ARTICLE 5 E

Information du Parlement sur les normes prudentielles bancaires dites « Bâle III »

Commentaire : le présent article, introduit à l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, prévoit que l'Autorité de contrôle prudentiel remet, au moins une fois par trimestre, un compte rendu sur les négociations tendant à la révision des normes prudentielles applicables aux établissements de crédit, dites de « Bâle III ». Un rapport ponctuel devra également être adressé au Parlement, avant le 31 mars 2011, afin d'évaluer l'impact de ces normes sur l'offre de crédit et le financement de l'économie.

I. LES NORMES PRUDENTIELLES ADOPTÉES PAR LE COMITÉ DE BÂLE

A. LE COMITÉ DE BÂLE

Créé en 1974, le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB) est un organe international de régulation chargé d'édicter les normes prudentielles bancaires. Il est hébergé par la Banque des règlements internationaux, située à Bâle. Ses travaux réunissent les régulateurs bancaires, le plus souvent des banques centrales ou des organismes qui leur sont affiliés, de vingt-sept pays 134 ( * )135 ( * ) .

Initialement considéré comme un lieu d'échanges entre superviseurs, il a pris une plus grande importance à partir de 1988 et l'élaboration du premier ratio prudentiel, le ratio de solvabilité Cooke.

Le ratio se calcule selon la formule suivante :

Fonds propres réglementaires

> 8 %

Engagements de crédit

Concrètement, un ratio fixé à 8 % signifie que si la banque a un encours de crédit équivalent à 100, elle doit posséder dans son bilan au moins 8 de fonds propres.

Cette règle est imposée à l'établissement de crédit pour qu'il soit en mesure de faire face à tout événement qui pourrait peser sur sa solidité financière et, en premier lieu, en cas d'augmentation du taux de défaut sur les crédits qu'il a consentis.

Les fonds propres sont classés en fonction de leur solidité selon trois catégories : Tier 1, Tier 2 et Tier 3. La partie Tier 1, la plus solide, comprend principalement le capital social, les résultats mis en réserve ainsi que les intérêts minoritaires détenus dans des filiales consolidées. Dans le ratio Cooke, au moins 4 % des fonds propres doivent appartenir à la catégorie Tier 1.

Le ratio Cooke est rapidement apparu trop fruste car il ne prenait pas assez bien en compte l'ensemble des risques auxquels une banque est exposée. C'est pourquoi, dans le courant des années 1990, le Comité de Bâle a élaboré un nouveau ratio prudentiel.

B. LES PRINCIPES DE BÂLE II

1. Le cadre initial

Le 26 juin 2004, le Comité de Bâle a adopté un nouveau dispositif de convergence internationale de la mesure et des normes de fonds propres des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.

Le dispositif, dit de « Bâle II », a pour objectif de moderniser l'accord de 1988 (« Bâle I ») pour renforcer la solidité et la stabilité du système bancaire. Le nouveau ratio de solvabilité bancaire est dénommé « ratio McDonough », du nom de son promoteur. Il s'agit d'assurer une meilleure prise en compte des risques réels encourus par les établissements, de rapprocher le capital économique du capital réglementaire, et d'inciter au développement d'un modèle interne de pilotage par les risques. La démarche de Bâle II se veut donc à la fois plus réaliste , compte tenu des évolutions récentes du métier bancaire, et plus fine que celle de Bâle I.

L'architecture du dispositif repose sur trois piliers complémentaires :

- le premier pilier impose aux établissements un niveau minimal de fonds propres , comme le faisait l'accord de Bâle I ;

- le deuxième pilier, qui innove par rapport à Bâle I, prévoit un processus de surveillance prudentielle , avec désormais la possibilité pour le superviseur d'exiger des fonds propres au-delà du niveau réglementaire en fonction du profil de risque de l'établissement. Ce pilier implique l'analyse des risques non couverts par le premier pilier, le calcul des besoins en fonds propres au titre du capital économique, et la confrontation, par l'autorité de contrôle, de ses propres analyses du risque à celles présentées par les établissements ;

- dans un objectif de discipline de marché, le troisième pilier vise une meilleure transparence financière tant de la part des établissements financiers que des superviseurs.

