B. LE BUDGET RECTIFICATIF N'INCLUT TOUTEFOIS QU'UNE PARTIE DES AUGMENTATIONS DE DÉPENSES PRÉVISIBLES SUR LES POLITIQUES NON INCLUSES DANS LA NOUVELLE MISSION

S'il était compréhensible que le premier projet de loi de finances rectificative, élaboré puis voté dans des conditions d'urgence exceptionnelles 76 ( * ) , n'appréhende pas la totalité des effets budgétaires prévisionnels de la crise, force est de noter que le projet présenté par le Gouvernement, un mois après le début du confinement, ne se fonde pas sur une estimation des dépassements et sous-consommations de crédits concernant d'autres missions .

L'examen du texte par l'Assemblée nationale a toutefois conduit à modifier les crédits de deux missions du budget général afin de répondre à des annonces de mesures nouvelles faites par le Gouvernement.

D'une part 880 millions d'euros de crédits ont été ouverts sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », sur la proposition de M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de l'Assemblée nationale afin de financer la nouvelle prime en faveur des familles modestes annoncée par le Gouvernement 77 ( * ) .

D'autre part l'Assemblée nationale, sur la proposition du Gouvernement, a ouvert 281,1 millions de crédits en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie » afin, selon l'exposé sommaire de l'amendement, de financer des mesures diverses : achat de masques et investissement dans des machines permettant la production de matériaux utilisé pour la confection des masques, mais aussi mesures de soutien aux zoos, refuges et cirques familiaux au titre des soins prodigués aux animaux. Cette ouverture de crédits accroit de 26 % les crédits de ce programme.

Les conséquences de la crise sanitaire sur les autres dépenses des ministères ne sont toutefois pas prises en compte , alors même qu'elles apparaissent parfois d'ores et déjà comme inéluctables.

S'agissant, à titre d'exemple, de la mission « Cohésion des territoires » : le report de la mise en oeuvre du versement contemporain des aides personnelles au logement devrait se traduire par des besoins de dépenses de l'ordre de 100 millions d'euros par mois de retard . Or aucune date n'a été fixée pour sa mise en oeuvre, d'autant que la Caisse nationale d'assurance familiale (CNAF), qui en était chargée, doit à présent répondre au défi de la mise en place de la nouvelle prime en faveur des familles modeste précitée. Le ministère du logement a par ailleurs annoncé des dépenses nouvelles d'hébergement et d'aide aux personnes sans domicile à hauteur de 65 millions d'euros.

La sollicitation particulière dont fait l'objet la direction générale des finances publiques (DGFiP) pose également la question de l'application du plan de réduction de postes, le schéma d'emploi étant en diminution de 1 500 équivalents temps-plein dans cette administration en 2020 avec un impact estimé à 46 millions d'euros.

Certaines missions pourraient connaître une sous-consommation de leurs crédits , faute de possibilité de mettre en oeuvre les actions prévues.

D'une manière générale, l'arrêt des déplacements et la généralisation du télé-travail peut permettre de constater des économies sur les frais de fonctionnement (déplacements) au sein des administrations publiques.

L'exécution des crédits de la mission « Action et transformation publique », qui était déjà faible au cours des exercices 2018 et 2019, pourrait être également affectée par les conséquences de la crise sanitaire, dans la mesure où la mission met en oeuvre des procédures de sélection de projets, plus difficiles à conduire en période de confinement, et des travaux immobiliers tels que la rénovation ou la construction de nouvelles cités administratives.

Les crédits de la mission « Travail et emploi » devraient connaître des évolutions. La direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) a d'ores et déjà indiqué une nette diminution des entrées en contrats aidés et on peut s'attendre à une sous-consommation des crédits afférents aux dispositifs d'inclusion dans l'emploi, pour lesquels environ 2 milliards d'euros ont été prévus en loi de finances initiale pour 2020. La baisse constatée des entrées en formation des demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi devrait également se faire ressentir sur la consommation des crédits du plan d'investissement en compétence ou PIC (environ 1 milliard d'euros prévus en loi de finances initiale). Le PIC devrait toutefois être mobilisé, notamment pour revaloriser les indemnités de stage des élèves-infirmiers et élèves aides-soignants faisant face à l'urgence sanitaire.

On peut enfin s'interroger sur la mise en oeuvre en 2020, dans le cadre de la mission « Sport, jeunesse et via associative », du service civique, pour lequel des crédits ont été ouverts en loi de finances initiale à hauteur de 30 millions d'euros, même si la mise en oeuvre de la réserve sanitaire pourrait avoir pour effet de consommer une partie de ces crédits.


* 76 Depuis l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), seule la loi n° 2008-1061 du 16 octobre 2008, présentée elle aussi au début d'une crise majeure, a été discutée et adoptée dans des conditions de délai comparables à la loi de finances rectificative du 23 mars 2020.

* 77 La recevabilité de l'amendement, au regard des conditions fixées par l'article 40 de la Constitution, est fondée sur l'accord exprimé par le Gouvernement devant les commissions des finances des deux assemblées préalablement au dépôt de l'amendement.

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