CHAPITRE IV
AUTRES DISPOSITIONS RENFORÇANT L'EFFICACITÉ
DES MOYENS DE LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

Article 9 bis
(art. 1844-5 du code civil)
Allongement du délai de contestation
de la transmission universelle de patrimoine

Le présent article est issu d'un amendement adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur, M. Yann Galut. Il vise à allonger le délai de contestation de la transmission universelle de patrimoine, en le faisant passer de trente à soixante jours.

En dehors des entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL), des exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) et des sociétés par actions simplifiée unipersonnelle (SASU), toute société doit comprendre une pluralité d'associés. Par conséquent, la réunion de toutes les parts ou actions entre les mains d'un seul associé, notamment à la suite d'une cession ou d'une transmission successorale, devrait entraîner sa dissolution de plein droit.

L'article 1844-5 du code civil apporte toutefois une atténuation au caractère systématique de la dissolution : l'associé unique dispose ainsi d'un an pour régulariser la situation (cession d'une partie de ses droits sociaux à une ou plusieurs personnes, augmentation de capital avec l'entrée de nouveaux associés, etc.). En outre, cet article prévoit que l'appartenance de l'usufruit de toutes les parts sociales à la même personne est sans conséquence sur l'existence de la société : l'associé unique a donc la possibilité de régulariser la situation en cédant la nue-propriété des droits dont il conserve l'usufruit.

Aux termes du troisième alinéa de l'article 1844-5 du code civil, la dissolution prononcée dans ces conditions entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique , sans qu'il y ait lieu à liquidation.

Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci. La transmission du patrimoine n'est réalisée et il n'y a disparition de la personne morale qu'à l'issue du délai d'opposition ou, le cas échéant, lorsque l'opposition a été rejetée en première instance ou que le remboursement des créances a été effectué ou les garanties constituées.

Ces dispositions ne sont toutefois pas applicables aux sociétés dont l'associé unique est une personne physique.

Selon le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le procédé de la transmission universelle du patrimoine est aujourd'hui massivement détourné par des sociétés ayant recours à la fraude fiscale et au travail illégal, afin d'échapper aux sanctions qu'elles encourent. En effet, lorsque l'information de la transmission de patrimoine parvient aux services fiscaux, le délai d'opposition est souvent déjà clos. Compte tenu de la perte de leur personnalité morale, les procédures classiques de recouvrement sont vouées à l'échec.

Afin d'améliorer l'effectivité du droit d'opposition des créanciers (parmi lesquels figurent les créanciers publics), le présent article propose d'allonger de 30 à 60 jours le délai d'opposition à la dissolution de la société.

Dans son rapport, M. Yann Galut, rapporteur de la commission des lois, souligne également tout l'intérêt que la publication de la dissolution puisse intervenir au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales , et pas dans tout autre journal d'annonces légal. Une telle modification devrait être apportée par voie réglementaire 40 ( * ) .

Votre commission a adopté l'article 9 bis sans modification .

Article 9 ter
(art. 241-3 et 242-6 du code de commerce)
Circonstance aggravante applicable au délit d'abus de biens sociaux

Le présent article est issu d'un amendement inséré par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur, M. Yann Galut. Il vise à créer une circonstance aggravante applicable au délit d'abus de biens sociaux.

Apparu dans les années 1930, dans un contexte de multiplication de scandales financiers rendant nécessaire une moralisation du droit des affaires, le délit d'abus de biens sociaux est le fait, pour les gérants, le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une entreprise, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement (articles L. 241-3, 4° et L. 242-6, 3° du code de commerce).

L'abus de biens sociaux est un délit puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.

Au soutien de son amendement, le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale attire l'attention sur le fait que l'abus de biens sociaux peut être le révélateur d'infractions de corruption ou de trafic d'influence, celles-ci étant commises grâce à des flux financiers enregistrés dans des comptabilités avec des justifications mensongères.

