CHAPITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉTAT CIVIL
Article 18 (art. 40 [nouveau], 48, 49, 53 et 61 du code civil) - Règles relatives à la tenue des registres de l'état civil
Le présent article modifie les règles applicables à la tenue des registres de l'état civil. Il affirme, à l'article 40 du code civil, le principe de la tenue des registres de l'état civil en double exemplaire. Par exception, il dispense les communes qui ont mis en place un traitement automatisé de ces données de la tenue du double de ce registre.
Votre commission a adopté un amendement COM-89 rédactionnel, présenté par son rapporteur.
En nouvelle lecture, à l'initiative de notre collègue députée Catherine Vautrin, l'Assemblée nationale a complété le présent article pour prévoir, à l'article 61 du code civil, que les demandes de changement de nom pourraient être justifiées par une personne majeure qui souhaiterait adjoindre le nom de l'un ou l'autre de ses parents à son nom de naissance.
Cette disposition pose au moins deux difficultés importantes
En premier lieu, le principe d'immutabilité du nom s'oppose à ce qu'il puisse être changé pour de simples convenances personnelles. Le nom de famille d'un enfant lui a été dévolu à sa naissance en application des règles prévues par le code civil. Depuis l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, lorsque l'enfant a été reconnu par ses deux parents, ceux-ci ont donc pu choisir entre le nom du père, le nom de la mère et les noms des deux parents accolés 87 ( * ) . Il ne saurait être question de remettre ce choix en cause, à moins de justifier d'un intérêt légitime, comme l'extinction de ce nom de famille ou son caractère dégradant, conformément à ce que prévoit déjà l'article 61.
En second lieu, au regard de l'exigence d'unité du nom de famille au sein d'une fratrie, cette nouvelle disposition pose question. En effet, l'article 311-21 du code civil dispose que lorsqu'un nom de famille a été dévolu à un enfant, « le nom précédemment dévolu ou choisi vaut pour les autres enfants communs ». Si l'on admettait l'adjonction du nom du parent qui n'a pas transmis le sien, comme le propose le présent article, qu'adviendrait-il du nom des autres membres de la fratrie ?
L'article 43 de la loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 relative à l'égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs, permet néanmoins à toute personne majeure d'ajouter à son nom, à titre d'usage, le nom de celui de ses parents qui ne lui a pas transmis le sien. La personne peut ainsi faire usage de ce nom dans l'ensemble de ses relations avec l'administration. Ce nom ne figurera pas sur ses documents de l'état civil et ne pourra être transmis à ses enfants.
Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission, à l'initiative de son rapporteur, a adopté un amendement COM-88 pour supprimer cette possibilité.
Votre commission a adopté l'article 18 ainsi modifié .
Article 18 bis A (art. 70 et 78 du code civil) - Simplification des démarches des usagers en matière d'état civil
Introduit à l'Assemblée nationale en première lecture à l'initiative du Gouvernement, cet article a été adopté sans modification en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
Il a pour objet de simplifier la vérification des données de l'état civil lors de l'établissement d'actes de mariage ou de décès.
Ces dispositions s'inscrivent dans le cadre du développement du système de communication électronique des données de l'état civil dénommé COMEDEC.
COMEDEC : la communication électronique de données de l'état civil Ce dispositif mis en oeuvre conjointement par l'Agence nationale des titres sécurisés et le ministère de la justice permet l'échange dématérialisé de données de l'état civil entre les destinataires de ces données (administrations et notaires) et leurs dépositaires (mairies et service central de l'état civil de Nantes). La mise en oeuvre de ces échanges a été instituée par voie règlementaire, par le décret n° 2011-167 du 10 février 2011 instituant une procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l'état civil et l'arrêté du 19 janvier 2016 relatif aux échanges par voie électronique des données à caractère personnel contenues dans les actes d'état civil. En l'état actuel du droit, la vérification électronique des données de l'état civil peut seulement être demandée par le ministère de l'intérieur dans le cadre de la délivrance des passeports, ou les notaires, pour les besoins des actes notariés. 134 communes sont adhérentes au dispositif 88 ( * ) . Selon le ministère de la justice 89 ( * ) , COMEDEC poursuit deux objectifs principaux : d'une part, simplifier les démarches administratives des usagers en leur évitant d'avoir à produire leur acte d'état civil, d'autre part, limiter la fraude documentaire. |
Pour l'établissement d'actes de mariage, le 1° du présent article apporte plusieurs modifications à l'article 70 du code civil qui impose actuellement à chacun des futurs époux de remettre à l'officier de l'état civil chargé de célébrer leur mariage une copie intégrale de leur acte de naissance ne devant pas dater de plus de trois mois, si elle a été établie en France, et de plus de six mois si elle a été établie dans un consulat.
En premier lieu il exige désormais la production d'un extrait avec filiation, et non plus d'une copie intégrale de l'acte de naissance.
En deuxième lieu, pour les actes de l'état civil détenus par un officier de l'état civil français, il permet à l'officier de l'état civil chargé de célébrer le mariage de solliciter directement les dépositaires des actes de naissance des futurs époux, au moyen de COMEDEC, pour la vérification de leur acte de naissance. Les futurs époux, qui devront en avoir été préalablement informés, seront alors dispensés de la production d'un extrait d'acte de naissance.
