Section 4 - Mesures relatives au développement de l'emploi des personnes handicapées et aux contrats d'insertion

Article 92 (art. L. 5212-6 du code du travail) - Prise en compte des travailleurs indépendants handicapés dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Objet : cet article offre aux entreprises la possibilité de s'acquitter partiellement de leur obligation d'emploi de travailleurs handicapés en faisant appel à des travailleurs indépendants handicapés.

I - Le dispositif proposé

A. L'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Toute entreprise comptant au moins vingt salariés est astreinte, en application de l'article L. 5212-2 du code du travail, à une obligation d'emploi de travailleurs handicapés (OETH) équivalente à 6 % de son effectif total.

L'employeur peut s'en acquitter de plusieurs manières : soit en employant directement des travailleurs handicapés, soit partiellement en passant des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestation de service avec des entreprises spécialisées ou en accueillant des stagiaires handicapés, soit en mettant en oeuvre un accord collectif en faveur des travailleurs handicapés, soit en versant une contribution à l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) dont le montant varie, selon la taille de l'entreprise, de 400 à 600 fois le smic horaire par bénéficiaire manquant (articles L. 5212-6 à L. 5212-11).

En contractant avec une entreprise adaptée , un centre de distribution de travail à domicile (CDTD) ou un établissement ou service d'aide par le travail (Esat), une entreprise peut remplir partiellement son obligation dès lors que le montant du contrat passé dépasse 400 à 600 fois le smic, en fonction de la taille de l'entreprise. De plus, il n'est pas possible pour un employeur de s'acquitter de plus de la moitié de son OETH par ce biais (article R. 5212-9).

B. La prise en compte des travailleurs indépendants handicapés

L'article 92 du projet de loi étend le champ de cette modalité d'acquittement partiel de l'OETH en modifiant l'article L. 5212-6 du code du travail afin d'y inclure les travailleurs indépendants handicapés, définis comme des bénéficiaires de l'OETH 501 ( * ) , immatriculés au registre du commerce ou au répertoire des métiers ou bien qui, dans leurs relations avec le donneur d'ordre, définissent seuls leurs conditions de travail.

Il distingue enfin entre deux modalités de détermination de cet acquittement partiel. Il précise qu'il doit être tenu compte du nombre de salariés exerçant pour le compte du travailleur indépendant, sauf si ce dernier relève du régime fiscal de la micro-entreprise ou du régime déclaratif spécial dit « micro-BNC », auquel cas l'acquittement est déterminé de façon forfaitaire.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements rédactionnels de ses rapporteurs à cet article, deux en commission spéciale et un en séance publique.

III - La position de votre commission

Selon les données de la Dares 502 ( * ) , en 2012, 100 300 établissements étaient assujettis à l'OETH, employant un total de 9 045 100 salariés. Parmi ceux-ci, 361 700 étaient éligibles à l'OETH, soit 3,1 % du total. Ces chiffres illustrent l'écart entre l'obligation théorique à laquelle sont soumises les entreprises et la situation réelle de l'emploi de personnes handicapées en France. De trop nombreux employeurs préfèrent encore verser leur contribution financière à l'Agefiph plutôt que d'embaucher un travailleur handicapé, tandis que la dégradation de la situation de l'emploi a eu pour conséquence une diminution du nombre de recrutements ( 38 400 en 2012 contre 41 700 en 2011) ainsi que la baisse, parmi ceux-ci, de la part de CDI.

La mesure proposée par cet article, si elle est d'ampleur limitée , est donc nécessaire et traduit un engagement pris par le Gouvernement lors du comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013. Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, les travailleurs indépendants concernés par cette disposition représentaient en 2008 8 % des bénéficiaires de l'OETH, soit 71 600 personnes 503 ( * ) . Elle ne permettra donc pas de combler le retard pris par de trop nombreuses entreprises, et ne doit pas se substituer à des recrutements de travailleurs handicapés. Il n'en reste pas moins qu'elle peut constituer une solution aux difficultés rencontrées par certaines personnes en situation de handicap ainsi que par certaines entreprises qui ne parviennent pas à satisfaire à leur OETH.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 93 (art. L. 5212-7-1 [nouveau] du code du travail) - Prise en compte des périodes de mise en situation en milieu professionnel dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Objet : cet article permet aux entreprises de déduire de leur obligation d'emploi de travailleurs handicapés les personnes handicapées accueillies en leur sein dans le cadre de périodes de mise en situation en milieu professionnel.