L'objectif était de maintenir inchangé (à 8 %) le niveau global des fonds propres réglementaires pour assurer la couverture des risques, tout en garantissant un calibrage beaucoup plus fin selon leur nature . Trois grandes catégories de risques sont ainsi concernées : le risque opérationnel, le risque de marché et le risque de crédit.

Les banques ont le choix entre trois méthodes, de sophistication croissante, pour calculer leur ratio de solvabilité :

- une approche standard faisant appel à des organismes d'évaluation externe (agences de notation en particulier) ;

- une approche par notation interne, dans laquelle les établissements calculent les probabilités de défaut des contreparties ;

- et une approche selon une notation interne « avancée », par laquelle la banque calcule également la perte en cas de défaut (notamment selon la méthode usuelle de marché dite « Value at risk »), l'exposition au risque et la maturité.

Le nouveau ratio se calcule ainsi :

Fonds propres réglementaires

> 8 %

Risques de crédit + Risques de marché + Risques opérationnels

2. Les exigences de Bâle II ont été adoptées par l'Union européenne et transposées en droit interne

Deux directives adoptées le 14 juin 2006 , les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE relatives, respectivement, à la refonte de l'accès à l'activité des établissements de crédit et de son exercice, et à l'adéquation des fonds propres des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, communément appelées « CRD » (« capital requirements directive »), ont traduit les principes de ces accords en droit communautaire 136 ( * ) .

L'Europe a effectué un choix distinct de celui des Etats-Unis en appliquant ce nouveau cadre à l'ensemble des banques et entreprises d'investissement européennes et non aux seules grandes banques internationales.

La directive européenne sur l'adéquation des fonds propres est entrée en application en janvier 2008. Une première révision de la directive a été initiée en octobre 2008, intégrant des recommandations relatives à la supervision des groupes paneuropéens, au traitement prudentiel de la titrisation, à la surveillance des grands risques et à la définition des fonds propres hybrides. Le Parlement européen et le Conseil ont ainsi adopté une directive 2009/111/CE du 16 septembre 2009, dite « CRD 2 », qui intègre, plus largement, un ensemble de règles applicables aux établissements de crédit. Elle doit être transposée dans les Etats membres avant le 31 octobre 2010, pour une entrée en vigueur fin 2010 137 ( * ) .

Le texte entame notamment une harmonisation du calcul des fonds propres des banques en obligeant à déduire des fonds propres les dividendes à verser, définit les titres hybrides et les conditions de leur admission , prévoit de demander aux établissements à l'origine d'une opération de titrisation de conserver 5 % des risques dans leur bilan et dispose que les risques représentés par une même contrepartie ne peuvent dépasser 25 % des fonds propres de la banque .

Le 13 juillet 2009, la Commission européenne a publié une nouvelle proposition de révision, dite « CRD 3 », qui est en cours d'examen devant le Parlement européen. Elle prévoit d'imposer un ratio de fonds propres plus élevé pour les opérations de retitrisation et des exigences de transparence accrue, un alourdissement des exigences de fonds propres pour les risques du portefeuille de négociation et une surveillance des politiques de rémunération des dirigeants et des personnes appelées à prendre des risques, incluant des exigences en fonds propres supplémentaires lorsque les politiques de rémunération encouragent une prise de risque excessive.

Une autre proposition de la Commission, dite « CRD 4 », est attendue pour l'automne 2010 qui devrait inclure des dispositions sur le ratio de levier, le provisionnement dynamique et la suppression des options nationales.

3. Les faiblesses de Bâle II

Deux faiblesses ont principalement été identifiées dans la réglementation « Bâle II ».

En premier lieu, elle est apparue procyclique . En effet, en période d'euphorie financière, les banques ajustent leurs fonds propres de telle sorte qu'elles ne détiennent que le minimum de fonds imposé par la réglementation. A l'inverse, lorsque la situation se détériore, elles doivent augmenter leurs fonds propres pour respecter le ratio de solvabilité, alors même que les fonds deviennent de plus en plus rares et chers, contribuant ainsi à précipiter les banques dans un état « d'asphyxie financière ».

