PREMIÈRE PARTIE - DISPOSITIONS RELATIVES AUX
RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL
Section 1-- Dispositions
relatives aux recettes des régimes obligatoires de base
de sécurité sociale et des organismes concourant à
leur financement
Article 1er (art. L. 131-10 du code de la sécurité sociale (nouveau), L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite et L. 741-15 du code rural et de la pêche maritime) - Allègements de cotisations salariales au bénéfice des salariés et fonctionnaires les moins rémunérés
Objet : Réduction dégressive de cotisations salariales pour les salaires inférieurs ou égaux à 1,3 Smic du secteur privé et pour les traitements inférieurs ou égaux à 1,5 Smic dans la fonction publique.
I - Le dispositif proposé
Le présent article rétablit un chapitre I er quater au sein du livre I er du code de la sécurité sociale qu'il consacre à un dispositif de réduction dégressive de cotisations salariales ciblé sur les salaires et traitements proches du Smic.
Alors qu'à partir de 1993 ont été progressivement mis en place des dispositifs d'exonérations générales de cotisations patronales pour les salaires dont le montant est compris entre 1 et 1,6 Smic, les cotisations payées par les salariés conservaient jusqu'ici un caractère essentiellement proportionnel, voire dégressif à partir d'un certain niveau de salaire.
Dans un souci de justice sociale, le dispositif prévu par l'article 1 er a pour objectif de rendre pour la première fois les cotisations salariales sur les bas salaires progressives afin de donner, dans un contexte de relative modération salariale, du pouvoir d'achat aux travailleurs concernés, de lutter contre le phénomène de la pauvreté laborieuse et d'inciter à l'activité. Il constitue à ce titre un des aspects majeurs de la dimension « solidarité » du Pacte de responsabilité et de solidarité du Gouvernement.
Ce dispositif - qui concerne tant les salariés du secteur privé que les fonctionnaires civils et militaires - devrait en outre avoir un effet positif sur la consommation et sur la croissance en soutenant la demande.
Il représenterait, selon l'étude d'impact du projet de loi, un coût total pour les finances publiques (sous forme de réduction des recettes perçues) de 2,5 milliards d'euros en 2015, de 2,61 milliards d'euros en 2016 et de 2,7 milliards d'euros en 2017 qui sera intégralement compensé selon des modalités définies dans les lois financières pour 2015.
• Les cotisations salariales des salariés du secteur privé
Depuis le 1 er janvier 2014, les cotisations à la charge des travailleurs salariés au titre des assurances sociales obligatoires sont les suivantes :
- Assurance maladie, maternité, invalidité, décès : un taux de 0,75 % sur la totalité du salaire ;
- Assurance vieillesse : un taux de 6,80 % en 2014, de 6,85 % en 2015, de 6,90 % en 2016 et en 2017 sur la partie du salaire inférieure au plafond de la sécurité sociale (soit 37 548 euros par an et 3 129 euros par mois) et de 0,25 % au 1 er janvier 2014, de 0,30 % au 1 er janvier 2015 et de 0,40 % au 1 er janvier 2017 au-delà du plafond de la sécurité sociale. Ces hausses de taux progressives résultent de la révision du dispositif de retraites anticipées pour carrières longues en 2012 ainsi que de la réforme des retraites qui a abouti à la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.
Ni la branche famille ni la branche accidents du travail - maladies professionnelles ne perçoivent de cotisations salariales.
La contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) sont également acquittées par les salariés de façon proportionnelle à leurs revenus (pour un taux total de 7,86 % pour une rémunération inférieure à 12 516 euros, de 8 % au-delà), tout comme les cotisations pour leur régime de retraite complémentaire (taux de 3,05 % pour la tranche de rémunération inférieure à 3 129 euros et de 8,05 % pour la tranche comprise entre 3 129 euros et 9 387 euros) ainsi que pour le régime d'assurance chômage (taux de 2,40 % jusqu'à 12 516 euros).
Au total, le taux des prélèvements salariaux au niveau du Smic s'établit à 21,01 % au 1 er janvier 2014 et s'établira à 22,01 points au 1 er janvier 2015.
Total des 22,01 points de
prélèvements salariaux au niveau du
Smic
(cotisations et contributions salariales de
sécurité sociale ou d'origine légale ou
conventionnelle
pour les salariés non cadres affiliés au
régime général de la sécurité sociale en
2015)
Source : Direction de la sécurité sociale
Il convient de noter que sont exemptées de cotisations salariales certaines catégories de salariés très particulières, telles que les apprentis, les salariés agricoles en « contrat vendange », les stagiaires en entreprise, les stagiaires du service civique, les gardes à domicile ou bien encore les assistantes maternelles.
• Une réduction dégressive de cotisations salariales pour les salariés du secteur privé dont les salaires sont compris entre 1 et 1,3 Smic
L'article 1 er dispose que les travailleurs salariés qui relèvent du régime général ou des régimes spéciaux dont les gains et rémunérations, tels que définis par l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale 1 ( * ) , sont inférieures au produit du salaire minimum de croissance et d'un coefficient fixé par décret verront les cotisations qu'ils payent au titre des assurances sociales réduites de façon dégressive (et ce, afin de ne pas créer d'effets de seuil).
Le Gouvernement prévoit que ce coefficient sera fixé à 1,3. Ainsi, seront concernés par ce dispositif les salariés dont la rémunération est comprise entre 1 et 1,3 Smic. Il convient de relever que le recours au décret pour déterminer ce coefficient paraît problématique, dans la mesure où le coefficient des allègements généraux de cotisations patronales est, pour sa part, déterminé par le législateur à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.
L'article 1 er prévoit que le montant de la réduction est calculé lors de chaque année civile sur l'ensemble de la rémunération annuelle de chaque salarié. Il résulte du produit entre les gains perçus par le salarié tout au long d'une année civile et un coefficient déterminé par décret.
Ce coefficient est fixé selon les modalités prévues par le deuxième alinéa du III de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale qui dispose : « ce coefficient est déterminé par application d'une formule fixée par décret. Il est fonction du rapport entre la rémunération annuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1 [...] et le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu. »
La formule de calcul de ce coefficient envisagée par le Gouvernement et présentée dans l'étude d'impact du projet de loi est la suivante :
(0,03/0,3) x (1,3 x Smic annuel / rémunération annuelle - 1)
Sa valeur maximale sera de 3 % au niveau du Smic et diminuera progressivement pour s'annuler à 1,3 Smic. Le décret qui le déterminera devra être publié au cours de l'automne 2014 pour permettre une entrée en vigueur au titre des rémunérations versées à compter du 1 er janvier 2015.
