ARTICLE 14 sexies (nouveau) (Art. 244 quater L du code général des impôts) : Prorogation du crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique

Commentaire : le présent article vise à proroger pour deux ans le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique.

I. LE CRÉDIT D'IMPÔT EN FAVEUR DE L'AGRICULTURE BIOLOGIQUE

A. LES DISPOSITIFS DE SOUTIEN À L'AGRICULTURE BIOLOGIQUE

Dans le but d' encourager les agriculteurs à pratiquer l'agriculture biologique 147 ( * ) et de réduire la part de l'agriculture « conventionnelle » dans le monde agricole, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif fiscal incitatif .

Ce dernier vient, pour mémoire, compléter dans le cadre du plan « agriculture biologique : horizon 2012 » trois types d'aides 148 ( * ) , issues de différents règlements communautaires 149 ( * ) , consistant à subventionner les exploitants ayant décidé de s'engager dans des pratiques satisfaisant aux exigences du mode de production biologique :

- les aides à la conversion à l'agriculture biologique ;

- les aides au maintien de l'agriculture biologique ;

- le dispositif de soutien direct pour production biologique .

En 2005, lors de la mise en place de la première aide, qui consistait à subventionner l'exploitant ayant décidé de s'engager dans un projet quinquennal de transition, pour tout ou partie de ses parcelles, vers l'agriculture biologique, on a constaté que les agriculteurs ne pouvaient pas valoriser correctement leur production pendant ces cinq années du fait de l'absence de certification « bio ». Il a donc été choisi d'instaurer un avantage fiscal sous forme de crédit d'impôt pour les exploitants ayant achevé leur conversion .

L'article 244 quater L du code général des impôts (CGI), qui résulte de l'article 75 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole, prévoit donc un crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique .

Aux termes de cet article, les entreprises agricoles qui ont engagé une production biologique peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt à la condition, d'une part, d'avoir au moins 40 % de leurs recettes annuelles provenant d'activités agricoles 150 ( * ) et, d'autre part, d'avoir fait l'objet d'une certification en agriculture biologique , au sens du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatifs à la production biologique qui a abrogé le règlement (CEE) n° 2092/91 du Conseil du 24 juin 1991 concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires, règlement (CEE) n° 2092/91 du Conseil du 24 juin 1991 concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires. Les bénéficiaires de cette mesure sont donc potentiellement toutes les exploitations agricoles , qu'elles soient soumises à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés.

Ce crédit d'impôt a été doublé et prorogé en 2009 151 ( * ) pour venir à échéance en 2010, mais compte tenu de l'importance accordée au développement de l'agriculture biologique et malgré un contexte budgétaire contraint, ce dispositif a, de nouveau, été prorogé pour 2 ans (2011 et 2012), par l'article 33 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011.

Cette dernière a fixé le montant du crédit d'impôt à 2 500 euros par exploitation . Alors que le crédit d'impôt pouvait varier entre 2009 et 2011 de 2 400 à 4 000 euros selon les cas, c'est désormais le cumul avec les aides à la conversion et au soutien à l'agriculture biologique qui est limité à 4 000 euros par an .

Par ailleurs, le dispositif de crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1535/2007 de la Commission du 20 décembre 2007 concernant l'application des articles 87 et 88 du Traité CE 152 ( * ) aux aides de minimis dans le secteur de la production de produits agricoles .

En 2009, le coût du crédit d'impôt bio était de 16 millions d'euros. En 2010 et 2011, le coût estimé est de 32 millions d'euros. Pour 2012, il est estimé à 23 millions d'euros .

Ces dispositifs d'aide peuvent être complétés, au niveau régional , par des aides à la certification et des aides à la promotion de l'agriculture biologique.

En outre, dans le cadre du plan de développement en faveur de l'agriculture biologique, le ministère chargé de l'agriculture a doté l'Agence française pour le développement et la promotion de la bio, dite « Agence Bio », d'un fonds de structuration des filières bio dit « fonds avenir Bio » d'un montant de 3 millions d'euros par an pendant 5 ans . Ce fonds est destiné à aider des projets structurants, pluriannuels, nationaux ou suprarégionaux, dits « multipartenariaux » (allant de la production à la distribution). Entre 2007 et 2012, 7 appels à projets ont été lancés pour un montant d'aides attribuées de 10,6 millions d'euros et 41 programmes financés.

B. BILAN DE L'AGRICULTURE BIOLOGIQUE EN FRANCE

La croissance de l'agriculture biologique se confirme en France, avec des taux annuels de progression à deux chiffres au cours des dernières années concernant tant la production que la consommation, sachant que la valeur totale du marché des produits biologiques est estimée à 4 milliards d'euros.