I - Le dispositif proposé

La loi du 5 mars 2014 504 ( * ) a unifié, sous la dénomination de « période de mise en situation en milieu professionnel » (PMSMP), les différents dispositifs d'immersion dans l'activité destinés aux personnes particulièrement éloignées de l'emploi ou suivant un parcours d'insertion.

D'une durée maximale d'un mois , les PMSMP visent à permettre à une personne, qu'elle soit privée d'emploi ou non, de découvrir un métier ou un secteur d'activité, de confirmer un projet professionnel, ou d'initier une démarche de recrutement (article L. 5135-1 du code du travail). Prescrites principalement par Pôle emploi, les missions locales, les Cap emploi et des structures d'insertion par l'activité économique, elles s'adressent aux demandeurs d'emploi, aux jeunes rencontrant des difficultés d'insertion ou encore aux titulaires d'un contrat unique d'insertion (CUI), dans le secteur marchand (contrat initiative emploi) ou non-marchand (contrat d'accompagnement dans l'emploi). Les bénéficiaires d'une PMSMP ne sont pas salariés de la structure qui les accueille mais conservent leur statut antérieur .

L'article 93 du projet insère un article L. 5212-7-1 dans le code du travail afin qu'une entreprise organisant en son sein des PMSMP à destination de personnes handicapées puisse partiellement les déduire de son obligation d'emploi de travailleurs handicapés, sur le modèle de ce que prévoit l'article L. 5212-7 pour les stages. Un décret en Conseil d'État doit venir préciser les modalités de mise en oeuvre et limites de cette disposition.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision du champ de cet article présenté par les rapporteurs de la commission spéciale. Il vise à lutter contre d'éventuels abus , liés à la multiplication de PMSMP au détriment de recrutements stables, en prévoyant que les personnes handicapées accueillies en PMSMP dans l'entreprise doivent s'imputer sur le plafond de stagiaires handicapés pouvant être pris en compte dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés (OETH) de l'entreprise, soit 2 % de l'effectif total de ses salariés.

III - La position de votre commission

Comme l'article 92, cet article 93 vise à inciter les entreprises à rattraper leur retard en matière d'emploi de travailleurs handicapés et leur ouvre une nouvelle possibilité de se mettre en conformité avec leur obligation légale. L'accent est ici mis sur les personnes handicapées qui rencontrent des difficultés particulières d'insertion et d'accès à l'emploi , au profit desquelles un accompagnement renforcé de la part des acteurs du service public de l'emploi est nécessaire.

Toutefois, il est permis de douter que cette disposition constitue « un levier très fort de la politique de l'emploi », ainsi que l'affirme l'étude d'impact annexée au projet de loi. Cette mesure a une portée essentiellement symbolique . En effet, les modalités de calcul du nombre de bénéficiaires de l'OETH reposent, pour les salariés, sur le temps de présence de la personne dans l'entreprise au cours de l'année civile (article L. 5212-14). Pour les stagiaires, le calcul est basé sur la durée du stage rapportée à la durée annuelle de travail applicable en entreprise. Une PMSMP ne pouvant dépasser un mois, et si le mode de calcul utilisé pour les stagiaires est retenu, elle ne comptera, à la durée légale de travail, que pour 0,1 bénéficiaire 505 ( * ) . Sauf à multiplier à outrance les PMSMP, au détriment de leurs bénéficiaires, une entreprise pourra difficilement satisfaire à son OETH grâce à elles. Il n'en reste pas moins que cette mesure technique , qui adapte le droit en vigueur à la réforme de l'insertion réalisée par la loi du 5 mars 2014, n'est pas défavorable aux travailleurs handicapés : il serait donc malvenu de s'y opposer.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement visant à supprimer le recours à un décret en Conseil d'État pour définir les modalités d'application de cet article, seul un renvoi à la « voie réglementaire » étant par exemple prévu à l'article L. 5212-6 du code du travail.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 93 bis (art. L. 5212-7 du code du travail) - Prise en compte des stages de découverte dans l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés

Objet : cet article, ajouté en séance publique par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, inclut dans les bénéficiaires de l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés les élèves handicapés de moins de seize ans accueillis en entreprise dans le cadre de stages de découverte.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Issu d'un amendement présenté par le Gouvernement, cet article 93 bis élargit le champ des bénéficiaires de l'OETH pour les entreprises qui y sont soumises en complétant l'article L. 5212-7 du code du travail, qui permet en l'état actuel du droit à un employeur de s'acquitter de son OETH en accueillant en stage des personnes handicapées, dans la limite de 2 % de son effectif.