Le Smic étant fixé à 9,53 euros depuis le 1 er janvier 2014, le gain de pouvoir d'achat pour un salarié payé au Smic et travaillant à temps complet (soit 1 820 heures par an) serait de 520 euros par an, soit un peu plus de 43 euros par mois. A des niveaux de rémunération supérieurs au Smic, le gain serait décroissant et s'annulerait à 1,3 Smic, comme le montre la figure ci-après.
Montant de l'exonération de cotisations
salariales
en fonction de la rémunération des
salariés
Salaire en Smic |
Rémunération |
Exonération |
1 |
17 345 € |
520 € |
1,05 |
18 212 € |
434 € |
1,1 |
19 079 € |
347 € |
1,15 |
19 947 € |
260 € |
1,2 |
20 814 € |
173 € |
1,3 |
22 548 € |
0 € |
Source : Etude d'impact du projet de loi
5,2 millions de travailleurs salariés devraient bénéficier de cette mesure, qui représenterait, selon l'étude d'impact du projet de loi, un coût pour les finances publiques (sous forme de réduction des recettes perçues) de 2,05 milliards d'euros en 2015, de 2,15 milliards d'euros en 2016 et de 2,23 milliards d'euros en 2017 qui sera intégralement compensé selon des modalités définies dans les lois financières pour 2015.
L'article 1 er précise que la réduction dégressive de cotisations salariales ne peut être cumulée avec une exonération totale ou partielle de ces cotisations, ni avec une prise en charge de ces mêmes cotisations, ni avec l'application de taux spécifiques ou d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations, à l'exception des frais professionnels.
• Une réduction dégressive de cotisations salariales pour les fonctionnaires civils et militaires dont le traitement est compris entre le Smic et l'indice majoré 468, soit environ 1,5 Smic
L'article L. 61 du code des pensions civiles et militaires dispose :
« La couverture des charges résultant, pour l'Etat, de la constitution et du service des pensions prévues par le présent code et les lois et règlements en vigueur ainsi que des dispositions du code de la sécurité sociale applicables aux régimes spéciaux d'assurance vieillesse est assurée par :
1° Une contribution employeur à la charge de l'Etat, assise sur les sommes payées aux agents visés à l'article L. 2 à titre de traitement ou de solde, à l'exclusion d'indemnités de toute nature, dans des conditions fixées par la loi de finances ;
2° Une cotisation à la charge des agents visés à l'article L. 2, assise sur les sommes payées à ces agents à titre de traitement ou de solde, à l'exclusion d'indemnités de toute nature, dont le taux est fixé par décret. Ce taux prend en considération les taux des cotisations à la charge des assurés sociaux relevant de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés et des institutions de retraite complémentaire visées à l' article L. 922-1 du code de la sécurité sociale pour la partie de leur rémunération inférieure au plafond prévu à l'article L. 241-3 du même code ».
Le taux de la cotisation à la charge des agents - actuellement unique pour tous les fonctionnaires, quel que soit leur niveau de traitement - est fixé par le décret n°2010-1749 du 30 décembre 2010 modifié en dernier lieu par le décret n°2013-1290 du 27 décembre 2013 : il était de 9,14 % au 1 er janvier 2014. Une montée en charge de ce taux est en cours depuis 2010 et devrait aboutir à un taux de 11,1 % en 2020.
L'article 1 er du projet de loi complète le 2° de l'article L. 61 du code des pensions civiles et militaires pour prévoir une réduction du taux de cette cotisation pour les fonctionnaires dont le traitement ou la solde sont inférieurs à celui ou celle correspondant à un indice majoré défini par décret. Il vise ainsi à rendre progressive au niveau des traitements les moins élevés de la fonction publique une cotisation jusque-là strictement proportionnelle. Cette disposition s'applique aux fonctionnaires de l'État mais également aux fonctionnaires des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière, qui sont affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).
La réduction du taux de la cotisation est appliquée de manière dégressive en fonction du montant du traitement ou de la solde en tenant compte de la quotité de travail dans des conditions fixées par décret. Selon l'étude d'impact du projet de loi, la réduction de la cotisation des fonctionnaires payés au Smic (soit l'indice majoré 312) sera au maximum de 2 % et sera progressivement dégressive jusqu'à s'annuler pour un traitement correspondant à l'indice majoré 468, soit environ 1,5 Smic.
Montant de l'exonération de cotisations
salariales
en fonction du traitement des fonctionnaires
Indice majoré plafond |
Baisse du taux
|
Gains annuels moyen
|
312 |
2 % |
329,62 |
328 |
1,80 % |
320,72 |
343 |
1,60 % |
301,21 |
359 |
1,40 % |
275,02 |
375 |
1,20 % |
246,33 |
390 |
1,00 % |
214,70 |
406 |
0,80 % |
178,18 |
421 |
0,70 % |
161,74 |
437 |
0,60 % |
143,92 |
453 |
0,50 % |
124,25 |
468 |
0,20 % |
51,49 |
Source : Etude d'impact du projet de loi
2,2 millions de fonctionnaires devraient bénéficier de cette mesure (pour un gain annuel maximum légèrement inférieur à 330 euros par an), dont 832 000 pour la fonction publique de l'État, 945 000 pour la fonction publique territoriale et 462 000 pour la fonction publique hospitalière.
Elle représenterait, selon l'étude d'impact du projet de loi, un coût pour les finances publiques (sous forme de réduction des recettes perçues) de 450 millions d'euros en 2015, de 460 millions d'euros en 2016 et de 470 millions d'euros en 2017, qui sera intégralement compensé selon des modalités définies dans les lois financières pour 2015.
II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
Outre deux amendements rédactionnels, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de Gérard Bapt au nom de la commission des affaires sociales et un sous-amendement présenté par le Gouvernement pour inclure dans la loi le seuil de sortie à 1,3 Smic pour bénéficier des exonérations de cotisations salariales et supprimer le renvoi au décret initialement prévu pour déterminer sa fixation.
