ARTICLE 18 ter (nouveau) (Art. 575 E bis du code général des impôts) : Mesures relatives à la fiscalité des tabacs en Corse
Commentaire : le présent article propose d'adapter la fiscalité du tabac en Corse dans un objectif de simplification, de clarification et de mise en conformité avec le droit communautaire.
I. LE DROIT EXISTANT
A. L'ASSIETTE DES IMPOSITIONS SUR LES PRODUITS DE TABACS
La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et le droit de consommation des produits de tabacs ont pour assiette le prix de vente de ceux-ci tel qu'homologué chaque année par un arrêté du ministre chargé du budget . Un arrêté global, entrant en vigueur au début du mois de janvier, homologue l'intégralité des prix des produits du tabac commercialisés en France métropolitaine, à l'exclusion des départements d'outre-mer. En cours d'année, les nouveaux produits, les produits retirés et les modifications de prix sont repris en trois arrêtés trimestriels. Ils sont tous publiés au Journal Officiel de la République Française (JORF). Le dernier arrêté remonte au 13 septembre 2012.
Pour les produits de tabac importés soumis à droit de douane, le montant acquitté au titre de ceux-ci est, en application de l'article 575 B du code général des impôts (CGI), déduit du prix de vente au détail pour le calcul du droit de consommation 253 ( * ) .
En pratique , les quatre fabricants de produits de tabac opérant sur le marché français (Philip Morris, Imperial Tobacco qui a racheté Altadis ex-SEITA, Japan Tobacco et British-American Tobacco) adressent à la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) les prix de ceux-ci. Ces prix sont librement déterminés dans la limite toutefois de l'article 572 du CGI. Cet article dispose que ce prix « ne peut toutefois être homologué s'il est inférieur à celui obtenu en appliquant, au prix moyen de ces produits, un pourcentage » fixé à 95 % par le décret n° 2004-975 du 13 septembre 2004.
Au total, l'homologation, de pure forme, a pour seul objet de garantir que les produits de tabac seront vendus au même prix sur l'ensemble du territoire national (sous réserve de dispositions particulières à la Corse et aux départements d'outre-mer).
S'agissant des produits de tabacs, la fiscalité et son produit présentent la caractéristique d'être indirectement déterminée par les fabricants . En effet, c'est in fine par rapport au prix de vente décidé par ceux-ci, dans les limites de l'article 572 précité du CGI, que les différents taux du droit de consommation sont calculés et que la TVA s'applique.
En effet, les taux de droit de consommation et de TVA s'appliquent « à rebours » ou « en dedans » , à partir du prix toute taxe comprise (TTC), et non, comme c'est normalement le cas, à partir du prix hors taxe (HT), ou « en dehors », des produits concernés.
Cependant, la fiscalité influence directement le prix des produits de tabacs puisque l'Etat est en mesure, par l'utilisation des divers instruments fiscaux ( cf . infra ), de renchérir les prix afin d'atteindre des objectifs de santé publique. L'Etat interagit donc avec les fabricants afin de les inciter à augmenter « d'eux-mêmes » leur prix, sous la menace permanente d'une augmentation de la fiscalité en cas de refus. Cette interaction est d'autant plus facilitée que le nombre de fabricants est réduit. Au total, la liberté de détermination des prix des produits de tabacs est ainsi en fait très encadrée.
B. LA TVA SUR LES PRODUITS DE TABACS
La TVA s'applique aux produits de tabac au taux normal de 19,6 % .
Cependant, comme il a été indiqué supra , la TVA ne s'applique pas sur le prix HT des produits de tabacs mais « à rebours » du prix de vente homologué précédemment mentionné, soit à un taux de 16,388 % de celui-ci.
Ainsi par exemple, pour un paquet de 20 cigarettes vendu à 5,70 euros, la TVA s'appliquera « en dedans » de ce prix à un taux de 16,3856 %, soit 0,93 euro 254 ( * ) .
Le marché du tabac en France étant estimé à environ 18 milliards d'euros, la TVA brute collectée par les fournisseurs de tabacs rapporte à l'Etat 3,5 milliards d'euros 255 ( * ) , affectés en quasi-totalité à la sécurité sociale.
C. LE DROIT DE CONSOMMATION SUR LES TABACS
1. Le taux applicable aux produits de tabac autres que les cigarettes
En application de l'article 575 du CGI, les tabacs manufacturés vendus dans les départements en France continentale, comme les tabacs ainsi que le papier à rouler les cigarettes qui y sont importés, sont soumis à un droit de consommation. S'agissant des tabacs manufacturés autres que les cigarettes, le droit de consommation qui leur est applicable se calcule sur la base de leur prix de vente au détail, sous réserve d'un minimum de perception fixé par mille unités ou par mille grammes (cf. infra ).
