II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL
1. La charge de la dette a été contenue en 2015 grâce aux taux d'intérêt exceptionnellement bas dont la future hausse représente un risque grave pour les finances publiques
Les taux d'intérêt des titres de dette souverains français ont atteint en 2015 des niveaux particulièrement faibles , les taux étant même négatifs pour certains titres d'État de court terme. La France a donc reçu des intérêts sur les bons du trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF) à hauteur de 301 millions d'euros alors qu'une dépense de 427 millions d'euros était prévue en loi de finances initiale.
La baisse continue des taux s'explique par plusieurs facteurs : la politique monétaire expansionniste de la BCE, qui a maintenu en 2015 le taux négatif de la facilité de dépôts à - 0,20 % puis à - 0,30 % à partir de décembre, participe bien sûr de cette dynamique baissière, de même que les obligations prudentielles liées aux accords de Bâle qui, contraignant les banques à posséder des montants importants d'actifs jugés sûrs conduisent à une « fuite vers la qualité » qui bénéficie aux titres souverains.
Courbe des taux sur titres d'État français
(en %)
Source : commission des finances du Sénat (d'après des données Bloomberg transmises par l'Agence France Trésor)
En outre, d'après les chiffres (encore non définitifs) de l'Insee, l'inflation aurait été nulle tandis que le projet de loi de finances s'appuyait sur une hypothèse de 0,9 %. La faiblesse de l'inflation a réduit la charge d'indexation du capital des titres indexés de 1,4 milliard d'euros par rapport aux prévisions.
Au total, la charge de la dette a été inférieure de 2,2 milliards d'euros aux prévisions de la loi de finances pour 2015 et elle est inférieure aux niveaux constatés en 2014 ou en 2013, alors même que le stock de dette a, lui, fortement augmenté : il atteint 1 576 milliards d'euros pour la seule dette de l'État et dépasse aujourd'hui le chiffre symbolique de 2 000 milliards d'euros pour l'ensemble des administrations publiques. En d'autres termes, la faiblesse des taux d'intérêt et de l'inflation permet à la France de s'endetter à moindre coût et conduit à déconnecter l'évolution du stock de dette de celle de la charge d'intérêt . Cette situation avantageuse permet au Gouvernement de se targuer de maîtriser les dépenses alors que les « économies » sur la charge de la dette ne relèvent que d'une logique de constatation.
Mais elle ne doit pas faire oublier qu'en cas de remontée des taux, la France se trouverait probablement dans une situation extrêmement délicate : sa charge d'intérêt exploserait et, à moins de dégager un excédent primaire, elle devrait s'endetter encore davantage pour financer le remboursement des intérêts déjà contractés - soit l'effet « boule de neige » . La situation pourrait être particulièrement grave si se creusaient des différences importantes, sur le plan de la notation ou sur celui des taux d'intérêt, entre la France et les pays voisins.
Certes, une augmentation des taux d'intérêt associée à une reprise de la croissance pourrait n'avoir des effets que modérés , dans la mesure où un contexte économique plus favorable devrait se traduire par de moindres dépenses publiques, en particulier dans le domaine social.
Cependant, cette situation pour être souhaitable n'en reste pas moins improbable : l'histoire montre que les dépenses publiques françaises n'ont pas connu de réduction drastique, bien au contraire, même en période de croissance. En outre, une augmentation des taux d'intérêt associée à une croissance stationnaire est tout à fait envisageable en cas de dégradation de la qualité perçue par les investisseurs sur la dette française.
Malgré ces risques graves, aucune politique sérieuse de réduction des dépenses n'est mise en oeuvre et la dette continue d'augmenter . Il y a vingt ans, en 1995, la dette publique brute représentait 55 % du PIB, soit un montant comparable à celui que connaissait l'Allemagne, et inférieur à celui de la Suède. Aujourd'hui, la dette publique française atteint 95,8 % du PIB et nous sommes plus proches des niveaux atteints par la Belgique que de ceux de l'Allemagne .
Si le Gouvernement annonce pour s'en réjouir que le taux d'endettement est « en voie de stabilisation », votre rapporteur spécial considère que ce n'est pas une stabilisation de la dette qu'il faut viser, mais une diminution de son encours à travers un désendettement massif . Une telle politique n'a rien d'impossible : l'exemple de la Suède depuis les années 1990, ou ceux, plus récents, de l'Allemagne et la Hongrie, montrent que l'augmentation continue de l'endettement public n'est pas une fatalité.
Évolution du ratio de dette publique brute par rapport au PIB
(en %)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les données Eurostat)
Dans un contexte marqué par des risques financiers importants, la dette de l'État ne sera soutenable qu'à condition de freiner sa hausse de façon radicale et de relancer la croissance , ce qui suppose la mise en oeuvre d'une politique résolue de maîtrise des dépenses publiques et d'allègement de la pression fiscale qui pèse en France tant sur les ménages que sur les entreprises.
2. Le fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des emprunts toxiques a connu une exécution heurtée en raison de la politique monétaire suisse
À la suite de la crise financière, il s'est avéré que certaines collectivités territoriales avaient souscrit des emprunts risqués dont les charges d'intérêt seraient très importantes (plusieurs fois le montant du capital) et qui fragilisaient les finances locales. Dans le but de faciliter le remboursement de ces emprunts par anticipation, le fonds de soutien aux collectivités territoriales et à leurs groupements ayant souscrit des emprunts structurés et des instruments financiers à risque a été créé par l'article 92 de la loi de finances pour 2014 94 ( * ) . D'abord rattaché à un programme de la mission « Économie », ce fonds a été intégré dans le périmètre de la mission « Engagements financiers de l'État » à partir de 2015 par la création du programme 334 qui regroupe les seuls crédits destinés au fonds.
Le financement du fonds est partiellement assuré par le secteur bancaire à travers deux mécanismes : d'une part, le versement de 11,5 millions d'euros 95 ( * ) par an pendant quinze ans par Dexia et la Société de financement local (SFIL) à un fonds de concours abondant les crédits du programme 334, d'autre part, l'acquittement d'une taxe spécifique , prévue à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts et qui reprend les principales caractéristiques de la taxe pour risque systémique.
La taxe pour le financement du fonds de soutien aux collectivités territoriales Le fonds de soutien devait initialement être financé à hauteur de 50 millions d'euros par une fraction de la taxe pour risque systémique, dont le taux avait été relevé par la loi de finances pour 2014 96 ( * ) . Cette taxe a toutefois été mise en extinction à partir de 2015 97 ( * ) afin de tenir compte de la mise en place d'un Fonds de résolution unique (FRU) au niveau européen. A donc été créée, par la loi de finances rectificative pour 2014 98 ( * ) , à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts, une nouvelle taxe au profit du fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés dits « emprunts toxiques » , due jusqu'en 2028 et recouvrée à l'appui de l'annexe à la déclaration de TVA. Son taux était fixé à 0,026 % en 2015, afin d'assurer un rendement de 40 millions d'euros en 2015 et 2016 et 50 millions d'euros par an à partir de 2017. Il a été relevé par la loi de finances pour 2016 99 ( * ) à 0,0642 % pour les années 2016 à 2025 et à 0,0505 % pour les années 2026 à 2028. Par ailleurs, une fraction du produit de la taxe est affectée, à hauteur de 28 millions d'euros par an, à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés pour les années 2016 à 2025. En 2015, 34,2 millions d'euros ont été recouvrés . Au total, le secteur bancaire a donc participé à hauteur de 45,7 millions d'euros au financement du fonds de soutien en 2015. Il faut noter que le produit de la taxe n'est pas affecté au fonds de soutien stricto sensu dans la mesure où le montant recouvré, hors fraction affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie, est versé au budget général. Le lien entre cette taxe et le fonds de soutien relève ainsi de l'intention du législateur et non d'une disposition inscrite dans le droit. Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget) |
La mise en oeuvre du fonds a tout d'abord connu un certain retard au démarrage , la doctrine d'emploi du fonds n'ayant été validée par le comité national d'orientation et de suivi (CNOS) que le 13 novembre 2014 100 ( * ) .
Si le fonds paraissait - enfin - pleinement opérationnel à la fin de l'année 2014, les conditions de l'exécution 2015 ont conduit à revoir tant les montants qui lui étaient alloués que ses modalités d'intervention.
En effet, la décision prise par la Banque nationale suisse de laisser fluctuer sa monnaie par rapport à l'euro à compte du 15 janvier 2015 a conduit à un brusque changement du taux de change , passé de 1 euro pour 1,2 franc CHF à 1 euro pour 1 franc CHF. Les emprunts indexés sur le taux de change entre l'euro et le franc CHF ont vu les coûts d'indemnités de remboursement anticipé augmenter . L'État a donc décidé de renforcer la capacité d'intervention du fonds de soutien. Les conditions d'octroi des aides 101 ( * ) ont également été revues afin de prendre en charge la quasi-totalité des surcoûts.
En 2015, la loi de finances initiale prévoyait des ouvertures de crédits à hauteur de 1,4 milliard d'euros en AE et 61,5 millions d'euros en CP (y compris fonds de concours). La loi de finances rectificative pour 2015 a autorisé l'ouverture de 1,5 milliard d'euros supplémentaires en autorisation d'engagement. Au total, en incluant les reports de l'année 2014, 3 milliards d'euros étaient disponibles en AE et 123 millions d'euros en CP.
Si les autorisations d'engagement ont été engagées dans leur quasi-totalité (2,9 milliards d'euros), moins de 30 millions d'euros de crédits de paiement avaient été effectivement décaissés fin 2015 : un effet de rattrapage est donc à prévoir dans les années à venir, d'autant plus que la durée de vie du fonds est limitée dans le temps , à quinze ans.
Évolution des crédits affectés au fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts à risque
(en millions d'euros)
LFI 2014* y compris fonds de concours |
Exécution 2014 |
LFI 2015
|
Reports entrants |
Ouvertures LFR |
Total crédits disp. 2015 |
Exécution 2015 |
LFI 2016 y compris fonds de concours |
|
AE |
61,50 |
0,00 |
1 438,50 |
61,50 |
1 500,00 |
3 000,00 |
2 999,28 |
11,50 |
CP |
61,50 |
0,00 |
61,50 |
61,50 |
0,00 |
123,00 |
29,85 |
111,50 |
* Les chiffres LFI 2014 correspondent à la dotation de l'action 05 du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie ». À partir de 2015, les chiffres LFI correspondent à la dotation du programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » de la mission « Engagements financiers de l'État ».
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
La visibilité complète sur montant final des aides accordées par le fonds devrait être obtenue au mois de septembre 2016 : votre rapporteur spécial sera donc attentif à ce que les documents budgétaires du projet de loi de finances pour 2017 récapitulent tous les éléments utiles au suivi des dépenses du fonds de soutien.
3. Les dépenses budgétaires associées aux garanties au titre du développement international de l'économie française continuent d'augmenter et doivent constituer un point de vigilance pour les années à venir
L'État peut accorder sa garantie à divers organismes, privés ou publics. Le programme n° 114 « Appels en garantie » retrace les dépenses budgétaires occasionnées par la mise en oeuvre de certaines garanties - et non l'encours des garanties elles-mêmes.
La garantie de l'État Une garantie de l'État est une assurance donnée par l'État à une personne tierce de verser lui-même, dans l'hypothèse de la manifestation de risques (défaillance du débiteur, apparition d'un déficit, moins-value...), les sommes nécessaires à la bonne fin de l'opération (règlement de la créance, service des intérêts...). Les garanties accordées par l'État sont de nature très diverse : - la dette garantie qui englobe les engagements de sociétés françaises, entreprises nationales, collectivités, établissements publics, organismes bancaires pour lesquels l'État s'est engagé, dans l'hypothèse d'une éventuelle défaillance du débiteur véritable, à effectuer lui-même le règlement des intérêts ou le remboursement des échéances d'amortissement périodiques prévues au contrat ; - les garanties de change et autres garanties spécifiques dont bénéficient certains établissements financiers chargés d'une mission d'intérêt général ou gérant pour le compte de l'État des interventions financières dans les pays en développement ; - les engagements pris par l'État dans le cadre d'un plan de restructuration ou d'une cession d'entreprise ; - des opérations sans sous-jacent financier ou dont le sous-jacent financier devient annexe comme l'engagement de bonne fin d'une opération telle qu'un contrat d'État à État, la garantie d'une intervention militaire ou l'équivalent d'une assurance corps pour un objet prêté à un musée national dans le cadre d'une exposition. L'encours des garanties accordées par l'État dans le cadre d'accords bien définis (c'est-à-dire en excluant les garanties implicites découlant de la mission de régulateur économique et social de l'État, comme les subventions aux régimes de retraites) s'élevait à plus de 1 126 milliards d'euros en 2015, soit environ 50 % du produit intérieur brut français. L'octroi d'une garantie ne se traduit pas nécessairement par des dépenses budgétaires dans la mesure où sa mise en oeuvre dépend de la survenance d'un évènement particulier, comme par exemple la défaillance du débiteur principal. Source : commission des finances du Sénat (d'après la circulaire du 22 juillet 2003 relative au recensement des dispositifs de garantie explicite ou implicite accordée par l'État) |
Le programme 114 est structuré en cinq actions dont la plus lourde d'un point de vue budgétaire est l'action 04 « Développement international de l'économie française », qui a donné lieu à des dépenses à hauteur de 149,3 millions d'euros en AE et CP pour l'année 2015 (soit près de 80 % des crédits du programme 114).