Le seuil de sortie à 1,3 Smic du dispositif de réduction dégressive de cotisations salariales figurera donc dans le nouvel article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, à l'instar du seuil de 1,6 Smic qui figure à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale pour les allègements généraux de cotisations patronales, et ne sera pas déterminé par voie réglementaire.
III - La position de la commission
Les exonérations de cotisations patronales portées par le présent projet de loi sont indispensables pour restaurer la compétitivité de nos entreprises, relancer la croissance de notre économie et lutter contre le chômage qui frappe un trop grand nombre de nos concitoyens.
Elles viennent approfondir un dispositif dont la mise en oeuvre a commencé dès 1993 et qui a rendu les cotisations sociales patronales progressives entre 1 et 1,6 Smic.
A l'inverse, les cotisations salariales étaient restées proportionnelles au cours du temps et n'avaient jamais fait l'objet de mesures d'exonérations.
Votre commission se félicite que, pour la première fois, le présent article 1 er mette en place une réduction dégressive de cotisations salariales pour les salaires inférieurs ou égaux à 1,3 Smic du secteur privé et pour les traitements inférieurs ou égaux à 1,5 Smic dans la fonction publique. Les cotisations salariales seront désormais progressives au niveau des bas salaires.
Cette mesure de justice sociale permettra de donner du pouvoir d'achat aux travailleurs modestes en augmentant leur salaire net sans augmenter le coût du travail pour l'entreprise : à titre d'exemple, un salarié payé au Smic et travaillant à temps plein pendant une année percevra 520 euros supplémentaires par an.
Cette mesure bénéficiera à 5,2 millions de travailleurs salariés et à 2,2 millions de fonctionnaires. Elle favorisera leur consommation, ce qui profitera à l'activité économique de notre pays.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 2 (art. L. 241-5, L. 241-6, L 241-6-1 (nouveau), L. 241-13, L 242-11 et L.834-1 du code de la sécurité sociale, et L. 731-10, L. 731-25, L. 741-3 et L 751-17 du code rural et de la pêche maritime) - Baisse des cotisations sociales des employeurs et des travailleurs indépendants
Objet : Cet article augmente les allègements généraux de cotisations patronales pour supprimer toute cotisation aux Urssaf au niveau du Smic, réduit les cotisations d'allocations familiales ainsi que les cotisations des travailleurs indépendants et simplifie les versements au fonds national d'aide au logement (Fnal).
Cet article transpose le principal engagement pris par le Gouvernement dans le cadre du pacte de responsabilité et de responsabilité, visant à réduire le coût du travail au voisinage du Smic afin de favoriser l'emploi et la compétitivité des entreprises.
I - Le dispositif proposé
•
Intégration dans le champ des
allègements généraux des cotisations dues au titre des
accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP), dans la limite
de la cotisation minimale
La nature des cotisations AT-MP, très directement liée à la sinistralité observée dans les entreprises, avait conduit à les écarter du champ des allègements généraux sur les bas salaires par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Cet article propose de les y réintégrer pour la partie correspondant à la cotisation minimale commune à toutes les entreprises qui n'est pas liée au taux spécifique de sinistres intervenus dans l'entreprise mais à la situation financière générale de la branche. Ce taux est indépendant des efforts que peut déployer l'entreprise pour réduire les risques.
Le taux de cette cotisation minimale est actuellement estimé à 1 % sur les 2,4 % du taux net moyen au niveau national.
Le 1° du paragraphe I complète le troisième alinéa de l'article L. 241- 5 du code de la sécurité sociale, qui prévoit que les cotisations AT-MP ne peuvent faire l'objet d'une exonération totale, pour indiquer que les allègements généraux peuvent porter sur la cotisation AT-MP sans pouvoir excéder le taux de la cotisation minimale.
• Baisse du taux de cotisations pour les
prestations familiales
Le 2° du I supprime le principe de la proportionnalité aux revenus des cotisations familiales des salariés, agricoles et non-agricoles, et des travailleurs indépendants, pour permettre qu'un taux différencié s'applique en fonction de différents seuils de revenus. Il clarifie la rédaction en distinguant mieux les différentes catégories : salariés agricoles ou non, travailleurs indépendants non-agricoles et exploitants agricoles.
Le 3° du I prévoit une réduction du taux des cotisations familiales de 1,8 point pour les salaires éligibles aux allègements généraux de cotisations. Pour les salaires inférieurs à 1,6 Smic, soit 2 312 euros au 1 er janvier 2014, un taux réduit de 3,45 %, contre 5,25 % pour le taux normal, sera applicable.
L'effet de seuil constaté à 1,6 Smic ne devrait pas perdurer, une réduction similaire ayant été annoncée par le Gouvernement à compter du 1 er janvier 2016 pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 Smic.
• Amplification des allègements
généraux de cotisations patronales
La première mise en place d'une politique d'allègements généraux de cotisations patronales résulte de la loi n° 93-353 du 27 juillet 1993 qui supprimait la cotisation d'allocations familiales au voisinage du Smic, avec l'objectif de baisser le coût du travail pour les entreprises et de favoriser ainsi l'emploi des personnes les moins qualifiées.
L'élasticité de l'offre de travail à son coût est en effet considérée par les économistes comme étant beaucoup plus forte au niveau du Smic, qui constitue un prix administré et non un ajustement de l'offre et de la demande de travail. Si le taux de cette élasticité fait débat, avec des fourchettes allant de 0,8 à 1,2, voire davantage, un consensus s'est établi pour une élasticité de 1, c'est-à-dire que si l'on baisse de 1 % le coût du travail, la demande de travail se trouve augmentée d'autant.
Depuis 1993, le taux de réduction, les seuils de rémunération en proportion du Smic et les éléments de rémunérations entrant dans le calcul de la réduction ont été modifiés à de nombreuses reprises, notamment pour en limiter le coût, stabilisé depuis 2012 autour de 20 milliards d'euros par an.
Codifiés à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, les allègements dits « Fillon » prennent concrètement la forme d'une réduction de cotisations calculée par l'application d'un coefficient de réduction à la rémunération brute annuelle du salarié.