Or le caractère dissimulé de l'abus de biens sociaux rend ce délit difficile à caractériser, notamment lorsqu'il fait intervenir des structures juridiques, des personnes morales, des comptes bancaires ou des personnes physiques à l'étranger.

Le présent article tend ainsi à aggraver les peines encourues - qui passeraient à sept ans d'emprisonnement et 500 000 euros d'amende - en matière d'abus de biens sociaux lorsque l'infraction a été réalisée ou facilitée au moyen soit de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d'organismes établis à l'étranger, soit de l'interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable établis à l'étranger. Ces deux circonstances aggravantes se retrouvent également dans les circonstances aggravantes de la fraude fiscale (1° et 2°) créées par l'article 3 du présent projet de loi (voir supra ).

Corrélativement, le V de l'article 16 du présent projet de loi propose d'autoriser l'utilisation des « techniques spéciales d'enquête » - à l'exclusion de la garde à vue de quatre jours 41 ( * ) - pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement de ce nouveau délit d'abus de bien social aggravé.

Votre commission a adopté l'article 9 ter sans modification .

Article 9 quater
(art. 8 du code de procédure pénale)
Report du point de départ du délai de prescription pour les infractions dissimulées

Le présent article a été inséré dans le projet de loi par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur, M. Yann Galut. Il vise à prévoir le report du point de départ du délai de prescription en matière délictuelle, de façon similaire à ce que prévoit d'ores et déjà la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de délits occultes ou dissimulés.

1 - Un droit de la prescription complexe à appréhender

L'article 8 du code de procédure pénale prévoit qu'en matière délictuelle, la prescription de l'action publique est de trois années révolues - des exceptions étant notamment prévues s'agissant de certains délits commis contre des mineurs, pour lesquels le délai de prescription peut être de dix ou de vingt ans, commençant en outre à courir à partir de la majorité de la victime (voir encadré).

En outre, depuis l'entrée en vigueur de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure n°2011-467 du 14 mars 2011, cet article prévoit que le délai de prescription de l'action publique de certaines infractions commises à l'encontre d'une personne vulnérable ne court qu'à compter du jour où l'infraction apparaît à la victime dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique.

Les délais de prescription en matière pénale

En l'état du droit, le délai de prescription de l'action publique varie en fonction de la gravité de l'infraction reprochée : il est en principe de dix ans en matière de crimes (article 7 du code de procédure pénale), de trois ans pour les délits (article 8 du code de procédure pénale) et d'un an pour les contraventions (article 9 du code de procédure pénale).

Ce principe général connaît toutefois des exceptions :

- il existe d'une part en matière délictuelle des délais de prescription plus courts que le délai de droit commun de trois ans :

* ainsi, dans un souci de protection de la liberté de la presse, le législateur a fixé à trois mois le délai de prescription des délits de presse prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881, à l'exception de certains délits de presse jugés comme particulièrement graves (provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciale, contestation des crimes contre l'humanité, diffamation ou injure raciale), qui se prescrivent par un an. Le discrédit jeté sur un acte ou une décision juridictionnelle par voie de presse écrite ou audiovisuelle fait également l'objet d'un délai de prescription de trois mois (article 434-25 du code pénal) ;

* par ailleurs, afin de garantir la sécurité des résultats électoraux, le législateur a fixé à six mois le délai de prescription de certaines infractions au code électoral ;

- d'autre part, des délais plus longs ont été instaurés pour certaines infractions considérées comme causant un trouble particulièrement grave à l'ordre public :

* ainsi les crimes contre l'humanité sont-ils considérés comme imprescriptibles depuis la loi n°64-1236 du 26 décembre 1964 ;

* les crimes d'eugénisme et de clonage reproductif, introduits dans le code pénal aux articles 214-1 et suivants par la loi n°2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique, se prescrivent par trente ans - le délai de prescription de l'action publique, s'agissant du crime de clonage reproductif, ne commençant à courir, le cas échéant, qu'à partir de la majorité de l'enfant né de ce clonage ;