Le taux de ce droit de consommation varie selon les produits de tabacs :
- pour les cigares et cigarillos : 27,57 % ;
- pour les tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes : 58,57 % ;
- pour les autres tabacs à fumer 256 ( * ) : 52,42 % ;
- pour les tabacs à priser : 45,57 % ;
- pour les tabacs à mâcher : 32,17 %.
Une fois le prix de vente des produits concernés homologué, les taux ci-dessus s'appliquent « en dedans » de celui-ci.
2. Le taux applicable aux cigarettes
Simples pour les produits de tabacs autres que les cigarettes, les règles fiscales se complexifient pour ces dernières, obligeant à distinguer entre celles applicables à la « classe de prix de référence » (CPR) et les autres.
a) La classe de prix de référence (CPR)
Les notions de CPR et de « prix moyen pondéré » (PMP) ont été introduites à l'article 575 du CGI par l'article 73 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 .
La CPR remplace la « classe de prix la plus demandée » (CPPD). Elle correspond au PMP exprimé pour 1 000 cigarettes et arrondi à la demi-dizaine d'euros immédiatement supérieure.
Le PMP correspond au prix obtenu en divisant la valeur de toutes les cigarettes mises à la consommation, pendant une année civile, par la quantité totale de ces mêmes cigarettes.
Il est déterminé un PMP et une CPR pour les cigarettes vendues en France continentale et pour celles vendues en Corse ( cf . infra ).
Le PMP et la CPR entrent en vigueur le 1 er janvier et sont fixés par arrêté du ministre chargé du budget au plus tard le 31 janvier de chaque année. La CPR est déterminée pour toute l'année civile. Elle n'est pas modifiée pendant l'année, y compris en cas de variation des prix homologués de vente au détail.
Pour 2012 , le PMP et la CPR en France continental sont les suivants, en application de l'arrêté du 26 janvier 2012 :
- le PMP s'élève à 284,81 euros pour 1 000 unités et à 5,70 euros pour 20 unités ;
- la CPR s'établit à 285 euros pour 1 000 unités et à 5,70 euros pour 20 unités.
Pour les cigarettes de la CPR, le montant du droit de consommation est calculé en appliquant au prix de vente au détail le taux global du droit de consommation fixé à 64,25 % pour la France continentale.
Ainsi, un paquet de 20 cigarettes appartenant à la CPR supporte en France continentale un montant de droit de consommation de 3,66 euros .
b) Les cigarettes n'appartenant pas à la CPR
Pour l'année 2012, les cigarettes n'appartenant pas à la CPR correspondent à celles vendues à un prix différent de 5,70 euros le paquet de 20.
Le droit de consommation se décompose alors en une part spécifique et une part proportionnelle.
i) La part spécifique
La part spécifique correspond à un montant exprimé en euros pour 1 000 cigarettes. Ce montant est identique quel que soit le prix de vente des cigarettes .
La part spécifique est fixée à 12 % (« taux spécifique ») de la charge fiscale totale afférente aux cigarettes de la CPR, en application de l'article 67 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011.
Cette charge fiscale totale applicable aux cigarettes de la CPR s'élève à 80,638 % . Elle correspond à l'addition du taux de droit de consommation (64,25 %) et du taux de TVA (16,388 %).
Le montant de la part spécifique se monte donc à 27,58 euros pour 1 000 cigarettes. Ce montant résulte du calcul suivant :
285 euros (prix de 1 000 cigarettes de la CPR) x 80,638 % x 12 % = 27,5782 arrondis à 27,58 euros.
ii) La part proportionnelle
La part proportionnelle est égale à la différence entre le montant du droit de consommation applicable à la cigarette de la CPR et la part spécifique, rapportée au prix de vente de la cigarette de la CPR.
Ainsi, la part proportionnelle du droit de consommation s'élève à 54,57 % .
La détermination de la part proportionnelle résulte en effet du calcul suivant :
(285 x 64,25 %) - 27,58 x100 = 54,57 %
285
iii) La taxation en deux exemples
Pour 1 000 cigarettes vendues à 290 euros , le droit de consommation supporté se monte à 185,83 euros. Ce montant se décompose en une part spécifique de 27,58 euros et une part proportionnelle de 158,25 euros (290 x 54,57 %).
