II. LE DROIT ACTUEL ET LA PROPOSITION DE LOI

A. L'APPLICATION AUX DRAPEAUX D'ANCIENS COMBATTANTS DES PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT DES BIENS

1. L'absence de protection juridique spécifique

La production et le commerce de drapeaux tricolores ne sont pas réglementés. Il est donc loisible à toute personne physique ou morale de confectionner, d'acheter, de distribuer ou de vendre de tels drapeaux.

Le symbole patriotique que représente le drapeau tricolore fait toutefois l'objet d'une protection spécifique depuis une date relativement récente. La loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure 6 ( * ) a en effet créé l'article 433-5-1 du code pénal punissant l'outrage public au drapeau tricolore ou à l'hymne national 7 ( * ) de 7 500 euros d'amende.

Par ailleurs, l'article R. 645-15 du même code, créé par le décret du 21 juin 2010 8 ( * ) , prévoit que le fait de détruire, détériorer ou utiliser de manière dégradante le drapeau tricolore dans un lieu public ou ouvert au public constitue une contravention punie d'une amende maximale de 1 500 euros.

Cette protection du symbole contre les outrages ne confère pas une nature juridique particulière à l'objet qui en est le vecteur. Ainsi, un drapeau tricolore usé peut être jeté ou détruit. De même, si détériorer publiquement un drapeau distribué à l'occasion d'un évènement sportif constitue un délit, le spectateur peut s'en débarrasser à l'issue de l'évènement.

Les drapeaux des associations d'anciens combattants ne font pas l'objet de dispositions législatives ou règlementaires spécifiques. Ils sont généralement achetés par ces associations dans le commerce et, le cas échéant, brodés au nom de l'association acquéreuse qui est libre d'en faire l'usage qu'elle souhaite, notamment de les remplacer par un étendard neuf le cas échéant. Un particulier propriétaire d'un drapeau ayant appartenu à une association d'anciens combattants ou en portant les signes distinctifs est également libre d'en disposer conformément aux principes du droit civil, c'est-à-dire notamment de le vendre ou de le céder.

2. La prescription acquisitive

Une chose ne peut être vendue que par son propriétaire légitime. Un particulier ne peut donc pas vendre le drapeau appartenant à une association d'anciens combattants. Toutefois, un particulier se trouvant en possession d'un drapeau ayant appartenu à une association d'anciens combattants peut en devenir légalement propriétaire par le moyen de la « prescription acquisitive », mentionnée à l'article 2258 du code civil. L'article 2276 du même code dispose en effet qu'en fait de meubles « la possession vaut titre » et que le propriétaire d'une chose perdue ou volée dispose d'un délai de trois ans pour la revendiquer.

Il résulte de ces dispositions que, en l'état actuel du droit, un individu ayant en sa possession un drapeau ayant appartenu à une association d'anciens combattants peut légitimement s'en considérer le propriétaire et en faire l'usage qu'il souhaite.


* 6 Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.

* 7 Dans sa décision n° 2003-467 DC du 13 mars 2003, le Conseil constitutionnel a validé la conciliation opérée par le législateur entre la liberté d'expression et le respect des emblèmes nationaux tout en assortissant sa décision d'une réserve d'interprétation. Sont ainsi visés les outrages commis lors de « manifestations publiques à caractère sportif, récréatif ou culturel se déroulant dans des enceintes soumises par les lois et règlements à des règles d'hygiène et de sécurité en raison du nombre de personnes qu'elles accueillent ».

* 8 Décret n° 2010-835 du 21 juillet 2010 relatif à l'incrimination de l'outrage au drapeau tricolore.

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