N° 33
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 3 octobre 2013 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification du traité sur le commerce des armes (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE),
Par M. Daniel REINER,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; M. Pierre André, Mme Kalliopi Ango Ela, MM. Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Luc Carvounas, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini . |
Voir le(s) numéro(s) :
Sénat : |
837 (2012-2013) et 34 (2013-2014) |
Mesdames, Messieurs,
Après plusieurs années de négociation et deux conférences diplomatiques, le Traité sur le commerce des armes a été adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 2 avril 2013, à une très large majorité.
L'objectif affiché est d'établir une norme internationale commune la plus stricte possible, afin de réguler le transfert international d'armes classiques.
Ce Traité n'est pas un acte empêchant le commerce des armes, il cherche uniquement à l'encadrer, à instituer des normes internationales strictes car ce n'est pas un commerce anodin.
Ce Traité vise à protéger les populations civiles, à contribuer à la paix, à la stabilité internationale et à promouvoir l'action responsable des États parties dans le commerce des armes. En effet, de trop nombreuses personnes sont victimes chaque année de cette régulation insuffisante.
Signé par la France le 3 juin 2013, il est aujourd'hui soumis à l'approbation du Sénat.
I. LE COMMERCE DES ARMES : UN ACTE NON ANODIN QU'IL CONVIENT DE SURVEILLER
A. ÉTAT DES LIEUX DU COMMERCE DES ARMES 1 ( * )
1. La France est l'un des principaux exportateurs de matériel de défense
La France figure parmi les cinq premiers exportateurs de matériel de défense. En 2012, les prises de commandes se sont élevées à 4,8 milliards.
Sur la période 2008-2012, l'Asie-Pacifique devient la principale destination des exportations françaises avec 27,8% des prises de commandes. Le Moyen-Orient représente 21,4% des prises de commandes françaises et l'Amérique latine 20,9%. En 2012, la répartition géographique des prises de commandes françaises confirme l'importance prise par l'Asie-Pacifique (52%). L'Arabie saoudite demeure le premier client sur la période 2003-2012, néanmoins de nouveaux partenariats avec la Fédération de Malaisie ou le Brésil se concrétisent.
Sur la période 2006-2011, la France se maintenait au 4 ème rang des pays exportateurs, avec 8,6%, après les États-Unis (48%), Russie (12%) Royaume-Uni (10,8%) mais devant Israël (5%).
2. Un commerce mondial dynamique
On estime le montant total des dépenses militaires dans le monde, en 2012, à 1 244 milliards d'euros. La croissance du volume des exportations mondiales d'armements est estimée à environ 9%, le montant des prises de commandes atteignant 79,5 milliards d'euros.
Ce sont principalement les commandes de pays d'Asie, du Moyen-Orient et d'Amérique latine qui sont à l'origine de la croissance du marché. Les pays de la zone Asie ont vu leurs dépenses militaires doubler en 10 ans, et, pour la première fois, les pays européens de l'OTAN ont moins dépensé pour leur défense (285 Md$) que les pays d'Asie-Pacifique (300 Md$).
De même, la Russie a augmenté ses dépenses d'armements de 113% entre 2003 et 2012 et projette d'investir 600 milliards d'euros d'ici à 2022 dans les acquisitions de défense.
Les pays de l'Union européenne, quant à eux, ont réduit leurs budgets de défense. Ainsi, les États membres consacrent en moyenne 1,3% de leurs PIB à leur budget de la défense, établissant leur part dans les dépenses d'armement mondiales à 18%, en constance diminution. Ce sont la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Italie qui, au sein de l'Union européenne, ont les dépenses de défense les plus élevées, pourtant leur part dans le marché mondial est passé de 15% en 2000 à 10% en 2010. En matière d'exportations d'armements, les pays de l'Union européenne contribuent à hauteur de 30% de celles-ci.
Malgré cette baisse continue, les pays de l'Union européenne, les États-Unis et le Canada assurent encore aujourd'hui 60% des dépenses militaires mondiales, notamment par la part des États-Unis, qui pèsent pour 40%, malgré une baisse de 6 % de leur budget de défense en 2013.
Les pays importateurs, quant à eux, se répartissent en quatre grandes aires géographiques : le Proche et Moyen-Orient (32,9% des importations), l'Asie (24,6%), l'Europe (7,7%) et l'Amérique du sud (2,8%). Sur la période 2006-2012, ce sont l'Arabie saoudite, l'Inde et les Émirats arabes unis qui se hissent parmi les premiers importateurs. Les dix premiers pays importateurs représentent, sur la même période, 54% des acquisitions (Arabie saoudite, Inde, Émirats arabes unis, États-Unis, Australie, Royaume-Uni, Irak, Algérie, Corée du Sud, Israël).
3. Les populations civiles, premières victimes du commerce des armes
Au-delà du commerce licite des armements, le commerce illicite est aussi une réalité à prendre en compte. S'il est difficile d'apprécier exactement ce qu'il représente, les conséquences de cette activité non suffisamment encadrée se ressentent principalement sur les populations civiles.
Selon Amnesty International :
- Chaque minute, 1 personne est tuée par arme dans le monde, et 15 sont blessées ;
- 80% des victimes des conflits armés sont des civils ;
- 875 millions d'armes à feu sont en libre-circulation dans le monde.
D'après les Nations-Unies, 40 à 60 % du commerce des armes légères dans le monde est illicite à un moment ou à un autre.
* 1 L'ensemble de ce paragraphe a pour source le rapport au Parlement 2013 sur les exportations d'armement de la France