Ce coefficient, d'un maximum de 28,1% pour les entreprises de moins de 20 salariés et de 26 % pour les autres entreprises pour les salariés rémunérés au Smic, évolue de façon dégressive pour s'annuler à 1,6 Smic.
Après application des allègements généraux, un reliquat de cotisations sociales recouvrées par les Urssaf de 4,15 points subsiste dans les entreprises de plus de 20 salariés au 1 er janvier 2015 ; il est de 1,65 point dans les entreprises de moins de 20 salariés.
Si l'on combine les effets des allègements généraux et du crédit d'impôt compétitivité emploi (Cice), ce reliquat est plus que compensé. En dépit de cet effort très significatif par rapport aux taux nominaux de cotisations, le coût du travail au niveau du salaire minimum se situe encore dans la moyenne haute des pays de l'OCDE et notre pays se distingue, par rapport à ses principaux partenaires européens par l'importance de la part des cotisations patronales dans le financement de la protection sociale.
Comparaison de la structure de financement de la
protection sociale
en points de PIB en France, en Allemagne, en Italie et au
Royaume-Uni
par rapport à la moyenne de l'UE à 15
Source : DG Emploi de la Commission européenne d'après Eurostat
L'amplification des allègements généraux constitue par conséquent un signal de soutien à la compétitivité des entreprises, à l'investissement et à la création d'emploi. Il s'agit d'une mesure d'accompagnement qui ne saurait remplacer les signaux donnés par la conjoncture et l'horizon des carnets de commande mais, à la faveur d'une reprise soutenue par la demande extérieure, elle peut avoir un effet de levier décisif.
Le 4° du I modifie le champ des allègements généraux de cotisations défini à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale pour y réintroduire les cotisations AT-MP et y ajouter la cotisation au Fnal et la contribution solidarité autonomie, qui sont également recouvrées par les Urssaf, soit une réduction nouvelle de 1,8 point pour les entreprises de plus de 20 salariés et de 1,4 point pour les entreprises de moins de 20 salariés.
Alors que les valeurs maximales des coefficients de réduction sont aujourd'hui fixées par la loi de façon différenciée selon la taille des entreprises, le texte renvoie au décret pour la définition de la valeur maximale du coefficient de réduction des cotisations sociales, qui ne doit pas excéder la somme des cotisations recouvrées par les Urssaf, hors majorations de cotisations AT-MP. D'après l'étude d'impact, les nouveaux coefficients d'exonération n'opèreraient plus de distinction au profit des entreprises de moins de 20 salariés mais feraient au contraire bénéficier de coefficients plus importants les entreprises de 20 salariés et plus dont le reliquat de cotisations Urssaf au niveau du Smic est plus important. En termes de cotisations sociales, l'effet de seuil est donc neutralisé entre 19 et 20 salariés.
Cotisations et prélèvements sous plafond
des entreprises
de plus de 20 salariés au 1
er
janvier
2015
Famille |
3,45 % |
Vieillesse |
10,30 % |
Maladie |
12,80 % |
AT/MP |
1,00 % |
CSA (autonomie) |
0,30 % |
Fnal |
0,50 % |
Total Urssaf |
28,35 % |
Construction |
0,45 % |
Formation |
1,60 % |
Apprentissage |
0,68 % |
Transport |
2,70 % |
AGFF |
1,20 % |
Agirc/Arcco |
4,58 % |
AGS |
0,30 % |
Chômage |
4,00 % |
Total hors Urssaf |
15,51 % |
Total |
43,86 % |
Source : INSEE et projet de loi
Au 1 er janvier 2015, l'effet cumulé de la réduction du taux de cotisation famille et de l'augmentation des allègements généraux devrait être le suivant sur les cotisations de sécurité sociale :
Taux de cotisations « Urssaf » au
voisinage du Smic au 1
er
janvier 2015
pour une
entreprise de 20 salariés et plus
Source : INSEE et étude d'impact PLFRSS
Comme indiqué dans l'étude d'impact, le niveau des exonérations de cotisations, en proportion du Smic sera le suivant :
Coefficient de l'allègement bas salaires au 1 er janvier 2015
Rémunération brute rapportée au Smic |
Moins de 20 salariés |
20 salariés et plus |
1 |
27,95% |
28,35% |
1,1 |
21,17% |
21,48% |
1,2 |
15,53% |
15,75% |
1,3 |
10,75% |
10,9% |
1,4 |
6,65% |
6,75% |
1,5 |
3,11% |
3,15% |
1 ,59 |
0,29% |
0,30% |
Source : étude d'impact PLFRSS
En intégrant les effets du Cice, qui ajoute 6 % de réduction à ce coefficient, c'est donc une réduction très significative du coût du travail au voisinage du Smic qui sera opérée au 1 er janvier 2015.
Taux de prélèvements patronaux au
1
er
janvier 2015
pour une entreprise de 20 salariés et
plus, après réduction
de la cotisation famille,
allègements généraux et Cice
Source : Insee
Le 4° du I rassemble, au IV de l'article de L. 241-13, les situations dans lesquelles les éléments de rémunération ne correspondent pas à du temps de travail effectif ou comportent des majorations (caisses de congés payés) et doivent donner lieu à la correction du coefficient.
Le 4° du I rappelle, dans le paragraphe VIII de l'article L. 241-13, le mode d'imputation de la réduction des cotisations : sur les cotisations au titre des assurances sociales et des allocations familiales, la cotisation Fnal et la cotisation CSA, puis, si le montant de la réduction est supérieure, aux cotisations AT-MP, dans la limite de la cotisation minimale en l'absence de sinistre.
La réforme devrait concerner 1,56 millions d'employeurs, soit plus de la moitié des entreprises et environ 10 millions de salariés.
• Baisse du taux de cotisations familiales
des travailleurs indépendants non agricoles
Les droits à prestations sociales des régimes de base des travailleurs indépendants sont identiques à ceux des salariés. A la suite du déplafonnement de la cotisation maladie, puis de la cotisation vieillesse, l'assiette des cotisations a été rapprochée de celle des salariés, avec des taux qui diffèrent pour certains risques. Le taux de cotisations pour les prestations familiales est identique à celui des salariés.
