C. LA MISE EN PLACE D'UN CADRE JURIDIQUE DE COOPÉRATION PLUS EFFICACE

1. Un accord qui remplacera l'arrangement technique de 1996

La coopération bilatérale dans le domaine de la défense a longtemps reposé sur un arrangement technique du 13 mai 1996 entre les ministères de la défense français et albanais.

Cet arrangement instaure une coopération entre les ministères en charge de la défense des deux Etats et leurs forces armées, principalement dans les domaines suivants :

- les concepts de défense et de sécurité, en particulier en Europe et dans les Balkans ;

- l'organisation et le fonctionnement des forces armées, y compris en matière de gestion des ressources humaines et de formation des personnels civils et militaires, de législations applicables ;

- l'histoire militaire et le sport militaire.

Il prévoit différentes formes de coopération, telles que les visites croisées, l'accueil de stagiaires en formation, des escales de bâtiments de guerre ou d'aéronefs, l'organisation de conférences et de colloques ou encore l'échange d'informations et de documentations.

Cet arrangement instaure également un groupe de travail mixte franco-albanais qui se réunit annuellement pour coordonner et dresser le bilan de la coopération. Il fixe enfin les modalités financières de la coopération.

L'entrée de l'Albanie dans l'OTAN, en 2009, a rendu obsolète cet arrangement, notamment s'agissant des clauses financières.

En 2012, la France a proposé à l'Albanie d'entamer des négociations en vue d'élever le niveau de leur coopération en matière de défense et de conclure un accord intergouvernemental, dont la portée juridique est plus importante qu'un simple arrangement technique. Cette initiative française s'est inscrite à l'époque dans le programme d'actualisation et de rénovation du cadre juridique de la coopération dans le domaine de la défense avec les Etats d'Europe centrale et orientale. Des accords de coopération en matière de défense ont successivement été signés avec la Slovaquie en mai 2009, avec la Serbie en avril 2011 et avec la Croatie en 2013.

En février 2016, la France a transmis un projet d'accord à la partie albanaise, qui a été approuvé en mars 2017, après une série d'échanges par la voie diplomatique.

Cet accord, rédigé de manière réciproque, reprend les stipulations classiques des accords de coopération conclus dans le domaine de la défense précités.

La France et l'Albanie étant tous deux membres de l'OTAN, l'accord renvoie à la convention entre les Etats parties au traité de l'Atlantique Nord sur le statut des forces, dite « SOFA OTAN », signé à Londres le 19 juin 1951, pour le statut des membres du personnel et des personnes à charge, ainsi que notamment pour la prise en charge financière des prestations de santé et pour le règlement des demandes d'indemnité en cas de dommage.

Contrairement à l'arrangement technique de 1996 qui faisait supporter la majorité des coûts inhérents aux activités à la partie d'accueil, l'accord pose désormais le principe, habituellement retenu dans ce type d'accord, selon lequel chaque partie prend à sa charge les frais induits par sa participation aux activités communes. Pour les stages organisés dans des organismes militaires de formation, la partie d'accueil examine, au cas par cas, la possibilité de prise en charge des frais de scolarité pour les membres du personnel de la partie d'origine.

Le présent accord prévoit également le maintien de la résidence fiscale dans l'Etat d'origine, conformément à l'article X du SOFA OTAN et à la convention franco-albanaise en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscale de 2002.

2. Enjeux et perspectives

De façon très concrète, cet accord permet de fixer le statut des membres du personnel français et albanais déployés sur le territoire de l'autre Etat dans le cadre des activités de coopération.

Ce nouvel encadrement juridique devrait permettre d'étendre la coopération et d'intégrer les capacités albanaises, notamment dans le cadre des opérations de l'OTAN.

Sur le plan géopolitique, cet accord permettra de développer des coopérations sur des sujets d'intérêt majeurs pour les deux pays comme la lutte contre le terrorisme et le radicalisme, la stabilisation des Balkans, la sécurisation des espaces maritimes méditerranéens.

L'entrée en vigueur de cet accord accompagnera la réouverture de la mission de défense française en Albanie à l'été 2019, fermée, on le rappelle en 2008, pour des raisons budgétaires. Cette mission sera dotée d'une compétence régionale visant à couvrir l'espace albanophone dans la région. Ce redécoupage, rendu nécessaire par la contraction du réseau de missions de défense dans le sud-est européen, ouvre la voie à une plus grande mutualisation des actions de coopération de la France avec ces quatre Etats qui entretiennent d'excellentes relations mutuelles ainsi qu'avec la France et travaillent déjà conjointement au sein de différentes structures régionales.

Par ailleurs, l'Albanie étant l'un des rares Etats de la région à se fournir encore de façon substantielle auprès de l'industrie française d'armement, des opportunités de contrat pourraient se présenter. Des besoins en équipement ultérieurs en hélicoptères dans le domaine civil (intérieur, santé) dont la gestion relève de la compétence du ministère de la défense ne sont pas non plus à exclure.

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