* les délais de prescription ont également été allongés pour certains crimes et délits commis contre les mineurs. Ainsi, le délai de prescription de l'action publique des crimes de meurtre ou d'assassinat précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie, de meurtre ou d'assassinat commis avec tortures ou actes de barbarie, de tortures ou d'actes de barbarie, des meurtres ou assassinats commis en état de récidive légale ainsi que des viols, lorsqu'ils sont commis contre des mineurs, a été porté à vingt ans. Il en est de même en cas de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, ainsi qu'en cas de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours, d'agression sexuelle aggravée et d'atteinte sexuelle sur un mineur de moins de quinze ans aggravée. Le délai de prescription des autres agressions sexuelles et atteintes sexuelles contre des mineurs, ainsi que des infractions de proxénétisme ou de recours à la prostitution d'un mineur a quant à lui été porté à dix ans. Dans tous les cas, ces délais ne commencent à courir qu'à partir de la majorité de la victime ;

* enfin, s'agissant des infractions à la législation sur les stupéfiants, du délit de participation à une association de malfaiteurs lorsqu'il a pour objet de préparer l'une de ces infractions, ainsi que des actes de terrorisme ainsi que des infractions connexes, le délai de prescription est de trente ans pour les crimes et de vingt ans pour les délits.

Source : rapport n° 249 (2011-2012) de M. Yves Détraigne, rapporteur de la proposition de loi modifiant le délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles, fait au nom de la commission des lois, janvier 2012.

2 - Les recommandations de la mission d'information de votre commission des lois sur les régimes de prescription en matière civile et pénale

Comme l'a souligné un rapport d'information de votre commission des lois daté de juin 2007 et consacré aux régimes de la prescription en matière civile et pénale 42 ( * ) , la complexité des régimes de prescription en matière pénale, du fait notamment d'une jurisprudence abondante et parfois incertaine de la Cour de cassation, soulève aujourd'hui une difficulté qui appellerait une réforme globale de ces régimes.

Afin de ne pas permettre que certaines infractions économiques et financières, du fait des conditions dans lesquelles elles sont commises, puissent rester impunies du fait de l'expiration du délai de prescription, la Cour de cassation a en effet considéré :

- qu'en matière d'infractions continues ou répétées , le délai de prescription ne commençait à courir qu'à compter du dernier acte délictueux (dernière remise de fonds en cas d'escroquerie, dernier acte du pacte de corruption, etc.) 43 ( * ) ;

- par ailleurs, lorsque l'infraction est occulte (ou « clandestine »), la Cour de cassation a jugé que le point de départ devait être fixé au jour où le délit est apparu ou aurait pu être objectivement constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique. Comme l'indique le rapport d'information de votre commission précité, cette jurisprudence ne concerne à ce jour qu'un nombre assez limité de délits : atteinte à l'intimité de la vie privée, mise en mémoire de données informatiques sans le consentement de l'intéressé 44 ( * ) , altération de preuves en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité, tromperie, publicité trompeuse ;

- enfin, lorsque l'infraction s'accompagne de manoeuvres de dissimulation , la jurisprudence admet également un report du point de départ du délai de prescription au moment où l'infraction est apparue et a pu être constatée : tel est notamment le cas en matière d'abus de confiance , depuis un arrêt du 4 janvier 1935, et d'abus de biens sociaux , depuis une jurisprudence de 1967.

La Cour de cassation a toutefois veillé à limiter l'extension de cette jurisprudence dont elle a, par exemple, refusé l'application au délit d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats à un marché public lorsque les opérations n'ont pas fait l'objet d'une dissimulation 45 ( * ) .

Cette jurisprudence, favorable à la poursuite et à la répression d'infractions difficiles à constater, fait toutefois l'objet de critiques, en raison des incertitudes juridiques qu'elle entraîne et le régime de quasi-imprescriptibilité qu'elle est susceptible d'entraîner.

