N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 30 novembre 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur


• la proposition de loi de MM. Jean-Pierre BEL, Claude HAUT, Yves KRATTINGER, Gérard MIQUEL, Mme Michèle ANDRÉ, MM. Bernard ANGELS, Bertrand AUBAN, Mme Nicole BRICQ, MM. Jean-Pierre DEMERLIAT, Edmond HERVÉ, François MARC, Marc MASSION, François REBSAMEN, Michel SERGENT, Jean-Marc TODESCHINI, Michel BOUTANT, Bernard CAZEAU, Yves DAUDIGNY, Mme Josette DURRIEU, MM. Jacques GILLOT, Jean-Noël GUÉRINI, Didier GUILLAUME, Claude JEANNEROT, Claude LISE, Jean-Jacques LOZACH, Philippe MADRELLE, Rachel MAZUIR, Marcel RAINAUD, Mme Jacqueline ALQUIER, MM. Serge ANDREONI, David ASSOULINE, Claude BÉRIT-DÉBAT, Jacques BERTHOU, Jean BESSON, Mme Maryvonne BLONDIN, M. Yannick BODIN, Mme Nicole BONNEFOY, MM. Yannick BOTREL, Martial BOURQUIN, Mmes Bernadette BOURZAI, Claire-Lise CAMPION, Françoise CARTRON, MM. Yves CHASTAN, Pierre-Yves COLLOMBAT, Roland COURTEAU, Marc DAUNIS, Mme Christiane DEMONTÈS, MM. Jean-Luc FICHET, Bernard FRIMAT, Mmes Samia GHALI, Odette HERVIAUX, Annie JARRAUD-VERGNOLLE, MM. Ronan KERDRAON, Serge LAGAUCHE, Jacky LE MENN, Roger MADEC, Jacques MAHÉAS, Jean-Jacques MIRASSOU, Robert NAVARRO, Mme Renée NICOUX, MM. François PATRIAT, Jean-Claude PEYRONNET, Bernard PIRAS, Mme Gisèle PRINTZ, MM. Daniel RAOUL, Paul RAOULT, Daniel REINER, Thierry REPENTIN, Roland RIES, Mme Patricia SCHILLINGER, MM. Jean-Pierre SUEUR, Michel TESTON, René TEULADE, Jean-Etienne ANTOINETTE, Serge LARCHER, Georges PATIENT, Mme Dominique VOYNET et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, relative à la
compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements ,


• la proposition de loi de MM. Yvon COLLIN, Jean-Michel BAYLET, Nicolas ALFONSI, Mme Anne-Marie ESCOFFIER, M. François FORTASSIN, Mme Françoise LABORDE, MM. Daniel MARSIN, Jacques MÉZARD, Jean MILHAU, Jean-Pierre PLANCADE, Robert TROPEANO, Raymond VALL et François VENDASI relative à la
compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements ,


• la proposition de loi de Mmes Nicole BORVO COHEN-SEAT, Marie-France BEAUFILS, Odette TERRADE, M. Jean-François VOGUET, Mmes Mireille SCHURCH, Éliane ASSASSI, Josiane MATHON-POINAT, MM. François AUTAIN, Michel BILLOUT, Mme Annie DAVID, M. Jean-Claude DANGLOT, Mmes Michelle DEMESSINE, Évelyne DIDIER, MM. Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Mmes Brigitte GONTHIER-MAURIN, Gélita HOARAU, M. Robert HUE, Mme Marie-Agnès LABARRE, M. Gérard LE CAM, Mme Isabelle PASQUET, MM. Jack RALITE, Ivan RENAR et Bernard VERA, relative à la
compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements .

Par M. Charles GUENÉ,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc , Serge Dassault, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, MM. Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

62, 64 et 107 (2010-2011)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Trois propositions de loi identiques relatives à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements seront discutées le jeudi 9 décembre 2010, dans le cadre de la séance mensuelle réservée aux initiatives des groupes politiques d'opposition et des groupes minoritaires des assemblées, selon les dispositions de l'article 48 alinéa 5 de la Constitution.

