TITRE 4 : L'ACCORD DU 9 DÉCEMBRE 2009 :
UN ACCORD DE CONSOLIDATION

Comprenant 19 articles, cet accord vise à doter les centres culturels des deux pays d'un véritable statut tout en définissant leurs missions et leurs obligations vis-à-vis du droit local.

Au regard de l'Azerbaïdjan, le centre culturel français ne possédait aucun statut et n'existait pour les autorités azerbaïdjanaises que comme un service de l'Ambassade de France en Azerbaïdjan. Le fait que le conseiller de coopération et d'action culturelle soit également directeur dudit centre étayait cette situation. Restaient en suspens le statut des personnels expatriés (régime des visas et situation fiscale), celui des personnels locaux (situation fiscale) ainsi que la situation juridique et fiscale du centre qui dispense des cours payants de français langue étrangère.

La négociation d'un accord permet ainsi de reconnaître le centre culturel sur le plan juridique et son rôle dans l'action de coopération française en Azerbaïdjan. L'accord consacre en outre une pleine réciprocité entre les deux pays.

Son application par la partie azerbaïdjanaise permettra d'améliorer le fonctionnement du dispositif d'influence de la France, de simplifier les relations administratives du centre culturel avec les autorités locales, d'améliorer sa visibilité, d'insuffler un réel dynamisme et donc de susciter d'avantages de partenariats privés.

L'article premier entérine la création du centre culturel français de Bakou (intervenue en 2004) et reconnaît à l'Azerbaïdjan la capacité de création d'un centre équivalent à Paris. Les Parties s'efforcent de faciliter leur installation ( article 8 )

Il est rappelé (article 2) que les centres culturels sont placés sous l'autorité des Ambassades respectives et ont la personnalité juridique de l'État d'envoi . L'Institut français d'Azerbaïdjan n'a pas de personnalité juridique distincte et demeure un service de l'État français placé sous l'autorité de l'Ambassadeur de France. Il répond aux dispositions contenues dans le décret n° 76-832 du 24 août 1976 relatif à l'organisation financière de certains établissements ou organismes de diffusion culturelle dépendant du ministère des affaires étrangères et du ministère de la coopération. A ce titre, le directeur de l'IFA est chargé d'assurer le fonctionnement des divers services de son établissement sous la tutelle du ministère des affaires étrangères. Il recrute le personnel de droit local et exerce son autorité sur l'ensemble des personnels. Sur le plan du droit international, les SCAC-EAF ne disposant pas d'une personnalité juridique distincte de celle de l'Ambassade et relevant de l'État d'envoi, ne relèvent pas pour autant de la Convention de Vienne de 1961 et ne peuvent prétendre à quelques privilèges ou immunités (sauf le COCAC / directeur de l'établissement qui est considéré comme un diplomate).

Votre rapporteure s'est interrogée sur la nécessité qu'il y aurait, le cas échéant, de faire évoluer la rédaction de cet article dans l'hypothèse où la décision serait prise de rattacher l'Institut français de Bakou à « l'Institut Français », établissement public industriel et commercial, qui est devenu opérateur de l'action culturelle extérieure de la France aux termes de la loi du 27 juillet 2010. En effet, une expérimentation est actuellement en cours dans 12 pays, à l'issue de laquelle il sera, éventuellement, décidé d'opter pour son extension à l'ensemble du réseau public, les centres culturels devenant alors des services déconcentrés de l'établissement public national.

Elle a reçu du Ministère des affaires étrangères, la réponse suivante :

« En cas de rattachement futur de l'IFA à l'Institut français :

- l'article 1er de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 dispose que les bureaux de l'EPIC Institut français à l'étranger pourront faire partie des missions diplomatiques et que leur action s'exercera sous l'autorité du chef de mission diplomatique.

- l'article 20 du décret 2010-1695 du 30 décembre 2010  dispose que le bureau local est dirigé par un directeur qui conseille également l'ambassadeur en matière de coopération culturelle. Il dispose aussi  que le statut juridique du bureau local sera précisé par le Cahier des charges mentionné à l'article 11 de la loi du 27 juillet 2010.