Il vise à permettre la prise en compte, dans l'OETH, des élèves handicapés de quatrième, de troisième ou de lycée , âgés de moins de seize ans, qui réalisent des périodes d'observation en entreprise et disposent d'une convention de stage. D'une durée maximale d'une semaine, elles sont réalisées durant les vacances scolaires (article L. 332-3-1 du code de l'éducation). Seraient concernés les élèves de l'enseignement général qui bénéficient de la prestation de compensation du handicap (PCH) ou dont les parents reçoivent l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AAEH) ou l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP).

Les rapporteurs de la commission spéciale ont complété cet amendement par un sous-amendement identique à la modification apportée à l'article 93 afin de préciser que ces jeunes s'imputent dans le plafond de 2 % de stagiaires pouvant être admis dans le calcul des bénéficiaires de l'OETH.

II - La position de votre commission

Comme le souligne l'exposé des motifs de l'amendement du Gouvernement, les jeunes collégiens et lycéens handicapés rencontrent d'importantes difficultés pour réaliser les stages de découverte qui sont désormais obligatoires dans l'enseignement secondaire. Cet article, qui traduit dans la loi une décision prise lors de la conférence nationale du handicap du 11 décembre 2014 506 ( * ) , a pour objectif affiché de lever les réticences des entreprises.

Aux yeux de votre rapporteur, il est regrettable que les entreprises aient besoin d'une telle incitation pour accueillir des élèves handicapés pour une période brève afin de leur faire découvrir leur activité et de faire naître chez eux des souhaits d'orientation. Comme pour l'article 93, la mesure proposée ici n'en reste pas moins d'une portée très limitée au regard de l'acquittement de l'OETH puisque la très courte période passée dans l'entreprise par ces élèves ne permet pas, sur l'année, d'améliorer véritablement les résultats en la matière. Il s'agit toutefois d'un signal positif qu'il convient de saluer et d'amplifier en prenant en compte non seulement les périodes d'observation mais surtout les séquences d'observation réalisées par des élèves, qui constituent les véritables « stages de troisième » puisqu'elles sont réalisées non pas durant les vacances scolaires mais durant l'année scolaire. Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement en ce sens .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 94 - Habilitation du Gouvernement à modifier par ordonnance les contrats aidés outre-mer

Objet : cet article habilite le Gouvernement à réformer par ordonnance le droit des contrats aidés outre-mer en substituant le contrat initiative emploi au contrat d'accès à l'emploi et en supprimant le contrat d'insertion par l'activité.

I - Le dispositif proposé

En matière de contrats d'insertion, le droit applicable dans les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer auxquelles cette compétence n'a pas été transférée (Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon) tient compte des spécificités économiques et culturelles de ces territoires.

Ainsi, alors que dans le secteur non-marchand le contrat unique d'insertion - contrat d'accompagnement de l'emploi (CUI-CAE) est applicable sur tout le territoire, dans le secteur marchand subsiste un contrat d'accès à l'emploi (CAE-DOM) en lieu et place du contrat initiative emploi (CUI-CIE). De plus, un contrat d'insertion par l'activité (CIA), créé en 1994, avait persisté malgré la mise en place du CUI-CAE et du revenu de solidarité active (RSA), permettant d'employer les bénéficiaires de ce dernier à un programme annuel de tâches d'utilité sociale. Quant aux emplois d'avenir, ils prennent la forme d'un CUI-CIE ou d'un CUI-CAE quel que soit le lieu où ils sont conclus.

Le Gouvernement souhaite clarifier le cadre juridique applicable à ces contrats et harmoniser les régimes applicables dans l'hexagone et outre-mer. À cet effet, l'article 94 du projet de loi l'habilite, par ordonnance , à :

- supprimer le CAE-DOM ;

- étendre et adapter le CUI-CIE aux DOM et à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon ;

- supprimer le CIA.

La durée de l'habilitation est fixée à douze mois à compter de la publication de la loi.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission spéciale a adopté deux amendements rédactionnels de ses rapporteurs à cet article, qui n'a pas été modifié lors de l'examen du projet de loi en séance plénière.

III - La position de votre commission

La généralisation du CUI-CIE outre-mer est souhaitable au vu des insuffisances du CAE-DOM. Il connait une désaffection croissante : selon les informations communiquées à votre rapporteur, seulement 3 870 ont été signés en 2014, alors que l'objectif était de 5 767 . De plus, l'encadrement et le suivi des bénéficiaires d'un parcours d'insertion est plus développé dans le cadre d'un CIE que dans celui d'un CAE-DOM. Davantage de garanties sont offertes, et des règles plus strictes sont en vigueur afin d'éviter tout effet d'aubaine : il n'est par exemple pas possible pour un particulier employeur de conclure un CIE, contrairement au CAE-DOM.