En troisième lieu, le 1° prévoit que les extraits d'acte de naissance qui ne sont pas détenus par un officier de l'état civil français ne doivent pas dater de plus de six mois, tout en exemptant de cette condition de délai les actes émanant d'un système d'état civil étranger ne procédant pas à la mise à jour des actes. Le Gouvernement fait valoir que, dans ce cas, « le caractère récent de la copie n'est d'aucune utilité » 90 ( * ) . Une circulaire du ministère de la justice du 23 juillet 2014 relative à l'état civil 91 ( * ) relève que certains systèmes étrangers ne procèdent pas à une mise à jour sur le modèle de ce qui est prévu pour les actes français et prévoit alors que le délai de moins de six mois ne s'applique pas, sous réserve d'attester pour le futur époux, au moyen d'un document officiel d'une autorité habilitée du pays en question, qu'aucune copie d'acte plus récente n'est possible et que, conformément à la règlementation de l'État concerné, l'acte ne fait pas l'objet de mise à jour.
Pour l'établissement d'actes de décès, le 2° du présent article complète l'article 78 du code civil, selon lequel « L'acte de décès sera dressé par l'officier de l'état civil de la commune où le décès a eu lieu, sur la déclaration d'un parent du défunt ou sur celle d'une personne possédant sur son état civil les renseignements les plus exacts et les plus complets qu'il sera possible. ».
La modification proposée consiste à permettre à l'officier de l'état civil de demander la vérification des données à caractère personnel du défunt directement à l'autorité « (...) dépositaire de l'acte de naissance ou, à défaut d'acte de naissance en France, de l'acte de mariage », toujours grâce au dispositif COMEDEC.
Votre rapporteur s'est montré tout à fait favorable à ces mesures de simplification et de sécurisation de la délivrance des actes de l'état civil, tant pour les usagers que pour les communes. Il relève en revanche que si le raccordement à COMEDEC est une faculté pour la majorité des communes, l'article 18 bis B du présent projet de loi, d'une part, vise à le rendre obligatoire pour les communes sur lesquelles est située ou a été située une maternité, sujet sur lequel votre rapporteur a d'ailleurs présenté un amendement, d'autre part, fait obligation aux communes raccordées au système COMEDEC de procéder à la vérification et à l'échange de données de l'état civil par voie dématérialisée.
Votre commission a adopté l'article 18 bis A sans modification .
Article 18 bis B (art. 101-1 et 101-2 [nouveaux] du code civil) - Publicité des actes de l'état civil
Introduit à l'Assemblée nationale en première lecture à l'initiative du Gouvernement, après avis favorable de la commission des lois, cet article a été adopté sans modification en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
Compte tenu du caractère législatif de toute disposition régissant l'état des personnes, conformément à l'article 34 de la Constitution, il vise à introduire dans le code civil les règles de publicité des actes de l'état civil.
Il s'agit, en premier lieu, de prévoir expressément, au sein d'un nouvel article 101-1 du code civil, que « la publicité des actes de l'état civil est assurée par la délivrance des copies intégrales ou d'extraits faite par les officiers de l'état civil. » Le contenu de ces actes et les conditions de leur délivrance seraient déterminés par décret en Conseil d'État.
En second lieu, le présent article s'inscrit dans la continuité de l'article 18 bis A et légalise, toujours au sein de l'article 101-1 nouveau du code civil, le recours à la procédure de vérification électronique des données de l'état civil, au moyen du système COMEDEC déjà décrit.
Il y institue une obligation de raccordement à COMEDEC pour les communes sur le territoire desquelles « est située ou a été établie une maternité » 92 ( * ) , dans les deux ans suivant la promulgation de la présente loi, comme le prévoit le XIV de l'article 54 du présent projet de loi. Il est d'ailleurs prévu à cet effet que « l'État s'engage à participer au financement de COMEDEC » dans les communes concernées. Votre rapporteur, favorable à ces dispositions, émet toutefois une réserve sur l'inclusion dans le champ de cette obligation des communes n'ayant plus de maternité, au regard de la baisse prévisible du nombre des actes de naissance qui seront établis sur leur territoire, qui rend moins pertinente l'obligation de raccordement au système dématérialisé.
Sur sa proposition, votre commission a donc supprimé cette obligation pour les communes qui ont eu une maternité sur leur territoire, en adoptant un amendement COM-87 rectifié .
Enfin, il est prévu qu'en cas de raccordement à COMEDEC, les acteurs concernés (communes, administrations de l'État ou notaires) sont tenus de l'utiliser pour procéder à la vérification des données de l'état civil. La procédure dématérialisée se « substitue » alors « à toute autre forme de délivrance de copie intégrale ou d'extrait » d'actes de l'état civil.
Par le même amendement, votre commission a supprimé la précision, qu'elle juge inutile, selon laquelle la procédure dématérialisée peut être mise en oeuvre « notamment par les notaires ».
Enfin, le présent article crée un nouvel article 101-2 dans le code civil pour prévoir que la publicité des actes de l'état civil est également assurée par le livret de famille, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
Votre commission a adopté l'article 18 bis B ainsi modifié .
Article 18 bis (art. 55 du code civil) - Délai de déclaration de naissance
Introduit en première lecture au Sénat en séance publique, à l'initiative de notre collègue Jacques Bigot et des membres du groupe socialiste et républicain, avec un avis favorable de votre commission et du Gouvernement, le présent article vise à permettre une dérogation au délai de droit commun de déclaration de naissance.
