EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 1 er juillet 2015, sous la présidence de M. Christian Cambon, vice-président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Joël Guerriau, rapporteur, sur le projet de loi n° 563 (2014-2015) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre dans le domaine de l'enseignement.
M. Joël Guerriau, rapporteur . - Il s'agit de la troisième convention intergouvernementale signée avec l'Andorre dans ce domaine. Sa ratification doit avoir lieu dans les meilleurs délais pour qu'elle puisse entrer en vigueur le 1 er septembre 2015 et prendre ainsi le relais de la deuxième convention, qui ne sera plus en vigueur à cette date. L'objectif principal est de reconduire le système éducatif français en Andorre , apprécié des Andorrans, et de l'améliorer au passage .
Voici tout d'abord quelques mots sur le contexte d'élaboration de cette troisième convention.
Comme vous l'avez compris, cette convention a été précédée par deux autres . La première, signée en 1993, est entrée en vigueur le 19 avril 1993, pour une durée de dix ans, afin de répondre au nouveau statut d'Andorre, qui est devenu cette année-là un Etat indépendant, souverain, reconnu internationalement et doté d'une constitution. Ce nouveau contexte institutionnel a en effet rendu nécessaire l'adaptation de l'enseignement dispensé par les établissements français en Andorre, qui était régi jusque-là par deux décrets de 1982. Cette première convention intergouvernementale a posé les fondements du système d'enseignement primaire et secondaire français en Andorre tel qu'il existe aujourd'hui.
La deuxième convention, qui lui a succédé, a été signée en 2003 et est entrée en vigueur le 1 er septembre 2005 , également pour une durée de dix ans . Cette deuxième convention a complété les actions d'enseignement primaire et secondaire assurées par le ministère français de l'éducation nationale, par une coopération franco-andorrane en matière d'enseignement professionnel et d'enseignement supérieur, par le développement du français et par des aménagements en vue d'assurer l'enseignement de la langue catalane. Elle prévoit également des échanges entre les enseignants des systèmes éducatifs français et andorran en matière de formation initiale et continue.
En octobre 2011, lors de la réunion de la commission mixte franco-andorrane pour l'enseignement , commission intergouvernementale créée par la convention de 1993 et reconduite par celle de 2003, les Parties ont convenu de maintenir le cadre actuel mis en place par les deux précédentes conventions, tout en lui apportant des améliorations , et pour ce faire, de constituer un groupe de travail mixte. Ce dernier a rendu ses conclusions en mai 2013 , ce qui a permis d'aboutir à la signature en juillet 2013 du texte de la convention qui nous est soumis aujourd'hui. On notera que « la Partie française n'avait pas de demande spécifique à l'exception de la réduction des heures de catalan au lycée. Cette demande, motivée par des emplois du temps très chargés, n'a pas été acceptée par la Partie andorrane ». 2 ( * )
Avant de commenter les modifications que cette convention apporte à la précédente, en date de 2003, je souhaite dresser un rapide état des lieux du dispositif d'enseignement français en Andorre.
Tout d'abord, le système éducatif français fait partie intégrante du service public d'éducation en Andorre , lui-même composé de trois systèmes éducatifs : l'andorran, l'espagnol et le français. Le système français compte actuellement quatorze écoles maternelles et primaires ainsi qu'un établissement dénommé « Lycée Comte de Foix » qui comprend un collège, un lycée et un lycée professionnel. Il n'est pas envisagé à ce jour d'ouvrir de nouveaux établissements. Depuis 2009, l'effectif total des élèves andorrans est stable, aux alentours de 11 000 élèves et la répartition entre les trois systèmes éducatifs relativement équilibrée.
A la rentrée scolaire de 2013 , le système éducatif français en Andorre scolarisait 3 504 élèves dont 2 000 dans le premier degré et 1 504 dans le second degré, soit un tiers de l'effectif total des élèves de la Principauté, tandis que le système andorran en scolarisait 4 242, dont 2 732 dans le premier degré, et 1 510 dans le second degré, et le système espagnol en Andorre 3 233 élèves, dont 1 918 élèves dans le premier degré et 1 315 dans le second degré.
A la rentrée de 2014, l'ensemble du dispositif français employait 338 personnes dont 248 enseignants , ce qui représentait un engagement financier pour la France d'environ vingt-quatre millions d'euros (9 384 868 euros pour le premier degré et 14 000 000 euros pour le second degré).
On notera, avec une certaine satisfaction, que seul 5 % des élèves scolarisés dans les établissements scolaires français situés en Andorre sont de nationalité française et que le système éducatif français est le seul à avoir enregistré une augmentation du nombre d'élèves inscrits en primaire à la rentrée de 2014.
La quasi-totalité des élèves du système éducatif français poursuit des études supérieures en France, ainsi que 20 % des élèves issus du système andorran. Actuellement, on compte près de 500 étudiants andorrans en France.
Venons-en maintenant à la convention proprement dite. Cette nouvelle convention, signée en 2013, n'apporte pas de modification à l'organisation de l'enseignement français en Andorre et en maintient les grands principes. Elle vise principalement à reconduire le cadre existant , puisque la Convention de 2003 cesse de produire effet à compter du 1 er septembre 2015, et à y apporter quelques améliorations .
