E. L'AGENCE NATIONALE DES TITRES SÉCURISÉS (ANTS) : UN FOND DE ROULEMENT MIEUX CALIBRÉ
En 2007, le programme « Administration territoriale » a connu une modification substantielle de son périmètre avec la création de l'ANTS 12 ( * ) .
Etablissement public administratif (EPA), l'ANTS a la qualité d' opérateur du programme . Sa mission vise à répondre aux besoins des administrations de l'Etat en matière de titres sécurisés. Elle recouvrait initialement les passeports électronique et biométrique, le certificat d'immatriculation des véhicules, le titre de séjour électronique, la carte nationale d'identité électronique (CNIe) et le visa biométrique. Depuis 2011, les attributions de l'ANTS ont été étendues à d'autres documents : le feuillet pour l'apposition d'un visa délivré par les autorités françaises compétentes aux titulaires d'un document de voyage non reconnu par la France, le titre de voyage délivré aux réfugiés et aux apatrides titulaires d'une carte de résident ou d'une carte de séjour, les cartes professionnelles des agents de l'Etat, le permis de conduire des bateaux de plaisance à moteur, le permis de conduire et la carte nationale d'identité.
L'objectif poursuivi est de donner à la France les moyens d'être au meilleur niveau mondial dans l'emploi des nouvelles technologies pour la production de titres sécurisés, de développer les synergies entre les administrations pour une meilleure maîtrise des coûts et de mutualiser les achats d'équipements nécessaires à l'exploitation des titres.
Le budget de l'ANTS est uniquement abondé par des ressources propres , liées aux taxes et aux redevances sur les titres d'identité ainsi qu'au SIV.
A cet égard, votre rapporteure spéciale souligne que les affectations de recette ne doivent pas avoir pour objet, même si elles sont conformes à la LOLF (articles 2 et 36), de contourner l'objectif de maîtrise des dépenses mais au contraire d' optimiser l'utilisation des ressources budgétaires .
Les ressources de l'ANTS en 2012 et en 2013
(en millions d'euros)
Taxes et redevances |
Base juridique |
Produit attendu par l'établissement |
|
Prévisions 2012 |
Prévisions 2013 |
||
Droit de timbre sur les passeports |
Art. 953-1 du CGI Art. 46 de la LFI 2007 |
107,5 |
107,5 |
Droit de timbre sur les titres de voyage biométrique délivrés aux réfugiés et apatrides |
Art. 77 de la LFI 2011 |
0,45 |
0,9 |
Taxe perçue à l'occasion de la délivrance, du renouvellement, du duplicata ou du changement d'une carte de séjour |
Art. 77 de la LFI 2011 |
15,2 |
15,2 |
Droit de timbre sur la carte nationale d'identité en cas de non présentation de l'ancienne carte lors de son renouvellement |
Art. 126 bis du CGI |
12,5 |
12,5 |
Droit de timbre sur les certificats d'immatriculation des véhicules |
Art. 1628-0 bis du CGI |
43 |
43 |
Redevance d'acheminement |
Décret n° 2008-850 du 26 août 2008 |
26 |
26 |
Total |
204,65 |
205,1 |
Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013
Concernant les recettes de l'ANTS, votre rapporteure spéciale souhaite relever le décalage entre le montant du droit de timbre à la charge du demandeur d'un passeport biométrique et le coût complet de ce titre . Ce décalage a été mis en évidence par l'enquête, demandée par votre commission à la Cour des comptes, dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF, sur le coût du passeport biométrique 13 ( * ) . Alors que le droit de timbre s'élève à 89 euros pour un adulte , 45 euros pour un mineur de quinze ans et plus et 20 euros pour un mineur de moins de quinze ans 14 ( * ) , le coût moyen du passeport biométrique est de 55 euros et son coût moyen pondéré en fonction de l'âge du demandeur s'établit à 69 euros .
D'une manière plus générale, si les ressources de l'ANTS demeurent donc stables d'une année sur l'autre (205,1 millions d'euros en 2013 contre 204,65 millions d'euros en 2012), ses charges augmentent en passant de 293,07 millions d'euros en 2012 à 268,14 millions d'euros en 2013. Cette progression s'explique notamment par la mise en production au cours de l'exercice à venir du nouveau permis de conduire, l'application FAETON mobilisant 42,33 millions d'euros (contre 26,9 millions d'euros en 2012).
