par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) est fixée à 70 millions d'euros (+ 10 millions d'euros), après un premier bilan positif de sa revalorisation en 2020. Enfin, les crédits dédiés à l'aide humanitaire sont revalorisés, avec une majoration du fonds d'urgence humanitaire (FUH) de 29,6 millions d'euros, et une hausse bienvenue de l'aide alimentaire programmée dont le montant s'élèvera à 76,3 millions d'euros en 2021. 5. Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une opération de renforcement des fonds propres de l'AFD , portée par un nouveau programme budgétaire dédié (programme 365). Celui-ci est justifié par la forte croissance des engagements de l'AFD depuis plusieurs années, mettant ainsi son bilan « sous tension », ainsi que par une évolution de la réglementation prudentielle qui requiert la conversion de la « ressource à condition spéciale » en fonds propres « en dur » de l'AFD. Le renforcement des fonds propres constitue un jeu d'écriture, neutre pour le budget de l'État . Toutefois, le besoin de fonds propres de l'AFD serait supérieur à ceux accordés par cette opération de conversion : une majoration de crédits en ce sens se traduirait alors par une dépense maastrichtienne. Les rapporteurs spéciaux regrettent que le besoin en fonds propre de l'AFD n'ait pas fait l'objet d'une meilleure anticipation , ce qui aurait permis de faire figurer tous ces éléments d'analyse dans les documents budgétaires transmis au Parlement. Par ailleurs, le contrat d'objectifs et de moyens (COM) 2017-2019 entre l'État et l'AFD étant échu, les rapporteurs spéciaux s'étonnent qu'à cette date, le COM 2020-2022 n'ait pas encore signé . C'est pourtant un point important permettant de formaliser les relations et priorités d'actions pour l'AFD. Ce sujet avait d'ailleurs été relevé par la cour des comptes, dans son enquête réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat, appelant à une meilleure formalisation des relations entre l'État et l'AFD 1 ( * ) . 6. Le renforcement en fonds propres de l'AFD appelle à une consolidation de son activité, après plusieurs années d'accroissement considérable de ses engagements . Dans cette perspective, la maîtrise des frais généraux, notamment des dépenses de personnel et des dépenses immobilières, doit constituer l'une des priorités budgétaires de l'AFD. 7. La trajectoire à la hausse des crédits de la mission a permis à la France de maintenir son rang de cinquième pourvoyeur mondial d'aide publique au développement . En termes de part d'aide dans le RNB, la France n'occupe toutefois que la neuvième place. Le profil de l'aide publique au développement de la France continue de se distinguer par le recours important aux prêts , plutôt qu'aux dons, même si un rééquilibrage est en cours. 8. Les conclusions du CICID du 8 février 2018 constituent la première pierre de la redéfinition du pilotage de l'aide publique au développement . Fortement interministérielle, l'aide au développement est conduite par une multitude d'instruments budgétaires. Cet « éclatement » résulte directement des critères de comptabilisation de l'aide publique au développement définis par l'OCDE, mais il nuit à l'élaboration d'une vision exhaustive de cette politique publique, et à un pilotage guidé par une logique de résultats, plutôt que de moyens. Le projet de loi de programmation, maintes fois annoncé, devrait permettre de consacrer une architecture réformée de cette politique publique. 9. Dans l'attente d'un cadre législatif constituant la « boussole » de l'aide publique au développement, le déséquilibre entre les priorités géographiques de la France et les principaux bénéficiaires de son aide constitue une anomalie aux yeux des rapporteurs spéciaux , et interroge la stratégie mise en oeuvre à l'égard des « très grands émergents » . 10. La crise sanitaire a entraîné le redéploiement de crédits, tant au niveau bilatéral, avec l'initiative « Santé en commun » portée par l'AFD, qu'au niveau multilatéral avec l'initiative de suspension du service de la dette (ISSD) en faveur des pays les plus pauvres. Les rapporteurs spéciaux saluent la mobilisation de notre aide publique au développement dans cette crise sanitaire, ainsi que le choix de préserver un budget crucial pour le rayonnement diplomatique de la France et le financement des biens publics mondiaux . Toutefois, dans un contexte de finances publiques dégradées, la question de l'évaluation, de la transparence, et de la « redevabilité » de cette politique publique devient plus que jamais incontournable . 11. Outre la maîtrise des frais généraux de l'AFD, en particulier de ses investissements immobiliers, il convient de mener un contrôle soutenu de l'efficience des actions et politiques menées , notamment pour s'assurer dans un contexte d'accroissement des subventions, qu'ils n'y aient pas de risques de « détournement » de l'usage de ces dépenses par leurs bénéficiaires. |