- le cahier des charges signé le 2 février 2011 par le Secrétaire général du MAE et l'administrateur provisoire de l'Institut français prévoit que "l'Institut français est représenté localement par un bureau de représentation à l'étranger, ci-après dénommé "bureau local", dirigé par un directeur, qui a par ailleurs un rôle de conseiller de l'ambassadeur en matière de coopération culturelle. Le statut juridique de ce bureau au regard des autorités locales doit être défini au cas par cas (...). Partout où cela est possible, le bureau local peut être présenté auprès des autorités locales comme un service d'ambassade, afin de pouvoir bénéficier d'un régime d'exonération fiscale. Les postes expérimentateurs doivent s'inspirer autant que possible de la formule retenue localement par le réseau Ubifrance."

Dans cette hypothèse, les autorités françaises en Azerbaïdjan pourront donc faire valoir le maintien d'un lien organique et hiérarchique entre les services à Bakou de l'Institut Français et l'ambassade pour arguer de la compatibilité du nouveau statut avec l'article 2 de l'accord. De surcroit la forme d'établissement public industriel et commercial de l'Institut Français ne préjuge pas du but lucratif des activités qu'il organise, elle lui apporte une autonomie de gestion mais l'établissement reste un organe de l'État qui en assure la tutelle effective. Il peut donc être considérer effectivement que ce cadre demeurera celui de référence vis-à-vis des autorités locales quelles que soient les évolutions juridiques et administratives françaises qui résulteront des réformes en cours de l'action culturelle extérieure de la France.

L'article 3 définit la mission des centres culturels :

• mise en oeuvre de programmes de coopération dans le domaine des sciences et des techniques, de la culture et de l'information, des sciences humaines ;

• diffusion à un large public de connaissance sur l'histoire, les beaux-arts et la culture, le potentiel scientifique, culturel et économique de leur État respectif ;

• encouragement à la création et au développement des relations et de la coopération entre les organismes scientifiques, culturels, éducatifs et artistiques ;

• apprentissage de la langue française en Azerbaïdjan et de la langue azerbaïdjanaise en France ;

• développement des relations en utilisant les nouvelles technologies de l'information et par l'intermédiaire des organismes internationaux, nationaux et régionaux, gouvernementaux ou non-gouvernementaux,

• création et le développement de relations humaines, scientifiques et culturelles entre les villes et régions;

• échange d'informations et de matériel promotionnel dans le domaine de la culture, de l'éducation, des sciences et des techniques.

L'article 4 en décrit les activités :

• organisation de conférences, colloques et autres rencontres, spectacles, concerts et expositions ;

• présentation et projection de films et de documents audiovisuels ;

• publication et la diffusion de programmes d'information et de documents à caractère culturel, didactique, scientifique, quel qu'en soit le support matériel ;

• gestion d'une médiathèque

• invitation et accueil de chercheurs, conférenciers et artistes ;

• information sur les questions culturelle, scientifique et technique, socio-économique et politique ;

• organisation de cours de langue, d'ateliers et de programmes de formation continue ;

• organisation de clubs et associations d'étudiants ayant fait leurs études dans l'un des deux pays;

• toute activité permettant au public français de mieux connaître l'Azerbaïdjan et au public azerbaïdjanais de mieux connaître la France.

Comme il est indiqué dans l'étude d'impact, le périmètre des activités du Centre décrit dans l'accord dont la négociation a été engagée en 2004 est limité aux fonctions classiques. En conséquence, la politique d'attractivité n'y figure pas alors qu'elle fait partie de ses missions depuis la fusion SCAC / EAF entrée en vigueur au 1er janvier 2011. Cette lacune n'empêche le centre de développer ces activités ni de participer aux débats d'idées, à la diffusion des savoirs, à la coopération universitaire et à la coopération scientifique en lien avec les universités et les centres de recherche 27 ( * ) .

Il est précisé que « les centres exercent leurs activités dans le respect du droit interne de l'État d'accueil, et conformément aux dispositions du présent Accord ». Cette formulation classique dans ce type d'accord laisse toutefois une interrogation à la mesure de la distance entre le niveau de protection des libertés publiques dans les deux États concernés.

L'article 5 envisage la possibilité pour les centres d'organiser des activités à l'extérieur de leurs locaux et sur l'ensemble du territoire de l'État d'accueil . Cette formulation n'empêche pas un déploiement éventuel d'antennes plus permanentes dans d'autres villes importantes, mais sous la même structure juridique, ce qui est d'ailleurs conforme à la fusion des établissements culturels entreprise depuis plusieurs années par le MAE et qui s'achèvera en 2013.

Par l'article 6 les Parties garantissent la liberté d'accès du public aux activités organisées par les centres , dans leurs locaux ou à l'extérieur de leurs locaux et s'engagent à prendre les mesures nécessaires afin d'assurer la sécurité des bâtiments ainsi que celle des manifestations qu'ils organisent.

Il est affirmé à l'article 7 le caractère non lucratif de l'activité des centres , mais précisé toutefois qu'afin de couvrir leurs frais de fonctionnement, ceux-ci peuvent, dans le respect de la réglementation nationale de l'État d'accueil : vendre des périodiques, catalogues, affiches, programmes en relation directe avec les manifestations qu'ils organisent ; percevoir des droits d'entrée pour les manifestations qu'ils organisent, des droits d'inscription à leurs cours de langue et leurs autres activités, des droits pour les services d'information et le prêt des documents de la médiathèque. Ces précautions sont nécessaires compte tenu de la part croissante attendue de ces recettes dans le financement des centres culturels en raison de la réduction du montant des financements budgétaires comme la mis en évidence nos collègues Jean Besson et René Beaumont dans leur rapport pour avis sur le programme 185 28 ( * ) .

L'accord prévoit que les centres culturels sont des organismes à but non lucratif. Il empêcherait, entre autre, tout recours contre les activités de l'Institut, notamment d'opérateurs privés locaux qui pourraient dénoncer une concurrence déloyale. On soulignera toutefois le risque que pourrait faire courir à certaines activités des centres, l'interprétation de la réglementation nationale de l'État d'accueil ou l'existence de règles de droit international applicables sur son territoire à certaines activités, notamment en ce qui concerne l'appréciation des règles de la concurrence, si des acteurs privés exerçant des activités analogues à celles des centres en subissaient un préjudice et s'il était démontré que le caractère dérogatoire au droit commun dans l'application de certaines règles constitue un avantage excessif au regard de l'intérêt public attaché à ces activités.

L'accord permet aux centres de facturer des prestations à titre onéreux afin de couvrir leurs frais de fonctionnement 29 ( * ) .

Comme l'indique l'étude d'impact, négocié à partir de 2004 et signé en 2009, à une époque où les notions d'autofinancement et de cofinancements étaient moins développées, l'accord n'envisage que de manière incomplète la question des ressources propres. Ainsi l'article 7 n'évoque pas le vaste champ des ressources innovantes (crédits européens sur appels d'offres et jumelages, apports des collectivités territoriales françaises, programmes culturels européens, partenariats et mécénats locaux, etc.) destinés à couvrir, aussi, les frais de fonctionnement de l'IFA. Cette lacune n'empêche toutefois pas l'IFA d'y recourir.

Il permet également d'appliquer le principe selon lequel un établissement culturel n'exerce pas d'activité commerciale, et, à ce titre, n'est pas assujetti à la fiscalité locale.

Les articles 9, 10 et 14 traitent du régime fiscal des centres et de leur personnel . Celui-ci est réglé par la législation de l'État d'accueil, sous réserve des disposions pertinentes de la « Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Azerbaïdjan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune » signée le 20 décembre 2001 à Paris.

Les centres bénéficient, dans le respect du principe de réciprocité et de la réglementation nationale de l'État d'accueil, de l'exonération des droits de douane et autres droits et taxes dus au titre de l'importation concernant les biens mobiliers, matériels et fournitures nécessaires au fonctionnement administratif courant des centres ; les catalogues, affiches, programmes, livres, disques, matériels audiovisuels et didactiques quel qu'en soit le support matériel ; des films destinés à être visionnés ou projetés dans les locaux des centres ou dans les lieux extérieurs dans le cadre des manifestations organisées par eux. Les biens cités ci-dessus ne peuvent être prêtés, loués, mis en gage ou vendus que dans les conditions fixées par les autorités compétentes de l'État d'accueil conformément à la réglementation douanière et fiscale en vigueur dans cet État.