Taux de cotisations des travailleurs indépendants non-agricoles au 1 er janvier 2015
Cotisation |
Assiette |
Taux artisan |
Taux commerçant ou industriel |
Taux profession libérale |
Maladie-maternité |
Totalité du revenu professionnel |
6,50 % |
||
Indemnités journalières |
Dans la limite de 5 Pass (soit 187 740 €) |
0,70 % |
_ |
|
Retraite de base |
Sous plafond 37 548 € |
17,05 % 2 ( * ) |
CNAVPL |
|
Au-delà du plafond |
0,20 % |
CNAVPL |
||
Retraite complémentaire |
Dans la limite de 37 513 € |
7 % |
CNAVPL |
|
Revenu compris entre 37 513 € et 150 192 € |
8 % |
CNAVPL |
||
Invalidité - décès 3 ( * ) |
Sous plafond |
1,30 % |
CNAVPL |
|
Allocations familiales |
Totalité du revenu professionnel |
5,25 % |
||
CSG -CRDS |
Totalité du revenu professionnel
|
8 % |
||
Formation professionnelle |
Sur la base de 37 032 € (soit 1 Pass 2013) |
0,29 % |
0,25 % |
0,25 % |
Source : RSI
Pour ouvrir leurs droits à prestations, les travailleurs indépendants doivent s'acquitter d'une cotisation définie par rapport à une assiette minimale.
Aménagée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, avec l'introduction d'une dégressivité de la cotisation maladie pour les revenus négatifs ou nuls, la structure des cotisations minimales a été réformée par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises qui unifie le régime microsocial (auto-entrepreneurs) et le régime micro-fiscal au sein d'un nouveau régime simplifié et permet aux travailleurs indépendants « ex auto-entrepreneurs » soumis à ce régime d'opter pour le paiement d'une cotisation minimale.
En conséquence, la dégressivité de la cotisation maladie ainsi que les exonérations de cotisations d'allocations familiales et de CSG-CRDS dont bénéficiaient certains indépendants sont supprimées, au profit d'un régime unique.
A l'issue de cette réforme, applicable au 1 er janvier 2015, le mode de calcul de la cotisation minimale est le suivant :
En matière de retraite, la cotisation minimale ne permettait de valider qu'un seul trimestre, même si l'activité avait été exercée tout au long de l'année (un revenu équivalent à 600 Smic horaire brut est nécessaire à la validation d'une année complète). En matière d'indemnités journalières, elle ouvre droit à un taux minimum. La réforme a consisté à diminuer la cotisation maladie tout en augmentant la cotisation vieillesse, de sorte qu'elle permette de valider au moins deux trimestres de retraite.
A la différence de l'ancien régime des auto-entrepreneurs, le nouveau régime, qui n'est pas une exonération de cotisations, ne fait pas l'objet d'une compensation par l'État.
Le 5 e du I prévoit la réduction du taux des cotisations d'allocations familiales des travailleurs indépendants dont les revenus sont inférieurs à un seuil fixé par décret dans la limite de 3,1 points. Il interdit le cumul de cette réduction avec tout autre dispositif d'abattement ou de réduction de ces cotisations.
L'étude d'impact précise que l'exonération prendra la forme suivante en fonction du revenu, entendu au sens du revenu professionnel pris en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu :
- lorsqu'il est inférieur ou égal à 110 % du plafond annuel de la sécurité sociale (41 302 euro en 2014, soit environ 3 Smic nets annuels), le taux de l'exonération sera de 3,1 % du revenu d'activité ;
- lorsqu'il est compris entre 110 % et 140 % du Pass (52 567 euros en 2014, soit environ 3,8 Smic nets annuels), le taux de la réduction décroîtra de façon linéaire afin de limiter les effets de seuil.
L'étude d'impact illustre les effets cumulés de la réforme du régime microsocial et de la réduction de la cotisation familiale.
Un artisan ayant un revenu de 15 000 euros annuel sera redevable de 6 890 euros de cotisations annuelles en 2015 contre 7 355 euros après la réforme de la cotisation minimale.
La réforme de la cotisation minimale concerne les 30 % des travailleurs indépendants qui y sont actuellement soumis. La réduction des cotisations familiales devrait concerner 90 % des artisans, 90 % des commerçants, 65 % des professionnels libéraux et 50 % des entrepreneurs relevant du régime microsocial.
• Fusion de la cotisation et de la
contribution au Fnal
Le 6 e du I fusionne la contribution et la cotisation au Fnal en une seule cotisation qui sera :
- de 0,1 % sous plafond dans les entreprises de moins de 20 salariés ;
- de 0,5 % sur la totalité des salaires dans les autres entreprises.
Cette fusion ne modifie pas le taux de prélèvement global et simplifie l'architecture des prélèvements.
•
Baisse du taux de cotisations familiales
des travailleurs indépendants et des salariés agricoles
Le paragraphe II modifie le code rural et de la pêche maritime afin d'appliquer aux exploitants et salariés agricoles les dispositions applicables aux travailleurs indépendants non-agricoles et aux salariés.
Le 1° du II modifie l'article L. 731-10 du code rural et de la pêche maritime et renvoie à l'article L. 242-12 du code de la sécurité sociale pour les conditions de fixation du taux de cotisations familiales.
Le 2° du II modifie l'article L.731-25 du code rural et de la pêche maritime pour préciser l'assiette des cotisations. Il supprime la notion de proportionnalité et renvoie au décret pour la définition du taux. Il opère un renvoi à l'article L. 242-11 du code de la sécurité sociale pour l'application aux exploitants agricoles de la réduction de cotisations familiales applicable aux travailleurs indépendants non-agricoles. Cette mesure devrait concerner plus de 95 % des non-salariés agricoles.
Taux de cotisations des exploitants agricoles au 1 er janvier 2015
Cotisation |
Assiette |
Taux |
Maladie |
Totalité du revenu professionnel |
10,84 % |
Vieillesse individuelle |
Sous plafond 37 548 € |
3,26% |
Vieillesse plafonnée |
Sous plafond 37 548 € |
11,31 % |
Vieillesse déplafonnée |
Totalité du revenu professionnel |
1,64 % |
Retraite complémentaire |
Totalité du revenu professionnel |
3 % |
Allocations familiales |
Totalité du revenu professionnel |
5,25 % |
CSG -CRDS |
Totalité du revenu professionnel |
8 % |
AT-MP |
Forfaitaire |
Entre 411,33 et 447,10 € |
Source : MSA
Le 3° du II modifie l'article L. 741-1 du code rural et de la pêche maritime qui renvoie au code de la sécurité sociale pour les modalités de fixation des différents taux de cotisations applicables aux salariés agricoles. Il exclut la possibilité de dérogations par décret pour les cotisations familiales.
Le 4° du II modifie l'article L. 741-3 pour supprimer la notion de proportionnalité des cotisations par rapport à la rémunération des salariés agricoles et permettre des taux différenciés de cotisations en fonction des niveaux de salaires.
Le 5° du II complète l'article L. 751-17 du code rural et de la pêche maritime pour inclure les cotisations AT-MP dans le champ des allègements généraux applicables aux salariés agricoles, dans la limite de la cotisation minimale.
• Date d'application
Le paragraphe II précise dans un A que les mesures applicables aux salariés agricoles et non-agricoles concernent les cotisations et contributions versées à compter du 1 er janvier 2015.
Pour les travailleurs indépendants, agricoles et non agricoles, les mesures sont applicables au titre de la période courant à compter du 1 er janvier 2015, même si elles sont versées à une autre période.
• Impact financier des différentes
mesures
L'impact financier des différentes mesures prévues par l'article est d'environ 5,5 milliards d'euros que l'étude d'impact du projet de loi détaille de la façon suivante :
- 1 milliard d'euros au titre de l'alignement du taux d'exonération des entreprises de 20 salariés et plus sur celui des entreprises de moins de 20 salariés ;
- 3 milliards d'euros au titre de la réduction de 1,8 point de la cotisation d'allocations familiales jusqu'à 1,6 Smic ;
- 0,4 milliard d'euros au titre du renforcement des allègements généraux au niveau du Smic ;
- 1 milliard d'euros au titre de la réduction des cotisations des travailleurs indépendants.
Ainsi que le précise l'étude d'impact, la mise en place de la progressivité de la cotisation d'allocations familiales devra être financée par des économies en dépenses.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
Outre 13 amendements rédactionnels ou de précision, l'Assemblée nationale a modifié l'article sur trois points.
A l'initiative de notre collègue Gérard Bapt, elle a adopté un amendement supprimant le 1° du IV de l'article L. 241-13 qui prévoyait que la rémunération annuelle du salarié prise en compte pour le calcul des allègements ne comprenait pas la part perçue au titre des « temps de pause, d'habillage ou de déshabillage ne constituant pas du temps de travail, versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 » Cette disposition permettait de porter au-delà du seuil de 1,6 Smic, les rémunérations prises en compte dans le calcul des allègements. Au cours des débats, le Gouvernement a précisé que cette suppression concernait, pour 80 %, le secteur de la grande distribution.
A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement modifiant le taux de cotisation au Fnal pour les entreprises de services dont les salariés sont affiliés au régime agricole. Alors que l'ensemble des entreprises affiliées au régime agricole se voient appliquer un taux de 0,1 % sur les rémunérations plafonnées quel que soit le nombre de salariés, elle a modifié l'article L. 834-1 du code rural et de la pêche maritime, pour réserver ce taux aux entreprises visées aux 1° à 4° de l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime et aux coopératives.
A l'initiative de notre collègue Gérard Bapt et d'un amendement identique de M. Jean-Marc Germain et plusieurs de ses collègues, l'Assemblée nationale a modifié l'article L. 2241-2 du code du travail pour ajouter aux sujets de la négociation annuelle de branche sur les salaires « l'impact sur l'emploi et les salaires des allègements de cotisations et des réductions et crédits d'impôts dont bénéficient les entreprises de la branche ».
III - La position de la commission
Dans la continuité d'une politique menée par tous les Gouvernements au fil des alternances successives, cette nouvelle vague d'allègements constitue un signal en direction des entreprises dans une conjoncture particulièrement dégradée.
Votre commission sera particulièrement attentive à la compensation de ces nouveaux allègements pour les comptes de la sécurité sociale.
A l'initiative de votre rapporteur général, la commission a adopté un amendement portant, à compter du 1 er septembre 2014, à 1,50 euro par heure déclarée la réduction de cotisation dont bénéficient les particuliers-employeurs.
Le régime de cotisations applicable aux particuliers-employeurs a été réformé à plusieurs reprises dans le sens d'une augmentation significative des cotisations. Après la suppression de l'abattement de 15 points sur les cotisations patronales, le 1 er janvier 2012, le régime du forfait a été supprimé le 1 er janvier 2013, ce qui représentait une hausse de cotisations de 12 % pour les ménages concernés.
La réduction de cotisations de 75 centimes par heure déclarée qui a accompagné cette réforme n'a pas permis d'enrayer la chute du nombre d'heures déclarées dans ce secteur, qui a baissé de 7 % en 2013, soit une perte de 16 000 équivalents temps plein, qui fait suite à une première baisse de 12 000 ETP en 2012.
Le montant de la réduction de cotisations est en principe fixé par décret. Le montant proposé par votre Commission devrait permettre de reconquérir de l'emploi déclaré - et donc des cotisations - pour un coût estimé à 120 millions d'euros en année pleine et à 40 millions d'euros en 2014.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 3 (art. L. 134-11-1, L. 135-3, L 241-2, L. 241-13 ; L 241-3, L. 611-19, L. 612-1, L. 633-9, L. 651-2-1, L. 651-3, L. 651-5 du code de la sécurité sociale et L. 731-2 du code rural et de la pêche maritime) - Création d'un abattement d'assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés, intégration financière du régime social des indépendants avec le régime général et répartition de l'affectation du produit de la C3S
Objet : Dans le cadre de la suppression programmée de la C3S à l'horizon 2017, cet article crée un abattement d'assiette. Il procède à l'intégration financière du RSI avec le régime général et répartit le produit de la contribution entre ses différents affectataires.