Le 2° du présent article complète ainsi l'article 55 du code civil d'un nouvel alinéa pour porter le délai de déclaration de naissance à huit jours, contre trois dans le délai de droit commun, lorsque « l'éloignement entre le lieu de naissance et le lieu où se situe l'officier de l'état civil le justifie ». Un décret en Conseil d'État est prévu afin de déterminer les communes concernées.
Cette disposition a été adoptée sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture.
Nos collègues députés ont ensuite inséré une nouvelle disposition au 1° du présent article, par l'adoption de deux amendements identiques des rapporteurs de la commission des lois et de notre collègue Sergio Coronado, avec l'avis favorable du Gouvernement, qui vise à porter le délai de droit commun de déclaration de naissance de trois à cinq jours.
Le Défenseur des droits 93 ( * ) a en effet relevé plusieurs cas de méconnaissance de ce délai, tant par les pères que les personnels de santé ayant assisté à l'accouchement 94 ( * ) .
L'article 55 du code civil prévoit actuellement qu'une naissance non déclarée dans le délai légal ne pourra être régularisée qu'après une déclaration judiciaire effectuée par les parents auprès du tribunal d'instance.
Or cette situation peut conduire à ce que l'enfant n'ait pas d'existence juridique pendant la durée de la procédure judiciaire, ce qui, toujours selon le Défenseur des droits, peut porter 95 ( * ) une atteinte au bien-être et à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Compte tenu de ces éléments, votre rapporteur s'est montré tout à fait favorable à cette proposition d'allongement du délai de droit commun.
Votre commission a adopté l'article 18 bis sans modification .
Article 18 quater (art. 60 et 61-5, 61-6, 61-7 et 61-8 [nouveaux] du code civil) - Transfert aux officiers de l'état civil des demandes de changement de prénom et de changement de sexe
Le présent article a été inséré en première lecture à l'Assemblée nationale. Le I, issu d'un amendement du Gouvernement, modifie la procédure applicable aux changements de prénom, pour la confier aux officier de l'état civil. Le II, inséré à la suite de l'adoption de deux amendements identiques déposés par nos collègues députés Pascale Crozon et Sergio Coronado, avec avis favorable de la commission des lois et du Gouvernement, introduit dans le code civil une section relative à la modification de la mention du sexe à l'état civil.
1. La nouvelle procédure applicable aux changements de prénom
En matière de changement de prénom, l'article 60 du code civil, dans sa rédaction actuellement en vigueur, prévoit que toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander au juge aux affaires familiales à changer de prénom. L'article 60-4 dispose ensuite que la mention des décisions de changement de prénom est portée en marge des actes de l'état civil de l'intéressé.
Désormais, la demande devrait être adressée directement à l'officier de l'état civil du lieu de résidence du demandeur ou du lieu où l'acte de naissance a été dressé. Si l'officier de l'état civil estimait que la demande ne revêt pas un intérêt légitime, il devrait saisir le procureur de la République. Si le procureur s'opposait à ce changement, le demandeur pourrait alors saisir le juge aux affaires familiales.
Cette déjudiciarisation de la procédure de changement de prénom a été proposée dans plusieurs rapports récents, dont celui de nos collègues Catherine Tasca et Michel Mercier, « Justice aux affaires familiales : pour un règlement pacifié des litiges » 96 ( * ) .
En effet, d'ores et déjà, l'officier de l'état civil qui reçoit la déclaration de naissance est chargé de veiller à ce que le prénom donné à l'enfant ne lui porte pas préjudice. Rien ne justifie dès lors qu'en cas de changement de prénom, il ne soit pas en mesure de jouer aussi ce rôle.
Selon les données fournies par le Gouvernement à l'appui de cette disposition, les demandes de changement de prénom sont stables depuis 2009 (entre 2 600 et 2 800 demandes par an) et les tribunaux font droit au moins partiellement à plus de 90 % d'entre elles. L'intervention du juge aux affaires familiales ne semblerait donc pas apporter de réelle plus-value.
Cependant, dans leur rapport, nos collègues Catherine Tasca et Michel Mercier insistaient sur la nécessité, tout comme pour l'enregistrement des pactes civils de solidarité, de transférer aux communes les moyens correspondant à ces nouvelles attributions, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Votre commission a donc adopté deux amendements identiques COM-80 et COM-5 , l'un de son rapporteur et l'autre de notre collègue Jean-Pierre Grand, supprimant ce transfert.
2. La nouvelle procédure applicable en matière de changement de sexe
a) Le droit en vigueur
Notre droit est régi par le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes, qui interdit à un individu de changer unilatéralement un des éléments de son état civil (sexe, nom, prénom, filiation). Des procédures judiciaires ou administrative existent, toutefois, pour changer ces éléments lorsque cela apparaît nécessaire (adoption, changement de nom par décret, changement de prénom par décision du juge aux affaires familiales...).
La loi ne prévoit aucune procédure de ce type pour le changement de sexe. Longtemps, le juge judiciaire en a conclu qu'il n'était pas possible d'autoriser une personne se présentant comme transsexuelle à faire correspondre son état civil au genre auquel elle estime se rattacher.
La Cour européenne des droits de l'homme ayant condamné la France, compte tenu de ce refus, pour atteinte au droit à la vie privée en 1992 97 ( * ) , la jurisprudence française a évolué 98 ( * ) jusqu'à reconnaître aux personnes transsexuelles la possibilité d'obtenir la rectification de la mention de leur sexe figurant dans leur acte de naissance lorsque deux critères sont réunis :
- la personne doit avoir établi, au regard de ce qui est communément admis par la communauté scientifique, la réalité du syndrome transsexuel dont elle est atteinte ;
- elle doit avoir subi un traitement médico-chirurgical, dans un but thérapeutique, à la suite duquel, elle ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris l'apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social.
Dans les faits certaines juridictions exigent à ce titre que la personne ait fait l'objet d'une modification de ses organes génitaux et/ou d'une stérilisation.
Transsexualisme et intersexualisme L'intersexualisme (ou hermaphrodisme) est une ambiguïté du sexe anatomique, d'origine génétique. Elle est traitée médicalement par des opérations de féminisation ou de virilisation destinées à favoriser l'orientation du développement de l'enfant vers le sexe dont il est le plus proche. Le transsexualisme est un trouble de l'identité sexuelle qui se caractérise par une opposition entre, d'une part, le sexe anatomique, chromosomique et hormonal et, d'autre part, le sexe psychologique ou psychosocial. Il se caractérise par le « sentiment profond et inébranlable d'appartenir au sexe opposé », accompagné du « besoin intense et constant de changer de sexe et d'état civil » 99 ( * ) . |
b) Le dispositif proposé
Les associations de défense des personnes transsexuelles appelaient depuis longtemps de leurs voeux une évolution significative. Elles revendiquaient, à la fois, une démédicalisation et une déjudiciarisation (changement de sexe par déclaration à l'officier de l'état civil) de la procédure.
Le dispositif proposé ne reprend que la première partie des revendications, le Gouvernement ayant obtenu, en première lecture à l'Assemblée nationale, de transformer la procédure simplement déclarative initialement prévue, en une procédure judiciaire.
Le présent article crée une nouvelle section dans le code civil, dédiée à la modification de la mention du sexe à l'état civil (articles 61-5 à 61-8 du code civil).
• Les conditions du changement de sexe à l'état civil
Le dispositif retenu procède à une « démédicalisation » complète de la procédure de changement de sexe : d'une part, l'intéressé n'a pas plus à prouver qu'il est atteint du syndrome transsexuel ; d'autre part, il n'a pas à subir préalablement un traitement médical irréversible.
La médicalisation du changement de sexe se heurte à des critiques de deux ordres : s'agissant du constat du transsexualisme, la pratique des tribunaux varie quant à la nature et au nombre d'expertises requises. En outre, les personnes concernées vivent parfois comme une humiliation et une stigmatisation de devoir faire établir par un médecin ce qui relève, à leurs yeux, d'une conviction indéfectible et évidente.
Par ailleurs, les opposants à la procédure actuelle soulignent aussi le fait qu'elle impose aux intéressés une intervention médicale lourde, voire mutilante, aboutissant de fait à une stérilisation.
Le mécanisme retenu par le nouvel article 61-5 est celui de la possession d'état : la personne devrait prouver, « par une réunion suffisante de faits » que la mention relative à son sexe à l'état civil « ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue ». En première lecture, l'Assemblée nationale avait retenu une rédaction différente. Le sexe de la personne, inscrit dans ses actes d'état civil, devait ne pas correspondre à celui « auquel elle appartient de manière sincère et continue ».
L'article 61-5 énumère ensuite certains des éléments factuels dont la réunion peut fonder la demande de changement de sexe. Ces principaux faits « peuvent être » :
« 1° Qu'elle se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ;
« 2° Qu'elle est connue sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel ;
« 3 ° Qu'elle a obtenu le changement de son prénom afin qu'il corresponde au sexe revendiqué ; »
En première lecture, l'Assemblée nationale avait prévu un quatrième fait pouvant être pris en compte pour l'appréciation de la demande : que la personne ait « l'apparence physique du sexe revendiqué par l'effet d'un ou plusieurs traitements médicaux ».
Cette disposition a été supprimée en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, les députés estimant que cette précision suscitait des interrogations et des craintes alors même que leur volonté était de faire échapper la décision du juge à la prédominance du dossier médical.
Dans cette même logique, le nouvel article 61-6 dispose que « le fait de ne pas avoir subi de traitements médicaux, une opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut motiver le refus de faire droit à la demande ».
En première lecture, le texte retenu par l'Assemblée nationale était plus nuancé. Il prévoyait que le « seul » fait de ne pas les avoir subis ne pouvait suffire à justifier un refus. Ce fait pouvait donc être pris en compte comme un élément d'appréciation parmi d'autres, ce qui n'est plus le cas dans la rédaction adoptée en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
• Les effets du changement de sexe à l'état civil
La décision appartiendrait au tribunal de grande instance 100 ( * ) . Elle aurait pour conséquence la rectification de la mention relative au sexe et, le cas échéant, du prénom, dans tous les actes d'état civil de l'intéressé. En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a précisé que cette mention, en marge de l'acte de naissance du demandeur, serait portée à la requête du procureur de la République, dans les quinze jours suivant la date à laquelle cette décision serait passée en force de chose jugée.