Des dispositions équivalentes permettent aux membres du personnel du centre culturel de l'autre Partie, ainsi qu'aux membres de leurs familles qui font partie de leurs ménages, d'importer en exonération de droits de douane leur mobilier et effets personnels ainsi que leur véhicule automobile en cours d'usage, dans un délai d'un an à partir de leur prise de fonctions, et de les réexporter à l'issue de leur missions au centre. Ces exonérations ne valent que pour la durée de leurs fonctions au sein des centres et les biens sont soumis aux mêmes règles d'usage que les précédentes.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux membres du personnel des centres culturels qui sont ressortissants de l'État d'accueil ou résidents permanents dans l'État d'accueil.

L'accord devra être communiqué à la Commission européenne et être conforme au règlement communautaire n° 1186/2009 du 16 novembre 2009 relatif à l'établissement du régime communautaire des franchises douanières en matière de franchise douanière.

Les articles 11, 12, 13, 15, et 16 abordent les questions relatives au personnel des centres culturels . Chacune des Parties nomme le personnel de son centre. Ce personnel peut être constitué de ressortissants de l'État d'envoi, de l'État d'accueil ou bien d'un État tiers. Dans ce dernier cas, la nomination doit être agréée avec les autorités de l'État d'accueil. Il est prévu une information mutuelle des Parties en matière de recrutement des personnels, prises et fins de fonctions.

Les directeurs des centres peuvent être membres du personnel diplomatique de la mission diplomatique de l'État d'envoi.

L'accord prévoit les règles applicables aux différentes catégories de personnels, tant en matière de législation du travail que de sécurité sociale. Il ne modifie en rien la prise en charge des traitements par l'État d'envoi des agents expatriés ou locaux.

Législation de l'État d'envoi

Législation de l'État d'accueil

Personnels des centres culturels ressortissants de l'État d'envoi (ou d'un autre État membre de l'Espace économique européen, lorsque la France est l'État d'envoi) séjournant de façon temporaire dans l'État d'accueil.

Personnels recrutés localement par les centres culturels dans l'État d'accueil, nationaux de cet État ou y résidant de façon permanente et régulière, sont régis par le droit local.

L'accord n'a pas d'impact sur le statut des personnels locaux et permet ainsi à l'établissement de se mettre en conformité avec la législation de l'État d'accueil.

Il précise enfin l'engagement de chaque Partie à accorder aux membres du personnel du centre culturel de l'autre Partie, ainsi qu'aux membres de leurs familles qui font partie de leurs ménages, des facilités de délivrance de visas et de titre de séjour et d'apporter son concours au personnel du centre ressortissant de l'État d'envoi ou au personnel ressortissant d'un État tiers dans la recherche de logement.

Enfin les articles 17 à 19 indiquent classiquement les modalités de modifications de l'accord, les modalités de règlement des différends éventuels dans son interprétation ou son application, enfin les modalités de notification de l'accomplissement des procédures internes requises pour son entrée en vigueur . L'Accord est conclu pour une durée de 5 ans renouvelable par tacite reconductions pour de nouvelles périodes de 5 années, à moins qu'une des Parties ait informé par écrit l'autre Partie de son intention de le dénoncer au moins 6 mois avant l'expiration de cette période.

La procédure de ratification a été menée à bien en Azerbaïdjan en mars 2011. Elle est en cours en France (approbation par le Conseil d'État et communication en Conseil des ministres en juillet 2012), son examen par notre Commission, avant d'être soumis à l'Assemblée nationale constitue la première étape de la partie parlementaire de ce processus.


* 27 L'Institut français  d'Azerbaïdjan  organise  ses propres conférences  (une dizaine pour les deux années réunies) et accueille celles de l'IFEA. En 2013, le rythme des conférences de l'Institut français d'Azerbaïdjan sera mensuel.

* 28 Sénat - Avis n° 150 (2012-2013) de MM. Jean BESSON et René BEAUMONT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 22 novembre 2012 : http://www.senat.fr/rap/a12-150-2/a12-150-2.html

* 29 Ces prestations (cours de langues, activités culturelles..) apportent actuellement environs 100 000 € de ressources propres au centre culturel français de Bakou.

Page mise à jour le

Partager cette page