C. DES ALÉAS MULTIPLES PESANT SUR LA PROGRAMMATION À MOYEN TERME DES DÉPENSES DE LA MISSION « DÉFENSE »
1. La mise en oeuvre des réductions d'emplois par la RGPP et le Livre blanc : des réductions pesant sur le maintien des capacités opérationnelles
Le schéma ci-après présente les grandes masses des réductions d'effectifs prévues au cours de la période 2008-2015, en application de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et du Livre blanc.
Les conditions dans lesquelles ces réductions d'effectifs sont menées soulèvent des interrogations quant à la possibilité de maintenir les capacités opérationnelles de l'armée française .
La répartition des diminutions
d'effectifs
selon qu'elles proviennent de la RGPP et du Livre
blanc
Source : ministère de la défense
En « régime de croisière », comme détaillé dans le tableau ci-après, la suppression des effectifs doit permettre d'économiser plus de 1,8 milliard d'euros par an (plus de 1,4 milliard d'euros de titre 2 et plus de 0,4 milliard d'euros de titre 3).
La diminution des effectifs étant linéaire, l'économie annuelle moyenne sur la période est de l'ordre de la moitié de ce montant, soit 0,9 milliard d'euros, et environ 8,2 milliards d'euros sur la période, compte tenu d'effets qui se répercuteront également sur l'année 2016.
Sur les 8,2 milliards d'euros d'économies attendues, la réduction de la masse salariale représente une économie de 6,5 milliards d'euros, et les économies relevant des dépenses de fonctionnement (titre 3) 1,7 milliard d'euros.
Cependant, la réforme a également des coûts à moyen terme :
- un plan d'accompagnement social des restructurations (soit 1,1 milliard d'euros de dépenses de titre 2, hors surcoût lié aux situations de chômage) ;
- des dépenses d'infrastructure (à hauteur de 1,5 milliard d'euros) ;
- l'accompagnement territorial des restructurations (0,2 milliard d'euros).
Les économies nettes ainsi générées doivent être majorées du produit des cessions immobilières, évaluées à 1,3 milliard d'euros, et qui ne figuraient pas jusqu'à présent dans les évaluations des économies liées à la réforme des effectifs, telles qu'elles étaient communiquées à vos rapporteurs spéciaux. Ce gisements d'économies potentielles, soudain découvert, laisse perplexe.
Au total, les économies nettes attendraient donc 6,7 milliards d'euros.
Comme le montre la répartition des économies budgétaires par année, la réforme entrera dans sa phase la plus difficile à partir de 2013.
Ces chiffrages , attribués par le Gouvernement aux vertus supposées de la révision générale des politiques publiques (RGPP), qui a été appliquée avec une extrême rigueur au ministère de la défense, apparaissent en réalité très incertains .
En 2008, le ministre de la défense avait ainsi évalué les économies liées à la suppression des mêmes 54 000 emplois à 4 milliards d'euros en termes de masse salariale, ce qui ne représentait toutefois qu'une économie nette de 2,7 milliards d'euros, compte tenu des mesures d'accompagnement social et des coûts de restructuration. En juillet 2010, le ministère de la défense réévaluait ces économies à 4,9 milliards d'euros, avant que le chiffre de 6,7 milliards d'euros ne soit finalement retenu en janvier 2011.
Ces incertitudes, quant à l'impact des réductions d'effectifs en termes notamment d'évolution de la masse salariale, ne sont pas propres au ministère de la défense : dans le PLF 2012, l'économie brute liée à la suppression d'un emploi est évaluée à 31 800 euros, en hausse de près de 18 % par rapport à l'année précédente. Le montant du « retour catégoriel » vers les agents publics, résultant des gains de productivité au titre de mesures catégorielles, donne lieu aux mêmes hésitations sans que, en tout état de cause, le taux de 50 % d'un « retour catégoriel » vers les agents soit atteint.
Or, dans le cas du ministère de la défense, à un retour catégoriel il est préféré un réinvestissement dans les équipements, mais dans des montants inconnus et sans qu'apparaisse clairement le circuit de tels redéploiements budgétaires .
Les principes qui doivent guider l'évolution des effectifs militaires devraient tenir compte, en priorité, du maintien des capacités opérationnelles, suivant une répartition équilibrée des bases militaires sur l'ensemble du territoire national, outre mer et à l'étranger.
Les économies nettes provenant des réductions d'effectifs du ministère de la défense
(en millions d'euros courants 2008 et en ETPT)
Source : ministère de la défense