Deux exceptions sont prévues : d'une part, la modification du prénom ne pourrait être portée en marge des actes d'état civil des conjoints (acte de mariage) ou des enfants (acte de naissance) qu'avec leur accord ; d'autre part, le changement de sexe serait sans effet sur les obligations contractées à l'égard des tiers ou sur les filiations antérieures (le changement de sexe ne serait donc pas répercuté dans les actes de naissance des enfants éventuels de l'intéressé).
Se pose néanmoins la question des filiations postérieures à la décision. Le changement de sexe pouvant intervenir sans que la personne ait subi un traitement médical ayant causé sa stérilité, il pourrait être possible que l'intéressé ait, ultérieurement, un enfant biologique. Ceci créerait une contradiction entre le sexe légal et celui déduit de l'engendrement : un homme pourrait donc être enceinte, ou une femme avoir un enfant biologique avec sa compagne. Un tel cas ne devrait être qu'exceptionnel (la situation s'est rencontrée au Canada), dans la mesure où, dans les cas de transsexualisme avéré, l'intéressé vivrait comme une contradiction flagrante d'être devenu parent selon son sexe d'origine et non selon celui qu'il a choisi.
c) La position de votre commission des lois
Votre rapporteur ne peut que déplorer l'improvisation totale à laquelle elle se trouve livrée, sur un sujet qui mériterait un texte à lui seul et non pas d'être introduit par voie d'amendement au sein d'un projet de loi consacré à l'organisation et aux procédures judiciaires 101 ( * ) .
À cet égard, il s'est interrogé sur l'existence d'un lien, même indirect, de cette disposition avec le présent projet de loi et, par là même, sur sa constitutionnalité.
Cependant, puisqu'à la suite de la nouvelle lecture du présent texte au Sénat, le dernier mot sera donné à l'Assemblée nationale, votre commission s'est inscrite dans une démarche constructive, proposant divers ajustements au dispositif proposé, qui demeurera néanmoins imparfait. À cet égard, elle ne s'interdit pas, dans les années à venir, d'évaluer la procédure mise en place et de lui apporter les ajustements qu'elle jugera pertinents. Elle a d'ailleurs organisé des auditions spécifiques sur le sujet, le 8 juin dernier 102 ( * ) .
Pour l'heure, sensible aux difficultés, voire à la détresse, des personnes transsexuelles, votre commission a souhaité s'assurer que le dispositif mis en place apporterait la plus grande protection possible aux personnes auxquelles il s'applique.
Comme l'a souligné Mme Dominique Lottin, premier président de la cour d'appel de Versailles, lors de son audition par votre commission, une procédure fondée sur une simple déclaration ne peut être retenue, comme l'avaient pourtant envisagé les députés dans un premier temps, avant que le Gouvernement n'amende le dispositif en première lecture.
Le juge doit pouvoir intervenir pour vérifier que ces personnes ne sont pas contraintes de changer de sexe, pour des raisons de prostitution notamment.
Il doit également pouvoir apprécier que la volonté du demandeur est irréversible. Mme Lottin l'a parfaitement exprimé : « nous évoluons tous dans nos vies. Le syndrome transsexuel, s'il correspond à une réalité scientifique, n'est pas forcément définitif. Certains individus ont une difficulté d'identité sexuelle qui les conduit à se sentir appartenir momentanément à un sexe. Il est important qu'un juge intervienne pour s'assurer de la liberté et de la pleine conscience de la personne qui demande le changement d'état civil. »
• La suppression de la possibilité pour un mineur émancipé de saisir le juge d'une demande de changement de sexe à l'état civil
Pour ces raisons votre commission a écarté la possibilité, prévue en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale, pour un mineur émancipé, de demander la modification de la mention du sexe sur ses documents d'état civil.
Même émancipé, un mineur ne peut accomplir certains actes sans l'autorisation de ses parents, comme être adopté ou se marier. De plus, comme l'a souligné M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice, en séance publique à l'Assemblée nationale, cette disposition ne répondrait à aucun besoin puisqu'un seul cas aurait été signalé à ses services.
• Une procédure sécurisée fondée sur des conditions objectives
Quant aux conditions à remplir pour que le juge autorise le changement de sexe à l'état civil, l'Assemblée nationale a entendu ôter tout caractère médical à la procédure.
Ainsi, une simple « réunion de faits » 103 ( * ) permettant de démontrer que l'état civil de la personne ne correspond pas à celui « dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue » suffirait à justifier le changement de sexe à l'état civil.
Or, comme l'a fait valoir Mme Dominique Lottin, « se présenter publiquement comme appartenant au sexe revendiqué, être connu sous un sexe, en avoir l'apparence physique : tout cela est éminemment subjectif et ouvre la porte à une diversité d'interprétations ».
Comme le soulignait le président de votre commission, notre collègue Philippe Bas, lors de ces auditions, « l'expression "réunion suffisante de faits" laisse chaque tribunal déterminer quels faits retenir pour accepter, ou non, un changement de sexe ».
Pour écarter tout risque pesant sur la sécurité juridique du dispositif, votre commission a choisi de s'inspirer, en l'adaptant, de la jurisprudence dégagée par la Cour de cassation.
Dans son arrêt d'assemblée plénière du 11 décembre 1992, la Cour de cassation a considéré que « lorsque, à la suite d'un traitement médico-chirurgical, subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le syndrome du transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect dû à la vie privée justifie que son état civil indique désormais le sexe dont elle a l'apparence ; que le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes ne fait pas obstacle à une telle modification ».