Dans leur rapport précité, nos collègues ont formulé plusieurs propositions concernant les régimes de prescription en matière pénale. Appelant avec insistance l'attention sur la nécessité de conserver un dispositif de prescriptions cohérent , ils ont recommandé de consacrer dans la loi le principe dégagé par la jurisprudence de la Cour de cassation selon lequel le point de départ des infractions occultes ou dissimulées est reporté au jour où elles sont apparues dans les conditions permettant l'exercice de l'action publique . Constatant que ce principe avait été dégagé pour des infractions à caractère économique ou financier, ils ont proposé de l'étendre à d'autres domaines du droit pénal , et en particulier aux crimes dissimulés par leur auteur (en déguisant par exemple un meurtre en une mort naturelle ou en dissimulant le corps).

Corrélativement, ils ont estimé que la conservation et l'élargissement des champs d'application de la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d'infractions occultes ou dissimulées appelaient, en contrepartie, la détermination d'un délai butoir à compter de la commission des faits , afin de ne pas rendre imprescriptibles de facto certaines infractions. Nos collègues ont proposé de fixer la durée d'un tel délai butoir à dix ans en matière délictuelle et trente ans en matière criminelle 46 ( * ) .

3 - Dispositif proposé par le présent article

Introduit par voie d'amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le présent article reprend partiellement ces recommandations en proposant d'inscrire dans la loi la jurisprudence de la Cour de cassation relative au report du point de départ du délai de prescription d'une infraction dissimulée.

Constatant que plusieurs projets ou propositions de loi - notamment l'avant-projet de réforme du code de procédure pénale présenté en mars 2010 - issus de la précédente majorité avaient envisagé de remettre en cause, par voie législative, cette jurisprudence, il propose au contraire de lui donner une assise législative afin de la consacrer.

Votre rapporteur a pu constater au cours de ses auditions que ces dispositions appelaient des jugements contrastés de la part de ses interlocuteurs, certains s'inquiétant des effets d'une telle inscription dans la loi s'agissant de la poursuite d'infractions autres qu'économiques et financières, d'autres soulignant au contraire ces dispositions, gages à leurs yeux de sécurité juridique.

Au total, votre rapporteur, sensible également aux préconisations formulées par votre commission il y a quelques années, a jugé qu'il était pertinent de donner une assise législative à cette jurisprudence bien établie de la Cour de cassation.

Relevant toutefois que le champ des dispositions votées par les députés était limité aux seuls délits, il a proposé à votre commission d'étendre le dispositif aux crimes - comme le suggérait, du reste, le rapport précité de votre commission.

Au terme d'un long débat, votre commission a toutefois estimé qu'il était sans doute prématuré de procéder à une telle modification du droit de la prescription - qui dépasse largement le champ du présent projet de loi - sans en évaluer au préalable les conséquences.

Elle a adopté un amendement du Gouvernement tendant à supprimer cet article.

Votre commission a supprimé l'article 9 quater .

Article 9 quinquies
(art. L. 28-1 du code de procédure pénale)
Ajout de l'association de malfaiteurs à la liste des infractions
que le service national de la douane judiciaire
peut rechercher et constater

Le présent article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Yann Galut, complète la liste des infractions que les agents habilités du service national de la douane judiciaire peuvent rechercher et constater en y ajoutant l'association de malfaiteurs (article 450-1 du code de procédure pénale). Il est précisé que seules seraient concernées les associations de malfaiteurs en vue de préparer l'une des autres infractions énumérées par la liste 47 ( * ) .

Cette modification améliore les chances que la douane judiciaire puisse être saisie pour l'ensemble des infractions liées à un même dossier et puisse obtenir de meilleurs résultats d'enquête.

Votre commission a adopté l'article 9 quinquies sans modification .

Article 9 sexies
(art. 230-20 et 230-25 du code de procédure pénale)
Possibilité pour le service national de la douane judiciaire de recourir
aux logiciels de rapprochement judiciaire

L'article 9 sexies , issu de l'adoption par la commission des lois de l'Assemblée nationale d'un amendement de son rapporteur, a pour objet de permettre au service national de la douane judiciaire de recourir à des logiciels de rapprochement judiciaire, dont l'usage est pour le moment réservé aux services de la police nationale et de la gendarmerie nationale chargés d'une mission de police judiciaire.

Ces logiciels ont pour objet d'établir, parmi les données dont disposent déjà les services de police, un rapprochement des modes opératoires permettant de renforcer les capacités d'élucidation des affaires. Le régime juridique de ces fichiers a été fixé par l'article 14 de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (« LOPPSI »).

Il comporte les garanties suivantes :

- les données nominatives ne peuvent apparaître que si les recoupements se sont avérés positifs ;

- les données sont effacées à la clôture de l'enquête et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de trois ans après le dernier acte d'enregistrement ;

- la mise en oeuvre de ces logiciels est placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire (le procureur de la République, qui peut demander que les données à caractère personnel soient effacées, complétées ou rectifiées ainsi que le magistrat référent chargé de manière plus générale du contrôle de la mise en oeuvre des logiciels et de leur mise à jour). La CNIL exerce, par ailleurs, ses pouvoirs de contrôle ;

- les personnes susceptibles d'utiliser ces fichiers sont les agents des services de police judiciaire, à la condition qu'ils soient « individuellement désignés et spécialement habilités » , et ne peuvent recourir à ces logiciels que pour les seuls besoins des enquêtes dont ils sont saisis ;

- enfin ces logiciels ne peuvent être utilisés pour les besoins d'une enquête administrative.

Compte tenu du solide encadrement juridique de ces fichiers et de leur utilité certaine dans le cadre des enquêtes de la douane judiciaire, votre commission a approuvé cette disposition.

Votre commission a adopté l'article 9 sexies sans modification .

Article 9 septies A (nouveau)
(art. 180-1 du code de procédure pénale)
Possibilité de reprendre l'instruction après un refus consécutif à une CRPC

Votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur tendant à la création d'un article additionnel 9 septies A relatif à la possibilité de poursuivre une instruction à la suite d'un refus de la peine proposée dans le cadre d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

La loi n°2011-1862 du 13 décembre 2011 a étendu la possibilité pour le procureur de proposer une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) dans le cadre d'une information judiciaire (comme c'était déjà le cas dans le cadre d'une enquête préliminaire). Ce mode de traitement d'une affaire pénale a lieu sous le double contrôle du juge d'instruction (accord préalable du juge d'instruction) et du juge du siège (homologation de la CRPC par un juge du siège), et elle suppose que la personne mise en examen reconnaisse les faits. Cette procédure présente un intérêt certain dans des infractions financières où le prévenu est susceptible d'accepter de payer une forte amende dès lors que la procédure est plus courte .

Toutefois, en cas d'échec de la CRPC du fait de la personne poursuivie, qui, après avoir annoncé qu'elle reconnaissait les faits, refuse la peine proposée ou encore revient sur sa position, il résulte de l'article 180-1 du code de procédure pénale que le procureur n'a pas d'autre choix que de faire juger l'affaire par le tribunal correctionnel. Or, il est possible que les investigations n'aient pas été aussi approfondies qu'elles auraient pu l'être si le mis en examen n'avait pas annoncé qu'il plaiderait coupable.

Il convient donc de prévoir expressément la possibilité pour le procureur de renvoyer l'affaire au juge d'instruction , afin, s'il y a lieu, de compléter les investigations. Cette possibilité existe d'ailleurs déjà lorsque le « plaider-coupable » est proposé à une personne poursuivie dans le cadre d'une enquête préliminaire (art. 495-12 du code de procédure pénale).

Votre commission a adopté l'article 9 septies A ainsi rédigé .