L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 48 % des réponses étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux en ce qui concerne les crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ». |
I. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS DE LA MISSION SE POURSUIT EN 2021, CONFORMÉMENT AUX ENGAGEMENTS PRIS EN 2018
A. UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS EN 2021, GONFLÉE PAR LE RENFORCEMENT DES FONDS PROPRES DE L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT
1. Une politique fortement interministérielle dont le coeur pilotable est porté par la mission « Aide publique au développement »
Le Comité d'aide au développement (CAD) 2 ( * ) de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) définit l'aide publique au développement comme tous les apports de ressources qui sont fournis aux pays et territoires sur la liste des bénéficiaires d'aide publique au développement, ou à des institutions multilatérales et qui répondent aux critères cumulatifs suivants :
- ils émanent d'organismes publics , y compris les États et les collectivités locales, ou d'organismes agissant pour le compte d'organismes publics ;
- ils ont pour but essentiel de favoriser le développement économique et l'amélioration du niveau de vie des pays en développement ;
- ils sont assortis de conditions favorables .
D'un point de vue budgétaire, en France, l'aide publique au développement financée par l'État transite par les dépenses budgétaires inscrites sur le budget général ou sur le compte d'affectation spéciale relatif aux participations financières de l'État (CAS PFE), ainsi que par le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne qui comprend la quote-part de la France au budget de l'action extérieure de l'Union européenne.
Au sein du budget général de l'État, la mission « Aide publique au développement » constitue le coeur budgétaire pilotable de cette politique publique . En 2020 et 2021, la mission devrait respectivement représenter 68 % et 65 % des crédits budgétaires comptabilisées en aide publique au développement. Trois autres missions budgétaires participent également au financement de l'aide publique au développement :
- la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour environ 13 % des dépenses budgétaires d'aide publique au développement en 2020 ;
- la mission « Action extérieure de l'État » pour environ 4 % en 2020 ;
- la mission « Immigration, asile et intégration » pour environ 8 % en 2020.
Le CAS PFE retrace, quant à lui, les dotations en capital des banques de développement ( cf. article rattaché à la mission ).
Au total, 25 programmes budgétaires différents concourent au financement de la politique d'aide publique au développement.
Si la mission « Aide publique au développement » concentre l'essentiel des crédits budgétaires, elle ne constitue, en 2019, que 44 % de l'ensemble de l'aide publique au développement de la France .
En effet, y sont ajoutés les crédits des autres missions budgétaires , la participation de la France au fonds européen de développement (FED), les prêts du Trésor , les opérations de traitement de la dette , et le fonds de solidarité pour le développement (FSD). Ce dernier est un fonds extrabudgétaire, créé en 2005 et géré par l'AFD, qui participe au financement de dépenses principalement dans les domaines de la santé, du climat, et de l'environnement. Il est alimenté par deux taxes affectées :
- la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA), pour un montant plafonné à 210 millions d'euros par an ;
- une part du produit de la taxe sur les transactions financières (TTF), pour un montant égal à 528 millions d'euros par an.
Par ailleurs, outre des subventions, l'effort de l'État en faveur de l'aide publique au développement se traduit par l'octroi de prêts .
Pour mémoire, selon les règles de l'OCDE, le décaissement d'un prêt peut être comptabilisé en aide publique au développement à hauteur des montants déboursés. Puis, dans un second temps, le remboursement en capital d'un prêt donne lieu à une contribution négative à l'effort d'aide publique au développement. Ainsi, seul l'élément-don du prêt, c'est-à-dire son niveau de concessionnalité, est comptabilisé en tant qu'aide publique au développement . Les prêts de la France sont versés selon plusieurs canaux :
- les prêts concessionnels du Trésor , pour lesquels les crédits budgétaires sont imputés sur le programme 851 « Prêts à des États étrangers » ;
- les prêts portés par l'Agence française de développement (AFD) , pour lesquels les crédits budgétaires nécessaires à leur bonification sont imputés sur le programme 110 « Aide économique et financière au développement », et sur le programme 853 « Prêts à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers » ;
- les prêts mis en oeuvre par l'AFD pour le compte de l'État , tels que les prêts d'ajustement structurel ;
- les prêts dits de « refinancement » dans le cadre d'opérations de restructurations de dette. Les crédits budgétaires nécessaires sont imputés sur le programme 852 « Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France ».