En second lieu, les produits les plus complexes, et donc, le plus souvent, les plus risqués, ne sont pas suffisamment bien pris en compte dans les modalités de calcul du ratio. Les banques n'ont pas été en mesure d'apprécier correctement les risques qu'elles prenaient lorsqu'elles menaient des opérations complexes , en particulier de titrisation et de retitrisation. Par conséquent, leur niveau de fonds propres s'est retrouvé en inadéquation avec la réalité des risques encourus.

Avec la déclaration sur le renforcement du système financier, adoptée lors du deuxième sommet du G 20 à Londres, le 2 avril 2009, il a été décidé d'améliorer les aspects quantitatifs et qualitatifs ainsi que la cohérence internationale des fonds propres dans le système bancaire. Le sommet du G 20 de Pittsburgh, le 25 septembre 2009, a confirmé cette orientation en affirmant que « le cadre de " Bâle II " doit intégrer des exigences en capital plus élevées pour les produits à risque et les activités hors bilan ».

Le Comité de Bâle a notamment proposé de réduire le recours aux estimations de fonds propres fondées sur un modèle de valeur en risque (« value at risk » ou VaR) et de renforcer la couverture des risques pour les instruments de retitrisation et la couverture des risques de défaut pour les produits de crédit non titrisés.

C. LE NOUVEAU CADRE PRUDENTIEL DIT DE « BÂLE III »

1. Les demandes du G 20 pour renforcer le cadre prudentiel

A Londres, le 2 avril 2009, le G 20 a fixé une feuille de route pour la réforme de la réglementation prudentielle et les travaux du CBCB :

« - lorsque la reprise sera assurée, les normes réglementaires prudentielles devront être renforcées . Les ressources en sus des minimums réglementaires devront être augmentées et la qualité du capital améliorée. Des directives en vue d'harmoniser la définition du capital devront être élaborées d'ici à la fin de 2009. Le CBCB devra réexaminer les niveaux minima de capital et élaborer des recommandations en 2010 ;

« - les exigences en capital liées aux risques devront être complétées par une mesure simple et transparente non liée aux risques permettant de procéder à des comparaisons internationales , tenant dûment compte des expositions hors bilan et susceptible de limiter l'accumulation des effets de levier au sein du système bancaire ;

« - le Comité de Bâle et les autorités devront faire progresser d'ici à 2010 les travaux sur l'amélioration des incitations en matière de gestion du risque des titrisations , y compris s'agissant de l'appréciation raisonnable du risque et de l'exigence de conserver une fraction du risque des titres émis ;

« - tous les pays du G20 devront adopter progressivement le cadre de Bâle II sur les fonds propres ».

Le programme du Comité de Bâle visant à promouvoir un cadre prudentiel et réglementaire plus robuste pour le secteur bancaire comporte cinq éléments fondamentaux :

- le renforcement du dispositif réglementaire d'adéquation des fonds propres ;

- l'accroissement des réserves de liquidité des banques ;

- l'optimisation de la gouvernance, de la gestion du risque et de la supervision des banques ;

- l'amélioration de la transparence du marché ;

- l'approfondissement de la coopération transfrontière en matière de supervision des banques internationales .

2. Les propositions et les articulations de Bâle III

Conformément aux échéances fixées, le Comité de Bâle a publié le 17 décembre 2009 deux épais documents de consultation sur la réforme globale tendant à renforcer les exigences en capital et en liquidité des banques (« Strengthening the resilience of the banking sector » et « International framework for liquidity risk measurement, standards and monitoring »). La consultation publique sur ces documents s'est achevée le 16 avril 2010.

Le 26 juillet 2010, le CBCB a trouvé un accord sur plusieurs éléments du futur cadre de Bâle III. Il aboutit globalement à diminuer le périmètre du numérateur (fonds propres éligibles) et à augmenter le dénominateur (risques pondérés), pour un ratio minimal inchangé à 8 %, selon les principes suivants :