La suppression des dispositions relatives au CIA répond à l'impératif de clarté et d'intelligibilité de notre droit . Il ne serait en effet plus utilisé depuis 2012, le CUI-CAE l'ayant supplanté en raison d'une meilleure prise en charge des bénéficiaires et d'un pilotage plus précis. L'étude d'impact annexée au projet de loi précise que la Martinique et la Guyane sont les deux derniers départements à avoir eu recours à cet outil en 2011.

Néanmoins, votre rapporteur ne peut que déplorer que le Gouvernement demande à réaliser cette réforme par ordonnance, en dépossédant le Parlement de sa compétence. Qui plus est, il ne s'agit pas de la première demande d'habilitation formulée dans ce projet de loi. Sans nier la nécessité des mesures proposées par cet article, ni même leur technicité, il aurait sans nul doute été possible, durant les six mois de préparation de ce texte, d'y intégrer ces dispositions pleinement rédigées.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 94 bis A (nouveau) (art. L. 5134-1 à L. 5134-19 du code du travail) - Suppression de dispositions obsolètes du code du travail

Objet : cet article additionnel, inséré par votre commission spéciale sur proposition de votre rapporteur, retire du code du travail 19 articles qui ne connaissent plus aucune application et sont relatifs aux emplois jeunes.

Les emplois jeunes ont été institués par la loi du 16 octobre 1997 507 ( * ) afin de « promouvoir le développement d'activités créatrices d'emplois pour les jeunes répondant à des besoins émergents ou non satisfaits et présentant un caractère d'utilité sociale, notamment dans les domaines des activités sportives, culturelles, éducatives, d'environnement et de proximité » (article L. 5134-1 du code du travail). Destinés aux personnes de moins de vingt-cinq ans , ils étaient principalement proposés par des collectivités territoriales, des organismes de droit privé à but non-lucratif et des associations. L'éducation nationale (assistants d'éducation), la police nationale (adjoints de sécurité) et la justice ont également bénéficié de ce dispositif. La durée de ces contrats, lorsqu'ils étaient conclus à durée déterminée, était de cinq ans et chacun donnait lieu au versement par l'État à l'employeur d'une aide de 15 924,55 euros par an (article D. 5134-9) durant cette période.

Mis en place au moment où la situation de l'emploi connaissait une forte embellie, les emplois jeunes ont représenté 410 000 embauches entre 1997 et juin 2002 . A cette date, le programme n'a pas été reconduit, sans pour autant que les conventions en cours soient interrompues. Ainsi, selon la Dares, 151 000 contrats ne s'étaient pas encore achevés à la fin de l'année 2003. La décroissance des bénéficiaires s'est ensuite poursuivie : 99 000 fin 2004, 65 000 fin 2005, 20 000 fin 2007. En raison de mesures de pérennisation prises en faveur du secteur associatif, le dispositif s'est éteint au début des années 2010 508 ( * ) .

Cet outil de la politique de l'emploi à destination des jeunes a depuis été remplacé par plusieurs types de contrats aidés, le plus récent étant l'emploi d'avenir , institué par la loi du 26 octobre 2012 509 ( * ) et ciblé spécifiquement sur les jeunes les plus éloignés de l'emploi, sans qualification et résidant dans une zone urbaine sensible, une zone de revitalisation rurale ou un département d'outre-mer. Il figure pourtant toujours dans le code du travail.

Les emplois jeunes occupent en effet 19 articles de sa partie législative (à la sous-section 1 de la section 1 du chapitre IV du titre III du livre premier de la cinquième partie, soit les articles L. 5134-1 à L. 5134-19) et 13 articles de sa partie réglementaire (D. 5134-1 à D. 5134-13). Afin de simplifier ce code , dont l'inflation et la complexité croissante sont régulièrement dénoncées par tous ceux auxquels il s'applique ou qui en font un usage quotidien (salariés, employeurs, juristes, universitaires, etc.), votre rapporteur a proposé la suppression des dispositions relevant de la loi , leur disparition entraînant mécaniquement celle des dispositions fixées par décret.

Il s'agit d'un premier effort , certes symbolique , pour réduire le volume du code du travail . Il est toutefois indispensable, car dans son ensemble le présent projet de loi ne s'inscrit pas dans cette dynamique vertueuse : dans sa version adoptée par l'Assemblée nationale , il ajoute 33 articles à ce code .