Consciente du caractère stigmatisant de l'utilisation de la notion de « syndrome transsexuel », alors même que le décret n° 2010-125 du 10 février 2010 104 ( * ) a supprimé les troubles de l'identité de genre des critères d'admission des affections psychiatriques de longue durée, votre commission a préféré s'en tenir à l'énoncé des caractéristiques qui définissent le transsexualisme : une personne qui « ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social ».
• L'exigence d'une appréciation médicale de la situation du requérant
En revanche, dans un souci d'objectivation de la procédure et, pour s'assurer que la demande de changement de sexe à l'état civil ne repose pas sur un trouble temporaire du genre, votre commission a prévu, au nouvel article 61-6 du code civil, une appréciation médicale de la demande. Cet avis médical porterait sur le fait que la personne ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe. Il pourrait résulter des pièces fournies par le demandeur et non pas d'une expertise systématique.
• Sans pour autant exiger que la personne se soit soumise à des traitements médicaux extrêmement lourds
Pour autant, votre commission comprend le refus d'une personne transsexuelle, voire l'impossibilité médicalement attestée, de procéder à des opérations chirurgicales lourdes conduisant à une réassignation sexuelle et à une stérilisation de fait.
À cet égard, le comité des ministres du Conseil de l'Europe, dans une recommandation de 2010 sur des mesures visant à combattre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, a affirmé que les conditions préalables, y compris les modifications d'ordre physique, à la reconnaissance juridique d'un changement de genre, devaient être régulièrement réévaluées afin de lever celles qui seraient abusives.
Pour éviter les divergences jurisprudentielles concernant l'appréciation de l'« apparence physique [de la personne] la rapprochant de l'autre sexe » , votre commission s'est inspirée, pour la rédaction du nouvel article 61-6 du code civil, d'une circulaire du ministère de la justice du 14 mai 2010, qui invitait les juridictions à donner un avis favorable à la demande de changement d'état civil « dès lors que les traitements hormonaux ayant pour effet une transformation physique ou physiologique définitive, associés, le cas échéant, à des opérations de chirurgie plastique, ont entraîné un changement de sexe irréversible, sans exiger pour autant l'ablation des organes génitaux » 105 ( * ) .
• Les hypothèses éventuelles de filiations biologiques postérieures au changement de sexe
Enfin, concernant les cas éventuels dans lesquels la personne qui a changé de sexe engendrerait un enfant biologique, la seule façon de remédier à cette difficulté potentielle serait d'interdire ponctuellement de tenir compte du changement de sexe, lorsque celui-ci entrerait en contradiction avec la filiation naturelle établie postérieurement. Concrètement, ceci reviendrait à mentionner, dans l'acte de naissance de l'enfant, le sexe d'origine de son parent.
C'est pourquoi, votre commission a modifié le nouvel article 61-8 du code civil, pour prévoir que le changement du sexe dans les actes de l'état civil est sans effet sur les filiations établies, qu'elles l'aient été avant cette modification ou qu'elles le soient après.
Votre commission a ainsi adopté l' amendement COM-81 rectifié proposé par son rapporteur.
Votre commission a adopté l'article 18 quater ainsi modifié .
Article 18 quinquies (art. 61-3-1 [nouveau], 61-4, 311-23 et 311-24-1 [nouveau] du code civil et art. 5, 7-1 [nouveau]et 10 de l'ordonnance n° 2000-218 du 8 mars 2000 fixant les règles de détermination des nom et prénoms des personnes de statut civil de droit local applicable à Mayotte) - Simplification de la procédure de changement de nom et de prénom lorsque la personne possède des noms et prénoms régulièrement acquis à l'étranger
Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture, à l'initiative du Gouvernement, le présent article vise à simplifier la situation des personnes qui n'ont pas le même nom en France et à l'étranger, en application du principe d'unicité du nom.
1. Faciliter le changement de nom des personnes qui ont acquis un autre nom à l'étranger
Actuellement, les personnes qui se trouvent dans cette situation sont soumises à la procédure de changement de nom de droit commun, régie par l'article 61 du code civil, qui suppose la preuve d'un intérêt légitime et une autorisation par décret.
En application du présent article, ce changement de nom relèverait désormais de la compétence de l'officier de l'état civil (article 61-3-1 nouveau du code civil et, pour Mayotte, article 7-1 nouveau de l'ordonnance du 8 mars 2000). Toute personne qui justifierait d'un nom inscrit sur le registre de l'état civil d'un autre État pourrait demander son changement de nom, en vue de porter le nom acquis dans l'État étranger.
En cas de difficultés, l'officier de l'état civil saisirait le procureur de la République qui pourrait s'opposer à la demande
Le procureur de la République du lieu de naissance du demandeur pourrait également être saisi dans les mêmes conditions et ordonner le changement de nom.
Cette nouvelle procédure de changement de nom, au profit des personnes qui ont acquis un autre nom à l'étranger, pose trois séries de difficultés.
D'un point de vue purement formel, son insertion après l'article 61-3 du code civil n'est pas pertinente. Elle devrait être insérée après l'article 61-1 qui prévoit la procédure de changement de nom de droit commun. Ainsi, cette nouvelle procédure pourrait se voir appliquer les articles 61-2 et 61-3 relatifs aux effets du changement de nom sur les enfants du demandeur, sans avoir à reprendre ces dispositions au sein de l'article consacré à cette nouvelle procédure 106 ( * ) .
