II. LES DÉPENSES
2011 constitue un véritable tournant en matière d'engagements gouvernementaux de maîtrise de la dépense. Ce premier exercice du deuxième budget triennal traduit en effet la première mise en oeuvre de la stabilisation en valeur des dépenses hors charges de pension et de la dette, ainsi que des objectifs de réduction des dépenses de fonctionnement et d'intervention qui ont donné lieu à une abondante communication au printemps 2010.
A. LA PREMIÈRE ANNÉE DE MISE EN oeUVRE DU « ZÉRO VALEUR »
Depuis la loi de finances pour 2008 (n° 2007-1822 du 27 décembre 2007), la norme d'évolution des dépenses de l'Etat s'appliquait non seulement aux dépenses du budget général, mais également aux prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l'Union européenne et aux affectations de taxes venant en substitution de crédits budgétaires 35 ( * ) .
Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 définit une nouvelle norme de dépense, dont le présent projet de loi de finances matérialise la première application.
1. Une norme de dépense plus sophistiquée et plus rigoureuse
Si la nouvelle norme de dépense s'applique à un périmètre identique à celui de la norme dite « élargie », elle n'en présente pas moins un caractère plus sophistiqué , en se déclinant en deux sous-objectifs distincts, et potentiellement plus rigoureux .
a) Zéro valeur et zéro volume
La progression des dépenses de l'Etat est désormais :
1) au plus égale, à périmètre constant, à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation. Il s'agit de la reprise de la norme « zéro volume » telle que nous la connaissons aujourd'hui ;
2) hors charge de la dette et hors contributions aux pensions des fonctionnaires de l'Etat, ces dépenses et prélèvements sur recettes sont stabilisés en valeur à périmètre constant.
La vertu principale d'un tel dispositif sera d'empêcher le recyclage en dépenses nouvelles d'économies de constatation, tel qu'il a pu se produire en 2009 ou en 2010 . Dans la mesure où les dépenses hors dette et pensions seront stabilisées en valeur, tout redéploiement au profit de ces dépenses constituerait, en effet, une infraction à la norme. Dans ces conditions, les éventuelles économies de constatation sur la charge de la dette ou les économies attendues de la réforme des retraites sur les dépenses de pensions des fonctionnaires contribueront à l'amélioration du solde .
b) Les modalités d'application
Le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 fournit plusieurs précisions sur les modalités d'application de cette norme à double détente et d'articulation du « zéro valeur » et du « zéro volume », en particulier si les hypothèses d'inflation, de charge de la dette et de dépenses de pensions étaient amenées à évoluer en cours de programmation.
Ce rapport dispose que « quelles que soient ces hypothèses, les plafonds de dépenses résultant des normes "0 volume" et "0 valeur hors dette et pensions" seront respectés, la règle la plus contraignante des deux étant retenue pour chaque année » . Cela emporte que :
1) en cas d'inflation modérée, susceptible de dégager des marges de manoeuvre sur la charge de la dette, l'application du zéro valeur interdira tout redéploiement et aboutira à une diminution de la dépense globale en volume . Ce cas de figure, exactement inverse des phénomènes constatés en 2009 et 2010, devrait se produire en 2011 puisque le Gouvernement indique que « les crédits diminueront en euros constants de près de 0,2 % » ;
2) en cas de forte inflation et de hausse de la charge de la dette et des pensions, c'est alors la règle du zéro volume qui prévaudra : il conviendra donc de comprimer les dépenses hors dette et pensions , et donc de les faire diminuer en valeur, pour tenir l'objectif global de stabilisation en euros constants. Le rapport annexé indique donc que, dans cette hypothèse, « les plafonds des crédits des missions seraient révisés à la baisse de manière à respecter la norme "0 volume". »
Les ajustements nécessaires « seraient opérés conformément au cadrage fixé par le Premier ministre au début de la procédure budgétaire. En cas de révision à la baisse de l'hypothèse d'inflation, ils se feraient prioritairement par la révision à la baisse des plafonds des missions comprenant des dotations dont l'évolution est directement corrélée au niveau de l'inflation , en vertu notamment de mécanismes d'indexation prévus par une disposition juridique » .
* 35 Cette norme de dépense « élargie » a été consacrée par l'article 5 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 (n° 2009-135 du 9 février 2009).