Ainsi, selon le Gouvernements, on comptait à la fin de l'année 2011 plus de 35 000 opérateurs ayant une activité biologique, dont plus de 23 000 exploitations bio (soit 4,6 % des exploitations françaises) valorisant plus de 3,5 % de la surface agricole utile (SAU) nationale (975 000 hectares), et 12 000 transformateurs et distributeurs. Ce développement s'est amplifié au cours des dernières années : le nombre de producteurs a augmenté de 12 % en 2011 par rapport à 2010, et de 74 % par rapport à 2008. Les surfaces exploitées selon le mode de production biologique ont ainsi augmenté de 14 % en 2011. Les surfaces en conversion, représentant 28 % des surfaces bio totales, se sont maintenues en 2011 après une hausse de 80 % en 2010. Enfin, la barre symbolique d' un million d'hectares de terres en mode biologique aurait été atteinte au cours du premier semestre 2012.

Le développement de la production biologique reste toutefois contrasté selon les filières et les régions . Les surfaces fourragères progressent de 23 % en 2011, tandis que celles de grandes cultures enregistrent une progression de 10 %. Alors que la SAU bio représente 12,3 % en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, elle ne représente que moins de 1 % en Nord-Pas-de-Calais, Haute-Normandie et Picardie.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale , à l'initiative du Gouvernement. Il vise à proroger pour deux ans le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le crédit d'impôt prévu à l'article 244 quater L du CGI constitue la principale mesure fiscale de soutien au mode de production biologique. Or, comme l'indique le Gouvernement, alors que les 3,5 % de surfaces bio sur le total de la SAU française restent faibles, il convient de porter l'offre française en matière de produits biologiques à un niveau suffisant, ce qui rend nécessaire d'augmenter les surfaces consacrées à l'agriculture biologique et de pérenniser les surfaces actuellement exploitées selon ce mode de production.

L'agriculture biologique est en effet un mode de production agricole non polluant et respectueux de l'environnement, et qui fait par ailleurs l'objet d'une demande nationale forte ainsi que le rappelle le Gouvernement, la France étant importatrice nette de produits issus de l'agriculture biologique.

Malgré le coût de ce crédit d'impôt, estimé à 23 millions d'euros en 2013, il paraît utile de maintenir une incitation fiscale à l'agriculture biologique. Le résultat des évaluations issues du rapport, rendu public en septembre 2011, du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, présidé par Henri Guillaume, est en effet très satisfaisant pour cette dépense fiscale puisqu'il lui a attribué le score maximal, en soulignant qu'il s'agit d'un dispositif très ciblé bénéficiant à un secteur créateur d'emplois.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 147 L'agriculture biologique est un mode de production agricole spécifique, désignant un ensemble de pratiques visant à la préservation de l'environnement, en particulier des ressources naturelles et des sols. Ses externalités positives sont réputées importantes.

* 148 Alors que les deux premiers régimes s'inscrivaient dans le cadre de la politique communautaire de développement rural, le troisième relevait du dispositif des aides directes communautaires mais, depuis 2011, l'aide au soutien destinée à la conversion est mise en place dans le cadre du premier pilier de la PAC, pour un montant de 32 millions d'euros pour l'année 2011, 44 millions d'euros pour l'année 2012, et 56 millions d'euros pour l'année 2013. En 2011, environ 22 millions d'euros ont été également versés dans le cadre des dossiers d'aide à la conversion maintenus dans le second pilier (contrats « conversion agriculture biologique » 2007-2009). Le bilan de santé de la PAC a permis la mise en place au niveau national, d'une aide annuelle au soutien de l'agriculture biologique afin d'accompagner les exploitations certifiées au-delà des cinq ans des aides à la conversion. Depuis 2010, un montant annuel de 50 millions d'euros est alloué à cet effet.

* 149 Il s'agit des règlements (CE) n° 1257/99 du Conseil du 17 mai 1999, (CE) n° 1698/2005 du Conseil du 20 septembre 2005 et (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs.

* 150 Il s'agit des activités dont les revenus sont pris en compte pour la détermination du bénéfice agricole au sens de l'article 63 du CGI.

* 151 L'article 121 de la loi n° 2008 1425 de finances pour 2009, est venu doubler le plafond du crédit d'impôt en faveur des agriculteurs biologiques. Ce plafond est donc passé de 1 200 euros à 2 400 euros. Ce même article a également doublé la majoration du crédit d'impôt par hectare exploité selon le mode de production biologique, de 400 euros contre 200 euros auparavant (cette majoration étant elle-même être limitée à 1 600 euros au maximum par exploitation, contre 800 euros selon le dispositif mis en place en 2006).

* 152 Ces articles sont désormais les articles 107 et 108 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

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