COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC » - M. François BAROIN, rapporteur spécial
I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS EN 2015
Le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » est complémentaire de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Il porte ainsi les crédits consacrés à la politique publique en faveur des médias à un total de 3 827,2 millions d'euros (AE=CP), soit une hausse de 0,6 % par rapport à l'exécution 2014 204 ( * ) .
L'exécution 2015 a été conforme à la prévision pour chacun des organismes de l'audiovisuel public. Aucune nouvelle répartition entre attributaires de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) n'a eu lieu en cours d'année, ce qui a garanti à ces organismes la stabilité financière qui leur avait manqué en 2014. Un nouveau programme a été créé pour retracer les avances de CAP allouées à TV5 Monde, auparavant financée par le budget général de l'État.
Récapitulation des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », par programme, en exécution 2014 et 2015
(en millions d'euros et pourcentages)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires) - les montants sont TTC
Les crédits du compte spécial se sont élevés à 3 666,8 millions d'euros en 2015 , soit un montant supérieur au montant garanti par le budget général de l'État fixé à 3 149,8 millions d'euros par la loi de finances pour 2015. Le solde entre les recettes constatées et les avances allouées aux organismes de l'audiovisuel public est très faible et s'élève à - 2 461 euros.
Exécution du compte de concours financiers depuis 2010
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL
1. Conformément à la prévision, les crédits de l'audiovisuel public ont été préservés
L'exécution 2015 fait apparaître une hausse globale de 3,3 % des crédits alloués aux organismes de l'audiovisuel public par rapport à 2014, due à l'augmentation de la CAP de 2 euros (hors inflation) votée en loi de finances pour 2015.
Toutefois en examinant l'évolution des crédits des programmes du compte spécial au regard de ceux de la mission « Médias, livre et industries culturelles », il apparaît que le financement public des organismes de l'audiovisuel public s'établit à un niveau équivalent à celui de l'année dernière , à l'exception de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) qui bénéficie d'une hausse de ses crédits de 28,1 %. L'INA retrouve ainsi un niveau de crédits identique à celui de 2013 , après une baisse de 20 millions d'euros en 2014, destinée à être compensée par un prélèvement sur son fonds de roulement.
Le programme 841 « France Télévisions » a reçu des crédits en baisse de 2,6 % (62,6 millions d'euros), baisse presque totalement compensée par une augmentation de la dotation budgétaire du programme 313 de la mission « Médias, livre et industries culturelles » (56,8 millions d'euros).
Évolution des crédits versés à France Télévision entre 2010 et 2015
(en millions d'euros - AE = CP)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
Les crédits du programme 843 « Radio France » ont été préservés avec une légère hausse de l'ordre de 0,2 %, à l'instar du programme 842 « Arte France ».
Évolution des crédits du CCF
« Avances à l'audiovisuel public »
versés
à Radio France entre 2010 et 2015
(en millions d'euros - AE = CP)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
L'audiovisuel extérieur de la France a également bénéficié d'un financement public en légère hausse . Le programme 844 « France Médias Monde » présente une forte hausse de 46 %, mais s'explique par la suppression de la dotation budgétaire qui lui était versée via le programme 115 « Action audiovisuelle extérieure » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » au profit d'un financement exclusivement assuré par la CAP. Cette hausse de 77,8 millions d'euros est à comparer avec la dotation budgétaire de 74,4 millions d'euros qui avait été accordée en 2014 (+ 3,4 millions d'euros). Le montant versé en programme 847 « TV5 Monde » est lui aussi équivalent au montant de la dotation budgétaire accordée à TV5 Monde via ce même programme l'année dernière (77,8 millions d'euros, à comparer aux 76,2 millions d'euros en 2014).
2. La suppression des dotations budgétaires impose de s'interroger sur la réforme de la contribution à l'audiovisuel public
Lors de la discussion de la loi de finances pour 2015, la ministre de la culture avait annoncé : « le Gouvernement veut mettre en oeuvre un financement pérenne pour le service public de l'audiovisuel, au coeur duquel figure en effet la modernisation de l'assiette de la contribution audiovisuelle publique » 205 ( * ) .
Or, le Gouvernement n'a pas entrepris de réforme pour moderniser la CAP afin de tenir compte de l'évolution des usages. Votre rapporteur spécial avait déjà plaidé lors de l'examen de la loi de règlement 2014 pour « une refonte de la contribution à l'audiovisuel public, qui devrait être guidée par les principes de neutralité technologique et de justice fiscale » 206 ( * ) .
Le Gouvernement a préféré en 2015 , une augmentation de la CAP de deux euros , hors indexation sur l'inflation 207 ( * ) , et en 2016 , un fléchage d'une part de la taxe due par les opérateurs de communications électroniques ( TOCE ) 208 ( * ) , après augmentation de 0,4 point de son taux, vers le programme 841 « France Télévisions » du compte spécial pour un montant de 140,5 millions d'euros par an 209 ( * ) .
Sur le plan budgétaire, ce refus d'engager une réforme globale de la CAP fragilise aujourd'hui le financement de l'audiovisuel public , alors même que les dotations budgétaires seront toutes supprimées fin 2016 et que le financement de l'audiovisuel public pèsera désormais exclusivement sur le compte de compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
3. Le fonctionnement du compte spécial se complexifie et la lisibilité des documents budgétaires doit être améliorée
Les crédits retracés dans le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » sont constitués :
- d'une part des remboursements d'avances correspondant au produit de la contribution à l'audiovisuel public , déduction faite des frais d'assiette et de recouvrement et du montant des intérêts sur les avances 210 ( * ) ;
- et, d'autre part, du montant des dégrèvements de redevance audiovisuelle pris en charge par le budget général de l'État. Cette prise en charge, dont le montant est retracé dans la mission « Remboursements et dégrèvements » 211 ( * ) , s'est ainsi élevée à 514 millions d'euros en 2015 212 ( * ) , soit une hausse de 6 millions d'euros par rapport à 2014 .
Or, le rapport annuel de performances du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes de l'année 2015 ne contient aucune information sur les différents flux financiers entrants du compte spécial, ni sur la manière dont s'articulent les montants de crédits retracés sur ce compte et les montants hors TVA 213 ( * ) inscrits en produits dans les comptes de résultats des organismes de l'audiovisuel public.
Cette carence doit être corrigée rapidement : en 2016, le compte spécial retracera également la part de taxe due par les opérateurs de communications électroniques (TOCE) affectée à France Télévisions.
* 204 L'exécution était de 3 805,3 millions d'euros.
* 205 Voir le compte rendu de la séance du 4 décembre 2014 :
http://www.senat.fr/seances/s201412/s20141204/s20141204019.html
* 206 Rapport n° 604 (2014-2015), Tome II, page 283
* 207 Augmentation applicable en métropole uniquement : le montant est passé de 133 euros en 2014 à 136 euros en 2015.
* 208 Article 302 bis KH du code général des impôts.
* 209 Article 48 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.
* 210 29 millions en 2015, selon les données du compte général de l'État 2015.
* 211 Action 12 « Remboursements et dégrèvements liées à des politiques publiques » du programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État ».
* 212 Ce qui est conforme à la limite maximale fixée en loi de finances pour 2015 (517 millions d'euros).
* 213 Les avances sont soumises à un taux réduit de TVA de 2,1 %, dont la déduction est traitée comme une dépense fiscale évaluée à 200 millions d'euros en 2015.