B. LUTTER CONTRE LA VIE CHÈRE PAR UNE POLITIQUE DE LA CONCURRENCE : DES LIMITES ÉVIDENTES
1. L'intensification de la concurrence : un levier à ne pas négliger, mais qui reste insuffisant
a) Une constante de l'action économique du Gouvernement
Ce projet de loi, comme la série de réformes économiques qui l'ont précédé, est bâti à partir d'un certain nombre de présupposés économiques conduisant à appréhender la question du pouvoir d'achat principalement sous l'angle de la dépense et des prix, à travers l'équation : « intensification de la concurrence = baisse des prix = hausse du pouvoir d'achat » . Toutes les réformes économiques conduites au cours du quinquennat qui s'achève ont adopté cette démarche. L'actuel projet de loi s'inscrit de ce point de vue dans la lignée de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat et de celles du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, du 4 août 2008 pour la modernisation de l'économie et du 1 er juillet 2010 relative à la réforme du crédit à la consommation.
Ainsi, pour mémoire, le titre II de la LME comportait deux réformes emblématiques qui utilisaient le levier de la concurrence pour stimuler le pouvoir d'achat. La première était la réforme des relations commerciales : elle a introduit la liberté tarifaire entre les fournisseurs et les distributeurs pour lutter contre le système des marges arrière et ses effets inflationnistes 4 ( * ) . Parallèlement à cette liberté des parties de négocier, la LME procédait aussi au renforcement des sanctions des comportements abusifs en instaurant la notion de « déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».
L'autre grande réforme censée dégager du pouvoir d'achat pour les consommateurs était celle de l'urbanisme commercial . A travers le relèvement de 300 à 1 000 m 2 du seuil d'autorisation administrative pour l'implantation des commerces, il s'agissait en effet de faciliter l'entrée sur les zones de chalandises de nouveaux commerces, notamment les magasins de hard discount , et ainsi d'intensifier la compétition entre distributeurs.
C'est sur cette même logique concurrentielle que repose l'article 1 er du présent projet de loi. Son objectif affiché, à défaut d'être atteint, est de faciliter l'installation de nouveaux concurrents sur les zones de chalandises non pas par la création de surfaces de vente nouvelles, mais en rendant plus simple le changement d'enseigne pour les commerces déjà installés.
Prétendre agir sur le pouvoir d'achat en agissant sur les prix via le niveau de concurrence n'est pas absurde. Pour que les baisses de prix permises par le progrès technique et la spécialisation internationale atteignent le consommateur final, il faut en effet que les intermédiaires commerciaux n'en captent pas les effets grâce à des rentes de situation monopolistique ou oligopolistique. Sans être la panacée, le levier de la concurrence n'est donc pas à négliger. D'ailleurs, sur la question des réseaux d'affiliation, votre rapporteur l'a actionné bien plus vigoureusement que ne l'a fait le Gouvernement. Constatant que l'article 1 er avait été dénaturé après son passage à l'Assemblée nationale, votre rapporteur en a en effet proposé une réécriture très large pour le rapprocher au maximum des recommandations formulées par l'Autorité de la concurrence dans son avis de décembre 2010.
* 4 Les lois Dutreil du 2 août 2005 et Chatel du 3 janvier 2008, s'y étaient déjà attaquées sans parvenir à instaurer la transparence des prix des produits de grande consommation.