Section 6 - Amélioration du dispositif de sécurisation de l'emploi
Article 98 A (art. L. 5125-1, L. 5125-2, L. 5125-4, L. 5125-5, L. 5125-6 et L. 5125-8 [nouveau] du code du travail) - Accords de maintien de l'emploi
Objet : cet article assouplit les conditions de conclusion des accords de maintien de l'emploi.
I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture
Le présent article, introduit en première lecture par votre commission sur proposition de votre rapporteur, visait à assouplir le cadre juridique des accords de maintien de l'emploi (AME) tout en ouvrant la possibilité pour les entreprises de conclure des accords de développement de l'emploi. L'article supprimait diverses obligations formelles pesant sur ces accords comme :
- la clause relative aux « graves difficultés économiques conjoncturelles » ;
- le diagnostic préalable analysé avec les organisations syndicales représentatives de salariés ;
- les conditions dans lesquelles les dirigeants et les actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés ;
- la durée maximale de deux ans (la durée de validité de l'accord sera désormais librement fixée par les signataires) ;
- la clause pénale ;
- la procédure de référé devant le président du tribunal de grande instance l'autorisant à suspendre, voire à résilier l'accord.
Il prévoyait en outre qu'à défaut d'un accord conclu avec les délégués syndicaux ou des salariés mandatés, l'accord peut être conclu directement avec les représentants du personnel, ou approuvé par les salariés à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés, dans le respect des principes généraux du droit électoral.
Toutefois, l'article ne remettait pas en cause :
- les règles de l'ordre public social auxquelles l'accord ne peut déroger (durée maximale du travail, repos quotidien, congés payés, etc.) ;
- le motif économique du licenciement prononcé à l'encontre d'un salarié qui refuse l'application de l'accord.
En séance publique, un amendement du rapporteur est venu clarifier la notion d'accord de développement de l'emploi en lui consacrant un article spécifique du code du travail.
II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture
La commission spéciale de l'Assemblée nationale a, sur proposition du Gouvernement, modifié le présent article pour supprimer l'ensemble des dispositions adoptées par le Sénat tout en introduisant des modifications du droit actuel.
Aux termes de la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, la durée maximale d'un AME est portée à cinq ans au lieu de deux, un bilan de son application étant effectué au bout de deux ans.
L'accord peut également prévoir les modalités et conditions selon lesquelles il peut être suspendu en cas d'amélioration ou d'aggravation de la situation économique de l'entreprise.
Les modalités d'information du salarié quant à son droit d'accepter ou de refuser l'application des stipulations de l'accord à son contrat de travail sont précisées ainsi que les conséquences de la rupture du contrat de travail en cas de refus : l'employeur n'est pas tenu aux obligations d'adaptation et de reclassement, mais le salarié bénéficie, dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, d'un congé de reclassement et, dans les entreprises de moins de 1 000 salariés, d'un contrat de sécurisation professionnelle.
Enfin, il est précisé que le président du tribunal de grande instance, saisi d'un recours portant sur un conflit entre les stipulations de l'accord et celles du contrat de travail, statue en la forme des référés .
Ces dispositions sont applicables aux AME conclus après la promulgation de la présente loi.
III - La position de votre commission
Les modifications apportées par l'Assemblée nationale constituent un net recul par rapport à l'ambition initiale du Sénat, qui était d'assouplir les règles juridiques encadrant la conclusion d'un AME et de permettre le développement d'accords « offensifs » de développement de l'emploi.
En effet, aucune des dispositions adoptées par le Sénat en ce sens ne figure dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Toutefois, certaines des dispositions du texte issu de l'Assemblée nationale constituent des précisions utiles.
Votre commission a donc adopté un amendement (COM-68) de votre rapporteur permettant de revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture tout en conservant les dispositions introduites par l'Assemblée nationale relatives, d'une part, à l'information du salarié sur les conséquences de son refus ou de son acceptation de se voir appliquer l'accord et, d'autre part, à l'assouplissement des obligations de l'employeur lorsqu'il licencie un salarié qui a refusé l'application de l'accord.
Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.
Article 98 B (art. L. 1221-2 et L. 1236-9 [nouveau] du code du travail) - Contrat de projet
Objet : cet article, supprimé par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, propose de créer un contrat de projet sous la forme d'un CDI dont la réalisation du projet pour lequel il a été conclu emporte la rupture après un délai de prévenance égal à deux mois au minimum.
I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture
Cet article a été introduit au Sénat en séance publique à l'initiative de sénateurs des groupes UMP et UDI-UC. Il a fait l'objet d'un sous-amendement de la commission et a reçu un avis favorable de la commission et un avis défavorable du Gouvernement.
1) Le contrat de projet s'inspire du succès du « CDD à objet défini »
Le contrat à durée déterminée (CDD) à objet défini a été mis en place à titre expérimental par la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail. Il a été pérennisé par la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises.
D'une durée comprise entre dix-huit et trente-six mois sans renouvellement possible, ce contrat, réservé aux ingénieurs et aux cadres, prend normalement fin avec la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu après un délai de prévenance au moins égal à deux mois. Il peut toutefois être rompu par anticipation sous certaines conditions. La possibilité de recourir au « CDD à objet défini » suppose la conclusion d'un accord de branche étendu ou, à défaut, d'un accord d'entreprise l'instituant.
2) Les caractéristiques du contrat de projet
S'inspirant de ce « CDD à objet défini », le présent article insère dans le code du travail un article L. 1236-9 qui créé un nouveau type de contrat de travail à durée indéterminée (CDI) conclu dans le but de réaliser un projet. Le contrat de projet est obligatoirement établi par écrit.
La réalisation du projet pour lequel ce CDI avait été conclu emporte, après un délai de prévenance au moins égal à deux mois, sa rupture. Les dispositions du code du travail relatives au licenciement pour motif économique du salarié bénéficiant d'un CDI n'y sont pas applicables.
Le contrat de projet a pour but d'offrir aux employeurs un cadre juridique encore plus souple que celui du « CDD à objet défini », afin de les inciter à embaucher.
En effet, le contrat de projet n'étant pas un CDD, l'employeur ne sera pas soumis aux règles du code du travail qui régissent ce type de contrat : par exemple, il ne sera pas tenu de verser au salarié en fin de « CDI de projet » une prime de précarité, contrairement à ce qui est prévu dans le cas d'un « CDD à objet défini ».
Enfin, les « CDI de projet » sont susceptibles de concerner tous les salariés et non pas seulement les seuls ingénieurs et cadres. Ils ne doivent pas faire l'objet d'une durée minimale ni maximale, contrairement aux « CDD à objet défini ».
II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture
En nouvelle lecture, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a supprimé cet article à l'initiative de ses rapporteurs et des membres du groupe écologiste.
III - La position de votre commission
La rigidité des modalités de rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée constitue aujourd'hui en France un frein majeur à l'embauche et à l'activité, qui pénalise tout particulièrement les TPE et les PME.
Une des solutions à ce problème passe par la création de nouveaux types de contrat de travail, tels que le « CDI de projet » moins contraignant que le CDI classique.
Votre commission spéciale a donc rétabli cet article par amendement ( COM-194) .
Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.
Article 103 bis (art. 1233-69 du code du travail) - Financement par l'entreprise des formations réalisées dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle
Objet : cet article transpose un accord des partenaires sociaux afin de permettre le financement des actions de formation des salariés licenciés pour un motif économique bénéficiant du contrat de sécurisation professionnelle au moyen des sommes consacrées, dans le cadre d'un accord d'entreprise, au financement du compte personnel de formation.
En nouvelle lecture, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté sur cet article un amendement du Gouvernement de coordination rédactionnelle.
Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.
Article 103 ter (art. L. 1233-3 du code du travail) - Motif économique du licenciement
Objet : cet article vise à préciser les critères d'appréciation du motif économique du licenciement.
I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture
Cet article est issu d'un amendement de votre rapporteur adopté par le Sénat en première lecture en séance publique avec un avis de sagesse du Gouvernement. Il vise à apporter des précisions à la définition du motif économique de licenciement figurant à l'article L. 1233-3 du code du travail.
Il inscrit dans la loi la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise comme motif de licenciement économique et précise que le motif économique peut être apprécié au niveau de l'entreprise ou du secteur d'activité.
Il s'agit notamment de sécuriser juridiquement les procédures de licenciement économique en codifiant une jurisprudence de la Cour de cassation.
II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture
L'Assemblée nationale a supprimé cet article.
III - La position de votre commission
Votre rapporteur considère que cet assouplissement du motif économique du licenciement est cohérent avec la volonté de la commission de promouvoir les accords de développement de l'emploi dont le principal intérêt est de préserver la compétitivité des entreprises avant qu'elles ne soient confrontées à de grandes difficultés économiques. Il s'étonne à ce titre que le Gouvernement, qui ne s'était pas opposé à l'adoption de cet article par le Sénat, ait donné un avis favorable à sa suppression par l'Assemblée nationale. C'est pourquoi votre commission, à l'invitation de votre rapporteur, a rétabli cet article par amendement (COM-69).
Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.
Article 104 bis - Congé de cinq jours pour les étudiants salariés préparant un examen
Objet : cet article propose de créer un congé de cinq jours pour les étudiants qui exercent un emploi salarié afin de leur permettre de se préparer dans de meilleures conditions à leurs examens.
I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture
Cet article a été introduit au Sénat en séance publique à l'initiative de plusieurs de nos collègues du groupe socialiste avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement.
Cet article vise à faciliter la réussite des 45 % d'étudiants qui exercent une activité rémunérée aux examens, afin qu'ils ne soient plus à la fois contraints de travailler pour vivre et handicapés par ce travail pour réussir leurs examens. Il prévoit qu'un étudiant qui occupe un emploi salarié peut bénéficier d'un congé spécial pour la préparation de ses épreuves.
Il doit justifier d'une inscription valide et en cours au sein d'un établissement préparant à l'obtention d'un diplôme d'enseignement supérieur.
Le congé qui lui est accordé est de cinq jours ouvrables par tranche de soixante jours ouvrables travaillés prévus par son contrat de travail. Il est situé dans le mois qui précède les épreuves. Il s'ajoute aux congés payés dont bénéficie par ailleurs l'étudiant, ainsi, s'il y a lieu, qu'au congé annuel pour les salariés de moins de vingt et un ans.
II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels de ses rapporteurs, ainsi qu'un amendement précisant que ces cinq jours de congé ne sont pas rémunérés.
III - La position de votre commission
La création de ce congé réservé aux étudiants salariés est destinée à leur permettre de préparer leurs examens dans de meilleures conditions. Les étudiants contraints de travailler pour financer leurs études sont en effet trop souvent victimes d'une double peine car l'activité salariée qu'ils exercent tend à accroître considérablement leur taux d'échec aux examens.
C'est pourquoi la mise en place de ce congé - non payé pour ne pas dissuader les entreprises d'embaucher des étudiants - est une mesure d'équité qui bénéficiera à des étudiants souvent confrontés à des situations difficiles.
Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.