B. POUR LA FRANCE, L'OBLIGATION DE RÉVISER LA CONSTITUTION

1. Une obligation qui résulte du texte proposé

La disposition la plus importante de la proposition de règlement est le premier alinéa de l'article 4 , qui prévoit : « les États membres adoptent des règles budgétaires chiffrées concernant le solde budgétaire, qui inscrivent dans le processus budgétaire national l'objectif budgétaire à moyen terme au sens de l'article 2 bis du règlement (CE) n° 1466/97. Ces règles s'appliquent aux administrations publiques dans leur ensemble et revêtent un caractère contraignant, de préférence constitutionnel ».

Cette rédaction va considérablement plus loin que la récente directive du « Six Pack » relative aux cadres budgétaires nationaux 9 ( * ) , qui prévoit seulement que les « règles budgétaires chiffrées » « favorisent effectivement le respect » des obligations des Etats dans le domaine de la politique budgétaire.

Comme le souligne la proposition de résolution, et comme le confirme le Gouvernement, il découlerait de la proposition de règlement, dans le cas de la France, l'obligation de réviser sa Constitution afin d'adopter une règle de solde contraignante .

Ainsi, comme le souligne l'exposé des motifs de la présente proposition de résolution, « quand bien même nous déciderions de ne transposer ce principe qu'à un niveau législatif (en fait, celui d'une loi organique) et non constitutionnel, nous n'échapperions quand même pas à la nécessité de modifier notre Constitution. En effet, pour que le principe acquière une force véritablement contraignante, comme l'article 4 le demande, il faudrait que le Conseil constitutionnel puisse opérer un contrôle systématique sur nos lois de finances, afin de vérifier que nos objectifs de moyen terme sont correctement respectés. Or, seule la Constitution peut prévoir un contrôle obligatoire du Conseil constitutionnel »

La proposition de règlement prévoit, dans son article 12, que « les États membres se conforment à l'article 4 au plus tard [ six mois après l'adoption du présent règlement] ». On remarque que dans la proposition de règlement, ce délai figure entre crochets, ce délai étant susceptible d'évoluer au cours de la discussion. En particulier, en son état actuel, le traité en cours de négociation (cf. C ci-après), dont seule existe actuellement une version anglophone, n'entrerait en vigueur qu'au 1 er janvier 2013, et les Etats auraient encore une année pour se doter de règles « contraignantes » (« binding »), « de préférence constitutionnelles ». Toutefois, en l'état actuel de la proposition de règlement, la France aurait six mois pour modifier sa Constitution. Si, dans un scénario « optimiste », le règlement entrait en vigueur à la mi-septembre 2012, la France aurait donc jusqu'à la mi-mars 2013 pour modifier sa Constitution .

2. Une obligation dont le non respect pourrait être sanctionné selon les procédures habituelles d'infraction

On rappelle que la Commission est responsable de la bonne application du droit de l'Union, que ce soit le droit primaire ou le droit dérivé, ce qui peut la conduire à ouvrir une procédure d'infraction si elle considère qu'un Etat membre n'applique pas correctement le droit de l'Union (ou ne l'applique pas du tout).

Cette procédure d'infraction peut conduire la Commission à saisir la Cour de justice de l'Union européenne sur le fondement de l'article 258 du TFUE afin que la Cour prononce le manquement de cet Etat membre à l'égard du droit de l'Union.

Si la Commission estime que cet Etat membre n'a pas tiré les conséquences nécessaires de l'arrêt de la Cour elle peut à nouveau saisir celle-ci - c'est le fameux « manquement sur manquement » prévu par les dispositions de l'article 260 § 2 du TFUE - et lui demander de prononcer une sanction financière contre cet Etat membre. Cette sanction financière, qui a pour objectif de contraindre l'Etat membre à se conformer à ses obligations vis-à-vis du droit de l'Union, peut se composer d'une astreinte et d'une somme forfaitaire.


* 9 Directive 2011/85/UE du Conseil du 8 novembre 2011 sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres.

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