Article 10 bis A (Article L. 310-2 du code de commerce) Conditions d'autorisation temporaire d'occupation du domaine public pour la vente au déballage de fruits et légumes
Commentaire : cet article accorde une autorisation tacite d'occupation temporaire du domaine public faute de réponse du maire sous trois jours ouvrés, pour les ventes au déballage de fruits et légumes frais.
I. Le droit en vigueur
Les ventes au déballage constituent une dérogation au droit commun du commerce. Elles permettent d'installer un espace de vente pour une durée limitée sur des espaces publics ou privés non prévus habituellement pour la vente , c'est-à-dire en dehors des magasins.
Le régime des ventes au déballage a été simplifié par l'article 54 de la loi précitée du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME), qui a remplacé le régime d'autorisation par le préfet ou par le maire (selon la surface des espaces de vente), qui prévalait antérieurement pour ces ventes, par un régime de simple déclaration préalable au maire de la commune concernée .
Outre la déclaration, dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 310-2 du code de commerce soumet les ventes au déballage à plusieurs restrictions :
- une restriction de durée : ces ventes ne peuvent être effectuées sur un même lieu que pour deux mois au maximum par année civile. Un régime dérogatoire plus favorable existe pour les fruits et légumes qui peuvent faire l'objet de vente au déballage en période de crise conjoncturelle et en période de pré-crise sans limitation de durée. Ces périodes ne sont pas non plus prises en compte dans le calcul des deux mois ;
- une restriction quant à la qualité des vendeurs : les particuliers ne peuvent participer aux ventes au déballage que deux fois par an et pour la vente d'objets personnels, dans le cadre de brocantes.
L'article L. 310-2 du code de commerce ne précise pas qu'il existe en pratique une autre condition pour que la vente au déballage soit possible. Lorsqu'elle a lieu sur l'espace privé (par exemple un parking de supermarché), il est nécessaire d'obtenir l'autorisation du propriétaire. Lorsqu'elle est organisée sur l'espace public, il est nécessaire d'obtenir une autorisation d'occupation temporaire du domaine public , qui relève des pouvoirs de police du maire, en vertu des articles L. 2212-2 et suivants du code général des collectivités territoriales.
II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Constatant que les délais de réponses des maires aux demandes d'autorisation d'utilisation temporaire du domaine public étaient parfois trop longs, bloquant en pratique la possibilité de réagir vite en organisant des ventes au déballage urgentes en situation de crise conjoncturelle sur les fruits et légumes, M. Lionel Tardy a présenté à l'Assemblée nationale un amendement prévoyant que cette autorisation serait réputée acquise, faute de réponse du maire sous trois jours ouvrés .
Le dispositif adopté par les députés introduit une double sécurité :
- d'une part, les seuls lieux concernés sont ceux habituellement affectés par la commune aux foires et marchés ;
- d'autre part, l'autorisation tacite ne vaut que pour les ventes au déballage de fruits et légumes frais . Notons que l'article R. 310-8 du code de commerce prévoit déjà un régime exceptionnel pour la déclaration préalable de vente au déballage concernant les fruits et légumes. En effet, le droit commun des ventes au déballage exige une déclaration au maire 15 jours avant la date de la vente, voire encore plus tôt si les délais d'obtention d'autorisation d'utilisation du domaine public sont plus longs. Or, le même article R. 310-8 du code de commerce exonère de délai les ventes concernant les fruits et légumes frais soit en période de crise conjoncturelle constatée en application de l'article L. 611-4 du code rural et de la pêche maritime par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé de l'agriculture, soit en période de pré-crise, constatée par décision conjointe du ministre chargé du commerce et du ministre chargé de l'agriculture, après consultation de l'interprofession compétente.
Par ailleurs, le deuxième alinéa de l'article adopté par l'Assemblée nationale a rappelé dans le code de commerce la nécessité pour les ventes au déballage d'obtenir, le cas échéant, c'est-à-dire lorsque la vente est effectuée sur le domaine public, une autorisation d'occupation temporaire du domaine public.
III. La position de votre commission
Votre commission partage le souci des députés de faciliter sur le plan pratique les opérations de vente au déballage de fruits et légumes en situation de crise conjoncturelle.
Comme la commission des lois, votre rapporteur estime cependant dangereuse la solution consistant à donner une autorisation tacite. En effet, le maire doit pouvoir conserver la maîtrise des conditions d'une telle autorisation (horaires, délimitation précise des lieux d'installation). Il doit pouvoir organiser par exemple la coexistence sur le marché des commerçants habituels et des personnes venant effectuer la vente au déballage de fruits et légumes.
C'est pourquoi deux amendements identiques avaient été déposés par votre rapporteur et par Mme Nicole Bonnefoy, rapporteure de la commission des lois, afin de raccourcir encore les délais pour les maires à trois jours francs. Faute de réponse dans ce délai, la demande serait réputée rejetée, ouvrant la possibilité de recours gracieux et juridictionnels, notamment en référé.
Votre commission n'a pas suivi les rapporteurs, estimant, comme le Gouvernement, que l'urgence qu'il y avait à vendre rapidement des fruits et légumes frais concernés par une situation de crise justifiait une procédure totalement exorbitante du droit commun.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |