III. L'ÉVOLUTION DES EMPLOIS DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
L'évolution des emplois est une question stratégique centrale pour ce qui concerne le financement de la présente mission.
En effet, les charges de personnel (titre 2) pèsent pour plus de 30,7 % parmi les crédits de la mission - et encore davantage si l'on exclut les dépenses absolument contraintes que sont les participations financières de la France aux organisations internationales (OI) dont elle est membre.
De plus, ces dépenses croissent (+ 2,8 %) alors même que le nombre d'emplois diminue et que les crédits sont sous forte contrainte - notamment du fait d'éléments difficilement contrôlables 1 ( * ) .
Pour la commodité du propos, l'analyse qui suit se situe au niveau du ministère des affaires étrangères (MAE) tout entier (c'est-à-dire de la présente mission ainsi que du programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement ») : d'une part, c'est à ce niveau que sont gérées les ressources humaines, d'autre part, de nombreux agents se partagent entre les différents programmes.
A. UNE DIMINUTION DES EMPLOIS QUI SE POURSUIVRA EN 2014
La participation du MAE à la stabilisation de l'emploi public se traduit, dans ce budget, par une diminution de 290 emplois en équivalents temps plein travaillés (ETPT) .
Le plafond d'emplois du ministère devrait ainsi passer de 14 798 ETPT en 2013 à 14 505 ETPT en 2014 2 ( * ) .
Cette diminution provient :
- d'une part, du schéma d'emplois, à hauteur de de - 190 ETPT (sous l'effet conjoint de l'effet report du schéma 2013 et de la part 2014 du schéma d'emplois de cette même année 2014, qui est réalisé pour l'essentiel à l'automne) ;
- d'autre part, d'une correction technique des marges sous plafond de - 100 ETPT.
Une telle évolution s'inscrit dans la planification de la période triennale 2013-2015 , au cours de laquelle le MAE doit perdre 600 emplois . Ce niveau tient compte des réductions d'effectifs déjà menées dans ce ministère depuis 2006.
B. LA NÉCESSAIRE POURSUITE DE LA RÉFLEXION SUR LES MISSIONS DES DIFFÉRENTS RÉSEAUX
Vos rapporteurs spéciaux ont déjà souligné par le passé que la diminution du nombre d'emplois du MAE devait se faire à la lumière d'une réflexion sur la présence des réseaux dépendant de ce ministère dans les différents pays du monde ainsi que sur les missions des postes 3 ( * ) .
Cela vaut notamment pour le réseau diplomatique stricto sensu ainsi que pour le réseau consulaire.
1. Le réseau diplomatique
Pour ce qui concerne le réseau diplomatique, colonne vertébrale politique du ministère à travers le monde, les efforts à venir doivent concerner deux types de postes très différents .
En premier lieu, les plus grandes ambassades seront mises à contribution , à hauteur de 5 à 10 % de leurs effectifs d'ici à fin 2015. A titre d'exemple, l'ambassade de France aux Etats-Unis pourrait ainsi voir ses effectifs diminuer d'environ 35 emplois sur 380 tandis que notre chancellerie londonienne pourrait « rendre » une dizaine de postes sur 180. Cependant, il s'agit là d'économies de gestion ou d'améliorations de processus, sans que le personnel « politique » ne soit significativement touché .
En second lieu et à l'inverse, treize postes dits « de présence diplomatique » 4 ( * ) devraient voir leur format très allégé . Mais, pour ces postes, ce sont bien les missions qui doivent être redéfinies, en se focalisant sur ce qui constitue la raison d'être de la présence française dans chacun de ces pays. Les missions prioritaires, le format retenu en termes d'emplois ainsi que le dispositif immobilier correspondant de chacune de ces ambassades figurent en annexe du présent rapport.
Vos rapporteurs spéciaux saluent cette démarche , tant il était impossible, année après année, de vouloir continuer à faire partout « la même chose avec moins de moyens ». Il est important de s'engager à présent dans une réflexion sur les missions de nos postes.
L'autre option, défendue par le passé par vos rapporteurs spéciaux (et évoquée par la Cour des comptes dans son référé du 13 février 2013 précité), aurait consisté à remettre en cause la notion même « d'universalité » 5 ( * ) de notre réseau. Elle n'a donc, pour l'heure, pas été retenue. Néanmoins, elle pourrait être remise sur la table si l'effort réclamé du MAE devait se poursuivre encore plusieurs années.
2. Le réseau consulaire
Le réseau consulaire , dont le premier rôle est d'assurer la protection des ressortissants français à l'étranger, de délivrer des titres d'identité et de voyage ainsi que des visas, a, lui aussi, été reformaté depuis 2006 6 ( * ) .
Là aussi, après l'étape de la simple rationalisation , notamment géographique, qui a déjà été menée en bonne partie, la poursuite de l'effort en termes d'emplois passerait nécessairement par des réflexions plus approfondies sur les missions du réseau lui-même et de chacun des postes.
Dans le rapport qu'elle vient de rendre à nos collègues de la commission des finances de l'Assemblée nationale en vertu des dispositions de l'article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la Cour des comptes rend hommage à l'action passée du ministère tout en évoquant des pistes pour l'avenir afin d'optimiser encore l'action et les moyens du réseau consulaire.
Vos rapporteurs spéciaux partagent dans une large mesure cette analyse.
Les évolutions futures pourraient ainsi concerner, en particulier :
- la réduction du nombre de statuts des consulats (il y a actuellement six statuts différents, conduisant à une situation difficilement lisible en dehors du MAE) ;
- une utilisation plus intensive des consuls honoraires, même si cela impliquerait nécessairement de leur offrir davantage de moyens afin qu'ils puissent exercer convenablement leurs missions. A cet égard, votre rapporteur spécial Richard Yung souhaite que des pistes pouvant paraître audacieuses soient poursuivies, comme la nomination en tant que consuls de directeurs d'Alliances françaises ou d'Ubifrance, voire, dans certains cas, de consuls généraux ou de consuls d'autres pays de l'Union européenne ;
- et un réel volontarisme en matière de mutualisation des fonctions consulaires avec nos voisins européens, a minima en termes de colocalisation des postes .
* 1 Dans son référé du 13 février 2013 sur l'évolution du réseau diplomatique depuis 2007, la Cour des comptes relève ainsi que les charges de personnel constituaient, fin 2011, le premier poste de dépenses du réseau, « en hausse de 20 % depuis 2007 malgré la baisse des effectifs », le coût unitaire par agent présent à l'étranger ayant « crû de 26 % » au cours de cette période. La Cour a souligné le poids de « facteurs s'imposant au ministère » comme l'impact de l'inflation et des taux de change sur les rémunérations à l'étranger, la revalorisation des cotisations sociales ou l'évolution de l'indemnité de résidence servie aux agents expatriés.
* 2 Pour la seule mission « Action extérieure de l'Etat », le plafond passera de 12 531 ETPT à 12 343 ETPT.
* 3 Rapport général n° 107 (2011-2012), Tome III, annexe 1 sur le projet de loi de finances pour 2012.
* 4 Les pays concernés sont Brunei, le Cap vert, l'Erythrée, la Guinée-Bissao, le Honduras, la Jamaïque, le Kirghizstan, le Libéria, le Népal, la Papouasie-Nouvelle Guinée, le Tadjikistan, Trinité-et-Tobago et la Zambie.
* 5 La Cour des comptes souligne ainsi que la France assure la représentation de ses intérêts auprès de 84 % des Etats admis au sein de l'Organisation des Nations Unies.
* 6 Voir le cas de la Belgique, développé dans l'annexe au présent rapport relative au contrôle budgétaire de votre rapporteur spécial Roland du Luart sur les opérations de regroupement immobilier à l'étranger.