III. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

A. LA PRÉSERVATION DES GRANDS ÉQUILIBRES

1. Le triple échec de la loi du 2 avril 1947

Le présent projet de loi, évoqué depuis plus d'un an et examiné en première lecture au Sénat, marque une importante évolution du paradigme de la distribution de la presse.

Tout d'abord, votre Rapporteur relève que le caractère spécifique de la distribution de la presse en France est lié à la nature singulière de la publication . Comme le Conseil constitutionnel le souligne, « le pluralisme des quotidiens d'information politique et générale auquel sont consacrées les dispositions [...] est en lui-même un objectif de valeur constitutionnelle ». L'exigence démocratique, qui dans notre pays s'appuie sur des citoyens informés, justifie l'intervention et le soutien public, via les aides à la presse ou le soutien à la distribution. Dès lors, le premier objectif de la loi du 2 avril 1947 a été de garantir une diffusion sur l'ensemble du territoire dans des conditions non discriminante, qui permettent à chacun, quel que soit son lieu d'habitation, de recevoir la presse IPG, et singulièrement les quotidiens, dans une temporalité proche à défaut d'être identique.

Or cet édifice ambitieux a été remis en cause ces dernières années par les crises successives qui ont frappé la presse ces dernières années.

De ce point de vue, le projet de loi acte un triple échec :

- celui de la régulation telle qu'issue des lois de 2011 et 2015, qui n'est pas parvenue, en dépit d'efforts très réels, à restaurer l'équilibre économique du secteur ;

- celui de Presstalis , qui n'a jamais semblé en mesure de se réformer suffisamment pour faire face à la baisse des ventes, et dont les directions successives ont principalement chargé un consensus social finalement obtenu grâce à un engagement important et non anticipé de l'Etat ;

- celui enfin des éditeurs , en particulier les membres successifs du conseil d'administration de Presstalis, qui n'ont jamais semblé en mesure de proposer des solutions de long terme dépassant le cadre de leur strict intérêt, sauf dans des situations d'urgence absolue où la distribution de la presse aurait pu s'effondrer brutalement.

2. Les objectifs que doit se fixer une modernisation de la législation

Votre Rapporteur avait défini dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2019 précité quatre objectifs que devait remplir une réforme de la loi Bichet :

- préserver un système à même d'assurer une distribution sur l'ensemble du territoire de la presse IPG ;

- créer les conditions d'un équilibre économique durable qui ne nécessiterait pas à intervalle régulier un soutien public ;

- préserver et développer le réseau des marchands de presse dans les territoires , en tenant compte des évolutions des habitudes de lecture ;

- enfin prendre en compte les nouveaux acteurs de la distribution numérique de la presse .

Le projet de loi relatif à la modernisation de la distribution de la presse cherche à préserver le sens premier de la loi adoptée le 2 avril 1947, qui est de garantir la distribution de la presse, spécifiquement IPG, en France, afin de permettre aux publications de remplir leur mission constitutionnelle.

Le schéma retenu passe par une réécriture complète de la loi de 1947, seules quelques dispositions du texte original étant préservées.

Pour autant, compte tenu de la place symbolique de cette grande loi issue des travaux du CNR et du maintien de son sens premier, votre Rapporteur estime important de rester dans ce cadre spécifique et de ne pas avoir inclus ces dispositions législatives, comme cela était envisagé par le rapport Schwartz, dans le code des postes et des communications électroniques. Ainsi, l'article 1 er du projet de loi contient une nouvelle « loi Bichet du 2 avril 1947 » de 26 articles.

La loi Bichet telle que conçue en 1947, révisée en 2011 et 2015, serait cependant très largement abrogée.

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