b) Les résultats peu concluants des accords seniors
La création, par l'article 87 de la LFSS pour 2009, d'une obligation pour les entreprises ou groupes de plus de cinquante salariés de négocier un accord en faveur de l'emploi des salariés âgés constitue la première initiative visant à impliquer directement employeurs et salariés dans la définition d'une politique spécifiquement consacrée aux seniors. Elle s'accompagne d'une pénalité de 1 % de la masse salariale, exigible des entreprises ne s'y soumettant pas.
Défini aux articles L. 138-24 à L. 138-28 du code de la sécurité sociale, ce mécanisme repose sur la négociation triennale d'un accord qui doit contenir un objectif chiffré de maintien dans l'emploi de salariés de cinquante-cinq ans ou plus ou de recrutement de salariés d'au moins cinquante ans et traiter trois domaines d'action parmi les six définis à l'article R. 138-26 du même code. A défaut d'accord, l'employeur doit établir un plan d'action sur les mêmes bases. Par ailleurs, les entreprises de moins de 300 salariés n'ont pas à s'acquitter de la pénalité si elles sont couvertes par un accord de branche étendu.
Enfin, une procédure de rescrit permet à toute entreprise de soumettre à l'administration l'accord conclu en son sein ou le plan d'action qu'elle a élaboré afin d'établir s'il est conforme aux obligations posées par la loi. En cas de réponse positive dans les trois mois, le silence de l'administration passé ce délai valant accord, celle-ci est opposable aux Urssaf pour démontrer que la pénalité n'a pas à être versée.
Applicable à partir du 1 er janvier 2010 pour les entreprises de plus de 300 salariés et du 1 er avril suivant pour celles en employant de 50 à 300, cette sanction a joué son rôle puisque la très grande majorité des entreprises se sont mises en conformité avec la loi, le deuxième semestre 2009 marquant une nette accélération du dialogue social.
Nombre d'accords d'entreprise et de plans d'action sur
l'emploi
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Période de signature des textes |
Plans d'action |
Accords d'entreprise |
Total |
Pénalités recouvrées |
Du 1
er
juin
|
15 542 |
6 817 |
22 359 |
/ |
Du 1
er
janvier
|
7 545 |
1 870 |
9 415 |
7 millions d'euros |
Du 1
er
janvier
|
397 |
211 |
608 |
2,2 millions d'euros |
Total |
23 484 |
8 898 |
32 382 |
9,2 millions d'euros |
Source : Dares
Au total, selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, 34 200 accords et plans d'action ont été déposés par les entreprises ainsi que quatre-vingt-dix accords de branche représentant près de quatre cents branches professionnelles. Ils couvrent 7,3 millions de salariés, ce qui représente plus de 80 % des salariés des entreprises soumises à cette obligation. Les plans d'action représentent deux tiers de ce total.
Sur un plan quantitatif, il est indéniable que cette négociation sur l'emploi des seniors a été un succès et a permis aux entreprises et aux branches de prendre conscience de l'importance de cette question pour leur développement. En revanche, le bilan qualitatif est plus mitigé.
Ainsi, l'objectif de maintien dans l'emploi a été privilégié dans 85 % des cas au détriment du recrutement des seniors. Les domaines d'action choisis sont majoritairement ceux concernant le développement des compétences ou l'anticipation des carrières, les questions de prévention de la pénibilité et de transmission des savoirs, plus complexes à mettre en oeuvre, étant souvent ignorées. De plus, la Dares estimait en 2011 31 ( * ) que la moitié des entreprises de 50 à 300 salariés étaient, grâce à un accord de branche, exonérées de l'obligation de négocier elles-mêmes.
Comme l'explique l'étude d'impact, les mesures prévues par les accords ou plans d'action étaient souvent formelles et sans lien avec les réalités spécifiques des entreprises. Toute réflexion sur la GPEC ou l'évolution des emplois dans l'entreprise était le plus souvent absente. Il est donc regrettable que les entreprises ne se soient pas plus appropriées ce dispositif, qu'elles ne l'aient perçu que sous l'angle de la sanction et non sous celui d'une opportunité d'améliorer la gestion de leurs ressources humaines et qu'il soit aujourd'hui difficile d'en faire l'évaluation complète.
Alors que la première génération d'accords arrivait à expiration, trois ans après leur signature, à l'automne 2012 et au début de l'année 2013, une circulaire du 2 octobre 2012 32 ( * ) a suspendu l'application de la pénalité dès lors que les entreprises avaient rempli leurs obligations au 4 septembre 2012. Dans l'attente du remplacement des accords seniors par la négociation sur le contrat de génération, l'administration a jugé inutile que les entreprises débutent des négociations sur la base d'une disposition appelée à disparaître sous peu.
* 31 Source : Dares, Emploi des seniors : synthèse des principales données sur l'emploi des seniors, Document d'études n° 164, septembre 2011.
* 32 Circulaire interministérielle DSS/DGT/DGEFP/SASFL n° 2012/17 du 2 octobre 2012.