Ces dernières années ont vu l'augmentation tant de l'encours global des garanties au titre du développement international de l'économie française que des dépenses budgétaires auxquelles ces garanties ont donné lieu : celles-là ont crû de près de 28 % et s'élevaient fin 2015 à 88,9 milliards d'euros quand celles-ci sont passées de 83,5 millions d'euros en 2010 à 125,3 millions d'euros en 2015, soit une hausse de 51,9 % en cinq ans. Par rapport à la seule année 2014, la consommation de l'action 04 est en hausse de 14 % en lien avec la hausse des dépenses d'assurance-prospection (+ 5 millions d'euros), de garantie du risque économique (+ 4 millions d'euros) et de garantie du risque exportateur (+ 5 millions d'euros).
Encours des garanties accordées par
l'État au titre du développement international de
l'économie française et dépenses
budgétaires
associées à ces garanties
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
Cette hausse témoigne d'une intensification des dispositifs d'aide à l'exportation , à travers notamment l'assurance prospection premiers pas (A3P). Cette procédure simplifiée, destinée aux entreprises qui exportent pour la première fois, comptait 4 702 bénéficiaires au 31 décembre 2015 contre 3 971 bénéficiaires un an plus tôt, soit une hausse de plus de 18 % en un an.
4. L'annulation par la France de la vente des « Mistral » à la Russie, qui n'a pas été compensée à la Coface, entraîne un déficit de 151 millions d'euros de la procédure d'assurance-crédit
L'exportation des bâtiments de projection et de commandement (« Mistral ») à la Russie (voir encadré) était couverte par la Coface au titre des garanties publiques, aussi l'indemnisation versée par l'État aux industriels français est-elle prélevée sur le compte de l'État à la Coface.
L'annulation de la vente des bâtiments de
projection
Les bâtiments de projection et de commandement (BPC) sont conçus pour répondre à des missions multiples telles que la projection de forces par voie aérienne ou maritime, la conduite d'opérations de projection de forces par voie aéroportée ou maritime depuis un poste de commandement de niveau opératif embarqué, le soutien aux forces déployées et l'assistance aux populations civiles. La marine nationale dispose de trois BPC de classe Mistral, produits par la société française DCNS : le Mistral, le Tonnerre et le Dixmude, respectivement entrés en service en 2006, 2009 et 2012. En 2009, la Russie s'était déclarée désireuse d'acquérir des bâtiments de projection et de commandement (BPC) qui combinent, sur une plate-forme unique, les fonctions de porte-hélicoptères, d'hôpital, de transport de troupes, de mise en oeuvre de moyens d'assaut amphibie et de commandement. Le 25 janvier 2011, un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à la coopération dans le domaine de la construction de bâtiments de projection et de commandement a été signé. La livraison d'un premier BPC devait intervenir en novembre 2014 et celle d'un second BPC en novembre 2015 . Une coopération avec les industriels russes était prévue ainsi que des transferts de technologie. Au total, le prix devant être réglé par la Russie s'élevait à 1,2 milliard d'euros, dont 893 millions d'euros ont été versés à titre d'avance à DCNS . En raison de la crise ukrainienne, le Gouvernement français n'a pas délivré à DCNS l'autorisation d'exportation que celle-ci sollicitait pour pouvoir livrer le premier BPC, dont la construction avait suivi le calendrier prévu. Cette livraison n'est donc pas intervenue et un refus de licence d'exportation de ce matériel militaire est implicitement né le 25 juin 2015, du fait du silence gardé par l'administration. Une décision explicite de refus de la licence d'exportation a ensuite été prise le 4 août 2015 concernant le second BPC , à la veille de la signature des accords réglant le différend avec la Russie. En effet, la France et la Russie ont décidé en février 2015 d'engager des négociations pour aboutir à un règlement négocié . Celui-ci prend la forme de deux accords intergouvernementaux, signés concomitamment le 5 août 2015. |
Est prévu le versement par le Gouvernement français au Gouvernement russe de la somme de 949,7 millions d'euros à titre d'indemnité . Selon le Gouvernement, cette somme correspond pour 893 millions d'euros aux avances versées par la Russie au titre du contrat et pour le solde, soit 56,7 millions d'euros, à des frais exposés par la Russie (formation des équipages et développement de matériels spécifiques destinés aux BPC). En contrepartie, la France se voit reconnaître la possibilité de revendre ces deux bâtiments, à condition que les matériels militaires russes qui y avaient été intégrés aient bien été restitués à la Russie et sous réserve d'en informer préalablement cette dernière. Source : avis n° 710 (2014-2015) de M. Dominique de Legge, fait au nom de la commission des finances, déposé le 29 septembre 2015, pp. 7-9 |
Alors que la loi de finances pour 2015 prévoit, au sein des recettes non fiscales de l'État, un reversement de la Coface de 500 millions d'euros au titre des procédures d'assurance-crédit, un déficit a été constaté pour la première fois depuis vingt ans qui s'élève à 151 millions d'euros .