Sur le fond ensuite, votre rapporteur s'interroge sur l'opportunité d'une telle procédure dérogatoire au droit commun.
Certes, actuellement, la procédure de changement de nom, prévue à l'article 61 du code civil est relativement lourde, puisqu'elle nécessite une autorisation donnée par décret, mais elle se justifie au regard du principe de l'indisponibilité de l'état des personnes, qui interdit à un individu de changer unilatéralement un des éléments de son état civil.
La nouvelle procédure prévue au présent article est, à l'inverse, très légère, puisqu'en l'absence de saisine du procureur de la République par l'officier de l'état civil, elle échapperait à tout contrôle judiciaire.
Elle ne permettrait pas non plus, comme le prévoit l'article 61-1 du code civil pour la procédure de droit commun, la possibilité pour les tiers de s'opposer au changement de nom. Or, une telle protection est nécessaire pour éviter par exemple des usurpations d'identité.
Enfin, par cohérence avec sa position concernant l'enregistrement des pactes civils de solidarité (article 17) et les décisions de changement de prénom (article 18 quater ), votre commission s'oppose à tout transfert de compétences aux officiers de l'état civil, sans transfert des moyens correspondants et sans formation appropriée.
Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a adopté un amendement COM-84 supprimant le 2° du I et le 2° du II du présent article.
Par coordination avec la suppression par votre commission, à l'article 18 quater , du transfert des décisions de changement de prénoms aux officiers de l'état civil, cet amendement propose également la suppression de la transposition de ces dispositions à Mayotte (article 5 nouveau de l'ordonnance du 8 mars 2000), prévue au 1° du II du présent article.
2. Reconnaître en France les décisions de changement de nom et prénom régulièrement acquises à l'étranger
Le présent article complète également l'article 61-4 du code civil pour préciser que les décisions de changement de nom et prénom, qui ont été régulièrement acquises à l'étranger, produiraient automatiquement effet en France.
Elles seraient ainsi portées en marge des actes de l'état civil sur instruction du procureur de la République, comme les décisions de changement de nom et de prénom acquises en France.
Par ailleurs, le présent article complète utilement le premier alinéa de l'article 61-4, applicable à toutes les décisions de changement de prénom et de nom, en précisant que ces décisions seront portées en marge de l'état civil du partenaire lié par un pacte civil de solidarité. Actuellement, cet alinéa prévoit seulement que ces décisions sont portées en marge des actes de l'état civil de l'intéressé et, le cas échéant, de ceux de son conjoint et de ses enfants.
Votre commission ne s'est pas opposée à ces deux modifications de l'article 61-4 du code civil.
3. Faire prévaloir le nom figurant dans l'acte de naissance étranger
Le présent article introduit également une nouvelle disposition (article 311-24-1) au sein des règles du code civil relatives à la dévolution du nom de famille.
En cas de naissance à l'étranger d'un enfant dont l'un des parents au moins est français, la transcription de l'acte de naissance sur les registres de l'état civil français devrait retenir le nom de l'enfant inscrit dans l'acte étranger. Au moment de la transcription, les parents pourraient néanmoins choisir d'appliquer la loi française pour l'attribution du nom de l'enfant.
Certes, le dernier alinéa de l'article 3 du code civil dispose que « les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger ».
Cependant, dans les faits, à défaut de connaître le contenu de la loi personnelle de l'enfant au moment de la déclaration de naissance, le nom de l'enfant est généralement déterminé par application de la loi du lieu de la déclaration. Il peut donc en résulter une discordance entre le nom inscrit sur l'acte de naissance étranger et le nom retenu au moment de la transcription de l'acte de naissance à l'état civil français.
La solution proposée permet donc aux personnes concernées, notamment aux binationaux, d'avoir le même nom sur l'ensemble de leurs documents d'état civil, et ce conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) 107 ( * ) .
4. Le changement de nom de l'enfant par déclaration conjointe de ses parents
Dans sa rédaction en vigueur, l'article 311-23 du code civil prévoit les règles de dévolution du nom de famille en cas d'établissement d'un second lien de filiation, lorsque la filiation n'était établie qu'à l'égard d'un seul parent et que l'enfant avait donc le nom de ce parent.
Les parents peuvent alors choisir de substituer au nom de l'enfant le nom du parent à l'égard duquel le lien a été établi en second ou d'accoler les deux noms. Ces changements nécessitent une déclaration conjointe des parents devant l'officier de l'état civil.
Or, comme l'a souligné le Gouvernement à l'Assemblée nationale, à l'appui de son amendement créant le présent article, si l'un des parents est empêché (hospitalisé, alité ou en détention par exemple), la procédure de changement de nom est bloquée puisque la déclaration ne peut être conjointe.
Le présent article propose donc, à juste titre, de compléter l'article 311-23 pour préciser qu'en cas d'empêchement grave, le parent absent peut être représenté.
Votre commission a adopté l'article 18 quinquies ainsi modifié .
* 87 Avant la réforme de 2005, priorité était donnée au nom du père. Lorsque les parents de l'enfant étaient mariés, seul ce nom pouvait être donné à l'enfant. L'ordonnance de 2005 avait prévu la possibilité jusqu'au 30 juin 2006 de choisir d'adjoindre en seconde position, à certaines conditions, le nom du parent qui n'avait pas été transmis à la naissance. Mais cette disposition transitoire n'était applicable qu'aux enfants de moins de 13 ans, c'est-à-dire nés après 1990. En effet, la commission des lois du Sénat de l'époque, au nom du principe d'immutabilité de l'état civil, n'avait pas souhaité ouvrir cette possibilité à tous les enfants nés avant 2005.