La nouvelle convention se compose, comme la précédente, de trois titres : le titre I relatif au système d'enseignement français en Andorre, le titre II relatif aux autres formes de coopération et le titre III contenant les dispositions finales. Deux références ont été introduites dans les visas : la participation des deux Parties au processus de Bologne qui vise la construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur et l'adhésion des deux Etats à la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l'enseignement supérieur dans la région européenne adoptée à Lisbonne, le 11 avril 1997. Seuls certains articles de la Convention de 2003 ont été modifiés.
Je vais vous faire part des modifications les plus significatives et vous renvoyer pour le détail au tableau comparatif des dispositions des conventions de 2003 et 2013 transmis par le ministère des affaires étrangères et du développement international et qui est annexé au rapport .
Les principales modifications sont les suivantes.
Il est fait une référence expresse au principe de laïcité que les établissements d'enseignement français en Andorre doivent respecter dans l'enseignement qu'ils dispensent (article 1 er ). Ceci correspond bien évidemment à la pratique existante.
Des précisions sont apportées sur le rôle de la commission nationale d'affectation des personnels de l'éducation nationale en Andorre et certaines procédures d'affectation (articles 3 et 6).
Les relations entre les systèmes éducatifs français et andorran doivent être approfondies , notamment en matière d'échanges d'enseignants et d'élèves des différents systèmes éducatifs du pays (articles 7 et 8).
La place du Gouvernement andorran dans les établissements d'enseignement français est précisée. Il prépare les programmes, les plans et les actions de protection en matière de santé à appliquer. En outre, les services sanitaires et sociaux andorrans interviennent en mettant en oeuvre leurs actions dans les établissements français, le cas échéant en liaison avec le personnel de santé de ces établissements (article 10).
Le développement de la langue française dans le cadre scolaire est réaffirmé et fait l'objet d'actions éducatives et culturelles conjointes dans le cadre de la francophonie, ainsi que d'activités pédagogiques favorisant la participation et l'échange d'enseignants et d'élèves des différents systèmes éducatifs du pays (article 11).
Des formations proposées par le Gouvernement andorran peuvent être dispensées dans les établissements d'enseignement français en Andorre. La langue catalane ainsi que les sciences humaines et sociales d'Andorre ont ainsi toute leur place dans le cursus scolaire. Elles sont intégrées au système d'évaluation et sanctionnées par des diplômes français. Elles peuvent également faire l'objet d'une certification andorrane (articles 12 et 13).
Le délégué à l'enseignement français en Andorre reste l'interlocuteur du Gouvernement andorran, mais il est précisé que, dans le domaine culturel , son action est désormais conduite en collaboration avec l'ambassade de France en Andorre (article 14).
La Commission mixte franco-andorrane pour l'enseignement, créée par la convention de 1993 puis reconduite par celle de 2003, est maintenue, mais son champ de compétence est élargi à « toute question relative à la coopération dans le domaine de l'enseignement supérieur entre les deux pays ». Un représentant du ministère chargé de l'enseignement supérieur est appelé à y siéger (article 15).
De nouvelles coopérations sont mises en place dans le domaine de l'information et de l'orientation des élèves, dans le domaine de la formation professionnelle avec une mobilité plus facile entre les systèmes d'enseignement, des formations communes sanctionnées par un double diplôme et la possibilité de participer aux programmes éducatifs d'insertion sociale et professionnelle mis en place par le Gouvernement d'Andorre, et enfin dans l'enseignement supérieur. Les relations interuniversitaires sont ainsi encouragées dans le respect de la règlementation nationale. La promotion de l'accès à l'enseignement supérieur en France est désormais assuré par le ministère andorran chargé de l'enseignement supérieur en collaboration avec d'autres organismes dont la représentation française en Andorre. L'ambassade de France doit y prendre part (articles 21 à 30).
Enfin l'article final prévoit la reconduction tacite de cet instrument bilatéral pour une nouvelle période de dix ans.
Sous le bénéfice de ces observations, je recommande l'adoption de ce projet de loi qui devrait permettre la ratification de cette convention avant le 1 er septembre 2015 et ce, afin d'éviter de se trouver devant un vide juridique qui empêcherait le système éducatif français en Andorre de continuer à fonctionner après cette date. Il s'agit notamment d'être en mesure de régler les salaires des enseignants et des personnels de l'Education nationale sur place.
L'examen en séance publique est fixé au 7 juillet 2015. La Conférence des Présidents a proposé son examen en procédure simplifiée.
Je vous propose, quant à moi, un rapport publié en forme synthétique.
À la fin de la présentation du rapporteur, un court débat s'est engagé.
M. Robert del Picchia . - Je suis très favorable à l'adoption de ce texte. C'est le seul exemple, à ma connaissance, où le ministère de l'éducation nationale prend en charge le financement du système scolaire français à l'étranger. Ce serait un exemple à suivre dans d'autres pays, compte tenu de l'état des finances de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.
M. Joël Guerriau, rapporteur . - Le système éducatif français en Andorre rencontre un réel succès. C'est d'ailleurs le seul qui enregistre une augmentation du nombre d'élèves en comparaison avec le système andorran et espagnol, ce qui mérite d'être souligné.
À l'issue de ce débat, la commission, suivant la proposition du rapporteur, a adopté, sans modification et à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité. Conformément aux orientations du rapport d'information n° 204 (2014-2015) qu'elle a adopté le 18 décembre 2014, elle a autorisé la publication du présent rapport synthétique.
La Conférence des Présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique, le mardi 7 juillet 2015 , en application des dispositions de l'article 47 decies du règlement du Sénat.
* 2 Réponse au questionnaire écrit de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale