EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 3 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur spécial, sur la mission « Pouvoirs publics ».

M. Jean-Michel Arnaud , rapporteur spécial . - Le périmètre de la mission « Pouvoirs publics » inclut la présidence de la République, les deux assemblées - Assemblée nationale et Sénat -, le Conseil constitutionnel, les deux chaînes de télévision LCP-AN et Public Sénat, ainsi que la Cour de justice de la République.

Ce budget est relativement constant depuis 2012 puisque se situant légèrement sous le milliard d'euros pour l'ensemble des institutions de la République. Par rapport à 2020, le montant total de la mission est même en légère diminution.

La dotation demandée pour la présidence de la République s'élève à un peu plus de 105 millions d'euros au titre de l'exercice 2021, soit un montant quasi identique à 2020, après une hausse constatée entre 2019 et 2020.

Il est à noter la poursuite de la mise en oeuvre d'un schéma immobilier pluriannuel de près de 52 millions d'euros que la présidence finance grâce à des crédits pris sur son budget, à la restitution à l'État d'une de ses emprises immobilières et à un financement en provenance de l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (Oppic). Comme avait pu le montrer notre collègue Jérôme Bascher, ces financements extérieurs ne permettent toutefois pas d'appréhender la totalité des crédits dont dispose la présidence de la République et que devrait refléter la dotation.

Par ailleurs, la réorganisation des services de l'Élysée, notamment sur le plan des ressources humaines, achevée en 2019 semble commencer à produire ses effets.

Enfin, un mot sur l'impact de la crise sanitaire qui a conduit à une baisse des déplacements présidentiels. La présidence de la République a ainsi décidé, en cours de gestion, de réorienter ces crédits pour financer des mesures sanitaires en interne, le surcoût des chantiers immobiliers ainsi que des dépenses d'investissement. L'exercice 2020 devrait néanmoins être légèrement excédentaire.

J'en viens aux dotations des assemblées parlementaires qui sont stables, puisque gelées depuis 2012, à 517,9 millions d'euros pour l'Assemblée nationale et à 323,6 millions d'euros pour le Sénat. Concernant le Sénat, ce gel avait été estimé en 2020, à 388 millions d'euros, soit une somme supérieure à une année de dotation.

Malgré une baisse des dépenses pour 2021, la stabilité de la dotation conduit les assemblées à prévoir un nouveau prélèvement sur trésorerie important pour financer les dépenses d'entretien et d'investissement immobilier nécessaires. Comme vous le savez, chacune des assemblées mène depuis plusieurs années des programmes immobiliers conséquents visant à améliorer les conditions de travail des parlementaires et du personnel et à préserver le patrimoine historique.

Toutefois, comme cela a été souligné par le passé, ce recours croissant aux réserves - qui vont s'amenuiser au fil des années - pose inévitablement la question de la soutenabilité de ce modèle à long terme.

Concernant les chaînes parlementaires, leur budget est stable. Il s'agit d'un sujet sensible au vu de l'indépendance et de l'autonomie de chaque chambre qu'il convient de préserver. Il existe des divergences d'appréciation entre nos deux chambres sur ce sujet auquel j'aimerais néanmoins m'intéresser dans les prochains mois.

Enfin, je dirai également un mot sur le budget du Conseil constitutionnel et de la Cour de justice de la République.

Le budget du Conseil constitutionnel, de 12,02 millions d'euros, est en baisse de près de 4 % par rapport à 2020, en raison de la non-reconduction du budget exceptionnel qui lui avait été affecté pour le contrôle de la première procédure de référendum d'initiative partagée concernant la proposition de loi relative aux aéroports de Paris.

Concernant la Cour de justice de la République, sa dotation est identique à celle de l'an passé, à hauteur de 871 500 euros, mais son activité est et sera, en 2021, largement impactée par la crise sanitaire que nous traversons. Au 1 er août, le nombre de plaintes était en augmentation, avec un total de 143 plaintes, dont 95 déposées en rapport avec la Covid. Dix affaires étaient en cours d'instruction. Selon la Cour, ces plaintes Covid instruites par la commission d'instruction vont engendrer de nombreux frais de justice, la plupart des plaignants devant être entendus et résidant en province.

Au vu de ces observations, je propose un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

M. Jérôme Bascher . - Est-il possible d'avoir plus de détails sur le volet des chaînes parlementaires ?

Mme Christine Lavarde . - Notre collègue Jérôme Bascher, lors de son contrôle budgétaire sur les moyens informatiques et la sécurité des systèmes d'information des pouvoirs publics, avait mis en avant un certain nombre de failles. Les pouvoirs publics en question en ont-ils pris conscience ? Ont-ils demandé des crédits pour tenter d'y apporter une réponse ?

M. Marc Laménie . - Ma question concerne l'impact de la crise sanitaire sur la mission « Pouvoirs publics ». Au Sénat, en avril et en mai, le télétravail était répandu, les jardins étaient fermés, etc. Idem pour l'Assemblée nationale et la présidence de la République. Avons-nous une idée de l'ampleur des dépenses supplémentaires ou des économies qui ont pu être réalisées ?