Ces textes ont été déposés par les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés 1 ( * ) , par le Président et douze autres de nos collègues membres du groupe du rassemblement démocratique et social européen (RDSE) 2 ( * ) et par les membres du groupe communiste, républicain et citoyen 3 ( * ) .

Par ces propositions de loi, les auteurs ont voulu mettre l'accent sur les difficultés financières que rencontrent les départements dans leur ensemble . Ces difficultés résultent notamment des charges qui pèsent sur eux au titre des trois allocations individuelles de solidarité visées par les propositions de loi : le revenu de solidarité active (RSA), l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH) . Le coût de ces prestations augmente et les compensations versées par l'Etat ne couvrent pas cette augmentation, qui pèse lourdement sur les budgets départementaux.

Toutefois, votre rapporteur juge inappropriée la solution proposée par les trois propositions de loi . Ces dispositifs visent à compenser intégralement le coût subi par les départements au titre du RSA et de la PCH et à hauteur de 90 % celui résultant de l'APA.

Le coût net subi par les départements est inégalement réparti entre ces trois allocations. Plus des trois quarts de ce coût résultent de la prise en charge de l'APA. Or, le Président de la République a annoncé, mardi 16 novembre 2010, l'organisation d'un débat national, dans le courant de l'année 2011, sur la réforme du financement de la perte d'autonomie , qui permettra de réformer le fonctionnement de cette prestation. Les propositions de loi ici examinées court-circuitent donc ce nécessaire débat sur la dépendance, dont l'absence pourrait, à bon droit, être contestée par l'opposition.

Par ailleurs, les dispositifs proposés conduiraient à une déresponsabilisation totale des départements dans la gestion de ces allocations et remettraient finalement en cause le principe même de leur décentralisation .

Enfin, le coût pour l'Etat de ces dispositifs, 3,34 milliards d'euros, n'est pas réaliste dans le contexte actuel des finances publiques , eu égard à la nécessité de réduire les déficits.

I. LE CADRE CONSTITUTIONNEL DES COMPENSATIONS DE TRANSFERTS ET D'EXTENSIONS DE COMPÉTENCES

L'article 72-2 de la Constitution, introduit par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 4 ( * ) , dispose que « tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion d'interpréter l'article 72-2 de la Constitution, notamment dans sa décision du 13 janvier 2005 relative à la loi de programmation pour la cohésion sociale 5 ( * ) . Il a estimé qu'il résultait de cet article que « lorsqu'il transfère aux collectivités territoriales des compétences auparavant exercées par l'Etat, le législateur est tenu de leur attribuer des ressources correspondant aux charges constatées à la date du transfert ». Dans ce cas, l'Etat est obligé de compenser la charge transférée en affectant un montant strictement égal aux charges qu'il supportait avant le transfert du fait de cette compétence.

A contrario , dans la même décision, le Conseil constitutionnel précise que, « en ce qui concerne les créations et extensions de compétences [...] qui présentent un caractère obligatoire [...] , il n'est fait obligation au législateur que d'accompagner ces créations ou extensions de compétences de ressources dont il lui appartient d'apprécier le niveau, sans toutefois dénaturer le principe de la libre administration des collectivités territoriales ».

Il résulte de cette interprétation que :

- qualifier l'attribution d'une compétence de transfert implique l'obligation constitutionnelle de transférer le montant intégral des dépenses que l'Etat supportait au titre de cette compétence avant son transfert ;

- qualifier d'extension , plutôt que de transfert, l'attribution d'une compétence aux départements supprime cette obligation constitutionnelle . La seule obligation de l'Etat est alors d'accompagner l'extension de ressources, en veillant au respect du principe de libre administration des collectivités territoriales.


* 1 Proposition de loi n° 62 (2010-2011).

* 2 Proposition de loi n° 64 (2010-2011).

* 3 Proposition de loi n° 107 (2010-2011).

* 4 Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République.

* 5 Décision n° 2004-509 DC du 13 janvier 2005.

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