Votre commission spéciale a adopté cet article additionnel.

Article 94 bis (art. L. 6332-6 du code du travail) - Prise en charge de la rémunération des salariés des TPE en formation

Objet : cet article, inséré dans le texte lors de son examen en séance plénière par l'Assemblée nationale, autorise les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) à prendre en charge la rémunération des salariés des entreprises de moins de dix salariés effectuant une formation.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

L'accord national interprofessionnel (ANI) du 13 décembre 2013 510 ( * ) est à l'origine d'une profonde réforme du système français de formation professionnelle, avec le passage pour les entreprises d'une obligation de dépenser à une obligation de former . L'un de ses objectifs est d'en faciliter l'accès aux salariés des très petites entreprises (TPE), qui sont aujourd'hui victimes d'importantes inégalités en la matière par comparaison aux salariés des grandes entreprises ou aux cadres. Selon l'article 39 de l'ANI, les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA), auxquels les entreprises versent leur contribution légale et qui financent en retour des actions de formation, peuvent prendre en charge la rémunération des salariés des entreprises de moins de dix salariés qui suivent une formation inscrite dans le plan de formation, si un accord de branche le prévoit et dans la limite du smic horaire.

La loi du 5 mars 2014 précitée a transposé cet ANI dans la loi, sans toutefois faire figurer explicitement dans le code du travail la possibilité pour les OPCA de prendre à leur charge le salaire des salariés des TPE en formation.

Cet article 94 bis corrige cette imprécision . Issu d'un amendement de nos collègues députés du groupe écologiste, il complète l'article L. 6332-6 du code du travail, qui arrête la liste des règles de fonctionnement des OPCA dont la définition relève d'un décret en Conseil d'État, afin qu'il fasse référence à la possibilité de financer la rémunération des salariés des TPE suivant une formation inscrite dans le plan de formation de leur entreprise.

II - La position de votre commission

Les partenaires sociaux, réunis au sein du comité paritaire national de l'emploi et de la formation (Copanef), avaient saisi le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social à la suite de la publication du décret du 24 octobre 2014 sur les OPCA 511 ( * ) en constatant que celui-ci n'offrait pas la possibilité aux OPCA de prendre en charge la rémunération des salariés des TPE partis en formation. Ils ont alors jugé cette absence contraire à « l'esprit de la loi du 5 mars 2014 » mais aussi « à la lettre et à l'esprit de l'ANI du 14 décembre 2013 ».

Dans sa réponse, le ministre avait précisé que la section sociale du Conseil d'État avait demandé le retrait de cette disposition du décret, en raison de l'absence de base légale sur ce point. Le Conseil d'État avait toutefois estimé que les partenaires sociaux, gestionnaires des OPCA, conservaient la possibilité de mettre en oeuvre cette stipulation de l'ANI .

Le présent article vient donner une base légale à cette mesure et corriger un oubli de la loi du 5 mars 2014, sans doute lié à la précipitation dans laquelle elle avait été examinée par le Parlement. Il renforce les moyens mis à la disposition des TPE pour former leurs salariés et l'accompagnement dont elles peuvent bénéficier : votre rapporteur y est très favorable.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.


* 501 Répondant aux critères fixés par l'article L. 5212-13 du code du travail : travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 %, bénéficiaires des emplois réservés prévus par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, titulaires de l'allocation aux adultes handicapés, etc.

* 502 Dares Analyses, L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés en 2012, n° 83, novembre 2014.

* 503 Source : enquête Handicap-santé - volet ménages (HSM), Insee - Drees, 2008.

* 504 Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, article 20.

* 505 A la durée légale de 35 heures par semaine correspondent une durée mensuelle de 151,67 heures et une durée annuelle de 1 607 heures.

* 506 Cf. relevé des conclusions de la conférence nationale du handicap, 11 décembre 2014, disponible sur :
http://www.elysee.fr/assets/Confrence-nationale-du-Handicap/11.12-CNH-Relev-des-conclusions.pdf

* 507 Loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes, art. 1 er .

* 508 Source : Dares premières synthèses, Les nouveaux services - emplois jeunes : bilan fin 2003,
n° 20-1, mai 2004.

* 509 Loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 portant création des emplois d'avenir.

* 510 Accord national interprofessionnel du 13 décembre 2013 relatif à la formation professionnelle.

* 511 Décret n° 2014-1240 du 24 octobre 2014 relatif aux organismes paritaires agréés mentionnés aux articles L. 6332-1, L. 6333-1 et L. 6333-2 du code du travail.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page