1) L'amélioration de la qualité, la consistance et la transparence des fonds propres, en particulier du ratio core Tier 1 (ou fonds propres durs, c'est-à-dire les actions ordinaires et les résultats mis en réserve), qui ne pourra plus comporter que des actions ordinaires ou instruments équivalents (tels que les parts sociales des groupes mutualistes), y compris les intérêts minoritaires d'un établissement dans une filiale bancaire. De même, les fonds propres de filiales d'assurance pourront être pris en compte, jusqu'à hauteur de 15 % des fonds propres de la société mère. En revanche, les instruments hybrides tels que les titres super-subordonnés, les actifs intangibles et les impôts différés devront être intégralement déduits ;

2) Le renforcement de la pondération de certains risques , en particulier du risque de crédit associé aux dérivés, « repos » 138 ( * ) et à la négociation pour compte propre. La pondération est différenciée de manière à accroître l'incitation à transférer les dérivés « de gré à gré » vers des chambres de compensation et des marchés organisés. Le CBCB promeut également une convergence de la mesure, de la gestion et de la supervision du risque opérationnel ;

3) La consécration d'un ratio d'effet de levier , ou ratio d'endettement, de 3 % 139 ( * ) se fera en deux temps. A partir du 1 er janvier 2013 et jusqu'au 1 er janvier 2017, les régulateurs utiliseront le ratio d'effet de levier comme un outil supplémentaire de mesure du risque. Les banques devront rendre public leur ratio à compter du 1 er janvier 2015. Au cours de l'année 2017, les résultats observés permettront d'opérer des ajustements sur la définition et le calibrage du ratio, notamment pour prendre en compte les éventuelles différences comptables 140 ( * ) . Dès le 1 er janvier 2018, il sera intégré dans le pilier 1 (exigences réglementaires) ;

4) L'introduction de mesures contra-cycliques : coussins de capital (accrus en période d'expansion du crédit) et provisionnement des pertes attendues (« expected losses ») plutôt qu'encourues (« incurred losses ») ;

5) La mise en place de deux ratios réglementaires de couverture de la liquidité : à 30 jours (LCR - Liquidity coverage ratio 141 ( * ) ) et à un an (NSFR - Net stable funding ratio 142 ( * ) ) : le CBCB a annoncé son intention de proposer, d'ici la fin de l'année, de nouvelles règles de calcul pour ces ratios afin d'en limiter le coût. Quoi qu'il en soit, le ratio à un an n'entrerait pas en vigueur avant le 1 er janvier 2018 .

3. Le calibrage des fonds propres durs s'élève à 7 %

Actuellement, le niveau de fonds propres Tier 1 est fixé à 4 %, dont 2 % de fonds propres durs, dits core Tier 1 .

Début septembre 2010, les régulateurs du Comité de Bâle ont retenu un calibrage de 6 % pour le ratio Tier 1, dont 4,5 % de fonds propres core Tier 1 auquel s'ajoute un « coussin de sécurité » de 2,5 %, soit un ratio total de fonds propres durs de 7 % .

Le « coussin de sécurité » est destiné à « affronter de futures périodes de stress ». Les banques qui ne respecteraient pas l'obligation de constituer ce coussin seront pénalisées et ne pourront distribuer leur bénéfice comme elles l'entendent. Concrètement, le régulateur imposera leur mise en réserve.

Les banques doivent atteindre le pourcentage de 7 % d'ici le 1 er janvier 2019 , conformément à l'engagement pris au G 20 de Toronto. Le communiqué final rappelle en effet que les pays du G 20 soutiennent l'idée « d'arriver à un accord au Sommet de Séoul [en novembre 2010] sur le nouveau cadre régissant le capital. Nous nous sommes entendus sur le fait que tous les membres adopteront les nouvelles normes et qu'elles seront mises en oeuvre de manière progressive dans un délai qui respecte le redressement durable et limite les perturbations des marchés, d'ici la fin de 2012, et dans un horizon de transition qui sera déterminé en fonction de l'étude de l'impact macroéconomique du Conseil de stabilité financière (CSF) . Les dispositions progressives tiendront compte des points de départ des pays et des circonstances qui leur sont propres, l'écart initial par rapport aux nouvelles normes étant appelé à se réduire à mesure que les pays convergeront vers les nouvelles normes mondiales ».

Le tableau ci-dessous récapitule le calendrier de mise en oeuvre des normes de Bâle III.

Mise en oeuvre de Bâle III d'ici 2019

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Ratio core Tier 1

3,50 %

4,00 %

4,50 %

4,50 %

4,50 %

4,50 %

4,50 %

« Coussin de sécurité »

-

-

-

0,625 %

1,25 %

1,875%

2,50 %

Total

3,50 %

4,00 %

4,50 %

5,125 %

5,75 %

6,375 %

7,00 %

Source : comité de Bâle

En revanche, à la date du 15 septembre 2010, le Comité n'avait pas tranché toutes les modalités de mise en oeuvre d'un matelas de capital contracyclique . Il devrait évoluer dans une fourchette représentant 0 à 2,5 % du bilan, en complément du coussin de sécurité. Contrairement à ce dernier, il ne serait pas systématiquement imposé aux banques. Aucune date n'a été fixée pour son entrée en vigueur. De même, la définition des institutions systémiques qui seront soumises à des exigences supplémentaires en capital n'a pas encore abouti.

Les ratios de liquidité à court et à long terme ne sont pas non plus définitivement arrêtés.

Enfin, l'accord global du Comité de Bâle doit encore être soumis à l'approbation des membres du G 20 lors du sommet qui se tiendra à Séoul les 11 et 12 novembre 2010 .

4. Un impact sur le financement de l'économie encore inconnu mais probablement moindre qu'anticipé

Le 26 juin 2010, le G 20, réuni à Toronto, a reconnu « l'importance de l'étude d'impacts quantitatifs qui est actuellement menée par le CBCB pour mesurer l'incidence potentielle des nouvelles normes de Bâle, et qui garantira que les nouvelles normes de fonds propres et de liquidités sont de grande qualité et adéquatement calibrées ».

Deux études d'impact ont ainsi été réalisées l'une par le Fonds monétaire international et la Banque des règlements internationaux, l'autre par le CBCB et le Conseil de stabilité financière et publiées en août 2010.

Les deux études montrent que les nouvelles réglementations auraient un « impact modeste » sur le financement de l'économie : une augmentation de 1 % des fonds propres conduirait à une diminution du PIB d'environ 0,2 % après quatre années, soit une baisse de 0,04 point de croissance chaque année.

En juin 2010, l'Institut international de finance, qui regroupe les associations professionnelles des banques du monde entier, avait estimé l'impact dépressif des règles de Bâle III à environ 4 points de PIB et plus de 5 millions d'emplois d'ici 2015, pour la seule zone euro, et près de 3 points de PIB pour le monde entier.

Si l'exigence de 6 % de capital « core Tier one » devait être retenue (coussins de capital contracycliques compris), alors la perte de PIB est évaluée, sur la même période, entre 1 et 1,5 % .

Par ailleurs, en ce qui concerne le ratio de liquidité, les études montrent qu'une augmentation de 25 % des actifs liquides se traduirait par un impact sur la croissance de 0,08 % d'ici 2015 . Il convient toutefois de souligner une limite méthodologique : ce chiffre est obtenu sans prendre en compte les mesures sur le calibrage des fonds propres « core Tier 1 », dont l'augmentation aura pour effet direct d'améliorer le ratio de liquidité. Son impact dépressif devrait donc être plus limité .

Enfin, sur le long terme, les études affirment que les bénéfices, en termes de stabilité financière et donc de croissance, des nouvelles règles se révèleront bien supérieures à leur coût de court terme .

Ces études donnent une idée globale de l'incidence des normes de Bâle III sur le financement de l'économie. Elles sont toutefois assez largement caduques compte tenu du calendrier très progressif de montée en charge du dispositif.

Ainsi, la plupart des banques européennes ne devraient pas recourir à une augmentation de capital . A ce jour, seule la Deutsche Bank a annoncé son intention de lever près de 10 milliards d'euros. Pour les autres banques, notamment françaises, il est fort probable que la simple mise en réserve des résultats nets suffira pour se conformer aux exigences du Comité de Bâle . Selon certaines analystes financiers, le montant total des capitaux nécessaires pour les banques européennes s'élèverait, sur la période, à hauteur de 27 milliards d'euros.

II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté le présent article.

