B. UNE MESURE D'INTERDICTION EFFICACE ET RÉALISTE
La proposition de loi examinée au Sénat s'inscrit dans le prolongement de ces précédents textes. Conformément au protocole organisant la concertation avec les partenaires sociaux, elle a été soumise pour avis aux organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives, dont les réponses sont publiées en annexe de ce rapport. La confédération générale du travail (CGT) a notamment émis un avis tout à fait favorable sur ce texte.
Elle vise à interdire les licenciements boursiers, c'est-à-dire, concrètement, à interdire aux entreprises qui ont versé des dividendes l'année précédente de procéder à des licenciements pour motif économique.
Cette disposition n'empêcherait pas une entreprise qui fait des profits de procéder à des licenciements économiques dès lors que ces profits servent à financer des investissements et non à rémunérer le capital. Une entreprise encore bénéficiaire, mais qui voit ses marges se réduire d'année en année, peut en effet être contrainte de procéder à des licenciements économiques. Il ne serait pas prudent d'attendre que l'entreprise réalise des pertes pour l'autoriser à se réorganiser : la réorganisation risquerait alors d'arriver trop tard et de s'accompagner de suppressions d'emplois plus importantes que celles qu'une réorganisation plus précoce aurait conduit à décider.
Grâce à cette mesure, ce sont les détenteurs du capital qui seront les premiers à faire des efforts, en cas de besoin, et non les salariés. Ce n'est que justice : l'immense majorité des salariés ne disposent que du revenu tiré de leur travail pour vivre alors que ceux qui investissent dans le capital des entreprises ont généralement d'autres sources de revenus.
Pour assurer une meilleure application de cette disposition, un nouveau pouvoir de vérification serait reconnu à l'inspection du travail . Il ne s'agit pas de rétablir l'autorisation administrative de licenciement mais simplement de permettre à l'inspection du travail de constater si une entreprise est ou non en infraction. Le procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail pourra servir ensuite d'élément de preuve devant le juge, ce qui aidera le salarié à faire valoir plus facilement ses droits.
Se pose enfin la question de la sanction applicable aux entreprises qui auraient licencié alors qu'elles ont distribué des dividendes. Outre l'indemnisation due aux salariés en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'entreprise serait tenue de rembourser les aides publiques qu'elle a perçues. Cette sanction paraît de nature à dissuader les employeurs de méconnaitre la règle posée par la proposition de loi et d'éviter que l'argent public serve à enrichir les actionnaires au mépris de la protection de l'emploi et des droits des salariés.
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Considérant que cette proposition de loi apporte une réponse appropriée aux abus constatés en matière de licenciements économiques, votre commission vous demande de l'adopter dans la rédaction issue de ses travaux.