Le permis de conduire en 2013 : le projet FAETON Destinée à remplacer le système national du permis de conduire (SNPC), l'application FAETON répond aux impératifs fixés par la directive communautaire n° 2006/126/CE du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire . Le système gèrera l'ensemble des droits à conduire, depuis l'inscription en école de conduite jusqu'à la gestion des points du permis de conduire proprement dit. Les développements informatiques de FAETON sont en cours et font l'objet d'une livraison au fur et à mesure de leur achèvement. Précédée d'une expérimentation, le déploiement définitif de l'application devrait avoir lieu le 19 janvier 2013 . FAETON vise à renforcer la sécurité routière et la lutte contre la fraude . Ainsi, en application de la directive européenne précitée du 20 décembre 2006, le format du titre est unifié et sécurisé, et les catégories de droits à conduire sont harmonisées. De nouvelles catégories de permis de conduire seront créées, notamment la catégorie AM pour la conduite des cyclomoteurs de moins de 50 cm 3 . Les préfectures n'auront plus la charge de fabriquer le titre, celui-ci sera produit par l'Imprimerie nationale et adressé au domicile du bénéficiaire. A partir du 19 janvier 2013, le titre devient renouvelable tous les quinze ans, sans contrôle médical ni épreuve de permis de conduire . Par ailleurs, l'ensemble des titres au format papier devront être repris pour 2033. Source : ministère de l'intérieur |
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, votre rapporteure spéciale s'était interrogée sur l'existence d'un fond de roulement très important au sein de l'ANTS 15 ( * ) , et cela d'autant plus que l'agence n'est créée que depuis 2007. Ce fonds s'élevait à 115,26 millions d'euros au 31 décembre 2011 . Afin de le ramener à de plus justes proportions, l'article 45 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 a opéré un prélèvement de 41,8 millions d'euros sur l'ANTS.
Le fond de roulement de l'agence devrait être de 57,07 millions d'euros au 31 décembre 2012 , et de 28,84 millions d'euros au 31 décembre 2013 . Il sera négatif à compter de 2014 si les ressources sont inchangées en raison du développement du programme FAETON.
Parmi les projets menés en 2013 par l'ANTS, votre rapporteure spéciale souhaite tout particulièrement relever l'expérimentation de la dématérialisation des actes d'état civil , pouvant être à l'origine d'importants gains de productivité pour les collectivités territoriales, de garanties supplémentaires contre la fraude, mais aussi peut être d'une charge de travail accrue pour les personnels en mairie.
La dématérialisation de l'état civil Conformément à l'article 4 de la loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité et au décret n° 2011-167 du 10 février 2011 instituant une procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l'état civil, le ministère de la justice, en liens étroits avec l'ANTS, a développé une application informatique dénommée COMEDEC. Cette application a pour objet de permettre la vérification dématérialisée des actes d'état civil . Dans le cadre de la délivrance des passeports et des cartes nationales d'identité, elle permettra à terme aux préfectures , services instructeurs des demandes de titre, de vérifier, de manière automatisée et dématérialisée, les données d'état civil fournies par les demandeurs à partir de l'application relative aux passeports. Le pilote de l'application informatique est testé auprès d'une quinzaine de communes de Seine-et-Marne, depuis le 15 septembre 2012 et pour une période de deux mois environ. A l'issue de cette expérimentation, les améliorations nécessaires seront apportées à l'application informatique en vue de sa généralisation. Source : ministère de l'intérieur |
Le projet relatif à la CNIe ne connaitra en revanche aucun développement en 2013 . A ce stade, aucun calendrier de déploiement n'a été arrêté pour ce nouveau (et hypothétique) document. Une mission sera en revanche conduite par l'IGA. A l'aune de la récente décision du Conseil Constitutionnel 16 ( * ) , cette mission étudiera la prise en compte, dans la procédure de gestion des futures CNIe et des passeports, des besoins opérationnels des services de sécurité et de délivrance de ces titres dans leur lutte contre la fraude.
Dans ce contexte général, le plafond d'emploi de l'agence passe de 116 à 118 ETPT 17 ( * ) .
* 12 L'ANTS a été instituée par le décret n° 2007-240 du 22 février 2007.
* 13 Sénat, rapport d'information n° 596 (2009-2010), « Le véritable prix du passeport biométrique », Michèle André.
* 14 Article 953 du code général des impôts (CGI). Une décote de 3 euros est appliquée si le demandeur fournit lui-même ses deux photographies d'identité.
* 15 Cf. Sénat, rapport spécial n° 107 (2011-2012) - tome III - annexe 2.
* 16 La loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité est parue au Journal officiel du 28 mars 2012 après une censure partielle de ses dispositions par le Conseil constitutionnel.
Dans sa décision DC n° 2012-652 du 22 mars 2012, celui-ci a notamment censuré l'article 5 qui prévoyait la mise en place d'un fichier commun aux CNIe et aux passeports, comportant des données biométriques. Ce fichier unique, principalement conçu pour garantir la fiabilité des documents délivrés et simplifier l'instruction des demandes, pouvait être consulté, à titre subsidiaire, à des fins policières ou judiciaires.
Le Conseil constitutionnel a considéré qu'eu égard à la nature des données enregistrées (données biométriques traçantes), à l'ampleur du traitement regroupant potentiellement la quasi totalité des nationaux, à ses caractéristiques techniques (identification possible à partir des seules empreintes) et aux conditions de sa consultation, la création de la base unique envisagée portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée par rapport au but poursuivi.
La loi promulguée ne comprend donc désormais que :
- l'insertion d'un composant dans la carte nationale d'identité, comportant notamment l'image de deux empreintes digitales du titulaire ;
- la transmission directe des données d'état civil de la commune de naissance à la commune qui a enregistré la demande de titre d'identité.
* 17 L'ANTS, qui bénéficiait également de neuf agents mis à disposition par le ministère de l'intérieur en 2012, n'en comptera plus qu'un en 2013.