D'après les documents budgétaires, « l'explication de ce déficit exceptionnel réside dans le montant particulièrement élevé des sinistres, du fait de l'indemnisation de la non-livraison à la Russie des bâtiments de projection et de commandement de type Mistral pour un montant d'environ un milliard d'euros ».
Les réserves constituées par la Coface étant suffisantes pour absorber ce déficit, aucun abondement n'a été nécessaire à ce titre en cours d'année, mais aucun reversement ne sera réalisé au profit de l'État.
Par rapport aux prévisions, l'annulation par la France de la vente des « Mistral » à la Russie a donc contribué à aggraver le déficit budgétaire de l'État en 2015 de 500 millions d'euros , comme le prévoyait déjà, à juste titre, notre collègue Dominique de Legge dans son avis relatif au projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France et la Russie sur le règlement lié à la cessation relatif à la coopération dans le domaine de la construction de bâtiments de projection et de commandement.
5. La réserve de précaution appliquée au programme 168 « Majoration de rentes » a provoqué des retards dans le versement des majorations de rente
L'État participe, pour des raisons historiques 102 ( * ) , aux majorations légales de rentes dues dans le cadre de contrats de rente viagère ayant été conclus avant 1987. Les majorations légales, dont le montant moyen est de 285 euros par an et par bénéficiaire en 2015, sont remboursées aux organismes débirentiers l'année suivant le versement de la rente.
De façon récurrente, ces remboursements ont lieu en décembre alors que les dispositions réglementaires relatives au dispositif 103 ( * ) prévoient que le versement doit être opéré avant le 30 juin de l'année.
La justification avancée pour ce retard de plusieurs mois tient à la mise en réserve de 14 millions d'euros appliquée au programme et qui doit être levée avant que les dépenses ne puissent être engagées.
Votre rapporteur spécial prend acte de cette explication mais ne peut la considérer satisfaisante : la réserve de précaution, dont l'objet de permettre des redéploiements en cours de gestion, ne doit pas constituer une rigidité telle qu'elle empêche les services de respecter la réglementation en vigueur. Les dossiers étaient prêts au paiement, selon la Cour des comptes, dès juillet 2015. Votre rapporteur spécial s'interroge donc sur les raisons pour lesquelles le dégel de 14 millions d'euros de crédits a demandé six mois et considère qu'il serait inacceptable que cette situation se reproduise une fois de plus en 2016 .
* 94 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 95 Dont 1,5 million d'euros pour Dexia et 10 millions d'euros pour la SFIL.
* 96 Article 35 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 97 Article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.
* 98 Article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.
* 99 Article 31 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.
* 100 Le décret n° 2014-444 fixant les modalités d'intervention du fonds de soutien a été publié le 29 avril 2014, son arrêté d'application le 4 novembre 2014. Doit aussi être signalé le décret n° 2014-810 du 16 juillet 2014 relatif au service à compétence nationale dénommé « Service de pilotage du dispositif de sortie des emprunts à risque ».
* 101 Rehaussement du taux maximal d'aide à 75 % du montant des indemnités de remboursement anticipé par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre), limitation des possibilités de refinancement des emprunts à risque par le décret n° 2015-619 du 4 juin 2014, barèmes différenciés selon la nature juridique du bénéficiaire par l'arrêté du 22 juillet 2015 et adoption d'une nouvelle doctrine d'emploi du fonds par le CNOS le 2 avril 2015.
* 102 Dans le contexte de très forte inflation d'après-guerre, les sociétés d'assurance et les mutuelles ne pouvaient pas indexer les rentes viagères sur l'évolution des prix.
* 103 Article 34 du décret n° 70-104 du 30 janvier 1970 fixant les modalités d'application des majorations de rentes viagères de la caisse nationale de prévoyance, des caisses autonomes mutualistes et des compagnies d'assurances.