2. L'exercice 2021 poursuit la trajectoire haussière de la mission, et dépasse même, à la faveur de la crise sanitaire, l'objectif de 0,55 % du RNB.
Pour l'exercice 2021, la mission « Aide publique au développement » comporte trois programmes :
- le programme 110 « Aide économique et financière au développement » , relevant de la direction générale du Trésor, au ministère de l'économie, des finances et de la relance. Il porte les crédits destinés aux fonds multilatéraux de développement, au financement des annulations de dette et à la bonification des prêts accordés par l'Agence française de développement ;
- le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » , relevant de la direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international, au ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE). Il comporte notamment les crédits destinés aux dons bilatéraux, les subventions aux organisations multilatérales, la coopération technique, la contribution de la France au fonds européen pour le développement (FED), ou encore les crédits dédiés à l'aide humanitaire ;
- le nouveau programme 365 « Renforcement des fonds propres de l'Agence française de développement » , permettant de doter en capital cet opérateur en 2021 ( cf. ci-après ).
Pour 2021, les crédits demandés s'élèvent à 5,12 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 4,90 milliards d'euros en crédits de paiement , soit respectivement une baisse de 30 % des AE et une hausse de 50 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.
Évolution des crédits de la mission
« Aide publique au développement »
À
périmètre
courant
(en millions d'euros)
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
|||||
LFI 2020 |
PLF 2021 |
Évolution (en %) |
LFI 2020 |
PLF 2021 |
Évolution (en %) |
|
110 « Aide économique et financière au développement » |
4 464,3 |
1 391,8 |
- 68,8% |
1 136,8 |
1 475,0 |
29,7% |
Action 01 - Action économique et financière multilatérale |
2 836,3 |
219,1 |
- 92,3% |
711,7 |
968,5 |
36,1% |
Action 02 - Aide économique et financière bilatérale |
1 310,4 |
1 172,7 |
- 10,5% |
339,7 |
409,2 |
20,5% |
Action 03 - Traitement de la dette des pays pauvres |
317,7 |
0,0 |
- 100,0% |
85,4 |
97,3 |
13,9% |
365 « Renforcement des fonds propres de l'AFD» |
- |
953,0 |
- |
- |
953,0 |
- |
209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » |
2 834,9 |
2 771,3 |
- 2,2% |
2 131,5 |
2 476,3 |
16,2% |
Action 02 - Coopération bilatérale |
1 464,8 |
1 527,5 |
4,3% |
839,0 |
1 227,1 |
46,3% |
Action 05 - Coopération multilatérale |
366,3 |
367,8 |
0,4% |
288,6 |
373,2 |
29,3% |
Action 07 - Coopération communautaire |
842,4 |
713,7 |
- 15,3% |
842,4 |
713,7 |
- 15,3% |
Action 08 - Dépenses de personnel du programme |
161,4 |
162,3 |
0,5% |
161,4 |
162,3 |
0,5% |
Total de la mission |
7 299,2 |
5 116,1 |
- 29,9% |
3 268,4 |
4 904,3 |
50,1% |
Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires
Toutefois, le renforcement des fonds propres de l'AFD, porté par le nouveau programme 365, constituant une opération transparente pour le budget de l'État (cf. ci-après ), il convient de neutraliser les crédits de ce programme afin d'apprécier l'évolution de la mission à périmètre constant.
Ainsi, en neutralisant le programme 365, les crédits demandés pour 2021 s'élèvent respectivement à 4,16 milliards d'euros en AE et 3,95 milliards d'euros en CP , soit respectivement une baisse de 43 % en AE et une hausse de 21 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.
La loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 3 ( * ) étant désormais caduque en raison de l'évolution du contexte macroéconomique, il n'est pas possible de comparer l'évolution de ces crédits aux plafonds prévus par cette trajectoire budgétaire pluriannuelle.