Pour 1 000 cigarettes vendues à 295 euros , le droit de consommation supporté se monte à 188,56 euros. Ce montant se décompose en une part spécifique de 27,58 euros et une part proportionnelle de 160,98 euros (295 x 54,57 %).
3. Le minimum de perception
En application de l'article 575 A du CGI , le minimum de perception est fixé à 115 euros pour les tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes, à 60 euros pour les autres tabacs à fumer et à 89 euros pour les cigares. Il n'y a pas de minimum de perception sur les tabacs à priser et à mâcher.
Pour les cigarettes, le minimum de perception est fixé à 183 euros pour mille unités, soit 3,66 euros par paquet de 20 .
Par conséquent, les cigarettes et les autres produits de tabac supportent soit le droit de consommation, soit le minimum de perception si le montant du droit de consommation lui est inférieur.
Il est possible de déterminer si un produit est soumis au droit de consommation ou au minimum de perception selon qu'il est vendu au dessus ou en dessous d'un prix appelé « prix d'entrée en application du minimum de perception » . S'il est vendu en dessous de ce prix, c'est le minimum de perception qui s'applique.
La détermination de ce « prix d'entrée » se calcule comme suit pour les cigarettes (pour un paquet de 20) :
Prix d'entrée = [(183 -27,5782) / (1000 x 54,57 %)] x 20 = 5,36 euros
Par conséquent, l'ensemble des paquets de cigarettes vendus à un prix inférieur à 5,36 euros se voit appliquer le minimum de perception.
Dans le cas de produits pour lesquels il n'existe pas de prix de vente homologué ( cas des produits en situation irrégulière ) et à défaut de connaître le prix de vente réel, le minimum de perception est appliqué.
L'article 73 de la loi précitée de finances rectificative pour 2010 a instauré un minimum de perception majoré de 10 % pour les cigarettes vendues à un prix inférieur à 94 % de la CPR, soit en 2012 en dessous de 5,36 euros le paquet de 20.
Dans le cas où la CPR est inférieure de plus de 3 % à la moyenne des prix homologués (cas d'une hausse générale des prix intervenant en cours d'année), un arrêté du ministre du budget peut rendre le minimum de perception majoré applicable aux cigarettes vendues à un prix inférieur à un taux différent de celui prévu de 94 % de la CPR. Ce taux peut dans ce cas être augmenté jusqu'à 110 % de la CPR de l'année en cours.
Le ministre chargé du budget n'a jamais utilisé cette possibilité de relèvement des minima de perception, mais le simple fait qu'elle existe pèse naturellement dans les négociations entre l'administration des douanes et les fabricants et distributeurs de cigarettes.
4. Produit et affectation
En 2011, le produit du droit de consommation sur les produits de tabacs s'est élevé à environ 10 milliards d'euros, affecté en totalité aux régimes de sécurité sociale .
D. LES RÈGLES SPÉCIFIQUES À LA CORSE
Le droit de consommation applicable en Corse diffère à la fois dans son assiette et dans son taux de celui applicable sur le continent.
Les tabacs vendus en Corse figurent dans les arrêtés d'homologation ( cf . supra ), mais leur prix de vente est inférieur à ceux du continent .
Cependant, en application de l'article 575 E bis du CGI, le prix de vente au détail appliqué aux cigarettes dans les départements de Corse est au moins égal à 75 % des prix de vente continentaux des mêmes produits . Ainsi une cigarette vendue en France continentale depuis le 17 octobre 2011 à 6,20 euros le paquet de 20 est vendue en Corse au prix de 4,65 euros.
Pour les autres produits de tabac , il convient de distinguer entre :
- les tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes, les autres tabacs à fumer, les tabacs à priser et les tabacs à mâcher, dont le prix de vente au détail est au moins égal aux deux tiers des prix continentaux des mêmes produits ;
- les cigares et les cigarillos, dont le prix de vente au détail est au moins égal à 85 % des prix continentaux des mêmes produits.
Par conséquent, la fiscalité s'appliquant pour les produits de tabac « à rebours » du prix de vente au détail, tant l'assiette de la TVA que celle du droit de consommation sont, en Corse, réduites par rapport à celles en vigueur en France continentale .
S'agissant des taux du droit de consommation , ceux-ci sont différents selon qu'il s'agit de la cigarette de la CPR ou une autre cigarette, mais toujours inférieurs à ceux en vigueur en France continentale :
- pour la cigarette de la CPR, le taux du droit de consommation s'élève à 45 % du prix de vente au détail (contre 64,25 % sur le continent) ;
- pour les autres cigarettes, le taux de la part spécifique est fixé à 6,5 % de la charge fiscale totale afférente aux cigarettes de la CPR (contre 12 % sur le continent) et la part proportionnelle à 41,01 % (contre 54,57 % sur le continent).