Article 9 septies B (nouveau)
(art. 569 du code général des impôts)
Dispositif de lutte contre la contrefaçon en matière de tabacs

Le présent article a été inséré par votre commission des lois sur proposition de M. Claude Bérit-Débat et plusieurs de nos collègues. Il vise à renforcer la lutte contre la contrefaçon en matière de tabacs.

Au soutien de leur amendement, nos collègues rappellent que la régulation de la consommation de tabac constitue un enjeu de santé public majeur et revêt une dimension fiscale non négligeable. Cette régulation représente, enfin, un enjeu transfrontalier décisif.

Afin de lutter contre la fraude fiscale dans cette matière et de garantir un contrôle effectif des produits tabagiques, le présent article propose d'imposer un dispositif de marquage des produits.

Ce dernier s'appliquerait lors de la production, de l'importation, de l'introduction, de l'exportation, de l'expédition ou de la commercialisation des produits tabagiques. Chacun de ces produits serait revêtu d'une marque d'identification unique, sécurisée et indélébile en garantissant l'authentification et en assurant la traçabilité.

L'article 569 du code général des impôts serait modifié à cette fin.

Il préciserait que la réalisation de la marque d'identification, la mise en oeuvre du système d'authentification et de traçabilité et le traitement informatisé des informations prévues ci-dessus relèvent de la responsabilité de l'État qui ne pourrait en déléguer la mission qu'à un prestataire qualifié et indépendant.

Votre commission a adopté l'article 9 septies B ainsi rédigé .


* 40 Rapport précité, page 88.

* 41 C'est-à-dire la surveillance (article 706-80 du code de procédure pénale), l'infiltration (articles 706-81 à 706-87 du code de procédure pénale), les écoutes téléphoniques (article 706-95 du code de procédure pénale), les sonorisations et fixations d'images de certains lieux ou véhicules (articles 706-96 à 706-102 du code de procédure pénale), la captation de données informatiques (article 706-102-1 à 706-102-9 du code de procédure pénale) et la possibilité d'ordonner des mesures conservatoires (article 706-103 du code de procédure pénale).

* 42 « Pour un droit de la prescription moderne et cohérent », rapport d'information n° 338 (2006-2007) de MM. Jean-Jacques Hyest, Hugues Portelli et Richard Yung, fait au nom de la commission des lois et de la mission d'information de la commission des lois, déposé le 20 juin 2007.

* 43 Cass. Crim., 3 décembre 1963. Cass. Crim., 6 février 1969.

* 44 Cass. Crim., 4 mars 1997. Cass. Crim., 17 décembre 2002. Cass. Crim., 7 juillet 2005. Cass. Crim., 20 février 1986.

* 45 Cass. Crim., 5 et 19 mai 2004 : “Attendu que le délit d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public est une infraction instantanée qui se prescrit à compter du jour où les faits la consommant ont été commis ; que, toutefois, le délai de prescription de l'action publique ne commence à courir, lorsque les actes irréguliers ont été dissimulés ou accomplis de manière occulte, qu'à partir du jour où ils sont apparus et ont pu être constatés dans des conditions permettant l'exercice des poursuites”.

* 46 Rapport précité, pages 41-42.

* 47 Il s'agit des infractions suivantes : 1° Les infractions prévues par le code des douanes ; 2° Les infractions en matière de contributions indirectes, d'escroquerie sur la taxe sur la valeur ajoutée et de vols de biens culturels ; 3° Les infractions relatives à la protection des intérêts financiers de l'Union européenne ; 4° Les infractions prévues par les articles L. 2339-1 à L. 2339-11, L. 2344-7 et L. 2353-13 du code de la défense (trafic d'armes); 5° Les infractions prévues par les articles 324-1 à 324-9 du code pénal (blanchiment); 6° Les infractions prévues au code de la propriété intellectuelle ; 7° Les infractions prévues aux articles 56 et 57 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne ; 8° Les infractions connexes aux infractions visées aux 1° à 7°.

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