La hausse des crédits de la mission s'inscrit en conformité avec les conclusions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) 4 ( * ) du 8 février 2018, qui a défini les priorités et les ambitions de la France en matière d'aide publique au développement.
Ces conclusions indiquent que « le gouvernement a fixé une trajectoire ascendante des financements consacrés à l'aide publique au développement en tant compte d'objectifs d'annulation de dettes. La France consacrera 0,55 % du revenu national brut (RNB) à l'aide publique au développement d'ici 2022 , première étape vers l'objectif de 0,7 % ».
Cet objectif devrait être atteint dès 2020, avec deux ans d'avance . En effet, en 2020, l'aide publique au développement de la France devrait atteindre 0,56 % du RNB, contre 0,47 % initialement prévu, et 0,69 % en 2021 .
Part de l'aide publique au développement dans le RNB de la France
(en %)
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
|
Trajectoire prévue par le CICID de 2018 |
0,44 |
0,44 |
0,47 |
0,51 |
0,55 |
Exécution (constatée ou évaluée) |
0,43 |
0,44 |
0,56 |
0,69 |
Non fournie |
Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires
Si la hausse des crédits de la mission depuis plusieurs exercices contribue à la satisfaction des ambitions fixées en 2018, les rapporteurs spéciaux rappellent que la contraction du produit intérieur brut de la France en 2020 d'au moins 10 % , en raison des conséquences économiques de la crise sanitaire, explique aussi cette hausse exceptionnelle du ratio de l'aide publique au développement par rapport au RNB.
Ainsi, comme l'ont reconnu les services auditionnés par les rapporteurs spéciaux, la crise sanitaire met en lumière les limites du « fétichisme » de la conduite d'une politique publique à partir d'un ratio économique .
À ce titre, le budget de l'aide publique au développement britannique est particulièrement éclairant . En effet, en juillet 2020, le Royaume-Uni a annoncé une réduction de 18 % du budget dédié à l'aide publique au développement, soit une baisse de 2,9 milliards de livres, afin de maintenir un budget représentant 0,7 % du RNB britannique, tout en profitant de la contraction du RNB liée aux conséquences économiques de la crise sanitaire.
Enfin, il convient de noter deux évolutions de la maquette budgétaire prévues par le projet de loi de finances pour 2021 :
- pour la première fois, le projet de loi de finances pour 2021 intègre une évaluation des dépenses favorables à l'environnement . D'après le Gouvernement 5 ( * ) , ces dépenses s'élèvent à 1,85 milliard d'euros au sein de la mission « Aide publique au développement », en intégrant le fonds de solidarité pour le développement. Le doublement de la contribution de la France au fonds vert pour le climat pour les années 2020 à 2022 y contribue fortement. En effet, 390 millions d'euros devraient être versés à ce titre par la France en 2021 ;
- compte tenu des conséquences économiques de la crise sanitaire, le projet de loi de finances pour 2021 prévoit la création d'une nouvelle mission budgétaire dédiée au financement du plan de relance de l'économie . Au sein du programme 364 « Cohésion » de celle-ci sont prévus 50 millions d'euros dédié au soutien en faveur d'organisations pour la santé mondiale et au financement de la recherche pour l'accès universel pour un vaccin contre la Covid-19. Cette enveloppe sera répartie entre l'Organisation mondiale de la santé (OMS), à hauteur de 25 millions d'euros, et à d'autres organismes de santé internationaux (Gavi, Unitaid, etc.).
* 1 Cour des comptes, « Le pilotage stratégique par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères des opérateurs de l'action extérieure de l'État », communication à la commission des finances du Sénat, février 2020.
* 2 Créé en 1961, le CAD est l'organe de l'OCDE chargé des questions de coopération avec les pays en développement. Il rassemble 22 pays donateurs et la Commission européenne.
* 3 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
* 4 Créé par le décret n° 98-66 du 4 février 1998, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement réunit, sous la présidence du Premier ministre, les ministres impliqués dans la politique française d'aide publique au développement et en définit les grandes orientations.
* 5 Document de politique transversale « Politique française en faveur du développement », annexé au projet de loi de finances pour 2021, p. 22.