B. LE TUNNEL SOUS LA MANCHE
Pour tirer les conséquences de la fin de la période de transition, le Gouvernement serait habilité à légiférer par ordonnances afin de « désigner l'autorité nationale de sécurité (...) pour la partie de la concession du tunnel sous la Manche située en territoire français ».
Conformément au Traité de Cantorbéry (12 février 1986) , le tunnel sous la Manche est une infrastructure concédée conjointement par la France et le Royaume-Uni. Gérée par Eurotunnel, l'infrastructure est aujourd'hui utilisée par trois entreprises ferroviaires (Eurostar, GB Rail freight et DB Cargo UK).
Le tunnel sous la Manche : les principaux chiffres 171 ( * ) - 50,5 kilomètres : longueur du tunnel ; - 26 % : pourcentage des échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et le continent européen qui transitent par le tunnel (140 milliards d'euros par an) ; - Toutes les 4 minutes : un train circule dans le tunnel ; - 35 minutes : temps de la traversée du tunnel (contre plus de 2 heures pour la traversée maritime) ; - 11 millions : nombre de voyageurs ayant utilisé l'Eurostar en 2019 ; - 1,6 million : nombre de poids lourds ayant transité par le tunnel en 2019. |
Le Traité de Cantorbéry a instauré une commission intergouvernementale (CIG) chargée de superviser l'exploitation du tunnel sous la Manche. Elle constitue aujourd'hui « l'autorité nationale de sécurité », définie par la directive européenne du 11 mai 2016 172 ( * ) comme « tout organisme chargé (des tâches relatives à la sécurité ferroviaire) par plusieurs États membres de manière à assurer un régime unifié en matière de sécurité ».
Cette gouvernance est toutefois remise en cause par le Brexit : à la fin de la période de transition, la partie britannique du tunnel ne sera plus soumise au droit européen et la CIG ne pourra plus être considérée comme l'autorité nationale de sécurité.
Préserver le rôle de la CIG - et donc l'unicité du cadre de sécurité du tunnel sous la Manche - nécessitera :
- un accord entre le Royaume-Uni et l'Union européenne , la France souhaitant être habilitée par l'Union afin de négocier directement avec les Britanniques ;
- et la modification de la directive du 11 mai 2016, pour qu'un organisme puisse être chargé des tâches relatives à la sécurité ferroviaire par un État membre (la France) et un État tiers (le Royaume-Uni).
En l'absence d'accord, la France devra désigner, à l'issue de la période de transition, sa propre autorité nationale de sécurité pour la partie du tunnel relevant de sa compétence ; le Royaume-Uni devra faire de même sur son territoire. Il s'agit toutefois d'une solution de dernier recours , la priorité étant de conserver l'unicité du cadre de sécurité .
Comme le confirme l'étude impact, l'absence d'accord nécessiterait de modifier l'article L. 2221-1 du code des transports pour « étendre la mission de l'établissement public de sécurité ferroviaire (qui est l'autorité nationale de sécurité française exerçant actuellement sur l'ensemble du réseau ferré national) jusqu'à la frontière située au milieu du tunnel » 173 ( * ) .
À l'initiative de son rapporteur, la commission des lois a inscrit cette disposition « en clair » dans la loi (amendement COM-59) . Elle ne s'appliquerait qu'à la fin de la période de transition et uniquement dans l'hypothèse où « aucune instance internationale ne (pourrait) être qualifiée d'autorité nationale de sécurité au sens du droit communautaire ».
* 171 Source : étude d'impact du projet de loi, p. 118.
* 172 Directive 2016/798 (UE) du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relative à la sécurité ferroviaire.
* 173 Étude d'impact du projet de loi, p. 120.