* 88 Annexe au rapport de la Cour des comptes sur les relations aux usagers et la modernisation de l'État, Vers une généralisation des services publics numériques, 4 février 2016. Ce document est consultable à l'adresse suivante :
https://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Relations-aux-usagers-et-modernisation-de-l-Etat
* 89 Dossier de présentation COMEDEC du ministère de la justice et de l'agence nationale des titres sécurisés accessible sur le site internet suivant : https://ants.gouv.fr/Les-solutions/COMEDEC
* 90 Amendement n° CL189 déposé par le Gouvernement en commission en première lecture à l'Assemblée nationale.
* 91 Circulaire du 23 juillet 2014 relative à l'état civil.
* 92 Une enquête de la Cour des comptes relative aux maternités, qui a donné lieu à un rapport d'information de la commission des affaires sociales du Sénat enregistré le 21 janvier 2015, indique que 545 maternités sont en activité en France en 2012, contre 1747 en 1972. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/r14-243/r14-2431.pdf
* 93 Décision du Défenseur des droits du 21 mars 2016 portant recommandation de réforme n° PR/MDE/16-01 et avis du Défenseur des droits n° 16-10 en date du 7 avril 2016.
* 94 L'article 56 du code civil prévoit en effet que la naissance de l'enfant est déclarée par le père ou, à défaut, par les personnels de santé ayant assisté à l'accouchement.
* 95 Avis du Défenseur des droits n° 16-10 en date du 7 avril 2016, p. 14.
* 96 Justice aux affaires familiales : pour un règlement pacifié des litiges, rapport d'information n° 404 (2013-2014) de Mme Catherine Tasca et M. Michel Mercier, fait au nom de la commission des lois, p. 40 et 41. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/rap/r13-404/r13-4041.pdf .
* 97 CEDH, 25 mars 1992, « B. c/ France », Requête n° 13343/87.
* 98 Assemblée plénière de la Cour de cassation, 11 décembre 1992, n° 91-11900.
* 99 Définition donnée par le Professeur Küss devant l'académie de médecine en 1982, cité par Astrid Marais, in Droit des personnes, Dalloz 2014, p. 106-107.
* 100 Initialement, les auteurs des deux amendements identiques ayant conduit à l'introduction du présent article avaient prévu une procédure différente. Le demandeur saisissait le procureur de la République d'une demande écrite. Si les conditions étaient remplies, le procureur ordonnait sous trois mois la modification de l'état civil. En cas de doute sérieux, le procureur devait saisir le président du tribunal de grande instance qui devait alors statuer dans les meilleurs délais. À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a finalement opté pour une procédure de droit commun devant le tribunal de grande instance, comme pour toute action relative à l'état des personnes.
* 101 Lors de l'introduction de ces dispositions dans le présent projet de loi, en première lecture, le Gouvernement avait estimé que, par sa gravité, le sujet abordé aurait mérité un traitement spécifique et ne pouvait être assimilé à une disposition de mise en oeuvre, seul aspect au titre duquel cette disposition aurait pu relever de manière pertinente du présent texte. Cf. objets des sous-amendements n° 400 à 402 déposés par le Gouvernement en séance publique.
* 102 Le compte rendu de ces auditions est consultable à l'adresse suivante :
http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20160606/lois.html#toc6
* 103 Parmi lesquels : se présenter publiquement comme appartenant au sexe opposé, être connu sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel, avoir obtenu le changement de son prénom.
* 104 Décret n° 2010-125 du 8 février 2010 portant modification de l'annexe figurant à l'article D. 322-1 du code de la sécurité sociale relative aux critères médicaux utilisés pour la définition des « affections psychiatriques de longue durée ».
* 105 Circulaire de la direction des affaires civiles et du sceau, n° CIV/07/10, du 14 mai 2010, relative aux demandes de changement de sexe à l'état civil, NOR : JUSC1012994C. Cette circulaire est consultable à l'adresse suivante : http://www.textes.justice.gouv.fr/art_pix/JUSC1012994C.pdf
* 106 En effet, le nouvel article 61-3-1 prévoit qu'« une fois le changement de nom autorisé, il s'étendrait de plein droit aux enfants de moins de treize ans du demandeur », alors que cette disposition est déjà prévue à l'article 61-2.
* 107 La CJUE estime que le fait pour une personne de porter différents noms est contraire au principe de libre circulation. Ainsi, en 2003, elle a jugé que la législation nationale devait prévoir la possibilité pour un ressortissant binational de changer de nom afin que celui-ci soit identique dans chacun des deux États membres dont il est le ressortissant (CJCE, 2 octobre 2003, « Carlos Garcia Avello c/ État belge », C-148/02,). La CJUE a également admis l'application de ce principe aux personnes ne possédant pas la double nationalité. Ainsi, le nom attribué par les autorités de l'État du lieu de naissance et de résidence doit être reconnu par les autorités de l'État dont l'enfant est le ressortissant (CJCE, 14 octobre 2008, « Grunkin Paul c/ Standesamt Niebüll », C-353/06).