L' alinéa 1 du présent article impose à l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) qu'elle « adresse aux commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat un compte rendu, une fois par trimestre au moins, des négociations menées au sein de la Banque des règlements internationaux sur la révision des normes prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement ».

Par ailleurs, l' alinéa 2 dispose que l'ACP remet au Parlement, avant le 31 mars 2011, « un rapport évaluant l'impact de cette révision sur l'offre de crédit et le financement de l'économie française ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La révision des normes prudentielles constitue un enjeu important pour le financement de l'économie réelle puisque nos entreprises se financent majoritairement par les banques et non par le marché , contrairement aux Etats-Unis.

A ce titre, il faut souligner que les assouplissements apportés par le CBCB au regard de son projet initial, notamment la nouvelle définition des fonds propres, semblent favorables aux banques françaises . En particulier, la prise en compte des intérêts minoritaires dans des filiales est adaptée à la structure des banques mutualistes . De même, l'inclusion dans les fonds propres d'un pourcentage des participations dans des sociétés d'assurance conforte le modèle économique de la « bancassurance » .

De plus, l'adoption d'un calendrier de moyen terme semble rendre compatible le renforcement de la solidité des banques avec le financement de l'économie.

En revanche, si la Commission européenne a d'ores et déjà indiqué son intention de présenter une directive transposant l'accord de Bâle au premier trimestre 2011, son application aux Etats-Unis demeure encore incertaine. Il apparaît fondamental que les banques européennes et américaines obéissent, en termes de règles prudentielles, au socle dégagé par le Comité de Bâle.

Il est néanmoins trop tôt pour analyser l'ensemble des effets du cadre de Bâle III.

Le rapport trimestriel relatif aux « négociations » au sein du Comité de Bâle devient sans objet puisque les négociations devraient s'achever prochainement, avant le prochain sommet du G 20 à Séoul en novembre 2010.

Il convient cependant de ne pas supprimer cette obligation mais de la reformuler. En effet, l'accord trouvé à Bâle ne constitue que la première étape d'un long processus. Dans un deuxième temps, l'Union européenne procédera à la transcription des règles de Bâle III dans une ou plusieurs directives qui devront, elles-mêmes, être transposées en droit interne. Il s'agit de deux phases cruciales dont l'impact peut être tout aussi important pour notre économie, comme l'a récemment démontré l'exemple de la directive « Solvabilité II ».

Votre commission a donc adopté un amendement reformulant le premier alinéa du présent article afin de prévoir que des rapports sont régulièrement adressés aux commissions des finances sur la mise en oeuvre des normes de Bâle III tant en droit européen qu'en droit français et sur leurs conséquences pour le financement de l'économie française.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi rédigé.


* 134 Afrique du Sud, Allemagne, Arabie Saoudite, Argentine, Australie, Belgique, Brésil, Canada, Chine, Corée, Espagne, Etats-Unis, France, Hong-Kong, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Luxembourg, Mexique, Pays-Bas, Royaume-Uni, Russie, Singapour, Suède, Suisse, Turquie.

* 135 La France est représentée par un secrétaire général adjoint de l'Autorité de contrôle prudentiel.

* 136 Transposées en droit interne par l'ordonnance n° 2007-571 du 19 avril 2007 relative aux établissements de crédit, aux entreprises d'investissement et aux sociétés de crédit foncier.

* 137 Les articles 5, 6 et 7 du présent projet de loi procèdent notamment à la transposition de cette directive. Des arrêtés du ministre de l'économie seront également publiés d'ici octobre 2010.

* 138 Un repo, ou « prise en pension », est un accord de rachat, communément utilisé sur le marché monétaire, mettant en jeu deux transactions en sens inverse : une vente d'instruments financiers suivie d'un rachat à terme.

* 139 Il s'agit du ratio fonds propres / engagements de la banque.

* 140 Ce ratio a la faveur des Etats-Unis, où les banques peuvent compenser dans leur bilan les positions sur dérivés et « repos », et donc afficher des bilans de taille plus réduite que les banques européennes alors même que leurs engagements peuvent être plus importants.

* 141 Stock d'actifs liquides de haute qualité / Flux nets de cash sur une période de 30 jours = 100 %.

* 142 Ressources longues et stables / Emplois stables > 100 %.

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