M. Rémi Féraud . - Le budget de la présidence de la République est certes en baisse, mais la dotation reste stable, avec un mécanisme de diminution du prélèvement sur trésorerie par rapport à l'année précédente. Comme pour nos assemblées, ce prélèvement n'aurait-il pas pu rester fixe ? Dans ce cas, la dotation de l'État aurait diminué : c'eût été un symbole. S'agit-il d'une volonté politique délibérée de la part de la présidence de la République ?

M. Claude Raynal , président . - Dans les tableaux comparatifs figurant dans la note, je remarque que, pour l'Assemblée nationale, le déficit initial, en 2020, de 49 millions d'euros est passé à 42 millions d'euros en 2021. Si je comprends bien, c'est à rapprocher des prélèvements sur disponibilité du Sénat de 29,26 millions d'euros en 2020 et de 20,01 millions d'euros en 2021. Si les prélèvements sur disponibilité de l'Assemblée nationale sont deux fois plus élevés que ceux du Sénat, cela signifie-t-il que ses réserves sont deux fois plus importantes que les nôtres ?

M. Jean-Michel Arnaud , rapporteur spécial . - Concernant les chaînes parlementaires, j'ignore quelle est la position de l'Assemblée nationale, mais j'ai pu échanger avec le député, rapporteur spécial de la mission. Les droits de diffusion sont payés par les deux chaînes. Mon homologue à l'Assemblée nationale a esquissé l'idée d'un regroupement de ces charges, ce qui permettrait de faire des économies. C'est un sujet évidemment sensible : chaque chambre a sa culture et celle du Sénat est territoriale comme en atteste la programmation de Public Sénat, plus en phase avec les attentes des sénateurs que des députés. Certains ont envisagé de mener des réflexions avec France Télévisions. Mais l'autonomie des deux chaînes permet de respecter l'autonomie de nos deux chambres. Il n'en irait plus de même si Public Sénat était intégré à France Télévisions. Les productions sur les deux chaînes méritent toutefois d'être analysées en termes de coûts. N'est-il pas notamment possible de mutualiser certains frais techniques ? Comme le sujet est sensible, je ne manquerai pas de demander les avis respectifs des sénateurs, administrateurs de la chaîne Public Sénat et des Questeurs.

Concernant la sécurité des pouvoirs publics, j'ai discuté avec le directeur de cabinet de Président de la République, Patrick Strzoda, et deux de ses collaborateurs. Des dépenses importantes sont prévues en 2021. Il est notamment proposé d'inscrire 3,4 millions de crédits pour continuer la modernisation des équipements informatiques et numériques. Par ailleurs, 1,6 million d'euros sont prévus pour poursuivre l'effort de sécurisation du palais de l'Élysée et de protection du Président. Il y existe donc une prise de conscience aiguë des moyens à dédier à la protection du principal représentant de l'État.

L'impact de la crise sanitaire a fait l'objet d'une estimation par les services de l'Assemblée nationale, en juin 2020 ; il est explicité dans l'annexe budgétaire . La crise engendrerait un surcoût budgétaire d'environ 0,7 million d'euros correspondant à des dépenses d'ordre sanitaire, ainsi qu'au déploiement des outils de télétravail et de visio-conférences pour les commissions. En sens inverse, des économies seraient de l'ordre de 12 à 13 millions d'euros, avec un décalage des opérations immobilières et des économies en fonctionnement de l'ordre 1,5 à 2,5 millions d'euros.

S'agissant du Sénat, et d'après les éléments disponibles dans l'annexe budgétaire, la crise aurait eu principalement une incidence sur les postes de dépense d'achat de fluide, de déplacements, de frais postaux et téléphoniques pour environ 1 million d'euros, ainsi que sur les travaux des missions et délégations pour environ 1 million d'euros. Parallèlement, les dépenses supplémentaires d'achat d'articles sanitaires et de prévention seraient évaluées à environ 0,3 million d'euros. Des pertes de recettes sont également prévues, s'agissant notamment des concessions. En matière d'investissement, plusieurs travaux ont été reportés à cause de la crise sanitaire sur l'exercice prochain et les opérations qui ont été maintenues ont pris du retard, comme celle du 26-36 rue de Vaugirard, dont 3 millions d'euros de reports sont anticipés, sans doute imputables à la crise.

Concernant la possibilité de procéder à des diminutions de crédits à la présidence de la République, l'Élysée procède à des travaux de restructuration immobilière. Le site de l'Alma est notamment en travaux et, accueillera, sous peu, une partie des agents de l'Élysée qui travaillaient sur un autre site. Des travaux porteront également, en 2021, sur l'hôtel Marigny. Le différentiel auquel vous faites allusion, à savoir le moindre prélèvement sur trésorerie, permettra de couvrir une partie de ces dépenses d'investissement.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Pouvoirs publics » sans modification.

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