I - Le dispositif proposé
• Intégration financière du RSI
avec le régime général
Du fait de leur démographie, les différentes caisses ayant donné naissance au régime social des indépendants, le 1 er janvier 2006, étaient structurellement déficitaires. L'équilibre des régimes obligatoires de base des indépendants est assuré depuis 1970 par la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (CSSS ou C3S) qui finance le déficit intégralement et automatiquement. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés sont assujetties au taux de 0,13 % de leur chiffre d'affaires lorsque celui-ci dépasse 760 000 euros sur l'année. La loi du 13 août 2004 relative à la réforme de l'assurance maladie a, par ailleurs, créé la C3S additionnelle au taux de 0,03 % assise sur la même assiette, qui est affectée au fonds de solidarité vieillesse. Le taux de la C3S s'établit donc à 0,16 %. Environ 300 000 entreprises sont redevables de cette contribution. |
L'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale prévoit que cet impôt est affecté « au prorata et dans la limite du déficit comptable résultant de la couverture obligatoire de base gérée par chacune des branches du régime, compte non tenu des subventions de l'État ni des montants de contribution sociale de solidarité attribués au titre des exercices antérieurs ou à titre d'acomptes provisionnels ».
La branche maladie du régime des exploitants agricoles bénéficie d'une quote-part proportionnelle de 30,89 %, à la suite de la suppression de la compensation maladie en loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Depuis 2011, en application de ce même article, le solde du produit de la contribution est affecté au fonds de solidarité vieillesse. |
Le produit total de la C3S et de la CS3 additionnelle s'est élevé à 5,6 milliards d'euros en 2013 et a été réparti comme suit entre ses différents affectataires, le produit de la C3S additionnelle, 1 milliard d'euros, étant affecté au FSV :
Affectation du produit de la C3S pour l'exercice 2013
MSA - exploitants agricoles - maladie |
1 420 258 562,49 € |
RSI - assurance maladie |
715 094 880,83 € |
RSI - assurance vieillesse des professions artisanales |
846 664 052,29 € |
RSI - assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales |
595 198 707,66 € |
Régime d'assurance vieillesse complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics |
32 305 076,46 € |
Fonds de solidarité vieillesse |
976 921 425,06 € |
Source : Arrêté du 23 mai 2014 relatif à l'affectation définitive pour 2013 de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés instituée par l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale
La C3S est un impôt sur la production, déconnecté du bénéfice de l'entreprise. Comme le relève l'étude d'impact, « les caractéristiques de l'assiette de la C3S conduisent dans certains cas à des distorsions importantes entre la capacité contributive de l'entreprise et le montant dû ». Pesant sur les consommations intermédiaires, elle peut être acquittée plusieurs fois au cours d'un cycle de production. Ces différents éléments ont conduit à préconiser sa suppression dans le cadre des assises de la fiscalité des entreprises.
Le RSI étant le principal affectataire de la C3S pour l'équilibre de ses régimes de base, le présent projet de loi propose d'assurer l'équilibre de ces régimes en les intégrant, sur le plan financier, comme c'est le cas des régimes agricoles, avec le régime général.
Le 1° du paragraphe I procède à l'intégration financière des différentes branches du RSI avec les branches du régime général.
Il abroge à cette fin la section IV bis du chapitre IV du titre III du livre I du code de la sécurité sociale consacrée aux « relations financières entre le régime général et le régime des non-salariés agricoles » et procède à une nouvelle rédaction de la section IV dont l'intitulé « relations financières entre le régime général et les régimes spéciaux » est remplacé par l'intitulé « relations financières entre le régime général et les autres régimes ».
Le 1° du I propose une nouvelle rédaction de l'article 134-14-11-1, actuellement consacré à l'intégration financière de la branche maladie du régime des exploitants agricoles avec la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés.
Le I de l'article L. 134-14-11-1 prévoit l'intégration financière avec la Cnam :
- de façon nouvelle, de la branche « assurance maladie et maternité » du RSI ;
- comme c'est le cas depuis 2009 en application de la LFSS pour 2009, de la branche « assurance maladie, invalidité et maternité » des exploitants agricoles, à l'exception des produits et charges liées aux indemnités journalières en métropole et outre-mer.
Le II de l'article L. 134-14-11-1 prévoit l'intégration financière avec la Cnav :
- de façon nouvelle, des branches « assurance vieillesse des professions artisanales » et « assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales » du RSI ;
- comme c'était déjà le cas, du régime spécial de retraite des agents de chemins de fer secondaire d'intérêt général, des chemins de fer d'intérêt local et des tramways.
Le III de l'article L. 134-14-11-1 précise que les organismes du régime général assurent, comme c'est actuellement le cas, la gestion de ce dernier régime. Le IV renvoie à un décret pour l'application de l'article.
Le 5° du I est relatif à la gestion de la trésorerie des différentes branches du RSI. Il modifie l'article L. 611-19 relatif à la gestion de la trésorerie par la caisse nationale pour le compléter par un alinéa prévoyant que cette gestion est effectuée en lien avec l'Acoss dans le cadre d'une convention.
Le RSI n'est pas autorisé à recourir à l'emprunt pour couvrir ses besoins de trésorerie. Il reviendra donc à l'Acoss de mettre à la disposition du régime des ressources suffisantes pour couvrir ses besoins en trésorerie.
Le 6° du I modifie l'article L. 612-1 qui définit les produits de la branche maladie du RSI pour supprimer la référence à la C3S et lui substituer une dotation d'équilibre de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés.
Le 7° du I modifie de la même manière l'article L. 633-9 relatif aux ressources de la branche vieillesse du RSI. Il supprime la mention d'une contribution de l'État dont le montant est fixé par une loi de finances.
• Modalités d'affectation du produit
résiduel de la C3S
Le 2° du I modifie l'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale qui fixe la liste des recettes du FSV pour supprimer les références à la C3S et à la contribution additionnelle et leur substituer, dans un 4°, une référence à une fraction du produit de ces contributions.
Le 3° du I modifie l'article L. 241-2 qui définit la liste des ressources de la branche maladie du régime général en rétablissant un 4°, consacré au produit de la CS3S et de la C3S additionnelle.
Le 4° du I ajoute cette même référence à la liste des ressources affectées à la branche vieillesse du régime général, définies à l'article L. 241-3.
Le 8° du I procède à une nouvelle rédaction de l'article L. 651-2-1 relatif à l'affectation du produit de la contribution. Le produit de la C3S et de la C3S additionnelle est réparti de la manière suivante :
•
Création d'un abattement
d'assiette
Le 9° du I définit, à l'article L. 651-3, l'assiette de la contribution comme le chiffre d'affaires décrit à l'article L. 651-5 après un abattement d'assiette de 3,25 millions d'euros. Il supprime en conséquence dans l'article les références au seuil de 760 00 euros de chiffre d'affaires.