Pour les autres produits de tabac, les taux sont fixés comme suit, entre deux et trois fois inférieurs aux taux applicables sur le continent :
- pour les cigares et cigarillos : 10 % ;
- pour les tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes : 27 % ;
- pour les autres tabacs à fumer : 22 % ;
- pour les tabacs à priser : 15 % ;
- pour les tabacs à mâcher : 13 %.
Par ailleurs, le minimum de perception ne s'applique pas en Corse .
Enfin, le produit du droit de consommation est affecté au financement de travaux de mise en valeur de la Corse et versé à concurrence d'un quart au budget des départements de la Corse et de trois quarts au budget de la collectivité territoriale de Corse .
E. LES ÉVOLUTIONS PRÉVUES PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (PLFFS) POUR 2013
Adopté en lecture définitive par l'Assemblée nationale le 3 décembre 2012 et faisant l'objet de deux saisines du Conseil constitutionnel en application de l'article 61 alinéa 2 de la Constitution 257 ( * ) , le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 prévoit plusieurs évolutions de la fiscalité des tabacs.
En particulier, la nouvelle rédaction proposée pour l'article 575 du CGI a pour conséquence que le droit de consommation sur les tabacs comportera désormais, pour tous les produits :
- une part spécifique par unité de produit ou de poids ;
- une part proportionnelle au prix de vente au détail.
Par ailleurs, la nouvelle rédaction proposée pour l'article 575 A du CGI fixe les taux normaux à la hausse .
Pour de plus amples développements, votre rapporteur général renvoie au rapport pour avis de notre collègue Jean-Pierre Caffet 258 ( * ) .
II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du Gouvernement, un amendement portant article additionnel adaptant la fiscalité du tabac en Corse dans un objectif de simplification, de clarification et de mise en conformité avec le droit communautaire .
Pour les différents groupes de produits de tabacs, cet article fixe comme suit le taux normal et le taux spécifique applicables en Corse, à compter du 1 er janvier 2013.
Taux du droit de consommation à compter du 1 er janvier 2013
(en %)
Taux normal |
Taux spécifique |
|
Cigarettes |
45 |
10 |
Cigares et cigarillos |
10 |
5 |
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
27 |
15 |
Autres tabacs à fumer |
22 |
0 |
Tabacs à priser |
15 |
0 |
Tabacs à mâcher |
13 |
0 |
Par ailleurs, à compter du 1 er juillet 2013 , ces mêmes taux seront fixés aux valeurs suivantes.
Taux du droit de consommation à compter du 1 er juillet 2013
(en %)
Taux normal |
Taux spécifique |
|
Cigarettes |
50 |
10 |
Cigares et cigarillos |
15 |
5 |
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
30 |
15 |
Autres tabacs à fumer |
25 |
0 |
Tabacs à priser |
20 |
0 |
Tabacs à mâcher |
15 |
0 |
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. L'ALIGNEMENT DE LA FISCALITÉ EN CORSE AVEC CELLE QUI SERA APPLIQUÉE SUR LE CONTINENT
Jusqu'au 30 juin 2013, le taux normal ne variera pour aucun groupe de produits de tabacs en Corse.
En revanche, un taux spécifique est instauré à compter du 1 er janvier 2013 pour les produits autres que les cigarettes. La situation en Corse connaîtra donc la même évolution que celle attendue sur le continent une fois promulgué le PLFSS pour 2013.
Sur le continent comme en Corse, une fiscalité dite « mixte » (c'est-à-dire combinant un taux normal et un taux spécifique) sera donc en vigueur à partir de 2013.
L'introduction de cette fiscalité mixte ne devrait avoir aucun effet sur les prix de vente , en dépit d'une légère surfiscalisation des cigarettes d'entrée de gamme dont le prix de vente public (PVP) sera inférieur à la CPR. En pratique, les cigarettes d'entrée de gamme (vendues à 6,10 euros sur le continent) seront vendues à 4,60 euros et, la CPR en Corse étant attendue à 4,70 euros, elles seront fiscalisées à 45,22 %, soit un taux légèrement supérieur au taux normal de 45 %.
B. LA HAUSSE DU DROIT DE CONSOMMATION
1. Vers la fin du régime fiscal dérogatoire actuellement en vigueur en Corse ?
A compter du 1 er juillet 2013, alors que les taux spécifiques resteront inchangés, les taux normaux augmenteront pour tous les groupes de produits de tabacs en Corse.
Pour la taxation des tabacs manufacturés, les départements de Corse bénéficient d'un régime fiscal dérogatoire par rapport à celui applicable aux mêmes produits sur le territoire continental ( cf. supra ).
En 1992, lors de l'adoption des directives concernant le rapprochement des accises communautaires, la France a été autorisée à maintenir ce régime dérogatoire. La directive 2003/117/CE du Conseil du 5 décembre 2003 a prorogé au 31 décembre 2009 cette dérogation et a autorisé la France à appliquer aux tabacs mis à la consommation en Corse un taux d'accise réduit.
Compte tenu des spécificités économiques et sociales de la Corse, il a été demandé et obtenu une reconduction de cette dérogation dans le cadre des négociations, engagées à l'automne 2008, sur les directives dites « tabacs ». Ainsi, la directive 2010/12/UE du conseil du 16 février 2010 permet à la France d'appliquer aux tabacs vendus en Corse un taux d'accise réduit jusqu'au 31 décembre 2015 .
Un alignement progressif , avec des étapes intermédiaires, de la fiscalité corse avec celle du continent, d'ici au 1 er janvier 2016, est toutefois imposé par le droit communautaire.
Un premier palier de cette convergence doit être franchi en 2013 et le taux normal est donc porté, dès cette année, à 50 %. Cette augmentation prendra effet au 1 er juillet, afin qu'elle coïncide avec la hausse nationale du droit de consommation prévue dans le PLFSS pour 2013.
Le Gouvernement indique qu'il n'a pas été possible d'obtenir de la Commission européenne un report de cette première étape de convergence. Il souligne néanmoins qu'il continuera d'oeuvrer auprès des instances communautaires afin de les convaincre de la pertinence d'un régime fiscal spécifique pour les tabacs en Corse .
2. La hausse du taux normal en Corse : des effets incertains
Indépendamment d'une hausse susceptible d'intervenir (selon les informations communiquées à votre rapporteur général par la DGDDI) sur le continent au 1 er juillet 2013 à l'initiative des fabricants, les effets de la hausse du taux normal en Corse à cette même date ne sont pas connus .
En effet, en dépit d'un abaissement de leur revenu unitaire (qui est quasiment le double de celui du continent) , les industriels (principalement Philip Morris et Imperial Tobacco) pourront choisir de maintenir leurs prix inchangés pour conserver leurs volumes, particulièrement importants en période touristique. Si toutefois les fabricants voulaient rétablir le prix hors taxe et remise (PHTR) unitaire à hauteur de ce qu'il est en 2012, ils devraient augmenter leurs prix d'environ 5 %.
On peut également concevoir un accord entre les fabricants et les buralistes corses pour se répartir l'effet de la hausse de la fiscalité, permettant ainsi une modération de la hausse des prix. Selon la DGDDI, un tel accord est toutefois peu probable.
Quels que soient le nombre et le calendrier des hausses de prix en Corse en 2013, le prix du tabac devrait en tout cas y augmenter dans une proportion plus grande que sur le continent . Ces hausses interviendraient soit à l'été et à l'automne, soit uniquement à l'automne.
3. L'impact budgétaire de la mesure
La mesure proposée par le présent article n'a pas d'impact sur le budget de l'Etat , car la recette du droit de consommation en Corse est entièrement affectée aux collectivités corses en application de l'article 575 E bis du CGI. Le produit de ce droit est en effet affecté au financement de travaux de mise en valeur de la Corse et versé à concurrence d'un quart au budget des départements de la Corse et de trois quarts au budget de la collectivité territoriale de Corse.
La recette fiscale devrait continuer à progresser selon le rythme observé ces dernières années, faisant toutefois apparaître, comme sur le continent, une inflexion à la baisse.
Produit du droit de consommation en Corse
au cours des trois derniers exercices
(en millions d'euros)
2009 |
2010 |
2011 |
|
Droit de consommation en Corse |
71,1 |
74,4 |
76,2 |
Source : DGDDI
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 253 Par exemple, 11 cigares importés, dont le prix de vente au détail est de 7,10 euros l'unité et ayant supporté des droits de douane à hauteur de 12 euros pour la totalité, ont une valeur taxable de 66,10 euros [(11x7,10)-12].
* 254 5,70 x 16,3856 % = 0,93.
* 255 Evaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2013, tome I.
* 256 Le narguilé et les blunts appartiennent notamment à cette catégorie.
* 257 Par plus de soixante sénateurs le 4 décembre 2012 et plus de soixante députés le 5 décembre 2012.
* 258 Sénat, rapport pour avis n° 104 (2012-2013).