Le 10° du I supprime de la même manière à l'article L. 651-5 les références au seuil d'assujettissement.
De la même manière, le 11° du I modifie l'article L. 651-5-3 relatif à la déclaration pour substituer à la référence à l'abattement celle du seuil.
Ainsi que le souligne l'étude d'impact, l'abattement permet d'alléger le montant de la contribution acquittée par l'ensemble des redevables de 5 200 euros au maximum dès 2015 et d'exonérer les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur au montant de l'abattement. Près des deux-tiers des entreprises redevables devraient ainsi être exonérées dès 2015, soit la totalité des TPE et plus de la moitié des petites entreprises
Le paragraphe II modifie l'article L. 731-2 du code rural et de la pêche maritime qui définit les ressources du régime de protection sociale des non-salariés agricoles. Il supprime la précision de la quotité de la contribution affectée à la MSA et ajoute aux ressources une fraction de la contribution additionnelle.
Le paragraphe III fixe l'entrée en vigueur du dispositif au 1 er janvier 2015.
Le coût de la mesure pour la sécurité sociale en 2015, avant compensation, est d'un milliard d'euros. Pour l'État, la mesure devrait se traduire par une amélioration du résultat des sociétés avec des incidences fiscales.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté onze amendements à cet article, dont sept rédactionnels ou de précision.
A l'initiative de nos collègues Gérard Bapt et Jacques Bompard, afin de répondre aux inquiétudes en confortant les garanties apportées à l'autonomie du régime, elle a modifié l'article L. 134-11-1 pour préciser que « les dispositions du I du présent article ne peuvent en aucun cas porter atteinte aux droits définitivement constatés qu'ont les caisses du régime social des indépendants mentionnées à l'article L. 611-3 de gérer l'ensemble des branches et régimes complémentaires obligatoires de ce régime ». Cette rédaction est identique à celle du troisième alinéa de l'article L. 134-6 du code de la sécurité sociale qui prévoit, à compter du 1 er janvier 2014, l'intégration financière du régime des non-salariés agricoles avec le régime général dans les mêmes conditions que celles proposées pour l'intégration financière du RSI.
A l'initiative de François Brottes et plusieurs de ses collègues, elle a adopté un amendement tendant à l'exonération de la C3S de l'ensemble des coopératives agricoles et non plus seulement, ainsi que le prévoit l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale, de celles « qui ont pour objet exclusif d'assurer l'approvisionnement de leurs associés coopérateurs en leur procurant les produits, les équipements , les instruments et les animaux nécessaires à leurs exploitations agricoles et des sociétés coopératives agricoles ayant pour objet exclusif l'utilisation de matériels agricoles par les associés coopérateurs ».
En 2013, 841 coopératives agricoles et sociétés d'intérêt collectif agricoles étaient redevables de la C3S pour un montant global de 14,42 millions d'euros, soit un montant moyen de 17 146 euros.
A l'initiative de Gérard Bapt, elle a adopté un amendement prévoyant que la répartition de la C3S peut faire l'objet d'acomptes provisionnels, comme c'est le cas actuellement.
A l'initiative de Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, elle a adopté un amendement prévoyant un rapport au Parlement « détaillant l'impact de la suppression à l'horizon 2017 de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés sur le financement du régime social des indépendants ainsi que sur les conséquences de l'intégration au régime général des chefs d'entreprise indépendants (actifs et retraités), artisans, commerçants, industriels et professionnels libéraux et ayants droit, tant en matière de cotisations que de prestations ».
III - La position de la commission
Cet article constitue le second volet des engagements du pacte de responsabilité et sa traduction en faveur des entreprises et des travailleurs indépendants.
A l'initiative de votre rapporteur général, la commission a adopté un amendement révisant l'objet du rapport demandé par l'Assemblée nationale.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 4 - Compensation des exonérations, réductions ou abattements d'assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale figurant à l'annexe V du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014
Objet : cet article tend à rectifier le montant des crédits budgétaires et des recettes fiscales prévus par le projet de loi de finances initiale pour 2014 afin d'assurer le financement des dispositifs compensés d'exonérations, de réduction ou d'abattements d'assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale.
I - Le dispositif proposé
Un montant de 3,8 milliards d'euros avait été approuvé en loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 au titre des crédits budgétaires et des recettes fiscales destinés à financer la compensation de dispositifs ciblés d'exonérations, d'exemptions ou d'aménagements d'assiette et de taux de cotisations de sécurité sociale.
Les crédits budgétaires s'inscrivaient en hausse de 2,9 %, reflétant deux mouvements inverses :
- le recentrage de certains dispositifs d'exonérations ciblés dont les zones de revitalisation rurale (ZRR) avec une compensation en baisse de 30 millions d'euros et l'exonération de cotisations des employeurs outre-mer dont la compensation était en baisse de 90 millions d'euros ;
- le soutien accru à certains publics prioritaires : les apprentis (+ 123 millions d'euros) et les jeunes entreprises innovantes (+ 58 millions d'euros).
Le présent texte révise à la baisse, à hauteur de 100 millions d'euros, le montant prévu.
Il tire ainsi les conséquences d'une annulation de 127 millions d'euros, opérée par le projet de loi de finances rectificative pour 2014, de crédits du programme « accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » de la mission « travail et emploi ». Cette annulation est pour partie liée à la révision des hypothèses de compensation de l'exonération de cotisations sociales dont bénéficient les contrats d'apprentissage.
L'année 2013 a connu une baisse de plus de 8 % du nombre de contrats d'apprentissage et le début de l'année 2014 n'a pas redressé cette tendance qui semble se poursuivre dans une conjoncture difficile.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
III - La position de la commission
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
* 1 L'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale dispose que « sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire ».
* 2 17,15 au 1 er janvier 2016.
* 3 Harmonisation à 1,3 % au 1 er janvier 2015 pour des artisans et des industriels et commerçants en application du décret n° 2014-775 du 4 juillet 2014.
* 4 PASS 2014
* 5 Taux 2014 avant réforme, à définir par le RSI pour 2015.